Nord-Eclair (Suite)

Dans les années 1960, l’imprimerie évolue et se modernise. Elle compte 5200 salariés dans le Nord dont 1500 à Roubaix-Tourcoing, dans la presse et l’édition. De la typographie, ou l’art de disposer les caractères mobiles de façon équilibrée, lisible et harmonieuse, on passe à l’ « offset »,  un procédé d’impression qui est l’amélioration de la lithographie, et l’électronique apporte ses perfectionnements.

Les nouvelles machines de l’imprimerie (Documents Nord-Eclair)

Dans cette optique un permis de démolir est déposé par la société des journaux réunis pour la démolition des 25-27 rue du Collège menaçant ruine, ce qui leur permet d’avoir une entrée par la rue du Collège. Puis un permis de construire est déposé pour un bâtiment à usage d’atelier de linotypes au 71 Grande-Rue en 1962, à ériger dans la cour de l’immeuble devant les ateliers déjà existants.

Plan du nouveau bâtiment pour abriter l’atelier de linotypes (Document archives municipales)

L’année suivante c’est un permis pour la construction d’un bâtiment d’un étage, à usage de bureaux au n°63 Grande-Rue, à la place du bâtiment démoli qui était adossé à l’immeuble de l’Union, qui est déposé. A droite de l’entrée sont alignés en façade sur la rue 7 bureaux et enfin un local vestiaire. A l’étage la disposition et la même avec au bout à droite le service des sports et l’édition belge.

Plan du nouveau bâtiment à usage de bureaux (Documents archives municipales)

Trente ans après la création de Nord-Eclair, une crise profonde touche la presse écrite et surtout les quotidiens régionaux. Quand certains titres s’affaiblissent, se restructurent, voire disparaissent les uns après les autres et face à la nécessité de procéder à de lourds investissements, le titre est absorbé par le groupe Hersant en 1975, groupe fondé par Robert Hersant surnommé le « Papivore » à cause de son appétit insatiable pour l’achat de journaux, de périodiques et de radios FM . Nord-Matin ayant lui-même été racheté par le même groupe en 1967, les 2 titres fusionnent et sortent dès lors de la même imprimerie.

Photo de Robert Hersant (Document Getty)

Jules Clauwaert contribue alors avec la rédaction à la création de 2 sociétés, l’une, industrielle et commerciale, l’autre éditoriale indépendante, liées par contrat pour exploiter et faire vivre Nord-Eclair. Lors de la transformation des structures juridiques de l’entreprise, Jean Catrice prend la présidence du conseil d’administration de la société Nord-Eclair Edition, responsable du contenu du journal. Sa présence symbolise les liens qui rattachent Nord-Eclair à ses origines. Il décède en 1979 des suites d’une longue maladie et ses funérailles sont célébrées en l’église du Saint-Sépulcre.

Jean Catrice en 1977 (Document Nord-Eclair)

Jules Clauwaert quant à lui devient directeur général puis président du Conseil Permanent de Nord-Eclair Edition. Egalement devenu président de l’école supérieure de journalisme de 1965 à 1978, il en demeure ensuite président d’honneur. Chevalier de la légion d’honneur, engagé pour la ville de Roubaix, il décèdera en 2014 à l’âge de 90 ans, salué par le Club de la Presse dont il était l’un des premiers adhérents et dont il avait soutenu la création.

Les locaux 71 Grand Rue dans les années 1970 (Document archives municipales)

En 1978, Nord-Eclair se porte acquéreur de l’usine Lestienne Rue du Caire à Roubaix. Après un passage en photocomposition le quotidien va en effet être imprimé en Offset et sa qualité d’impression et de présentation sera dès lors notablement améliorée. La reconversion technique entamée sera terminée faisant de Nord-Eclair l’une des entreprises de presse les plus modernes de France voire d’Europe.

Ces bâtiments récents et leur infrastructure correspondent aux besoins du quotidien soucieux de pouvoir installer ses nouvelles rotatives afin de moderniser l’ensemble du journal, tout en maintenant l’emploi dans une agglomération déjà durement touchée par la crise.

Annonce de l’achat des locaux de la rue du Caire (Document Nord-Eclair)
Locaux rue du Caire (Documents GraphiLine et collection privée)

A l’invitation de Nord-Eclair, Pierre Prouvost, maire de Roubaix, son épouse, plusieurs de ses adjoints, des conseillers municipaux et des chefs de service de la mairie visitent les nouveaux locaux avec André Defrance, directeur général de Nord-Eclair et Nord Print, et Jules Clauwaert, directeur de Nord-Eclair Edition, entourés de nombreux collaborateurs. Les discours sont l’occasion de saluer le pluralisme de la presse dans notre région mais aussi une opération visant au maintien de l’emploi sur Roubaix.

Le conseil municipal reçu dans les nouveaux locaux en janvier 1979 (Documents Nord-Eclair)

Le permis de construire déposé en mairie de Roubaix pour procéder à une extension de l’usine sur le n°15 de la rue du Caire permet de se rendre compte de l’importance de la surface totale qui couvre les numéros 15 à 21 de la rue. La répartition des services est bien démontrée dans les plans de l’intérieur sur lesquels apparaissent notamment les salles de mise en page et celle des rotatives et de l’expédition.

Les plans de 1978 (Documents archives municipales)

Instantané de mémoire : « Mon père avait commencé sa carrière à la Croix du Nord à Lille avant d’intégrer l’imprimerie du journal Nord-Eclair en tant que linotypiste ( personne qui travaille sur une linotype, machine à composer et à fondre les caractères d’imprimerie par lignes ). A cette époque il avait dû se former pour pouvoir travailler sur les nouvelles machines Offset. L’évolution était nécessaire pour pouvoir poursuivre sa carrière dans la presse écrite ».

