Tranches de travaux

En octobre 1976, c’est par une conférence presse donnée par Pierre Prouvost, adjoint au maire et Jean Papillon président de la chambre de commerce de Lille Roubaix Tourcoing qu’est présentée la première tranche de travaux du secteur piétonnier. Elle concerne la réalisation d’un trottoir piétonnier d’une largeur de 8 à 10 mètres, sur un côté de la Place de la Liberté jusqu’à Roubaix 2000, agrémenté de vitrines et de plantes. La circulation automobile se fera du côté de la Banque de France, à sens unique, la rue Louis Catrice permettant aux automobilistes venant de Wattrelos par la Grand Rue de rejoindre la boulevard Gambetta. Le Mongy disposera d’un site particulier sur le terre plein central du boulevard Leclerc prolongé sur la Place de la Liberté.

Le trottoir piétonnier traverse le boulevard jusqu’au centre commercial Roubaix 2000. Il ne sera plus possible aux automobilistes de tourner à gauche vers la place de la Liberté, ils devront aller jusqu’à hauteur de la rue Henri Dunant pour tourner à gauche afin de rejoindre cette place. Le terre plein du boulevard Gambetta est rendu aux piétons, on supprime les parcmètres, on va y planter des arbres ! Un nouveau parking d’une contenance de 65 voitures se situera derrière le café des Olympiades, on pourra y accéder de la Place de la Liberté.

Le secteur piétonnier se prolonge boulevard Leclerc, jusqu’à la rue Pierre Motte, avec des aires de stationnement et des plantations d’arbustes. Le coût des travaux se monte à deux millions et demi de francs ! Pour le financement, la moitié par l’Etat, l’autre moitié par la communauté urbaine. L’aménagement du site des transports en commun relève du ministère des transports et de la communauté urbaine, la ville finance l’éclairage et les plantations. Les travaux démarrent en janvier après les fêtes sur la demande des commerçants.

Le début des travaux Nord Éclair janvier 1977

La seconde tranche, concerne l’aménagement des abords de Roubaix 2000, du côté du boulevard de Belfort. La rue de Lannoy devient une desserte pour les habitants de la résidence des tuileries. On devra désormais passer par la rue de la tuilerie, tourner dans la rue Winston Churchill et par la rue St Jean pour rattraper la rue de Lannoy qui démarre à présent après le boulevard de Belfort. L’espace récupéré le long du centre commercial est rendu aux piétons après avoir été approprié. De l’autre côté, la rue Henri Dunant permet aux voitures de relier les boulevards de Belfort et Gambetta, et on prévoit de percer le terre plein pour l’accès à la place de la Liberté.

Enfin, pour augmenter l’attractivité de Roubaix 2000, la maison des docteurs située boulevard Leclerc, a été rachetée par la communauté urbaine pour être démolie, afin de favoriser l’accès au parking. Lequel parking sera réaménagé, par des travaux de peinture, d’éclairage, de sonorisation, de numérotage et de fléchage. Et les commerçants s’engagent à rembourser le parking à leurs clients. Il faut diriger le visiteur vers Roubaix 2000 !

 

Un pont pour Beaurepaire

Le chemin vicinal d’intérêt commun n°142 (pour nous le boulevard Beaurepaire) traverse la voie ferrée par un passage à niveau. Il se dirige ensuite à droite vers Leers, avec un accès à gauche vers Wattrelos par la passerelle de l’écluse du Sartel.

Plan du quartier en 1899

 Cette traversée à niveau pénalise énormément les usagers du tramway venant ou se rendant à Leers, qui rédigent en 1919 une pétition exposant « la gêne considérable que leur cause le transbordement qui s’effectue sur cette ligne à la traversée du passage à niveau du Chemin de Fer de Somain à Tourcoing. » En effet, depuis la construction de la ligne, les voyageurs doivent descendre du tramway avant le passage à niveau, traverser les voies à pied, puis reprendre un autre tramway pour poursuivre leur voyage, car la compagnie des chemins de fer s’oppose à une traversée à niveau de ses voies. De son côté, l’E.L.R.T a présenté deux projets d’estacade permettant au tramway d’enjamber la voie ferrée. Ces projets sont rejetés en 1908 et en 1920 par le conseil municipal, celui-ci considérant que les rampes d’accès représentant une emprise de 100 mètres de longueur de part et d’autre des voies rendraient le boulevard incommode et feraient subir une dépréciation aux propriétés riveraines.

