Les maisons enchâssées (1)

Le carrefour formé par la rue de l’Epeule et la rue des Arts a subi des modifications d’urbanisme, notamment dans l’angle épeule/arts/rémy Cogghe. Le résultat de ces travaux présente un curieux assemblage de deux maisons enchâssées dans un nouvel immeuble qui semble les entourer. À l’arrière de cette façade de rue, d’anciennes courées ont disparu, entraînant avec elles les front-à-rue de la rue des Arts et de la rue Rémy Cogghe. Comment cette transformation s’est-elle opérée ? Voici la reconstitution des opérations.

Vue de la rue de l’Epeule autrefois Coll Particulière

Pendant les années soixante dix, la surface délimitée par la rue de l’épeule (du n°53 au 61), la rue des Arts (du n°174 à 194) et la rue Rémy Cogghe (du n°32 à 54) va faire l’objet de profondes transformations. Au milieu des années soixante, la rue de l’épeule affiche un front-à-rue intégralement commerçant, notamment du n°53 au n°61. En effet, après la cour Desrousseaux, au n°53, on trouve la boulangerie de M. Henri Molle, la crémerie de M. Lamblin Demil à l’enseigne « à la petite ferme », au n°57 le dépôt Anet de blanchisserie de M. Flament Deleval, l’épicerie de M. Bacro au n°59 et la Brasserie de l’épeule aux n°61-63.

Le n°53 rue de l’épeule Coll Particulière

Du côté de la rue des Arts, il y a un boucher, M. Bouchelaghem au n°174, un libraire au n°176, l’entreprise Parks Cramer France matériel textile au n°180, l’électricien M. Tonneau et le dépôt de la teinturerie Duhamel au n°186 et le salon de coiffure dames Michèle au n°190. Quant à la rue Rémy Cogghe, on y trouve au n°32 la société Flandre-mercerie, commerce en gros, des maisons individuelles au n°34 et 36, un courtier en laines au n°38, la maison de l’ingénieur De Laubier Vernier au n°40, la cour veuve Desrousseaux au n°46, et le café Claeyman au n°54.

Les Ets Fiévet au n°32 de la rue des Fleurs Coll Particulière

Derrière ces façades de commerces et d’habitations, se situe l’importante cour Desrousseaux, composée de trois barres de maisons entre la rue de l’épeule et la rue des arts (cinq, douze et neuf maisons), et de quatre barres entre la rue des Arts et la rue Rémy Cogghe (douze, seize, vingt et dix maisons). Soit quatre-vingt quatre maisons.

Plan des lieux pour le projet de réserve foncière doc AmRx

Cet ensemble de maisons construit à l’initiative de la famille Desrousseaux, apparaît déjà en 1884 sur le plan cadastral. En 1973, les propriétaires de cette courée sont les héritiers Desrousseaux, Jean et Agnès, épouse De Laubier. Il semble que cette famille soit apparentée à celle d’Emile Roussel-Desrousseaux, l’important teinturier de la rue de l’épeule et de la rue Watt. L’ancêtre de cette famille est Jean Baptiste Joseph Desrousseaux Honore (1794-1872) fabricant à Roubaix, son fils Jean-Baptiste Desrousseaux-Meurisse (1824-1874) l’est également et habite rue de l’épeule. Le petit-fils Felix Desrousseaux-Dupire (1873-1907) est imprimeur rue du grand chemin, sa femme Hortense Dupire est la fille de l’architecte Auguste Dupire. De ce couple sont issus les héritiers cités plus haut. Michel de Laubier-Desrousseaux est issu d’une importante famille de notaires et d’architectes, il habitera au n°46 de la rue des fleurs, future rue Rémy Cogghe. On accédait aux cours Desrousseaux entre le n°51 et le n°53 de la rue de l’épeule, dans la rue des Arts avant le carrefour et dans la rue des fleurs (aujourd’hui Rémy Cogghe) par le n°40.

Le 13 décembre 1967, la commission des logements insalubres s’intéresse à l’immeuble situé au n°49 rue de l’épeule appartenant à Mme De Laubier Desrousseaux demeurant 40 rue Remy Cogghe à Roubaix et à M Desrousseaux Jean 40 rue blanche à Lille et occupé par Fernand Fastre, son épouse et leurs deux enfants. Après les constatations d’usage, cette construction ancienne est dite ne plus correspondre aux normes actuelles du logement. Il est remarqué un manque d’entretien prolongé, la vétusté des chevrons de la toiture, dont les poutres fléchies indiquent qu’elle est endommagée. Un arrêté est alors pris : les propriétaires ont un mois pour démolir la partie supérieure de la maison ! Le 30 juin 1969, au n°51bis de la rue de l’épeule, c’est à dire cour Desrousseaux, les immeubles n°25 à 33 menacent ruines. S’ensuit une action en justice, après une mise en demeure en date du 8 mai dans laquelle on peut constater que deux de ces maisons sont libres d’occupation et trois autres portes et fenêtres murées ! Les cinq dernières sont encore habitées ! Le rapport est accablant : le gros œuvre en maçonnerie de briques se lézarde, des fissures sont apparentes au dessus des portes et des fenêtres, il n’y a pas de canalisation d’évacuation des eaux de pluie et ménagères, les eaux stagnent dans la cour commune. Menuiseries, planchers et escaliers sont vermoulus. Tout cela présente un danger grave. Les propriétaires sont sommés de procéder à la démolition. En mai 1970, les démolitions ont fait apparaître de graves fissures aux n°47 et 49 de la rue de l’épeule qui jouxtait les maisons de courée. Leur destruction est demandée aux propriétaires. Le 18 août 1971, exigence renouvelée.

Les deux maisons isolées au milieu d’un parking doc AmRx

Le 26 juin 1972, la ville de Roubaix envisage de constituer une réserve foncière sur le quadrilatère concerné, et déclare vouloir acquérir les propriétés suivantes : 49, 51, 51bis rue de l’épeule, cour Desrousseaux 25 à 33, et toute une série d’immeubles en courée et en front à rue rue des arts, rue de l’épeule, 182 à 194 qui appartiennent désormais à André Sidoine Desrousseaux et à Mme veuve Desrousseaux-Vandevelde demeurant à Clichy. Les 47 et 49 rue de l’épeule ont été démolis d’office par la ville le 9 février 1972 aux frais des propriétaires qui ont déjà payé pour la démolition de la courée 25 à 33 et qui demandent un délai pour régler la somme due. Le 25 novembre 1974 le plan d’occupation des sols fait mention du projet d’établir un édifice communal à cet endroit, on négocie l’achat du terrain, les démolitions vont bon train. Le décret d’expropriation paraît en 1975, les pourparlers en 1976. En 1982, les deux maisons enchâssées aux n°53 et 55, ne le sont pas encore. Elles sont à ce moment entourées par un parking !