André Defrance, déclare à tous ceux qui oeuvrent à la sortie du journal, photograveurs, rotativistes, service d’expédition, etc sa vive satisfaction devant la promptitude avec laquelle toute l’équipe technique s’est adaptée au nouveau matériel moderne. Il trinque avec son personnel avant que les rotatives offset fassent jaillir le journal du jour. Nord Print est l’imprimerie du journal Nord-Eclair et imprime alors une dizaine de titres dont, pour la plupart, des journaux nationaux mais aussi des publications étrangères comme « El Pais ».

Fête dans les nouveaux locaux (Document Nord-Eclair)
Publicités de 1979, 1986 et 1995 (Documents Nord-Eclair)
Les locaux dans la rue du Caire lors de l’installation (Documents archives municipales)

A suivre…

Article dédié à André Delmée, salarié de Nord-Eclair pendant la quasi totalité de sa carrière.

Remerciements aux Archives Municipales de Roubaix

Le blockhaus de la rue de Cartigny

Un blockhaus se trouve à hauteur du N° 130 de la rue de Cartigny à Roubaix , entre le cimetière et la rue d’Alger, curieusement posé, comme en équilibre sur le mur.

le blockhaus rue de Cartigny ( document BNR Daniel Labbé 1982 )

Il a été construit par les allemands au début de la seconde guerre mondiale. Les sentinelles étaient chargées de surveiller la rue, les soldats étaient équipés de mitrailleuses. Nul doute que cette casemate protégeait un lieu sensible derrière le mur, certainement un dépôt de munitions, ou le garage de véhicules militaires ou bien un atelier de réparation du matériel de défense anti-aérienne de la Luftwaffe. C’est l’une des rares constructions de la guerre 39-45 à Roubaix.

document archives municipales

En 2001, l’état du mur qui supporte le blockhaus n’est pas brillant, il y a des risques pour les piétons, et la mairie envisage de le détruire purement et simplement.

Une association est créée dont le but est de sauvegarder le blockhaus, vestige de la guerre et qui, de plus, fait partie du paysage du cimetière.

document Nord Eclair 2001

Au mois de Juin 2001, Thierry Delattre, conservateur du patrimoine de la ville, Jean-Louis Denis, membre de l’association Espace du Souvenir, Evelyne Delannay, conservateur du cimetière, Pierre Leman, membre de la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles) se réunissent sur place avec le propriétaire des lieux José Baptista.

document Nord Eclair 2001

L’accès au blockhaus se fait par un bâtiment industriel désaffecté. Une échelle de fer rustique et vacillante mène à la plate-forme de l’ouvrage. La construction est faite de plaques de béton. Des meurtrières offrent une vision rare des deux côtés de la rue et du cimetière.

document Nord Eclair 2001

Il faut absolument que le site soit classé au titre du patrimoine. On envisage même de le faire visiter par les roubaisiens, pour les prochaines journées du patrimoine du mois de Septembre. Certes, quelques travaux sont nécessaires : remplacer l’échelle, nettoyer l’accès, poser une porte et surtout consolider le mur du soutien…

Malheureusement deux années plus tard, la mairie décide de raser le blockhaus ! La demande de permis de démolir signée par J.F. Boudailliez le 30 Août 2003, est acceptée en Septembre pour risque de « péril ». On imagine donc que les commissions de sécurité ont estimé que le mur de soutien sur lequel est posée la casemate est trop fragile, et qu’il y a donc un risque grave d’effondrement sur le trottoir et la chaussée. Le blockhaus est démoli en fin d’année 2003.

la flèche rouge indique l’endroit où se trouvait le blockhaus ( Photo BT )

Remerciements aux archives municipales

Visite d’une journée à « La Lainière »

document collection privée

En 1956, la direction de l’entreprise de « La Lainière de Roubaix » souhaite faire visiter son impressionnante usine à sa clientèle. Elle affrète alors plusieurs trains à plusieurs reprises, pour faire venir ses clients dépositaires des marques Pingouin et Stemm, directement sur les quais de l’usine au sein même de l’entreprise.

La  »gare » du Crétinier ( document collection privée )

Il faut préciser que la gare SNCF du Crétinier à Roubaix-Wattrelos n’existe pas ! En effet, ce n’est pas une gare SNCF : c’est la gare privée du peignage Amédée Prouvost.

La ligne de chemin de fer Menin-Somain passe entre les bâtiments de l’usine de la Lainière. Un embranchement particulier permet la réception des matières premières et l’expédition des produits finis. La direction a donc profité de cet embranchement pour en faire « la halte du Crétinier ».

document Nord Eclair 1956

A chaque fois, cinq à six cent visiteurs descendent des trains. Ils arrivent de toute la France, via Paris, et sont accueillis par les cadres de l’usine. Vingt groupes de 25 personnes sont alors formés et la visite peut commencer. Chaque groupe démarre une longue expédition de plus de 3 heures, à travers le dédale des ateliers.

document collection privée

Le peignage Amédée Prouvost, en cette année 1956, est une usine plus que centenaire. 4500 employés dont 3000 femmes y travaillent. L’usine a une superficie de 15 hectares.

20 millions de moutons sont tondus chaque année pour les laines du Pingouin. Les toisons laineuses proviennent d’Australie et de Nouvelle Zélande. La laine brute subit de multiples opérations de triage, lavage et cardage.

Le triage de la laine ( document collection privée )

Poursuivis de salle en salle par l’odeur spécifique du mouton, les visiteurs arrivent dans l’immense centrale électrique grande comme une église, où on leur communique des chiffres records annuels : 48.000 tonnes de charbon, 300 millions de litres d’eau chaude, 37 millions de Kwh etc

La production est également impressionnante  car l’entreprise possède 90.000 broches de filature. Parmi les 3000 ouvrières beaucoup viennent quotidiennement du Pas de Calais. La production se fait 6 jours sur 7 en 3 équipes donc 24h / 24h.