Les choses en restent là jusqu’en 1924, une conférence réunit alors à Paris au siège social de la compagnie du Nord les parties intéressées. On y évoque la possibilité d’un passage supérieur. Le conseil municipal s’empare du projet, et l’approuve au mois de Juin. L’année suivante, on approuve également la substitution d’un pont fixe au pont levis du Sartel. On décide de réaliser ces transformations. Ce pont fixe sera placé non loin de l’écluse. On construira le pont sur le chemin de fer dans l’alignement du nouveau pont sur le canal et le boulevard Beaurepaire formera un coude vers la gauche au niveau de la rue de Valenciennes pour desservir ces nouveaux ponts sur un remblai rectiligne. La ligne du tramway empruntera ce nouveau pont avant de se diriger vers Leers.

Les intérêts particuliers s’éveillent, chacun essayant de s’adapter à la situation nouvelle. En 1926 la société anonyme des foyers automatiques demande la construction d’un mur de clôture le long du boulevard Beaurepaire, et en commence la construction, arguant d’un « accord verbal » avec l’ingénieur en chef du département, accord nié par l’intéressé, celui-ci précisant « que les autorisations verbales n’existent pas dans mes bureaux ». Le projet inclut une modification du tracé de la rue de Valenciennes pour permettre le passage du tramway. En effet, la rampe d’accès au pont fait que la rue de Valenciennes se trouvera en contrebas du boulevard : on y accèdera par un escalier. La société anonyme des foyers automatiques proteste immédiatement contre ce projet de déviation qui morcellerait son propre terrain et interdirait la possibilité d’un embranchement particulier. Elle propose de faire emprunter au tramway les rues Molière et de Sévigné. La compagnie des tramways propose même de supprimer carrément la desserte de la gare du Pile, la ligne ne quittant plus le boulevard et continuant directement vers Leers.

Le projet primitif prévoit un pont de 34 mètres, mais la compagnie du Nord envisage maintenant un pont de 100 mètres pour favoriser la création d’embranchements particuliers desservant les usines voisines : filature Lepoutre Bonneterie, société des levures et alcools, établissements Petit (accusés d’avoir acheté des terrains dans l’unique but de faire une bonne opération lors des expropriations). La municipalité proteste contre l’augmentation du prix du projet, et ajoute que l’augmentation de la longueur du pont devrait conduire à l’élargissement de sa chaussée pour éviter des encombrements de circulation. La société Lepoutre, propriétaire d’une filature le long du boulevard voudrait récupérer la bande de terrain séparant sa clôture du mur de soutènement en échange d’un morceau de son terrain nécessaire à l’implantation de la rampe d’accès au pont.

 
Le terrain de la société Lepoutre qui doit être exproprié. Photo Nord Eclair

En 1931, on en est à discuter du montant que devra verser l’ELRT pour la réalisation du projet. De nombreux échanges de correspondance, permettent à chacun de défendre ses arguments. Il faut dire que les fonds manquent pour financer les travaux pourtant nécessaires : le directeur des travaux municipaux souligne « qu’il est désirable que la construction du P.S. Du boulevard Beaurepaire ne soit plus remise, en raison… de l’importance des travaux à exécuter qui nécessiterait l’emploi de nombreux ouvriers et serait, par conséquent, de nature à réduire les secours aux chômeurs actuellement payés par votre administration. ». Ce dernier argument fera avancer la décision.

Documents Archives municipales de Roubaix

Un nouveau boulevard de ceinture

Désireux d’obtenir une desserte pour leurs terrains, les propriétaires concernés par le projet du nouveau boulevard de ceinture s’engagent en mars 1891 à céder gratuitement les parcelles nécessaires à la construction d’un boulevard de 30 mètres de largeur entre la rue d’Hem et la rue de Lannoy, à condition que la ville exécute à ses frais dans l’année 1892 les travaux de nivellement. Ils s’engagent également à intervenir pour les 2/3 dans les frais de pavage. En 1895-96, la proposition s’étoffe : les futurs riverains proposent maintenant de céder les terrains situés entre la rue de Barbieux et la rue de Lannoy. Ils s’engagent également à contribuer pour une somme de 30 Francs du mètre d’avenue aux travaux de construction, à poser les bordures de trottoir et à mettre en bon état des trottoirs d’une largeur de 8 mètres. Ceux-ci seront pavés sur trois mètres, le reste étant simplement empierré. La ville devra niveler la route large de 14 mètres et poser un aqueduc central, planter d’arbres l’avenue, et proposer à la compagnie des tramways l’établissement d’une ligne empruntant la voie nouvelle et la reliant à la gare.