à suivre

d’après la presse de l’époque et les délibérations municipales

Le ministre et l’avenue

La délibération du Conseil Municipal en date du 16 novembre 1979 avait donné son nom à la nouvelle pénétrante venant de Tourcoing. Le tronçon entre le Pont SNCF et la rue Pierre de Roubaix au niveau de la Grand Rue s’appellera donc avenue des Nations Unies. Puis on lui intégrera la partie de la rue Pierre de Roubaix entre la Grand Rue et le boulevard Gambetta, ce qui lui assurera un débouché plus conforme à son flux de circulation. La nouvelle avenue des Nations Unies emprunte donc les anciennes voies dénommées rue Saint Vincent de Paul, rue Saint Pierre, rue du Ballon, ainsi que des tronçons de voies de la rue Pellart, de la rue de l’Hommelet et de la rue Pierre de Roubaix1.

Le dernier bâtiment démoli le long de la nouvelle avenue Photo NE

On vient à peine de démolir la dernière bâtisse vétuste à coups de bulldozer et on a déjà commencé les plantations du futur mail devant l’église Notre Dame.

Le mail Notre Dame Photo NE

Pas de nouvelle avenue sans inauguration officielle. C’est le premier ministre Pierre Mauroy, il l’est depuis le 21 mai dans le premier gouvernement du Président François Mitterrand, qui viendra procéder à cette cérémonie, le samedi 16 octobre 1981. Un programme chargé l’attend, d’autant qu’il n’aura que la matinée à consacrer à Roubaix, emploi du temps de chef de gouvernement oblige. Le rendez vous des personnalités a lieu en mairie le samedi 16 octobre à 10 heures 30, puis on rejoint la toute nouvelle école Elsa Triolet dans le quartier de l’Alma pour l’inaugurer. Vers 10 h 15, c’est au tour de de l’avenue des Nations Unies, de la rue de la Communauté urbaine et du parking silo d’être inaugurés. Après une visite des constructions en cours, une réception à l’hôtel de ville est prévue vers 11 h 45 réception et discours. Départ du premier ministre à 12 h 15. Pierre Mauroy est accompagné par M. Alain Savary, ministre de l’Education Nationale et Roger Quillot ministre de l’urbanisme et du logement. Cette visite ministérielle est l’occasion du lancement d’une grande campagne de promotion des logements de l’alma gare et de l’alma centre.

Les officiels Photo NE

Une pluie fine et un vent mauvais ont contribué à donner un aspect morne à cette cérémonie. Le premier ministre est attendu : la CFDT, l’atelier populaire d’urbanisme, auxquels Pierre Mauroy répond sur des thèmes qu’il reprendra un peu plus tard, l’emploi, les 35 heures, les pré-retraites. Après quelques échanges avec des syndicalistes sous leurs banderoles, le cortège rejoint la salle des mariage l’hôtel de ville, où se trouvent M. Clérambeaux vice-président de la communauté urbaine, ex maire adjoint de Roubaix.

Inauguration école Elsa Triolet Photo NE
Inauguration de l’avenue des Nations Unies Photo NE

Le député maire de Roubaix Pierre Prouvost prend la parole pour évoquer les objectifs de Roubaix : l’organisation de la conversion économique par le développement industriel à partir de zones d’activités en tissu urbain et le traitement curatif et préventif des friches industrielles, et l’aménagement du centre ville et des quartiers anciens dégradés par la suppression de l’insalubrité, l’amélioration de l’environnement, la création d’équipements publics et collectifs tout en y favorisant une offre diversifiée de logements2.

Viennent ensuite la lutte contre l’échec scolaire et la constitution d’un environnement socio éducatif et socio culturel de qualité.Enfin le député maire de Roubaix porte la candidature de sa ville au nom du versant nord est de la métropole pour recevoir le centre d’innovation du textile dont la mise en place est prévue pour 1982.

Pierre Mauroy, dans sa réponse, aborde la question de l’emploi et du chômage, annonce une croissance de 3 % en 1982 génératrice d’emploi, la réduction du temps de travail à 35 heures et des mesures d’encouragement à la pré-retraite. Il évoque ensuite la reconquête des centres villes pour laquelle il constate que Roubaix est en avance.

Le député maire de Roubaix Pierre Prouvost prend la parole pour évoquer les objectifs de Roubaix : l’organisation de la conversion économique par le développement industriel à partir de zones d’activités en tissu urbain et le traitement curatif et préventif des friches industrielles, et l’aménagement du centre ville et des quartiers anciens dégradés par la suppression de l’insalubrité, l’amélioration de l’environnement, la création d’équipements publics et collectifs tout en y favorisant une offre diversifiée de logements2.

Il parle aussi de la lutte contre l’échec scolaire et de la constitution d’un environnement socio éducatif et socio culturel de qualité. Enfin le député maire de Roubaix porte la candidature de sa ville au nom du versant nord est de la métropole pour recevoir le centre d’innovation du textile dont la mise en place est prévue pour 1982.

Pierre Mauroy, dans sa réponse, aborde la question de l’emploi et du chômage, annonce une croissance de 3 % en 1982 génératrice d’emploi, la réduction du temps de travail à 35 heures et des mesures d’encouragement à la pré-retraite. Il évoque ensuite la reconquête des centres villes pour laquelle il constate que Roubaix est en avance.

1 Extrait du registre des délibérations municipales

2 D’après Nord Éclair

Une discrète petite place

La Place Édouard Roussel se situe entre les rues d’Isly, de l’Industrie et Descartes. Elle présente une forme rectangulaire de 80 mètres de long sur 40 mètres de large. Les propriétaires des terrains requis pour sa construction furent Mme Veuve Louis Watteau–Tiers, rentière, demeurant 36 rue d’Inkermann et François Tiers, cultivateur, demeurant 29 Place du Trichon, tous parents du fermier du Trichon Auguste Tiers. Sur le plan apparaît déjà le commissariat de la rue des Arts, construit en 1880. Du côté de la rue de l’Industrie, il y a déjà les forts Sion et Briet.