La filature ( document La Lainière )

Les clients continuent ensuite leur visite par la teinturerie en écheveaux, puis la salle des « pelotonneuses » qui produisent une pelote à la seconde et enfin la salle des « remailleuses » qui fabriquent les chaussettes Stemm.

Les dépositaires Pingouin et Stemm sont enchantés de leur venue. Ils sont surpris par ces couloirs interminables ( parfois de 400m de long ) mais également par la propreté des locaux y compris ceux de la teinturerie. Ils ont pu, lors de cette visite, comprendre parfaitement la transformation très complexe du ruban de laine en fil, et du fil en pelote.

document collection privée
document collection privée

La visite se termine, un apéritif est servi au Pavillon du stade Amédée Prouvost où débuta l’époque héroïque du C.O.R.T.( célèbre équipe de football de Roubaix-Tourcoing ). Un repas est ensuite servi au restaurant de l’usine dans un cadre plaisant et aéré. Jacques Prouvost, administrateur délégué, Philippe Bourguignon, directeur général et Jacques Thomassin, directeur de la publicité assistent bien évidemment au repas.

document collection privée

Les concessionnaires des laines du Pingouin peuvent à la fin de leur visite, expédier une carte postale datée du 18 Juin 1956.

document collection privée

L’objectif de ces visites très bien organisées est bien-sûr de créer un véritable esprit de famille entre le producteur et son client.

Au cours des années suivantes, ce sont 2 illustres visiteurs qui vont honorer l’entreprise de leur présence : en 1957, Elizabeth II d’Angleterre et en 1960, Nikita Kroutchtchev.

Le Pont Emile Duhamel

le pont Emile Duhamel ( document N. Duhamel )

Tous les roubaisiens connaissent ce pont de la Grand rue sous le nom de pont du Galon d’ Eau ou Entrepont. En revanche, peu de personnes savent que ce pont s’appelle, en réalité, Emile Duhamel, depuis 2010.

Mais qui était donc ce Monsieur ?

Plaque ( photo BT )

Emile Duhamel naît à Wattrelos en 1923. Il commence par être ouvrier tisserand, puis devient militant du Parti Communiste et syndicaliste CGT. Il est adjoint au maire de Roubaix, conseiller municipal, vice-président de la CUDL, membre du conseil d’administration du CCAS de Roubaix, de la CPAM, ainsi que de l’office D’HLM, conseiller régional , président des Amis du Parc de Barbieux, etc.

Emile Duhamel ( document YouTube )

Mais c’est surtout parce que Émile est un fervent défenseur du canal de Roubaix, que ce pont a été rebaptisé « Pont Emile Duhamel » en Octobre 2010

Dans les années 1970, Émile Duhamel, conseiller régional, milite pour la ré-industrialisation de la zone de l’union, à partir du canal, quand Jacques Coru adjoint au maire de Tourcoing fait réhabiliter le canal sur sa ville.

Emile Duhamel devant le canal ( document YouTube )

Plus tard à la fin des années 80 on doit encore à la mobilisation initiée par Émile Duhamel au service des pêcheurs, que le canal n’ait  pas été détruit à Roubaix à l’occasion de la construction de la voie rapide allant du quai de Gravelines au quai d’Anvers.

En 1990, une grande opération de nettoyage a lieu sur le canal de Roubaix et des centaines de mètres cubes de déchets sont ainsi récupérés.

Et enfin en 1992, c’est la remise en navigation du canal qui intervient et le rétablissement de la liaison Deule-Escaut, en partenariat avec des homologues belges.

Émile Duhamel a donc beaucoup défendu le canal de Roubaix. Il a lutté pendant plus de 20 ans et a réussi à obtenir que le canal ne soit pas fermé pour favoriser la voix rapide.

( document YouTube )

Émile Duhamel obtient la décoration de chevalier de la Légion d’Honneur, remise par Georges Séguy en 1998, lors d’une cérémonie à l’Hôtel de ville.

document N. Duhamel

Slimane Tir, conseiller municipal a beaucoup insisté, pour que l’entrepont prenne le nom d’Émile Duhamel. C’est en effet un bel hommage à lui rendre, que de donner son nom au pont de la Grand-Rue, entre Roubaix et Wattrelos, face au café « A l’As de cœur » et face à la maison où se trouve le syndicat des pêcheurs.

document Nord Eclair et document N. Duhamel

Une cérémonie émouvante se déroule en Octobre 2010, en présence de son épouse Denise et de sa fille Nicole, René Vandierendonck maire de Roubaix, Slimane Tir conseiller municipal, Dominique Baert maire de Wattrelos, Jean-Jacques Fertelle président du syndicat des pêcheurs, Jean-Marie Duriez secrétaire de la section du PC, et Manou Masquellier patoisante roubaisienne.

documents N. Duhamel

Emile Duhamel, le communiste au grand cœur est un grand homme par la taille, par l’esprit et par le cœur. Il a marqué la vie politique roubaisienne de ses coups de gueule et de ses combats, défenseur infatigable des pêcheurs de Roubaix et du retour à la navigation du canal.

document N. Duhamel

Émile Duhamel, homme exceptionnel, nous a quitté le 22 décembre 2006

« Quelle belle vie, j’ai eue  » disait-il . . .

Une vie entière consacrée à aider les autres et au bonheur de sa famille .

Pour d’autres aspects de la personnalité d’Émile Duhamel :

http://emile-duhamel.over-blog.com

Remerciements à Nicole Duhamel

Le foyer Paul Constans

L’ancien foyer des jeunes travailleurs Paul Constans se trouvait au 349 de la Grand rue à Roubaix, à l’angle de la rue d’Alger. Issu d’une association créée en 1963 : l’ALJI ( Association pour le Logement des Jeunes Isolés ) le bâtiment a été construit en 1968. Il doit son nom à l’un des fondateurs et administrateur du projet.

