Robert Lecocq, traiteur

Robert Lecocq naît le 21 Avril 1932. Il apprend le métier de boucher charcutier traiteur, mais c’est surtout l’activité de traiteur qui le passionne : la création de plats, de mets succulents et de desserts pour le plaisir des clients.

A la fin des années 1960, il installe ses bureaux au 111 rue du Luxembourg à Roubaix et ouvre un magasin de traiteur, au 189 Boulevard Gambetta à Tourcoing. C’est une artère importante qui relie les deux villes, ce qui lui permet de faire venir les clients de Roubaix Tourcoing, mais également des petites villes voisines. Car les particuliers viennent de loin pour commander chez Robert Lecocq. Sa réputation et sa notoriété sont désormais acquises.

Publicité années 60 ( Document collection privée )

Robert Lecocq livre à domicile, que ce soit pour les particuliers ( noces, mariages et banquets ), ou pour les entreprises ( repas d’affaires ).

Il est ambitieux et son souhait le plus cher est de pouvoir mettre une salle de réception à disposition de sa clientèle. L’occasion se présente en 1979, lorsqu’il rencontre Mme Maes qui possède le 31 rue Paul Lafargue. C’est un hôtel particulier construit en 1928 par l’industriel André Carissimo. Cette maison de maître de 265 m2 de surface au sol (la façade fait 19m de long sur plus de 14m de large) possède deux étages. Le terrain de 3360 m2 donne sur l’avenue Gustave Delory et la demeure est inoccupée depuis 1976. Un bail de location est signé.

Les Hauts de Barbieux ( Document J.J.Young )

Robert Lecocq s’installe dans ces locaux et crée l’enseigne « Les Hauts de Barbieux ». Il installe la cuisine, le laboratoire et la chambre froide au sous sol et aménage deux salles de réception au rez de chaussée : La Chaudrée et la Fontaine. Il fait ouvrir le mur de clôture, avenue Gustave Delory, pour la création d’une porte cochère, afin de faciliter le passage des véhicules de livraison.

Les Hauts de Barbieux ( Documents collection privée )

Il a donc désormais plusieurs activités : traiteur et livraison à domicile, salle de réception pour les week-end, et restaurant pour le reste de la semaine. Le succès est immédiat et le restaurant se trouve déjà à l’étroit. Au début des années 1980, Robert fait donc construire une véranda sur les 19m de façade, côté jardin : la salle principale est maintenant immense, magnifique et très lumineuse.

Les Hauts de Barbieux ( Documents collection privée et Google Maps )
Les Hauts de Barbieux ( Documents D. Gaudenzi )

Robert Lecocq devient le spécialiste incontesté de la cuisine pour les plus fins gourmets et les plus grands gourmands. Les créations sont toujours uniques, délicates et savoureuses, car tous les plats sont faits maison à partir de produits frais. Robert est très exigeant, voire même intransigeant auprès de son personnel sur la qualité.

Menu restaurant ( Document J.J.Young )

En 1986, Robert Lecocq prévoit l’extension et l’agrandissement de ses locaux techniques, avec l’accord de la propriétaire Mme Maes, mais en 1988, il renonce à effectuer les travaux, car il a d’autres projets : la création de salles de réception, dans des lieux historiques et prestigieux . . .

En 1989, Robert Lecocq signe un accord avec la ville de Mons en Baroeul, pour la location du Fort de Mons. C’est dans cet édifice du XIX° siècle, avec une architecture remarquable, niché dans la verdure, que Robert aménage des salles de réception et un restaurant dans de magnifiques salles voûtées.

Le Fort de Mons ( Document collection privée )

Fin 1990, Robert tombe malade et arrête son activité professionnelle pour pouvoir se soigner. Son épouse Chantal et leurs trois fils François, Emmanuel et Alexandre reprennent le flambeau, continuent l’activité et développent l’entreprise de façon très importante et rapide, car ils fourmillent d’idées originales.

En 1991, la famille Lecocq décide d’aménager des cuisines et un laboratoire, dans un nouveau local rue Émile Moreau, car cet emplacement se trouve à proximité de l’église Notre Dame, futur nouvel espace de réception.