Profil en travers de la nouvelle voie

Ces riverains sont, pour la partie entre les rues de Barbieux et l’actuelle rue Edouard Vaillant (chemin n° huit) Paul Masurel, Constant Legrand et la veuve Spriet-Pluquet. Ensuite, jusqu’à la hauteur de la ferme de Gorghemetz, Auguste Pigouche-Beaucourt. Les terrains aux environs de l’actuelle rue Carpeaux sont la propriété des hospices de Roubaix et, à partir de la rue Henri Regnault jusqu’au chemin numéro neuf (l’actuelle rue du chemin neuf), incluant la ferme de la Haie, la société Lefebvre et Lemaire, dont le mandataire est Julien Lefebvre-Delemazure, négociant, 44 rue du Curoir. On trouve enfin jusqu’à la rue de Lannoy la veuve Constantin Descats et les héritiers Leconte-Baillon.

Le directeur de la voirie municipale attire l’attention du conseil sur l’intérêt qu’il y aurait à ouvrir cette voie, rappelant le succès rencontré par l’ouverture de la précédente ceinture (les boulevards de Reims et de Lyon). Il décrit cette nouvelle artère qui partirait de la rue Montyon jusqu’au débouché de la rue Descats qui serait incorporée dans son tracé. Il précise que la voie pourra facilement être prolongée jusqu’à la route de Leers, au-delà de la voie ferrée, pour constituer la nouvelle ceinture au sud de Roubaix.

Une délibération du conseil municipal, considérant que des usines commencent à s’installer sur ces « vastes plaines », représentant une population de près de 1000 ouvriers et potentiellement 200 maisons, adopte l’idée de la création de cette nouvelle avenue.

Tout est désormais prêt pour passer à la phase active de la réalisation du projet .

Les documents proviennent des archives municipales

 

 

 

Des autos et des piétons

Le drame de Roubaix 2000 est d’être séparé du centre ville par un boulevard à grand flux de circulation automobile. En effet, depuis l’ouverture du centre commercial, le passage des voitures en flot continu sur les boulevards Leclerc et Gambetta ne favorise pas l’accès par la place de la Liberté. Que faire ? Un passage souterrain est envisagé par la communauté urbaine, mais le projet est enterré. Ce devrait être un tunnel souterrain de grand gabarit vu le trafic, et cela coûterait trop cher. Il faut signaler que pendant l’été 1976 apparaissent les passages souterrains sur le boulevard du Mongy, notamment au Sart. Mais il y eut sans doute d’autres arguments (présence d’un égout collecteur, configuration du terrain…) On évoque alors une passerelle pour piétons, en précisant qu’il faudra amener les gens à l’utiliser, et qu’elle ne devra pas rallonger le parcours. Il semble que cette proposition ait fait long feu.

Puis on évoque la diminution du flux automobile, qui semble prochaine, avec les deux projets routiers en cours de réalisation : le contournement de la ville par Hem, vers la toute récente zone industrielle de Roubaix Est située à Leers, et la future pénétrante Tourcoing Roubaix, qui va emprunter le tracé de la rue Saint Vincent de Paul, et qui aboutit sur les plans place de la Liberté !

Le projet de pénétrante publié dans Nord Éclair

Suite aux articles de presse, les premières réactions entraînent un véritable tollé des habitants et des familles, qui demandent de situer ailleurs le débouché de cette dernière voie. Le boulevard Gambetta coupe déjà le centre ville en deux, la pénétrante coupera la ville en deux !

Roubaix 2000, masqué par la circulation de la Place de la Liberté en 1972 Photo Nord Éclair

Concernant la liaison à Roubaix 2000, la réflexion continue. Il faut que le centre commercial tende les mains au reste du centre ville, et que son parvis soit attractif. Cela contribuerait grandement à l’aménagement d’un large secteur piétonnier, une esplanade comprenant la place de la Liberté et Roubaix 2000. L’idée est lancée, les consultations commencent. M.Papillon président de la chambre de commerce de Lille Roubaix Tourcoing, fait une proposition de ce genre de la rue Jules Guesde jusqu’à la rue du vieil abreuvoir. Un sondage auprès des commerçants de la rue du vieil abreuvoir donne une légère majorité des oui au secteur sans voitures. Finalement, le projet de trajet piétonnier partirait du boulevard de Belfort, jusqu’à la grand place de Roubaix, englobant Roubaix 2000, une partie de la place de la Liberté et la Grand rue entre la rue Pauvrée (actuelle rue Jean Monnet), et la Grand Place. On se réunira avec les responsables des rues piétonnières de Lille et de Tourcoing afin de recueillir les fruits de leurs expériences.

En février 1976, l’idée sera soumise en conseil municipal, suite à la proposition de Pierre Catrice, répondant à l’invitation de Jean Papillon, devant les différents représentants de commerçants roubaisiens. A cette occasion, Pierre Catrice parle du désenclavement de Roubaix prévu avec la rocade sud est, pour libérer les avenues Motte et Salengro et informe les participants de l’évolution du projet de pénétrante Tourcoing Roubaix : elle débouche à présent rue de l’Hommelet, avec une petite desserte sur la place de la liberté avec la rue Pauvrée. On parle aussi du métro. On évoque le secteur piétonnier place de la Liberté Grand Place, et Pierre Catrice le présentera au conseil municipal. En mars, le projet avance, mais que fera-t-on du Mongy, danger potentiel pour la circulation, qui à cette époque va encore jusqu’à la Grand Place ?