Le but de l’association est l’accompagnement individuel des résidents avec un brassage très large au niveau des origines sociales et des projets professionnels ( voir sur notre site, un article précédemment édité et intitulé : le foyer des jeunes travailleurs ).

Plus de quarante années après, il est temps de laisser sa place à un tout nouveau complexe. En effet les 148 logements du foyer commencent à ressentir le poids des années : chambre de 9 m2, toilettes situées dans le couloir, isolation dépassée, etc

Il est donc décidé de démolir le foyer, en 2011-2012

Photos de l’ancien bâtiment ( documents Nord Eclair )

Le projet d’un nouveau foyer voit le jour : un permis de construire est déposé par Logicil en décembre 2008 sur un terrain vierge de 5265 m2, situé au 9 place Chaptal, en bordure du cimetière et occupé provisoirement par un club de tir à l’arc. Le cabinet d’architecture CA Concept Archi à Croix est choisi pour mener à bien le projet.

Vue aérienne ( document archives municipales )
Projet nouveau bâtiment ( documents archives municipales )

La vocation du foyer reste la même : fournir un logement décent et adapté à des jeunes aux revenus modestes, car le logement est l’une de leurs grandes préoccupations. Pour ce nouveau bâtiment, l’accent a donc été mis sur le confort : des chambres d’une superficie de 20 m2 qui comprend les sanitaires, salle de bain, coin-cuisine, et connexion wi-fi.

La plupart des façades extérieures sont de couleur verte, elles traduisent le caractère verdoyant du lieu, surtout côté cimetière.

Une chambre ( document archives municipales )
Un couloir intérieur ( Photo BT )

En 2009 le dossier Logicil est transféré à la Sté Vilogia Services, et les travaux démarrent et s’étalent en 2010-2011. En attendant l’ouverture du nouveau foyer en Octobre 2011, des logements sont redéployés sur les communes voisines, pour les jeunes résidents.

Le bailleur propriétaire est Villogia. Le foyer est géré par ARCADIS (Association Roubaisienne de Coordination d’Actions de Développement et d’Insertion Sociale). Youssef Chouaf en est le président, Hamid Ifri en est le directeur.

Hamid Ifri en 2011 ( document Nord Eclair )

L’aspect social du projet s’accompagne aussi d’un important volet écologique. En effet le bâtiment a été conçu afin de maîtriser au mieux la consommation en énergie. Cela se traduit par toute une série d’équipements tendant à limiter les émissions de CO2 : panneaux solaires, couloirs lumineux, récupération des eaux etc

Le bâtiment reçoit les labels Bâtiment Basse Consommation ( BBC ) et Habitat et Environnement.

Le foyer dispose de plusieurs espaces réservés aux animations et aux loisirs : mini ateliers de travail et même un studio de musique.

studio de musique ( Photo BT )

L’inauguration a lieu en Avril 2012 par René Vandierendonck, sénateur-maire de Roubaix : « Un sacré boulot ! » comme le note M. le Maire. Cinq millions ont été nécessaires pour la construction de ce foyer roubaisien. René Vandierendonck souligne également « un travail de partenariat exemplaire ». Ainsi, 69 % du projet a été financé par des subventions provenant de LMCU (Lille Métropole Communauté Urbaine), de la DDE (Direction Départementale de l’ Equipement), de la Région et de la CAF (Caisse d’Allocations Familiales) : un investissement qui permet aujourd’hui à ces jeunes d’envisager l’avenir avec plus de confiance.

Inauguration ( document Nord Eclair )

L’année suivante, en 2013, les jeunes résidents et les bénévoles construisent entièrement la cafétéria. A l’origine de ce projet, le collectif de l’atelier bois ( résidents, encadrant technique et bénévoles ) mis en place au Foyer des Jeunes Travailleurs, souhaite aménager cette cafétéria avec du matériel de récupération et en particulier, du bois. Les travaux d’aménagement sont un vecteur d’accompagnement personnalisé et d’épanouissement des résidents. Le but est d’aider les jeunes à se servir d’outils et à se débrouiller.

cafétéria ( Photo BT )

Dans le hall d’accueil, a été reposée l’ancienne plaque de l’inauguration de l’ancien foyer des jeunes travailleurs du 349 de la Grande rue.

( Photo BT )

Aujourd’hui, le directeur, Hamid Ifri, précise que :

– en moyenne le taux d’occupation des logements dépasse les 90%

– le nombre de salariés est de 24 pour le foyer Paul Constans et de 15 personnes en insertion pour l’atelier-chantier Fibr’&CO au 53 boulevard Gambetta à Roubaix

– l’association ARCADIS a été retenue pour la reconstruction de l’immeuble Oasis rue de Lille de 87 logements pour 92 lits avec le bailleur Partenord, pour 2023-2024

Vue aérienne ( document Google Maps )

Remerciements à Hamid Ifri ainsi qu’aux archives municipales

La Place Chaptal

La place Chaptal se situe dans la Grande rue à Roubaix, après le canal et avant la rue d’Avelghem. Les roubaisiens connaissent bien cette petite place, car c’est à cet endroit que se trouve l’entrée principale du cimetière.

plan cadastral 1974 ( document archives municipales )

La place Chaptal est triangulaire. A gauche, côte pair, il n’y a qu’un seul numéro : le N° 2, occupé par l’entreprise Duquesne et cie, commerce de fleurs et de monuments funéraires depuis le début des années 1950.