Plan du quartier avant la lace doc AmRx

Cette Place fait partie du projet des six places publiques1 de l’équipe municipale de Julien Lagache adopté par le Conseil Municipal en juin et décembre 1891. Il faut signaler que ces places ne sont pas destinées à être des parvis d’église mais plutôt à accueillir des marchés de quartier. Le 3 mai 1893, il est envisagé d’entourer le terre-plein central de deux rangées d’arbres. Sur les plans, la Place porte la dénomination de Place du 1er Mai. Cette appellation est remplacée dans les mois qui suivent par celle de Place du Commerce, pour faire bon voisinage avec les rues des Arts et l’Industrie toutes proches.

Plan de la place doc AmRx

Il faut attendre 1898 pour la construction d’un aqueduc le long du front nord de la Place, alors qu’on déjà fait construire quelques maisons. Les travaux de pavage des chaussées suivront mais une des habitantes écrit au Maire de Roubaix en mai 1902, pour lui signaler l’état défectueux de la chaussée. Elle demande que cette chaussée soit pavée sur toute sa longueur et les riverains intéressés y participeront pour au moins un tiers, ce qui nous permet de connaître leurs noms : Melle Séverine Carpentier, MM. Dejonghe, A. Delescluse, M. Vandenbeulque et Louis Tiers.

Vue de la place prise de la rue d’Isly CP Méd Rx

La place ne comprendra que neuf maisons qui seront numérotées de 2 à 18, les autres côtés du rectangle formé par elle étant repris dans les numéros des rues de l’Industrie, Descartes et d’Isly. La très belle maison située à l’angle avec la rue Descartes a été construite en 1904 par l’architecte Achille Dazin pour M. Louis Tiers. C’est le 18 septembre 1911 qu’on donnera le nom d’Édouard Roussel à la Place du Commerce suite au décès de ce fabricant de tissus, qui fut Maire adjoint de Roubaix et Conseiller général.

La belle maison de Louis Tiers 1904 CP Méd Rx

Qui habite aujourd’hui cette magnifique rangée de maisons ? De l’après seconde guerre au milieu des années quatre-vingt-dix, il s’agit plutôt d’une population de classe moyenne, locataire et donc très mobile. On y trouve un médecin, des représentants, des employés, un instituteur, un contremaitre, un expert du textile, des magasiniers et des ouvriers.

La place Roussel est un lieu très animé comme nous le prouve ce relevé des festivités contemporaines. En 2009 l’opération « Faites le printemps » se déroule Place Roussel autour de 5 grandes thématiques : Mesures initiatives liées aux économies d’énergie, les modes de déplacements, le tri et la réduction des déchets, manger sain et la nature en ville. Un atelier sur les nichoirs, Concours de fleurissement ! On récidivera en 2010. En 2015, c’est une fête organisée en quelques semaines, un rendez-vous imaginé pour fédérer les bonnes volontés autour du vélo. En 2016, à Roubaix, on danse sur les places ! De grands bals s’installent dans toute la ville ! Au programme du Bal des Quartiers Ouest : Adequat (chanson française et variété internationale), le 2 juin de 19h30 à 23h, Place Edouard Roussel. Plus récemment en 2018, l’association Le Fil de l’Epeule organise une journée de fête entre voisins sous la forme d’un tournoi de pétanque à partir de 10 h (il faut ramener ses propres boules) puis un repas convivial, salades et barbecue jusque 16 h. La manifestation est soutenue par la Ville de Roubaix et le PIC (projet d’initiative citoyenne).

Affiche fil de l’épeule
1 Places de la Nation, du Progrès, Carnot, du Travail, de la Fraternité et du Commerce

 

 

Edmond Desbonnet à Roubaix

Quand il arrive à Roubaix, Edmond Desbonnet jouit déjà d’une certaine notoriété, comme professeur de culture physique, alimentée par le journal l’Athlète dont il est le rédacteur en chef. Venant de Lille, il gagnera ensuite Paris où il devait trouver la consécration. En attendant, il prospecte à Roubaix pour monter une quatrième école de culture physique.

Edmond Desbonnet à l’âge de 20 ans @ domaine public

Dans son journal, Edmond Desbonnet présente Franz Cyclops de son vrai nom Bienkowsky né à Tomken le 5 juillet 1862, un athlète extraordinaire qui a remporté un énorme succès au cirque royal de Bruxelles. Suit l’énumération de ses prouesses : deux haltères de 115 livres épaulées et poussées en haut des bras, une haltère de 200 livres dévissée d’une main très facilement, une haltère de 200 livres développée à deux mains, cinq fois de suite sans revenir toucher la poitrine. Ajoutés à cela un certain nombre de pièces, chaines, fils de laiton, courroies déchirés ou rompus, et un poids de 25 kg sur une table, soulevé par l’athlète assis le bras tendu jusqu’à hauteur d’épaule. Une véritable bête de foire entre le cirque de Bruxelles et les folies bergères de Paris !

Desbonnet annonce ensuite la soirée du 28 mars 1897 au Club athlétique roubaisien qui offre des primes afin d’attirer les compétiteurs. Arthur Leblond champion du nord pour le caoutchouc dorsal relève le défi. Cyclops sera également de la partie. Mais Desbonnet qualifiera le Cercle athlétique de Roubaix, de simple réunion de jeunes gens présomptueux. En effet, il ne se trouve aucun compétiteur à l’arrivée de Leblond et Cyclops. Leblond essaie l’extenseur roubaisien et le casse en deux. Il confie le sien au champion roubaisien qui ne le bouge pas. Après cette déception concernant le matériel, le lutteur Cyclops ne travaille pas, car il n’y a pas plus de défi que d’argent. Roubaix ne semble pas être à la hauteur.

Edmond Desbonnet écrit une chronique sur les trois célèbres lutteurs Youssouf, Nourouhlat et Kara-Osmann qui viennent en représentation à Lille. Ils ont pour barnum l’ancien athlète lutteur Doublier qui les a engagés à Constantinople. Ils sont turcs. Nouroulhat mesure 2 m et pèse 150 kg, Youssouf 1,86 et 115 kg et Kara-osmann 1,80 et 100kgs. Ce sont des lutteurs aguerris qui passeront par Roubaix à l’hippodrome un peu plus tard. Les turcs sont passés par le Cercle Athlétique Lillois puis sont rentrés à Paris où ils cherchent des engagements. On vend leurs photographies au journal.