En mai les commerçants se déclarent favorables à un trottoir piétonnier Place de la Liberté, boulevard Leclerc, rue Pierre Motte et Grand Place, après une rencontre avec les tourquennois et les lillois. M. Donnay pour Lille, affirme que les conditions de travail des commerçants se sont améliorées, mais sans trop d’effet sur le chiffre d’affaires. A Tourcoing, le chiffre d’affaire a augmenté de 25%. Un sondage effectué donne 94% de clients satisfaits pour les deux secteurs piétonniers (rue de Béthune à Lille et rue Saint Jacques à Tourcoing). Mme Harmand présidente de l’union des commerçants du centre, dit alors que le piétonnier, c’est l’avenir. Elle demande concertation et sondage avec les commerçants. En octobre, c’est décidé : un secteur piétonnier sera réalisé en plusieurs étapes de l’église Ste Elisabeth jusqu’à l’église St Martin, et la première tranche concernera le chantier de la place de la Liberté jusqu’à Roubaix 2000.

Les études continuent, un déplacement à Dieppe en novembre, où depuis l’apparition du secteur piétonnier, l’on trouve les clients moins agressifs, les ventes plus diversifiées, mais la rue devient un désert après 18 h 30, car il n’y a pas d’animation, ce qui n’est pas le cas de Roubaix, qui propose trois cinémas dans le secteur projeté. On projette d’aller voir à Courtrai comment ça se passe. Le 12 janvier 1977, c’est parti, les travaux commencent.

Les 90 logements du Boulevard de Reims

Le parc de la Potennerie est racheté avant la dernière guerre par la caisse d’assurances sociales « la Famille », et revient lors de la création de la sécurité sociale à la caisse primaire de Roubaix. En 1950, la ville s’en porte acquéreur pour y construire un centre médico-social, projet finalement abandonné. C’est alors l’office départemental des HLM qui le reprend. On y construira les immeubles constituant les groupes de la Potennerie rouge et de la Potennerie blanche. Après ces travaux, il demeure une bande de terrain libre, située derrière l’ancien mur du parc, en bordure du boulevard de Reims. Elle est rétrocédée à l’office public d’ HLM de Roubaix qui va y construire 90 logements de tailles diverses pour y reloger les derniers habitants du secteur Edouard Anseele.

Le terrain qui servira à la construction – photo Nord Matin

Les travaux démarrent en octobre 1960. Les appartements disposeront du chauffage central individuel ; ils seront peints et tapissés avant d’être livrés. Les techniques de construction sont nouvelles : certains éléments (murs intérieurs, plafonds et escaliers) sont coulés au pied des immeubles, puis on les installe ensuite en place. Cette technique permet d’accélérer la construction : par exemple, les évidement pour le passage des canalisations sont prévus lors de la coulée.

La construction – photos Nord Eclair et la Voix du Nord

On remarque que l’ancien mur du parc et sa porte monumentale ne sont abattus qu’à la fin des travaux .

Contrairement aux autres immeubles du quartier, l’architecte a prévu quatre magasins au rez-de chaussée de l’immeuble situé le long du boulevard de Reims. Ces magasins sont occupés dès livraison : En 1968, on trouve un poissonnier, M. Pauwels au 272, un « Bazar de la Potennerie » au 280, qui deviendra en 1973 une agence immobilière. Au 288 une épicerie (magasin EGE), au nom de M. Decaestecker, qui tient également une autre épicerie « Aux fruits de Provence » au 296. En 1978, un pédicure s’installe au 272, tandis que le 280 devient un salon de coiffure.

Photos Nord Eclair et Jp Maerten

On constate que l’immeuble a peu changé depuis sa construction, et qu’il est resté en bon état. On pourrait faire cette remarque pour la plupart des immeubles de brique rouge construits à Roubaix vers cette époque.

En prélude à l’avenue des Villas

Dans les années 1880, au moment où il est question de créer un boulevard de ceinture incluant ce qu’on va plus tard appeler le nouveau Roubaix, le quartier du Huchon ou de Barbieux n’était desservi que par le Chemin de Barbieux, menant de la rue du Moulin à Croix. Sur cette voie venait s’embrancher les boulevards de Douai et Lacordaire, constituant, à l’époque, la ceinture ainsi que, plus vers Croix, un chemin menant à Hem en passant par la ferme Gorghemez, et une voie à peine ébauchée, qui deviendra la rue Bossuet, vers le parc nouvellement créé. Par ailleurs, un sentier remontant à plusieurs siècles, dit du Vert Baudet à Croix ou sentier du Huchon, s’embranchait également sur la rue de Barbieux, mais il a été fermé « lors de la construction de la promenade » (le parc). Il est rouvert partiellement par décision municipale du 1er juin 1880 à la suite d’une pétition des riverains du quartier : Il est représenté sur la carte par une ligne pointillée partant du parc et rejoignant en formant un angle la rue de Barbieux.