Ets Duquesne ( documents collection privée )

A droite, on trouve une rangée de maisons du N° 1 au N° 21. Oscar Fournier occupe les N° 1 et 3 avec son entreprise de monuments funéraires, caveaux, plaques de marbre et fleurs artificielles à l’enseigne : « A l’Ange Gardien »

Oscar Fournier ( documents collection privée )

Au N° 7 et 9 on trouve René Hoste, un horticulteur, au N° 19 le bijoutier horloger J. Waeles et au N° 21 le café de G. Beyaert. Ensuite, l’entrée de la courée Lezy se trouve au 21 bis.

( document archives municipales )
( document collection privée )
documents collection privée

Après le N° 21 de la place Chaptal, on se trouve dans la Grande rue : au N° 293 le café Librecht, au N° 295 l’ancien commissariat de police du V° arrondissement et au N° 297 l’entrée de la courée Masurel

la cour Masurel ( document archives municipales )

Oscar Fournier prend sa retraite et cesse son activité au tout début des années 1980. Le bâtiment « A l’Ange Gardien » est muré quelques temps après.

document archives municipales

En 1982, derrière la rangée de maisons du côte Impair, se trouve un terrain vague immense d’environ 50 ares. Le comité de quartier de l’Entrepont propose à la mairie d’aménager ce terrain vierge en aire de jeux pour les enfants du quartier, mais ce projet n’aboutit pas, car l’office public d’ HLM envoie des courriers aux riverains de la place Chaptal et aux habitants de la cour Lezy, les informant que des projets de construction sont programmés sur ce terrain vierge, et qu’il se pourrait bien qu’ils reçoivent d’ici peu, des mesures d’expropriation. Seraient également concernés les 293 295 de la Grande rue et la courée Masurel.

document Nord Eclair

Le vœu de la Mairie est bel et bien de débarrasser la Grande rue des courées dont celles de Lezy et Masurel. Plusieurs maisons sont déjà inoccupées et murées : une opération de curetage s’impose. D’ailleurs, un permis de démolir est accordé en 1983 pour l’ensemble des maisons de la courée Masurel aux N° 297 299 de la Grande rue –

à droite , la cour Masurel ( document archives municipales )

L’année suivante en 1984 un autre permis de démolir est accordé pour les N° 293 et 295 de la Grande rue, à savoir l’emplacement du café et de l’ancien commissariat.

le café et l’ancien commissariat ( document archives municipales )

C’est cinq ans plus tard, en 1989, que la démolition de l’immeuble « A l’Ange Gardien » d’Oscar Fournier, du N° 1, 3 de la Place Chaptal a lieu. Et ce n’est qu’en 2006 que les maisons N° 7 et 9 seront rasées.

les N° 7 et 9 place Chaptal ( document archives municipales )

En 2013, le permis de démolir est délivré pour le reste des habitations du N° 11 à 21

Photo 2008 ( document Google Maps )
Photo 2014 ( document Google Maps )
Photo 2016 ( document Google Maps )

Plus de 30 années ont donc été nécessaires pour démolir la rangée des habitations du côté impair, de la place Chaptal ( de 1983 à 2016 ). Il ne reste plus aujourd’hui que le N° 2, occupé autrefois par l’entreprise Duquesne et qui vient de fermer à la fin des années 2010 pour cause de retraite, transformée en maison d’habitation.

Remerciements aux archives municipales.

La rue d’Alger, une longue rue pour une longue histoire

Un plan de 1867 ne montre au Nord-Est de Roubaix que des terres à labour dépendant des fermes de Garcigny, dans la quartier de Beaurepaire, de la Bourde à l’emplacement du Cimetière et de la Vigne, sur le chemin de Cartigny, le tout situé entre le canal projeté et la limite de Wattrelos. C’est pourtant l’époque où la place se fait rare pour implanter les usines nouvelles et, dans la première moitié des années 1870, les pouvoirs publics tracent sur ces terres des voies pour structurer un nouveau quartier. C’est ainsi que naît la rue d’Alger, longue voie tracée au cordeau pour former l’épine dorsale de la zone placée à l’extérieur du canal, entre la rue d’Avelghem et du Hutin à l’autre extrémité. Le rue est viabilisée à la fin des années 1880.

Plans de 1871 et 1884

 Elle est ouverte en plusieurs tronçons successifs et les terrains qui la bordent ne tardent pas être vendus, notamment à des industriels, avant que les constructions s’y élèvent. La rue prend alors un caractère ouvrier et industriel, typique de l’époque du développement de Roubaix au 19e siècle. On y remarque avant la première guerre au 30 la filature de coton Etienne Motte, le Peignage Amédée Prouvost au 178, le tissage Bonnel frères au 230, le tissage Dubar-Delespaul au 292, plus tard Pennel et Flipo, et, côté impair, au 101 la société anonyme de peignage, et au 121 la société des huileries de Roubaix.

Photo IGN 1962

Entre ces usines, l’espace est tenu par des habitations ouvrières, alignées en front à rue ou disposées en courées, auxquelles on accède, venant de la rue, en traversant un passage couvert. Ces habitations sont souvent construites par séries appartenant à un même propriétaire, qui peut être un des industriels qui s’implantent dans la rue. C’est ainsi qu’à l’origine, toutes les maisons entre la Grand Rue et la rue d’Avelghem appartiennent à André Meillassoux.

Photos D.Labbe

On trouve peu de commerces dans la rue, exceptés les inévitables estaminets, indissociables des zones industrielles. Ils sont souvent implantés au coin des rues. En 1913, on compte six estaminets sur les sept maisons situées entre les numéros 31 et 49, autour de la rue du Congo, quatre sur quatre entre les rues d’Oran et de Constantine, pour une trentaine au total dans la rue. Le consommateur avait le choix  !