Deux mois plus tard, l’attention de Desbonnet est retenue par les animations des cirques à Roubaix, qui en accueille deux à la fois, le cirque Diter et le cirque Lenka. L’athlète Léon Dumont est engagé au cirque Lenka obtient tous les soirs un grand succès. Il affronte quelques amateurs roubaisiens, Quivy, Desnoulez, le grand Jean, dont il est vainqueur. À l’occasion d’une rencontre de lutte au cirque Lenka entre deux roubaisiens Desnoulez et Jean Rousseau, le jury est composé de MM Parent, Desbonnet, Dubois, Février, Allemand, Leleu tous membres du Club Athlétique Lillois. L’enjeu est double, une prime de 100 frs et le titre de champion roubaisien. Les deux adversaires étant brouillés pour raisons privées, il n’y aura pas de compérage entre eux. Desnoulez est un lutteur amateur de première force et Jean Rousseau est le directeur de l’arène athlétique et du club de la rue de Lannoy. Rousseau est vainqueur de Desnoulez par un collier de force. Le frère de Desnoulez monte sur le ring et veut lutter, mais la police l’empoigne et l’expulse. Rousseau est champion de Roubaix 1897.

Le Journal d’Edmond Desbonnet in Gallica

Edmond Desbonnet semble être séduit par l’animation sportive roubaisienne. Il annonce la fête fédérale de gymnastique de Roubaix et publie le programme détaillé du 4 juin au 8 juin. Il signale également la création de la société de sport athlétique « la jeunesse roubaisienne » autorisée à se constituer chez M. Jean Burggrave quai de Rouen à Roubaix, par arrêté préfectoral du 25 juin.

Il consulte un peu les archives et relate dans son n°19 de juillet 1897 le concours athlétique de Mouscron s’étant déroulé le 25 décembre 1894. Y ont été primés les roubaisiens Emile Faucheux pour un épaulé et jeté d’un bras 140 livres, et Nauvelaerts troisieme du même concours.

Dans son N°22 d’ août 1897, Jules Parent et Edmond Desbonnet sont en visite chez les deux nouveaux clubs athlétiques de roubaix, l’un dirigé par Jean Burggrave 10 quai de rouen, et l’autre par M. Vancrayenest rue Philippeville. Ces deux sociétés sont amies et s’entraînent mutuellement. Parmi les athlètes recensés, on trouve les noms suivants : Henri et Jean Desnoulez, Jean Brys, Florentin, Scatteman, Davelos, Wotters, Lafrance, Dekayser, Vermersch, Rousselle.

Le professeur lillois est de plus en plus interessé par la vie sportive roubaisienne, il chronique dans la rubrique sports athlétiques le racing club roubaisien. Il donne le résultat des courses, les noms des racingmen, en tête Catteau, Bonnier, Reheiser, Dancette, Waeles, Vroman, Kaltemback, Loucheur, Kiebbe, Hargrave. Ces courses organisées par le racing club roubaisien se déroulent au vélodrome de Barbieux, et elles cloturent la saison sportive.

Publicité Extraite du Journal l’Athlète

En septembre 1897, Edmond Desbonnet fonde sa quatrième salle de sports à Roubaix. C’est une une école de culture physique super équipée qui compte rapidement trente élèves, et Jules Parent le champion du nord amateur vient y donner des leçons. C’est un club privé qui donne des leçons particulières. On photographie l’adhérent à son arrivée, ses mensurations sont régulièrement prises et reportées sur un registre. L’ouverture de la salle intervient dans les premiers jours d’octobre et son adresse est 28 rue Jeanne d’arc en face les halles. Edmond Desbonnet y transfère le bureau et la rédaction du journal L’athlète. Vingt membres s’y entraînent régulièrement parmi lesquels les sociétaires : Masson, Scrépel, Plateau, Lucien Monet, Desgranges, Vallet, Debryl, Danel, Six, Dubeaurepaire.

La même année, Edmond Desbonnet organise le championnat du monde de force pendant l’exposition internationale de Bruxelles. Le Français Noël Rouveyrolis, dit Noël le Gaulois, y sera sacré champion du monde.

On lira une notice complète sur Edmond Desbonnet sur Wikipédia

Le tournoi du jumelage

Un des points communs entre les quatre villes sœurs de 1969, Bradford, Mönchengladbach, Roubaix et Verviers, c’est à coup sûr un passé, voire un présent footballistique glorieux.

Bradford City Association Football Club Photo NM

Ainsi le Bradford City Association Football Club est un club de football anglais est fondé en 1903. Le club adopte un statut professionnel et rejoint la League la même année. La saison 1910-1911 est la meilleure saison de toute l’histoire du club. Le club termine 5e de la division 1 et, le 26 mai 1911, le club remporte la finale de la Coupe d’Angleterre de football. La période d’après-guerre est particulièrement difficile pour les « bantams ». Lors de la saison 1921-1922, l’équipe est reléguée en division 2. Cinq ans plus tard, le club est relégué en troisième division. Il faudra deux saisons à Bradford pour remonter en division 2. Lors de la saison 1933-1934, ils ratent d’un point une montée en division 1 et finissent par retrouver la division 3, à la suite d’une relégation lors de la saison 1936-1937. Après la seconde guerre mondiale, l’équipe est reléguée en division 4 lors de la saison 1960-1961. La remontée en division 3 est finalement acquise lors de la saison 1968-1969. Bradford reste 3 saisons en division 3 avant de redescendre à l’échelon inférieur, en 1972.

Borussia Mönchengladbach Photo NM

Le Borussia Mönchengladbach est fondé le 1er août 1900 et le premier nom du club est le Fussballklub Borussia 1900. Le club accède à la plus haute division de l’époque en 1912 et devient champion d’Allemagne en 1920. Le Borussia intègre la deuxième division en 1949 et monte en première division de l’Allemagne de l’ouest l’année suivante. En août 1960, le club remporte la Coupe d’Allemagne de football face à Karlsruher SC (3-2). L’année suivante le Borussia devient le premier club allemand à participer à la nouvelle Coupe d’Europe des Vainqueurs de Coupe, éliminés par les Glasgow Rangers en quart de finale. En 1965, le club accède au nouveau championnat d’Allemagne professionnel, la Bundesliga. Dans les années 1970, le Borussia devient l’une des figures de proue du football allemand. Le 31 octobre 1969, il occupe pour la première fois la tête du championnat. Il est encore aujourd’hui le deuxième club à avoir occupé le plus le haut du tableau après le Bayern Munich. Le 30 avril 1970 les « poulains » s’adjugent leur premier titre de champion. L’année suivante le Borussia remporte une nouvelle fois le championnat devant le Bayern Munich et devient alors le premier club à remporter deux fois de suite le championnat. Par la suite le Borussia continue à dominer le championnat tout en se distinguant sur la scène européenne. En 1972-1973 le club remporte la coupe d’Allemagne face à Cologne et atteint la finale de la coupe de l’UEFA où il s’incline face à Liverpool.