Ce sentier desservait plusieurs propriétés, mais, à la réouverture, les alignements n’ont pas été précisés, ce qui pose immédiatement des problèmes aux riverains. En 1886 M. Edmond Ternynck demande de construire une mur de clôture le long du sentier du Huchon (qu’on appelle aussi rue Monthyon), ainsi que le long de la rue de Barbieux et un troisième face au parc. Le directeur de la Voirie municipale regrette que les limites du sentier n’aient pas été fixées suffisamment, et précise qu’il faut soit élargir le sentier pour tracer une rue de 12 m de large (ce qui nécessite une série d’expropriations), soit supprimer complètement ce sentier, qu’il appelle « du vert Baudet ». Il préfèrerait qu’on déclasse cette rue pour privilégier un accès au parc Barbieux par un nouveau boulevard de ceinture, empruntant le boulevard Lacordaire et se dirigeant vers la rue de Lannoy., ceci pour « …réunir au parc Barbieux, pour y retenir la population qui tend à s’établir sur Croix, toute la partie du territoire comprise entre le parc et les limites des communes de Croix, d’Hem et de Lys » (pour nous le Nouveau Roubaix).

En octobre, les frères Georges et Max Brame, MM. Leveugle et Edmond Ternynck acceptent l’abandon gratuit des terrains nécessaires à l’élargissement à 12 mètres du sentier et le tracé de la rue Monthyon. Les frères Brame assortissent cette promesse à l’expropriation des immeubles gênant le débouché de la rue vers la rue de Barbieux. En effet, des immeubles appartenant à M. Pierre Delesalle-Defives existe à cet endroit. Le sentier l’évitait grâce à une courbe, mais il se trouve juste sur le nouveau tracé. Cet immeuble est occupé par plusieurs locataires, dont M. Jules Roger , qui tient un cabaret à l’enseigne du vert Baudet, et il faudra également indemniser ces gens.

En Janvier 1887 le conseil municipal approuve le tracé, récupère les terrains et le préfet du Nord entérine les dispositions prises. Pourtant, les autorités municipales décident de laisser provisoirement en l’état le débouché actuel dans la rue de Barbieux. La nouvelle rue est classée et répertoriée, mais n’est donc que partiellement tracée, car son accès à l’Est reste à réaliser. Apparemment, les choses en restent là plusieurs années, jusqu’en 1896, au moment où on projette le percement de l’avenue des Villas, qui doit aboutir à cet endroit même. A cette époque aboutit l’accord entre M. Delesalle et la municipalité pour la session du terrain et des bâtiments situés dans l’alignement. On imagine alors de d’élargir la rue Monthyon jusqu’à une largeur de 30 mètres, au lieu de 12 initialement prévus. Celle-ci pourrait ainsi servir de prolongement à l’avenue des Villas qui doit faire cette largeur. Mais d’autres bâtiments appartenant à M. Delesalle empiètent sur le nouveau tracé élargi.

 Les deux projets vont finalement se rejoindre et se confondre : Les riverains de l’avenue des Villas proposent plutôt de déclasser la rue Monthyon, puisque « l’engagement des propriétaires se trouvant caduc par suite de la non exécution de l’engagement de janvier 1887 », et de créer le prolongement dans l’alignement de la future avenue. C’est cette solution qui sera choisie. Il faudra alors, par toute une série d’échanges et de tractations rendre les terrains constituant la rue Monthyon et en acquérir d’autres pour prolonger l’avenue des Villas, ce qui scellera le bref destin de cette rue : tracée pour remplacer un chemin séculaire, elle sera, aussitôt née, supplantée par une avenue de prestige, chargée de retenir et attirer la population de ce qu’on appelle déjà « le beau jardin », pour constituer un des plus beaux quartiers de Roubaix.

 Les documents utilisés proviennent des archives municipales

 

 

 

 

Appartement de la Potennerie Rouge

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Pour avoir un de ces appartements, il fallait être marié depuis au moins un an, habiter la ville de Roubaix. La mairie de Roubaix avait un quota d’appartements dans ce nouveau lotissement pour les enseignants qui travaillaient sur Roubaix. Donc on a habité cet appartement, au numéro 2.