Les maisons individuelles sont présentes par séries en particulier entre les rues d’Avelghem et la grand rue, entre les rues de Cartigny et d’Oran. Plus loin, elles partagent l’espace à parts égales avec des entreprises. Celles-ci sont d’ailleurs plus modestes dans la deuxième partie de la rue, bien qu’on trouve tout au long de la rue des ateliers et des entreprises commerciales de taille moyenne.

A partir des années 60, l’industrie textile périclite et les usines ferment les unes après les autres. D’autres entreprises les remplacent et le style de la rue évolue petit à petit en perdant son caractère de grosse industrie. Peu à peu en effet, les anciens locaux sont repris pour partie par diverses entreprises du tertiaire, souvent à cause des capacités de stockage qu’elles représentent.

Photo D.Labbe

Les collectivités locales rachètent certaines friches : le tissage Motte, au 30 de la rue, est démoli et fait place au Lycée Jean Rostand et au Collège Samain, la propriété Meillassoux au Foyer des jeunes travailleurs.

Au fil du temps, les entreprises et divers organismes se succèdent et voisinent au fur et à mesure sur les espaces qui se libèrent. C’est ainsi que, dans les années 60, après le foyer des jeunes travailleurs on trouve une chapelle et un dispensaire.Au 83 la « division technique du centre administratif et et technique interdépartemental de Lille », au 121 « la Chimie dans l’Agriculture », un fabricant d’engrais qui voisine avec un fabricant de lessives, les établissements Lestarquit. Toujours au 121, France Pigments, un autre fabricant, ainsi que les transports Wenderbecq. Au 331 H. Parent pratique la mécanique générale. Côté pair, au 30 toujours les établissements Motte et Compagnie, entreprise en fin de vie qui partage l’espace avec la manufacture des deux gendarmes, linge de table, la société Anonyme Amitex, bonneterie, et les fils d’Albert et Eugène Motte société anonyme, bonneterie. Au 230 les établissements Galland fabriquent des rubans, et, à la même adresse, les « cours professionnels roubaisiens ». Au 292 on retrouve Pennel et Flipo qui poursuivent encore pour un temps leurs activités.

Année après année, sociétés et commerces plus ou moins prospères continuent de s’installer, puis, souvent, de quitter la rue. Cette évolution a plusieurs fois été commentée lors des ateliers mémoire du quartier Echo. où l’on a évoqué notamment le café-mercerie-épicerie Leclercq, sur le coin de la rue d’Avelghem, le café, connu sous le sobriquet du «  roi du Couscous », au coin de la rue du Congo, l’épicerie Chez Marie, au 33, chez qui les gens déposaient leur liste avant le travail à 5h et allaient reprendre leur marchandise à 13H. La même opération se répétait pour l’équipe suivante : C’étaient les « Drives in » avant la lettre. Il y fut question aussi du vendeur de palettes situé au bout de la rue, juste avant la route de la laine, des marchands forains d’articles ménagers du 61, et de beaucoup d’autres….

Avec le temps, les repreneurs se font plus rares, les bâtiments industriels sont progressivement abandonnés, et les friches industrielles se multiplient. La rue, qui n’avait connu pour horizon que des murs de briques noircies par les fumées des usines découvre, avec les démolitions qui se répètent, de vastes espaces, en particulier vers le bout de la rue, où s’installe une végétation plus ou moins sauvage.

Photos Google

La rue semble aujourd’hui en attente d’un renouveau après des années d’intense activité, à l’image d’une bonne partie du secteur nord-est de Roubaix.

Les documents proviennent des archives municipales et de la médiathèque de Roubaix.

Quatre maisons à l’Entrepont

Le carrefour de la grand rue et de la rue d’Alger s’orne dès la fin du 19ème siècle de quatre belles maisons de maître, dont trois aujourd’hui disparues, assorties de parcs imposants. Au vu des photos anciennes, on ne peut s’empêcher de s’intéresser à ces propriétés. Quelle est leur histoire, pour qui ont-elles été construites, qui les a habitées ?

Les quatre propriétés – Photo IGN 1947

Cette histoire remonte à 1868, lors que Alfred Motte choisit de s’associer avec les frères Meillassoux pour fonder la teinturerie Motte et Meillassoux frères, installée rue du Coq Français. Venus de Suresnes, les Meillassoux s’installent alors à Roubaix.

La proximité des deux familles est affirmée en 1883 par le mariage d’Étienne Motte avec Louise Meillassoux, Le père d’Étienne, qui porte le même prénom, est le frère d’Alfred Motte ; sa mère est Catherine Desurmont. Louise est fille d’André, un des frères Meillassoux et de Léontine Duval. Son frère, Edouard Meillassoux, est marié à Germaine Desmazières.

Étienne Motte fonde une filature de coton à l’angle de la rue d’Alger et de la grand rue. Il fait construire au coin de ces deux rues, dans une enclave de l’usine, une maison entourée d’un parc. Le document ci-dessous montre l’usine ; le parc et la maison sont visibles en bas à droite.

Le recensement de 1906 nous indique qu’Étienne Motte, né en 1852 et filateur de coton habite la maison sise au 393 grand rue. A cette époque, sa femme Louise est malheureusement déjà décédée à l’âge de 27 ans. Leurs enfants Étienne, Jacques, Marie, Jean Marie, Ursule et Catherine vivent avec leur père. Une photo ancienne montre, à gauche, la maison, qui présente, sur le coin, un curieux angle rentrant et une vaste façade sur la grand-rue. Un bâtiment bas la prolonge côté rue d’Alger. Un mur de clôture ferme le parc côté grand rue. Il s’étend jusqu’au dépôt des tramways.

Étienne Motte décède à son tour en 1919. Son fils Étienne, troisième du nom, époux depuis 1907 de Germaine Pollet habite la maison avec sa famille. Après la guerre, on retrouve à cette adresse dans le Ravet-Anceau jusqu’aux années 60 Motte-Lepoutre, industriel.