Le C.O.R.T Photo NM

Il n’y a plus vraiment de grand club de football à Roubaix. Le Racing Club de Roubaix né en 1895 a fusionné avec le Stade Roubaisien né en 1896 pour former le Racing Stade de Roubaix en 1963. L’année suivante, le nouveau club organise le tournoi international junior qui sera un rendez vous régulier pour les amateurs de ballon rond jusqu’en 1985. Après la seconde guerre, le CORT qui regroupe le RC Roubaix, l’Excelsior AC et l’US Tourcoing, est soutenu par l’industrie textile locale. Il termine troisième pour sa première saison, puis remporte le titre de champion de France dès la saison suivante, en 1946-1947. Mais il ne peut éviter la relégation en Division 2 à l’issue de la saison 1954-1955, et abandonne le statut professionnel en 1963. Les heures de gloire sont donc bien passées.

Royal Cercle Sportif Verviétois Photo NM

Verviers entre en football au cours de l’année 1896, initiée par un sud africain de passage, M. Scott Lane. Fondé le 18 octobre 1896, le Royal Cercle Sportif Verviétois fait partie des dix premiers clubs belges et il joue au stade de l’Ile Adam à Lambermont. Il fait partie des dix plus vieux cercles de football de Belgique. Le club a disputé 102 saisons dans les séries nationales, ce qui en fait le sixième club à avoir disputé le plus de championnats nationaux en Belgique. Surnommés « les Béliers », en référence au passé riche en industrie lainière de la région, les joueurs de ce club évoluent en vert et blanc, couleurs de la ville de Verviers. En 1897, ils s’affilient à l’Union Belge des Sociétés de Sports Athlétiques sous le nom de Verviers Football Club. En 1903 , c’est la fusion avec le Stade Wallon pour former le Club sportif Vervietois. En 1925, après l’obtention du titre de Société Royale, changement de dénomination : le Club sportif Vervietois devient le Royal Club sportif Vervietois et reçoit l’année suivante le matricule 8. Le club fut deux fois champion de Division 2 en 1925 et 1956 et une fois champion de Division 3 en 1948.

Les blasons des quatre équipes

Si l’on résume les forces en présence, Bradford présente donc une équipe de 4e division anglaise, Mönchengladbach est venu avec une sélection amateur des différents clubs de la ville, afin d’éviter un tournoi déséquilibré (dixit la presse), Roubaix « renforce » le CORT avec des professionnels comme Roger Boury (ex RC Lens et CORT, retraité depuis 1958, André Betta et Pierre Michelin deux ex Cortistes encore en activité dans le championnat professionnel) et Verviers présente une équipe de division 2 belge.

Le tournoi se déroule les 7 et 8 juin 1969 au Parc des Sports et met en présence les sélections de chaque ville. Les premiers matches opposent le RCS Verviers au FC Bradford et Mönchengladbach au CORT. Les anglais et les roubaisiens remportent leur match. C’est Pierre Michelin, lociste à l’époque, qui inscrit le but permettant à Roubaix de battre Bradford en finale.

Roubaix, rond point de l’Europe

Le 19 mai 1969 le conseil municipal décide de donner le nom de rond point de l’Europe au carrefour devant la poste principale. On y installe le nombre de mâts nécessaire pour hisser dans de grandes occasions les oriflammes des membres de la communauté européenne. Ce qui sera fait quelques jours plus tard, dans le cadre des cérémonies officielles de jumelage avec Bradford, Mönchengladbach et Verviers.

Le rond point de l’Europe Photo NE

Le jumelage entre deux villes date du moyen âge, alors que Roubaix n’existait pas encore1. Un jumelage est une relation établie entre deux villes majoritairement de pays différents, relation qui se concrétise par des échanges socio-culturels. C’est dans l’immédiat après seconde guerre qu’un mouvement fédéraliste français dépassant les clivages politiques, « La Fédération » fondé en 1944, relance dans les années 1950, l’idée du jumelage de communes en Europe. Cinquante maires européens fondent en janvier 1951 le Conseil des communes d’Europe. S’ensuit le premier jumelage entre deux villes européennes, Troyes et Tournai, le 4 novembre 1951 ; entre deux capitales, Rome et Paris en 1956. Un premier jumelage franco-allemand, entre Montbéliard et Ludwigsbourg est officialisé en 1962, un an avant le traité de l’Élysée qui scelle la réconciliation franco-allemande, signé par Charles de Gaulle et Konrad Adenauer2.

Il apparaît alors que le seul moyen de progresser sur le plan des relations internationales et d’apaiser les haines et les rancœurs, est de tisser des liens au niveau le plus élémentaire, la commune, et ainsi, d’établir des relations d’échanges étroits avec ses voisins. L’objectif initial consiste à échanger des connaissances, des expériences, du savoir-faire dans tous les domaines de la vie locale. Engager les populations traumatisées de cette Europe ruinée de l’après-guerre à fraterniser, relève du défi. Parmi les échanges culturels, en parallèle des diverses associations communales, les collèges et lycées des communes jumelées sont parties prenantes et aident à promouvoir ainsi l’apprentissage de langues étrangères.

Victor Provo l’européen Photo AmRx

Le projet de jumelage de Roubaix avec d’autres villes européennes verra donc son aboutissement en 1969. Mais dès les 20 et 21 juin 1968, une délégation de Mönchengladbach est reçue à Roubaix, puis le 1er octobre 1968, c’est au tour de la délégation de Bradford, avec à sa tête le Lord Maire Walton. Enfin, le 21 novembre, il est procédé au jumelage avec le bourgmestre de Verviers. Le 20 décembre, la municipalité de Roubaix reçoit des personnalités de Bradford,Verviers et Mönchengladbach. Le 28 décembre, ce sont les pongistes de Mönchengladbach. En 1969, les rencontres se poursuivent : le 23 mars, rencontre de natation des villes jumelées. Le 29 mars, c’est l’inauguration de la Maison de l’Europe à Roubaix, tandis qu’une délégation de la municipalité roubaisienne prend l’avion pour Bradford. En avril, les roubaisiens se rendent à Mönchengladbach. 