Nous étions au troisième étage. C’était beau, ultramoderne, mais il n’y avait pas d’ascenseur. Il y avait une cave, où l’on pouvait mettre les boulets pour le chauffage au charbon, et les vélos… On n’a jamais eu de vol. On mettait les caisses de bière avec l’argent, pour les livraisons de la Grande Brasserie Moderne…J’ai un souvenir sur le chauffage. Comme il n’y avait pas de chauffage permanent, en hiver les tuyaux d’eau étaient gelés, on nous avait dit qu’il fallait mettre des journaux autour des tuyaux et chauffer pour dégeler. Donc j’ai fait ça, et ça a failli mettre le feu à l’appartement !

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Le plan de l’appartement

On entrait dans un petit hall où se trouvaient les toilettes, ensuite, il y avait une porte qui amenait à la cuisine. Il y avait des éléments dans la cuisine, et dans un coin, un endroit pour mettre une cuisinière mixte : à l’époque, j’avais une Coussement, le grand chic !  Les cuisinières Coussement mixtes à feu continu, c’était quelque chose ! On faisait des pommes de terre au four là dedans !… Elle était mixte, il y avait deux brûleurs à gaz…Je crois qu’il y avait ensuite l’entrée de la salle de bains, la chambre, et le grand balcon.

Ensuite, venait le séjour, et une seconde chambre avec une double porte. On l’a ouverte, donc ça faisait un grand séjour. Il y avait un feu continu dans le séjour sur le côté. Ça ne chauffait pas très fort, mais c’était un feu continu qui était loué en même temps que l’appartement. C’était le chauffage au charbon, il fallait monter les seaux à charbon. La cuisine était grande, la salle de bains aussi. Pour chauffer la salle de bains, on devait laisser la porte ouverte. On devait chauffer à mort… Le chauffe-eau était une ELM Leblanc. Le feu continu, c’était une espèce de feu gris-noir… C’était un truc allemand. C’était de la fonte, parce que c’était difficile à chauffer, mais, une fois que c’était chaud…

Les équipements de 1954 pubs journaux

Pour avoir cet appartement, j’ai fait la demande à la mairie de Roubaix. A l’époque, il n’y avait pas de surloyer, tout le monde payait le même loyer. Je ne crois pas que c’était cher, non, c’était très raisonnable, mais on était deux à travailler…

On a été les premiers à avoir une télévision, parce que le voisin, la porte à côté, était représentant en télévisions. Donc, on a été pratiquement les premiers sur Roubaix à avoir une télévision. Et il y avait une antenne, justement, qui avait été installée par le CIL. C’était une Philips, et elle a duré douze ans ! La télé était dans le séjour. Les gens passaient chez moi. On regardait l’émission de Jean Nohain, 36 chandelles, il y avait aussi Cinq colonnes à la une…

Le parc était magnifique, il n’y avait pas de barrières, c’était bien entretenu, bien fréquenté…

Merci à Camille Mullié pour ce témoignage, Photos PhW

Ces appartements ont été construits par le CIL en 1953 et 1954. Ils font partie de la série commencée au Galon d’Eau et poursuivie au square des Près. Nous parlons de Potennerie Rouge à cause de la couleur des briques employées, et pour distinguer ce lotissement de celui qui le jouxte, dit la Potennerie Blanche, qui a été construit après de 1958 à 1960.

Appartement rue Renan

potblancheaer copievue aérienne « Potennerie Blanche » Photo IGN Mappy

Les trois bâtiments plus petits ont été réhabilités il y a quelques années, et pour la grande barre, rue Ernest Renan, les travaux vont commencer sans doute en fin d’année, pour démolir les deux premières entrées côté Montgolfier, avec construction d’un nouveau bâtiment  attenant à l’existant. Il y a une entrée également qui va disparaître, l’avant-dernière sur la droite. L’accès Renan, qui est complètement sur la droite du bâtiment passera sur cette démolition, et il va y avoir des constructions de maisons individuelles sur ce secteur là. On va aussi complètement retraiter l’espace vert.

C’était en 1994. Je n’ai habité là que quinze mois ; en fait, pour moi, ce n’était qu’une étape. Je loue un appartement à l’entrée numéro 8, à peu près dans le milieu de la grande barre. C’est un appartement deux chambres au quatrième étage, sans ascenseur. Je loue à l’agence Partenord des Hauts Champs, rue Chardin.

Il faut savoir qu’il y a trois appartements par palier, cinq niveaux, donc ça fait quinze appartements par entrée. On entre par un couloir relativement long qui dessert à gauche une première chambre, qui donne directement sur la salle de bains. J’avais condamné la porte de communication entre cette chambre et la salle de bains. Ce qui est amusant dans cette configuration, c’est qu’on peut entrer dans la salle de bains par trois endroits différents. Moi, j’utilisais la chambre qui est tout au fond, qui donnait également sur la salle de bains et ça me faisait comme une « suite », comme dans les hôtels de luxe. C’était mon luxe à l’époque !