Mais l’usine ferme et, en Juin 1970 la communauté urbaine achète l’ensemble du terrain aux établissements Motte. On prévoit d’y construire deux établissements scolaires. Les constructions ne traînent pas et on ouvre le collège Samain en 1972. Le Lycée Rostand le suit de près, qui ouvre en 1977.

Sur l’emplacement de la maison d’Étienne Motte s’étend une pelouse située devant le bâtiment des logements des personnels administratifs du Lycée.

Pratiquement en face, la société Motte et Cie possède dès 1884 une propriété côté pair de la grand rue, comprenant une maison prolongée par des bâtiments annexes sur le jardin, qui s’étend jusqu’à la rue d’Avelghem. Cette maison prendra plus tard le numéro 308.

 

Plan cadastral 1884

En 1886 s’y installe André Meillassoux, le beau-père d’Étienne Motte. Cette installation est provisoire, car, dès 1903 il s’installe au 349, de l’autre côté de la rue, laissant la maison à Edouard Meillassoux, son fils, né en 1873, et peigneur sur laines. Il y vit avec sa femme Germaine Desmazieres et ses jeunes enfants Jacques et Pierre. La famille séjourne au 308 jusqu’à la deuxième guerre.

Photo IGN 1965

En 1953 c’est la famille d’Henri Meillassoux et de Marie-Louise Wattel, qu’on retrouve dans la maison jusque dans les années 60. Henri est fils d’Emile Meillassoux et Marguerite Wibaux, petit fils d’Edouard Meillassoux-Desmazieres.

La propriété existe encore aujourd’hui et semble bien entretenue. La grande fenêtre de droite au rez de chaussée a remplacé en 1924 les deux fenêtres originalement séparées par un trumeau.

Photo Google

Revenons à André Meillassoux, l’associé des Motte qui traverse la grand rue en 1903 pour venir habiter au 349, au coin même de la rue d’Alger où il a fait construire une demeure dont la demande de permis de construire date d’octobre 1898. Le recensement de 1906 l’y trouve, avec sa femme Léontine Duval et ses enfants Cécile et Emile ; on y mentionne la profession de peigneur sur laines.

La maison, carrée et de belle apparence, possède sur l’arrière une partie plus basse et une extension vitrée semi-circulaire sur le parc, surmontée d’un balcon.

Nord Eclair nous en livre en 1964 une vue prise depuis le jardin.

André Meillassoux décède en 1917, sa veuve reste dans la maison. En 1939, la propriété est vide selon le Ravet-Anceau. Après guerre, s’y installe le foyer de jeunes filles du peignage Alfred Motte, ainsi que le terrain d’activités physiques inter-entreprises de Roubaix-Tourcoing. Plus tard, la mairie achète la propriété de 10 000 mètres carrés en 1964, pour en faire don aux HLM dans le but d’y construire un foyer des jeunes travailleurs. Celui-ci est construit en 1968 et inauguré en 1969. Il est aujourd’hui transféré place Chaptal et l’ancienne propriété est à l’abandon.

La dernière de nos quatre maisons se situe à quelques mètres de là, au numéro 296. Elle est construite à la fin des années 1880 et abrite à partir de 1891 la famille Browaeys. Le brasseur Jean baptiste Browaeys est né en 1866, en Belgique. Il a épousé cette même année Jeanne Tiers née en 1872.

Le 296 dans les années Le 296 dans les années 80

Vue de la rue, la maison, régulière en apparence, cache un plan de toiture très curieux qu’on découvre grâce aux photos aériennes. Le parc, assez vaste, s’étend jusqu’à la rue d’Avelghem.

Photo IGN 1965

Jean Baptiste décède en 1901 et sa veuve continue d’habiter la maison avec ses filles Jeanne, Antoinette, et Madeleine, ainsi que son fils Jean. Elle héberge également sa belle-mère Colette Verbrugghe et son beau-frère Pierre, employé par Jean-Baptiste. La famille vient du quartier du Fresnoy, puisqu’en 1896, Colette, veuve, habitait 87 rue de Rome avec son fils Pierre, employé brasseur, alors que son autre fils, Jean Baptiste, et sa femme Jeanne habitent le 81 de la même rue. Quittant le 296, la famille va ensuite s’installer non loin de là au 77 rue de la Conférence en 1913. Elle y est toujours en 1920.

La maison est habité ensuite par diverses personnes, dont, dans les années 50 par l’ industriel L. Blanchot-Baumann.

Dans les années 80, le parc est réduit par la construction rue d’Avelghem d’un immeuble qui a abrité un temps les élèves policiers dans l’attente de l’ouverture de l’école d’Hem. Le reste de la propriété disparaît plus tard, ainsi que la maison, dont on conserve pourtant la façade. Celle-ci sert plusieurs années, persiennes fermées, conjointement au mur d’enceinte, à interdire l’accès au terrain. Sur l’ancien jardin on construit enfin l’ensemble de logements collectifs l’Echo dont l’architecte a daigné préserver la partie basse de la façade de l’ancienne maison.

Photo Google

Ce reste de façade et la maison du 308 restent les seuls témoins des demeures de maître qui existaient à cet endroit, ornements d’un quartier par ailleurs populaire.

Les documents proviennent des archives municipales et de la médiathèque de Roubaix.

Gustave Coquant

Gustave Coquant est né le 3 Mai 1910 à Roubaix. Il travaille bien en classe et passe son certificat d’études à 13 ans. Il trouve immédiatement un emploi chez un négociant en vins et liqueurs : L’Alliance, au 13-15 rue des Fabricants, pour aider financièrement la famille et pour acheter des accessoires pour sa bicyclette, car il est passionné de vélo. Gustave prend des cours du soir, pour se former au commerce, à la comptabilité et au droit ; en effet, il est bien décidé à entreprendre et à foncer dans la vie.