Les 7 et 8 juin 1969 ont lieu à Roubaix les cérémonies officielles de jumelage des villes de Bradford, Mönchengladbach, Verviers avec Roubaix. Alderman Edward Newby, Lord Mayor de Bradford, Wilhelm Wachetendonk, Oberbürgermeister de Mönchenglabach, Victor Provo Maire de Roubaix et Marcel Counson Bourgmestre de Verviers prêtent le serment de jumelage suivant :

« Librement désignés par le suffrage de nos concitoyens, certains de répondre aux aspirations profondes et aux besoins réels de nos populations, sachant que la civilisation occidentale a trouvé son berceau dans nos « anciennes communes » et que l’esprit de la liberté s’est d’abord inscrit dans les franchises qu’elles surent conquérir, considérant que l’oeuvre de l’Histoire doit se poursuivre dans un monde élargi mais que ce monde ne sera vraiment humain que dans la mesure où les hommes vivront libres dans des cités libres,

En ce jour nous prenons l’engagement solennel de maintenir des liens permanents entre les municipalités de nos communes, de favoriser en tous domaines les échanges entre leurs habitants pour développer par une meilleure compréhension mutuelle le sentiment de la fraternité européenne, de conjuguer nos efforts afin d’aider dans la pleine mesure de nos moyen au succès de cette nécessaire entreprise de paix et de prospérité : l’Unité européenne. »

Les quatre prestataires du serment de jumelage Photo AmRx

Roubaix est aujourd’hui jumelée avec les villes de Skopje (Macédoine) depuis 1973, Prato (Italie) depuis 1981, Sosnowiec (Pologne) depuis 1993, Covilhã (Portugal) depuis 2000 et a signé des accords de partenariat avec les villes de Bouira (Algérie) depuis 2003 et Qabatiya (Palestine) depuis 2012.

1Le Mans et Paderbron en 836
2D’après Wikipedia

La grève des commerçants

Une réunion des commerçants se déroule le mardi 4 mars 1969 : cent cinquante persones se sont réunies au Casino cinéma place de la Liberté à l’appel de l’intercommerciale de Roubaix. Son président Robert Bousquet souligne la nécessité de « faire l’unanimité dans le calme et la dignité ». Un mouvement de grève est prévu le mercredi 5 mars suivi d’un meeting qui doit se tenir à la foire commerciale de lille. Au bureau de cette réunion siègent MM. Bousquet, Harmand, vice président, Papillon et Sauvet, délégués de la chambre de commerce, Moermann président des cafetiers, hôteliers et restaurateurs, Plateau, président adjoint de la fédération des groupements commerciaux de Roubaix, Antoine président des épiciers et fruitiers du Nord Pas de Calais.

Le bureau de la réunion Photo NE

Les motifs du mouvement font l’objet d’un cahier de revendications déjà rédigé. Il est rappelé que 80% de l’activité commerciale est exercée sur le plan national par le commerce indépendant qui emploie aussi 70 % du personnel. Le mécontentement est du à la non reconnaissance du rôle et de la place du commerce indépendant dans la vie économique de la nation, ainsi qu’à la campagne de dénigrement qui met en jeu sa dignité. On réclame une fiscalité juste simple et supportable, la liberté des prix et des marges commerciales, la fin des contrôles, l’égalité des droits et des moyens pour tous, le aintien de la propriété commerciale, des loyers équitables, l’indemnisation du préjudice causé en cas d’expropriation, la neutralité de la publicité à l’ORTF, un statut social digne et valable.

De leur côté les cafetiers, hôteliers et restaurateurs de Roubaix se sont réunis dans l’après midi à leur siège au 10 de la rue du Maréchal Foch en présence de M. Moermann président et Harmand vice président, Michel Vandenberghe président des cafetiers, Pierre Louchard président des restaurateurs, Moïse Sadoine trésorier. Les revendications du matin ont été rappelées. La FNAIM (immobilier) s’associe au mouvement.

Les rideaux de fer de la Grand Rue Photo NM

Les consignes ont été données aux commerçants pour la grève du lendemain: enseignes éteintes, portes closes, rideaux baissés, mais pas de désordre en ville. « Prévenez les clients ! » Il s’agit d’une grève d’avertissement, une suite est d’ores et déjà prévue s’il n’y a pas d’effets. Ceci s’adresse aux Pouvoirs Publics. On précise les revendications : réduction du taux et simplification de la TVA, égalité des droits et charges entre tous les commerçants, suppression des contrôles fiscaux, assouplissement du régime de la Caisse d’assurance maladie, reconnaissance du salaire fiscal du commerçant, simplification des formalités administratives. M. Papillon rajoute la liberté des prix et des marges commerciales et la posibilité pour les commerçants indépendants d’être présents dans les nouveaux centres commerciaux. Pierre Poujade, président de l’UDCA, se déclare hostile à la journée de fermeture du mercredi 5 mars sans précision, mais le représentant local de l’UDCA a donné consigne de fermer.

Rue de Lannoy 1969 Photo NE

Le 5 mars a donc lieu une grève sans précédent des commerçants et artisans, et le mouvement a été fortement suivi dans notre région. Il y eut des cortèges à Valenciennes, Dunkerque, Cambrai, Avesnes et à Arras. Ce jour là, Roubaix est devenue une ville aux boutiques closes, le mouvement de grève a été suivi à 98 %. Aucun incident. Sous un soleil radieux mais un froid vif. Le centre du Lido affiche fermé. Charges trop lourdes et fiscalité injuste ! Grilles fermées, stores pudiquement baissés. Seuls cinq grands magasins sur les sept installés dans la ville avaient ouvert avec des cars de police pour assurer la sécurité. Les ménagères avaient pris leurs précautions, on ne pouvait trouver aucun bistrot ouvert, ni un coiffeur, ni une pharmacie, pour laquelle un service d’urgence avait quand même été mis en place. La quasi totalité du commerce roubaisien avait donc suivi la grève hier. On aurait dit Roubaix au mois d’août, signale un journaliste dont l’article prend un peu ça à la rigolade. Meetings et défilés se sont déroulés dans le calme. Victor Provo président du conseil général du nord, maire de Roubaix écrit une lettre de soutien envoyée au président de l’intercommerciale M. Bousquet, dans laquelle il assure le mouvement de sa sympathie et de la solidarité de l’association des maires. Il en profite pour faire le procès de la fiscalité injuste développée par l’État, sur les inquiétudes concernant le transfert aux collectivités des charges et la perspective de la régionalisation.