Le grand bâtiment vu de la rue Philippe Auguste Photo PhW

La particularité de cette face là, qui donne sur la rue Ernest Renan, c’est les grandes baies vitrées tout le long. Il y a un à peu près un mètre cinquante de mur, et au dessus, la baie vitrée tout le long. Ensuite un séjour relativement petit, qui donnait sur un grand balcon. On pouvait même manger sur le balcon. J’ai un doute : je ne me souviens pas si le balcon allait jusqu’à la cuisine ou pas… La cuisine, qui paraît grande sur le schéma, était minuscule : on ne pouvait pas s’y tenir, on ne pouvait pas y manger. C’était pratique pour faire la cuisine, puisqu’on avait forcément tout sous la main. C’était une kitchenette plutôt qu’autre chose… On entre dans la cuisine par le séjour.

Je disais tout à l’heure qu’il y avait trois appartements par palier. Là où j’ai mis des hachures, c’est l’appartement d’à côté qui vient s’imbriquer dedans, et c’est la raison pour laquelle, à mon avis, il y avait ce couloir. Je n’ai pas visité les autres appartements. A mon avis, les trois appartements sur le palier n’ont pas la même configuration du tout.

Du point de vue acoustique, c’était sympa, parce qu’on entendait tout ce qui se passait à côté, donc on était au courant de tout, pas besoin de rencontrer ses voisins pour savoir ce qui se passait… Chauffage par le sol, pas de grenier, par contre, une cave bien pratique, parce que quand tu habites au quatrième étage, et que tu reviens avec tes courses, tu es content de pouvoir en mettre un petit peu à la cave et de ne pas tout monter d’un seul coup. C’était sécurisé, fermé à clé, chacun avait son emplacement fermé, son box. Je n’ai jamais eu de problème avec la cave. Par contre, j’ai eu des problèmes, notamment avec des drogués dans les escaliers, j’ai retrouvé des seringues, des gens qui se piquaient, du sang sur les murs… Ils n’étaient pas agressifs, ils se droguaient simplement. Ça n’est pas très agréable, mais bon…

Le grand bâtiment côté rue Renan Photo PhW

J’avais un lave-linge. Ça me revient, parce que, quand j’ai déménagé, j’ai retiré la machine à laver ; je n’ai pas vu que le robinet fuyait, et, quand je suis retourné pour l’état des lieux, il y avait trois centimètres d’eau dans la salle de bains. Il a fallu éponger avant que l’agent de Partenord n’arrive : il y avait de l’eau jusque dans le séjour ! C’était de la moquette partout, sauf la salle de bains. En cuisine, c’était du carrelage et salle de bains aussi. Le reste était moquetté. Sur 15 mois, je n’ai pas changé de voisins…

Merci à Gérard Vanspeybroeck, ex locataire de la Potennerie Blanche

Avant l’avenue des Villas

En 1884, la partie sud de Roubaix, que l’on appelait « Roubaix Campagne », n’était constituée que de terres agricoles et de quelques hameaux. Ces terres dépendaient de quelques grosses fermes : Gourgemez, la Haye, la Petite Vigne, Maufait, l’Espierre, le Petit Beaumont… La population de la ville s’est considérablement développée et la partie sud va s’urbaniser progressivement : les usines et les habitations vont gagner ces zones potentiellement libres.

Pl1884-96dpiPlan cadastral de Roubaix Sud en 1884 – Document archives municipales

On veut donc structurer cette zone en traçant des voies le long desquelles s’implanteront les nouvelles constructions. Un projet de boulevard de ceinture se décide dès 1866. Il sera constitué des boulevards Lacordaire, de Reims, de Lyon et de Mulhouse pour relier le quartier de Barbieux à la gare de Roubaix-Wattrelos. Le projet se réalise vers 1888.

Entre temps les terres agricoles ont été, pour une bonne part, reprises par diverses sociétés,  et en particulier par la société Lemaire frères et Lefebvre, qui possède alors la majeure partie de ce qui constitue aujourd’hui le Nouveau Roubaix.

On retrouve souvent le nom de cette société lorsqu’il est question de tracer des voies nouvelles, dans les années 1890 . Certains terrains sont rachetés pour implanter la place du Travail en 1891, le boulevard de Fourmies, jusqu’à la place de l’Avenir, en 1892 et la rue Carpeaux en 1896. D’autres terrains sont cédés gratuitement, par exemple, ceux qui sont nécessaires à la prolongation du boulevard de Fourmies. Enfin, cette même société propose aussi de céder à la Ville des rues qu’elle a construites sur ses propriétés : c’est le cas de la rue Henri Regnault en 1891, la rue Meissonnier en 1895, la rue David D’angers, la rue Rubens et la rue Philibert Delorme en 1896. La société Lemaire frères et Lefebvre construit également des maisons dans le nouveau quartier.