Il est très intéressé par les nouvelles technologies balbutiantes des années 1920-1930 et en particulier la T.S.F. Il trouve un local en 1931, au 37 bis rue Pauvrée, pour exercer sa passion. Il passe un accord avec le fournisseur REX RADIO pour vendre ses TSF ( le poste musical ) dans les foires, les salons et les expositions d’appareils électro-ménager.

Gustave devant sa devanture, en 1938, Grande-rue  ( Document V. Coquant et coll. priv. )

Gustave est particulièrement doué pour le commerce, tant et si bien que le succès est immédiat. Victor Coquant, son père, satisfait de cette période de rodage, décide de l’aider en lui trouvant un magasin, en 1938, dans une artère commerçante de la ville, au 261 Grand-rue  ( entre la place Nadaud et le canal ).

Gustave s’associe également avec deux de ses cousins pour ouvrir un magasin à Tourcoing et un à Lys-lez-Lannoy.

Gustave et Simone Coquant ( Document V. Coquant )

Après guerre, Gustave développe son activité de façon très importante ; il rachète la marque REX RADIO à son compte. Il vend désormais non seulement ses postes de radio mais également des télévisions de grandes marques : TELEREX, TEVEA, SCHNEIDER, RADIOLA, des réfrigérateurs, des machines à laver : LAVIX, REXILUX, HOOVER, des machines à coudre. La femme de Gustave, Simone, l’aide à la tenue du magasin, la comptabilité, le secrétariat et le fichier client. Ils habitent au 1er étage.

( Document V. Coquant )

En 1951, il décide de transformer la façade de son magasin. Il confie les travaux à l’entreprise Trapletti et Dumortier, Bld de Metz, pour un montant de 500.000 Frs. L’année suivante, il investit à nouveau en transformant l’immeuble du 24 rue Perrot ( la rue parallèle, juste derrière ) avec un accès direct au magasin et un aménagement de deux pièces à l’étage.

( Document coll priv. )

Gustave aime toutes formes de publicité : les parutions dans la presse locale, bien sûr, mais également sur des véhicules publicitaires, comme le célèbre « camion Coquant » que Gustave a dessiné lui-même et qui est construit par le carrossier Mesmiak, à Armentières, en 1959. C’est un camion de marque Hotchkiss conçu de façon très ingénieuse et astucieuse, avec un coffre arrière qui se soulève, ce qui permet d’installer une estrade pour des panneaux d’information, des remises de prix ou des animations diverses. Un mini lavabo est installé à l’intérieur, ainsi qu’un groupe électrogène pour alimenter la sono, le micro, et les haut-parleurs.

( Document V. Coquant )

Dans les années 1960, il fait installer « la flèche Coquant ». C’est une enseigne lumineuse immense, posée, non pas en façade, comme habituellement, mais au dessus de la Grand Rue ! avec des fixations sur le mur opposé. Cette enseigne est alors visible depuis le centre-ville !

Une partie de la flotte de véhicules de livraison, de SAV et le camion Coquant ( Document V. Coquant )

Gustave s’occupe surtout de la vente. Il ne compte pas ses heures. Conscient qu’il n’a pas pu étudier comme il le souhaitait, il compense par une quantité de travail impressionnante. Le magasin est même ouvert le dimanche matin. Une vingtaine de salariés travaillent dans l’entreprise ( techniciens et livreurs ).Toujours au service du client, la devise reste la même : Un service spontané et constant.

( Photo Daniel Labbé )

En 1968, Gustave Coquant ouvre un nouveau magasin, au 32 place de la Liberté, de façon à développer sa clientèle, en étant plus proche du centre-ville.

( Document V. Coquant et Nord Eclair 1969 )

Toujours passionné par la publicité et l’animation, il décore, en 1969, les vitrines de ses deux magasins : Grand-rue sur le thème des astronautes, et place de la Liberté sur le thème du cirque REX.

( Document Archives Municipales )

Il reprend la maison voisine, au 259 Grand rue, en 1969, et l’année suivante, fait transformer la façade des deux magasins par l’architecte Paul Amadei, rue Lacroix, pour un budget de 50.000 Frs.

Au début des années 1970, son fils Jean-Marc devient PDG adjoint et développe l’entreprise familiale, Coquant SA, en créant une gamme de meubles haut de gamme (Tricoire, Ehalt . . . )

( Photo Google maps )

Gustave Coquant reprend ensuite le hangar derrière le magasin, de façon à pourvoir abriter les camionnettes, avec une entrée rue Perrot. La surface totale du terrain s’étend désormais sur 1500 m2.

( Document V. Coquant )

Gustave est très présent dans le milieu associatif roubaisien. Il fait partie du syndicat des pêcheurs, de l’Union des commerçants de Roubaix, du tribunal de commerce de Roubaix, du COR ( Cercle Orphéonique de Roubaix ). Tous ses engagements lui valent la médaille d’argent de la ville de Roubaix et les palmes académiques.

Gustave décède en 1976. Son fils Jean Marc continue l’activité.

Dans les années 80, la concurrence arrive : des surfaces de vente spécialisées en électro-ménager, comme Darty ou Boulanger, s’implantent en zone commerciale. Les attentes de la clientèle sont différentes et évoluent vers des produits consommables, ce qui entraîne la fermeture du magasin Coquant en 1993 : la fin d’une époque.

Remerciements à Valéry Coquant pour sa documentation et son témoignage ainsi qu’aux Archives Municipales.

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Si par hasard, un lecteur possède une photo de la célèbre « Flèche Coquant » au dessus de la grande-rue, ce serait sympa de nous contacter. Merci d’avance.

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