On est en pleine période de construction de Roubaix 2000 et le Lido a déjà tamisé beaucoup de commerçants de la rue de Lannoy. Les supermarchés sont de plus en plus présents : Auchan, le grand marché, Monoprix, Unifix. Ceux- là ne fermeront pas le 5 mars de même que les Coop. Leur délégation régionale publie un communiqué dans lequel elle déclare ne pas s’associer aux manifestations car les Coop n’ont pas été contactées, bien que connaissant les mêmes charges, impôts et contrôles que les commerçants. Elle termine en rappelant que les Coop sont des associations de consommateurs auxquels elles doivent rendre le service attendu.

Les grévistes sont des petits et moyens commerçants, de ceux qui ont fait l’attractivité d’une ville depuis plus d’un siècle, Roubaix pouvant être considérée comme la ville aux rues commerciales. C’est un monde qui souffre et va progressivement disparaître sous les attaques concurrentielles des grandes surfaces, les coups de boutoir de la fiscalité, la particularité des statuts vis à vis de la maladie, de la retraite…

Les rénovations de 1969

La célébration du cinq centième anniversaire de la charte, ou plutôt de la promesse de charte, a donné lieu à maints préparatifs, parmi lesquels la rénovation de salles de spectacles : la salle Destombes du Conservatoire, la salle Watremez et le théâtre Pierre de Roubaix.

Salle Destombes rénovée Photo NM

L’importante école de musique de Roubaix (17 cours, 15 professeurs en 1880) était installée au 17 rue des lignes quand elle fut rattachée à l’Administration des Beaux-Arts par l’arrêté du Ministre de l’Instruction Publique et des Beaux-Arts du 6 mai 1884, puis érigée en succursale du Conservatoire National de Musique de Paris, suivant le décret du 2 Août 1902. Au commencement de l’année scolaire 1903-1904, il fut procédé à son transfert dans les locaux plus vastes de la rue de Soubise, libérés par l’institut Turgot parti rue du Collège. Pierre Destombes (1842-1915) faisait partie de la commission de surveillance de l’école de musique et c’est grâce à lui qu’au cours de l’année 1906, une salle d’audition avec un grand orgue, a pu être construite et inaugurée, qui porte désormais le nom de son généreux donateur.

En 1969, on s’occupe donc de rénover cette salle. Un concert Beethoven y est donné le dimanche précédent qui a permis de découvrir son nouveau visage. Les mélomanes n’ont pas été déçus. Une douce atmosphère d’intimité y règne agrémentée de confortables fauteuils, la scène a été remodelée. Cette salle est présentée à l’administration municipale le 20 avril. Plus récemment des travaux de transformation du vieux conservatoire entre 2011 et 2013 l’ont rendu nomade pour un temps.

La salle Watremez en travaux Photo NM

En 1907, à l’ouverture du nouvel hôpital de la Fraternité, les malades quittent l’Hôtel Dieu de la rue Blanchemaille, lequel accueille les pensionnaires de l’Hospice (situé rue de l’Hospice) qui est alors démoli. On va construire à son emplacement une salle des fêtes. La partie de cet immeuble, front à la rue de l’Hospice, est démolie en août 1908, en vue de la construction d’une salle d’expositions. Il s’agit d’une salle d’expositions et de fêtes de 1 500 m² organisée autour d’une halle centrale et de deux galeries latérales perchées à 5 mètres de hauteur.

En 1934, il est procédé à la modification de l’acoustique de la salle des fêtes par un traitement orthophonique, ainsi que diverses transformations d’agencement. En décembre de la même année décède Henri Watremez, adjoint au maire plus spécialement chargé des bâtiments. Pour honorer sa mémoire, l’Administration municipale décide le 13 juillet 1935 que la salle des fêtes de la rue de l’Hospice sera dorénavant dénommée Salle municipale Henri Watremez1.

Fermée depuis l’automne 1968, la salle Watremez n’a plus l’allure d’un grand hall froid et austère. Elle s’est transformée en un vaste auditorium de couleur bleu nuit. Deux larges portes en chêne donnent accès au vestibule peint en vert pâle, et deux autres portes identiques donnent accès à la salle. On a gardé un escalier sur la droite pour permettre l’accès à la galerie de l’étage. Le plateau est éclairé par de grosses ampoules électriques et par un plafonnier comportant de nombreux spots. À gauche de la salle, un long comptoir de bois clair et de marbre borde le dégagement vers les installations sanitaires. Sur la droite, on retrouve le foyer avec son énorme bar éclairé par un plafonnier monumental. Un petit salon orné d’une fontaine lumineuse un sol en dalles, un éclairage indirect, et une sonorisation nouvelle en font un endroit agréable et un cadre de choix pour les manifestations à venir. Plus récemment, la salle a été réaménagée en 1998 par l’agence Zig Zag.

Le théâtre Pierre de Roubaix rénové en 1969 Photo NM

La Bourse du travail du boulevard de Belfort est inaugurée le lundi 2 avril 1934. C’est l’architecte Albert Baert qui en fut l’architecte, lui qui réalisa la piscine de la rue des Champs.

En 1969, le théâtre compte 735 places, sa scène a été élargie : il y a désormais 136 m2 de plateau, extensibles à 180 m². Cet aménagement présage de grands spectacles comme par exemple la Tosca prévu au programme des festivités. Une machinerie scénique compléte a été installée qui permettra la mise en œuvre de huit décors simultanément. Une fosse d’orchestre a été installée qui pourra contenir 35 musiciens, 50 « en se serrant un peu ». La sécurité a été améliorée avec des sorties de secours conformes. Quatre loges individuelles et une loge collective ont été construites pour les artistes. Des fauteuils moelleux en skaï (sic) disposés en quinconce pour suivre le spectacle de manière optimale ont remplacé les méchants sièges en bois. Selon la presse, le théâtre de la Bourse est mort, vive le théâtre Pierre de Roubaix !

En 2008, des travaux engendrent des modifications : l’entrée du théâtre Pierre de Roubaix sera désormais dans la rue perpendiculaire qui se porte le même nom, avec une façade équipée d’une structure rectangulaire en verre et à moitié en apesanteur. Mais la façade de l’ancienne bourse du boulevard de Belfort reste identique et au même endroit.