Les ouvertures de rues et les constructions se multipliant, la municipalité veut voir plus grand, et construire une ceinture plus large, qui englobera toute cette zone et reliera la rue de Lannoy et Barbieux, en restant proche des limites de la commune.

QuartiersSud-1896--96dpiPlan des quartiers sud en 1896,  en noir les rues existantes, en rouge les voies projetées Document archives municipales

Dans un rapport au conseil municipal en 1896, le directeur de la voirie propose l’ouverture, entre le chemin de Barbieux et la rue de Lannoy, d’une avenue dite « des villas ». Il souligne l’engagement des propriétaires de céder les terrains concernés à titre gratuit pour que cette ouverture se réalise. Le projet va donc pouvoir prendre corps.

Stationnement

gambettaLe boulevard Gambetta à la belle époque Collection Privée

Quand les roubaisiens décidèrent de remblayer le bras mort du canal, qui s’étendait du pied du boulevard de Paris jusqu’au bout du boulevard Gambetta, ils souhaitaient transformer cet égout à ciel ouvert en un grand boulevard. Ce fut chose faite en 1886 : un vaste terre plein avec deux contre allées se déroule alors entre le café des Arcades et le peignage Allart. Les années passent et les repères se transforment : le concessionnaire Renault a remplacé le café et la cité du Galon d’eau occupe l’emplacement du peignage. Le boulevard Gambetta abandonne une partie de son parcours pour célébrer le général Leclerc. Pas de problèmes de stationnement alors. Le terre plein des deux boulevards accueille même régulièrement les forains en avril et en septembre.

Au début des années soixante, apparaît le souci de gérer le stationnement. Excepté les parcs de stationnement de la Grand-Place et de la place des halles, ceux de la place de la Liberté, et les terre pleins des boulevards Leclerc et Gambetta sont relativement peu utilisés car estimés trop éloignés du centre. Les automobilistes préfèrent se garer dans les rues proches du centre, et le stationnement se fait au détriment des commerces, ceux qui stationnent étant des personnes qui viennent travailler et occupent toute la journée des emplacements utiles aux riverains, clients et commerçants. C’est alors que commence le grand chantier de démolition du bloc Anseele. On parle d’implanter des parkings sur les espaces libérés, notamment sur le terrain dégagé de la rue des filatures. En novembre 1962 c’est la mise en place de la zone bleue. De quoi s’agissait-il ? La zone bleue est une zone de stationnement réglementé, limité dans la durée. Il ne s’agit pas d’un parking à proprement parler, mais d’une zone où le stationnement en voirie est autorisé. Peuvent s’y garer les automobilistes qui possèdent un disque de stationnement. Sur le disque figurent d’une part des heures d’arrivée possibles, d’autre part la durée autorisée et les heures de départ correspondantes, en sachant que la durée de stationnement en zone bleue est généralement limitée à 1h30. L’automobiliste tourne le disque pour faire apparaître les horaires choisis en face des fenêtres découpées à cet effet dans la pochette, et l’appose contre le pare-brise à l’intérieur de son véhicule. Le principe reposait sur la bonne volonté des automobilistes, mais nombreux sont ceux qui redescendaient changer l’heure de leur disque une fois la durée autorisée écoulée. Le stationnement au disque était non payant.

stationnement2La macadamisation du terre plein en 1973 Photo Nord Éclair

En 1967, l’idée de la création d’un grand parking souterrain germe alors, sous le centre commercial, plus d’un millier de places à moins de cent mètres du centre de Roubaix ! En 1973, le vaste terre plein du boulevard Gambetta a disparu. On y garait sa voiture, loin de tout souci de paiement, et on trouvait toujours une place. Le terre plein a été macadamisé et il a rétréci diminuant ainsi le nombre de places possibles. On a tracé les emplacements réduisant d’autant les places, les tracés donnant deux lignes de stationnement.

stationnementL’arrivée des parcmètres, un succès ! Photo Nord Éclair

Et puis en septembre, c’est l’arrivée d’une invention américaine, les parcmètres. C’en est fini du stationnement gratuit. Leur mise en service a pour effet de rendre déserts les emplacements. Les conducteurs ont-ils pour autant mis leur voiture dans le parking souterrain ? Il semble bien que non. Ils se garent dans les rues du bloc Anseele, déjà cité dortoir, qui devient alors pour la journée un quartier parking. Il semble que le problème dure encore…

D’après Nord Éclair