Amélioration du confort, de l’acoustique et de la lumière, les salles publiques de spectacle ont donc fait peau neuve en 1969 pour accueillir de grands événements : le 13 avril le théâtre Pierre de Roubaix présente la damnation de Faust de Berlioz, le 20 avril la salle Pierre Destombes propose un Concert par l’Orchestre du Conservatoire de Roubaix (avec soliste) et la salle Watremez accueille la nuit du Jazz le 1er mai.

1Extrait du Rapport du Maire 1935

Michel Bernard vainqueur à Roubaix en 1960

 

Michel Bernard en pleine action au parc municipal des sports de Roubaix Photo NE

En février 1960, Michel Bernard s’aligne au départ du cross du Racing Club de Roubaix patronné par Nord éclair. L’organisation est confiée àMM Masse, Moerman, Stevens et Quero du RCR aidés par MM Bolle etDepinoy de la LFA (ligue française d’athlétisme). C’est une jolie promotion pour le vieux club roubaisien omnisports car Michel Bernard est la vedette de l’athlétisme français et il se prépare activement à participer aux jeux olympiques qui se déroulent à Rome. Un bon millier de curieux est donc venu assister au parc municipal des sports à la participation du champion de France  à cette épreuve.  Le départ est donné et trois hommes prennent rapidement la tête : Michel Bernard, le tourquennois Wagnon et le liévinois Caillerets. Le champion de France accélère la cadence et termine avec une minute et trente secondes d’avance. Ses deux compagnons d’échappée se disputent la seconde place qui revient finalement à Caillerets.

Bien entouré après son arrivée Photo NE

À l’issue de la course, Michel Bernard est interrogé sur sa participation future au National pour lequel il réserve encore sa réponse. C’est l’année des jeux olympiques de Rome. Michel Bernard pense d’abord à sa préparation physique, il ne faut pas risquer une blessure ! L’année suivante, Bernard reviendra à Roubaix pour remporter pour la deuxième fois le cross du Racing Club de Roubaix.

Michel Bernard est un des leaders de l’athlétisme français des années 50-60, finaliste olympique du 1500 m et du 5000 m (7e) aux JO de Rome en1960. Son ami et concurrent Michel Jazy est médaillé d’or sur 1500 m. Quatre ans plus tard à Tokyo, Michel Bernard obtient son meilleur résultat olympique avec une sixième place au 1500 m. Président de la FFA de 1985 à 1987, fondateur du meeting en salle de Liévin, Michel Bernard s’est éteint le 14 février 2019 à Anzin.

 

 

Un nouveau bureau de poste à la Fosse-aux-chênes

Le 9 février 1894 parvient à Roubaix l’autorisation pour l’ouverture d’un troisième bureau de poste, à la Fosse-aux-Chênes, pour lequel Émile Moreau avait fait la demande alors qu’il était député 1. L’arrêté ministériel date du 29 Janvier 1894 et le bureau de postes sera ouvert le 16 Juin 1895. Monsieur Trabuc est le premier receveur de ce nouveau bureau de postes situé 66 rue de la Fosse-aux-chênes, qui compte à son ouverture six dames employées des Postes et Télégraphes et trois facteurs du télégraphe. Car ce bureau est ouvert au service de la poste et du télégraphe. Il dispose également d’une cabine téléphonique et se livre aux opérations de la Caisse d’épargne postale.

Le bureau de poste dans la rue de la Fosse-aux-chênes Coll Méd Rx

A l’époque, les horaires d’ouverture du guichet postal sont les suivants : pour le service d’été, de 7 heures du matin à 9 heures du soir (1er mars au 31 octobre). Pour le service d’hiver, (1er novembre au 28 février) de 8 heures du matin à 9 heures du soir. Il est fermé à midi les dimanches et fêtes légales. M. Baillon sera le receveur suivant et l’effectif est passé à cinq dames employées des Postes et Télégraphes. Il est annoncé que le bureau de la Fosse aux Chênes ne fait pas de distributions ni de levées de boîtes. Après la première guerre, le bureau sera dirigé par une receveuse, Mme Mangin, avec cinq dames employées et un aide. Son successeur, Monsieur Deprecq gardera la même équipe. Après plus d’un demi-siècle d’existence, on décide de remplacer ce bureau, qui présentait des évidents signes de vétusté, n’offrant aucun confort ni pour les usagers, ni pour le personnel, par un nouvel équipement 2.

L’ancienne poste vue contemporaine Coll Méd Rx

La construction avait été décidée en 1967 par le conseil municipal. Mais il n’ouvrira qu’en janvier 1974. Situé à deux pas de l’ancienne poste, le nouveau bureau se trouve à l’angle des rues Daubenton et des Sept Ponts, là où il se trouve encore de nos jours. La ville a acheté le terrain, et a fait construire le bureau de poste, l’administration postale refusant d’intervenir dans l’opération, étant déjà engagée dans les chantiers de la nouvelle grand-poste à l’emplacement du Lido et du centre postal du Carihem. Le bâtiment est gai, la salle des guichets est vaste, claire et aérée. Derrière se trouve un grand local réservé aux facteurs 3. Il est vrai que les locaux sont passés de 50 m2 à 250 m². On apprend que le receveur, M. Chalon, a son bureau au rez-de-chaussée et qu’il habite un appartement à l’étage.

Le nouveau bureau de poste de 1974 Photo NE

Le nouveau bureau est inauguré le samedi 12 janvier 1974 par Victor Provo maire de Roubaix entouré d’un certain nombre de personnalités locales. L’édile roubaisien rappelle que la ville n’est pas suffisamment riche en bureaux de postes, il en manque dans des quartiers comme l’épeule et les trois ponts. Il s’étonne que l’administration postale ne puisse pas prendre en charge la construction de tels bureaux, souhaite que le nouvel hôtel des Postes soit terminé en 1975 et regrette que le centre du Carihem ne soit pas affecté au tri. En effet, il s’agit simplement d’un centre d’expédition de colis. Prudemment, le ministre des Postes de l’époque a envoyé un télégramme de félicitations au maire de Roubaix, qui sera lu en préambule du traditionnel vin d’honneur.

1Il est député radical socialiste de la 5e circonscription de Lille de 1889 à 1893.

2D’après l’article de Nord Éclair

3D’après l’article de Nord Éclair

D’après les rapports du maire de la ville de Roubaix