La mairie de Roubaix signe une concession, en 1992, pour la location de cette ancienne église qui date du XVIII° siècle, désacralisée en 1983. Les travaux de rénovation sont immenses, car cet ancien lieu de culte inoccupé depuis 10 ans, a servi de stockage pour la municipalité, et se trouve en mauvais état.

L’église Notre Dame ( Documents collection privée )

L’espace Gobelins est né. C’est un lieu magique, majestueux, étonnant avec ses larges colonnes et sa voûte à 20m de hauteur. La salle est immense, puisqu’elle peut recevoir 350 personnes pour un dîner ou 1500 personnes pour un cocktail. C’est un écrin idéal pour les réceptions ; la clientèle est ravie.

Espace Gobelins ( Documents D. Gaudenzi )

En 1997, la famille Lecocq reprend le restaurant « La Terrasse des Remparts » à Lille ( auparavant tenu par le chef étoilé Bardot ), qui se trouve dans l’enceinte même de la Porte de Gand : site historique classé, construit en 1620. La décoration est originale et marie audacieusement le moderne et l’ancien, avec succès. Le restaurant a une capacité de 110 couverts, et emploie 15 personnes.

La Terrasse des Remparts ( Document collection privée )

En 2002, le groupe Lecocq ajoute un nouveau projet et, cette fois-ci, se lance dans la création, en ouvrant un restaurant à thème, sur un concept inspiré du voyage, des vacances et de la méditerranée, à l’enseigne « Villazur », à Wasquehal. Le bâtiment, la décoration et la carte sont un billet pour le soleil : un voyage méridional entre terre et mer.

Villazur ( Document collection privée )

En 2007, le groupe Lecocq déménage tous les équipements des cuisines, de la rue Emile Moreau, dans de nouveaux locaux, au 37 avenue Henri Delecroix à Hem. Malheureusement, la crise économique de 2007-2008 entraîne une baisse des commandes du service traiteur, une baisse de la fréquentation des restaurants. L’activité tourne au ralenti et les premières difficultés apparaissent. La situation ne s’améliore guère, et la liquidation judiciaire de l’entreprise est prononcée en 2011.

Le siège de la société, à Hem, est repris par Compass Group, qui fait partie de la chaîne « Traiteur de France ». L’activité continue, et la nouvelle direction décide, bien évidemment, de garder le nom Lecocq qui représente le prestige, la forte renommée, et plus de 50 ans d’expérience. Le nom de l’entreprise est désormais : « Lecocq traiteur »

( Document Lecocq traiteur )

Remerciements aux archives municipales, ainsi qu’à Matthieu Croquette, Didier Gaudenzi et Jean Jacques Young.

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Les magasins Drouffe

Benjamin Louis Drouffe a 25 ans lorsqu’il se marie, en 1880, avec Marie Chevalier. La même année, ils créent ensemble leur petite entreprise, une manufacture de meubles et sièges. L’entreprise L. Drouffe-Chevalier s’installe rue Pierre de Roubaix dans un bâtiment immense auquel on accède également par une porte cochère, au 29 rue de Saint Amand.

( Document BNR )

Très rapidement ils décident d’apporter un complément d’activité à leur entreprise. Au début des années 1900, ils produisent des voitures d’enfants, des charrettes, des attelages, des tricycles… dans leurs usines de Roubaix ( au 136-138 rue Pierre de Roubaix ) et de Toufflers (au 122 rue de Roubaix ).

( Document BNR )

La production est bien sûr artisanale : les landaus sont entièrement montés manuellement et demandent une main d’oeuvre abondante et spécialisée.

( Doc coll. priv. )
( Doc BNR )

En Août 1911,un incendie ravage l’entreprise de la rue Pierre de Roubaix, détruisant un lieu de stockage de meubles de grande valeur, un atelier de production de voitures d’enfants, et une partie de l’habitation. Le préjudice s’élève à 75.000 Frs. Les assurances permettent heureusement de rembourser les frais et de reconstruire les locaux.

( Document Journal de Roubaix . Archives Municipales )

Benjamin Louis et Marie sont ambitieux ; ils souhaitent développer davantage les ventes de leur commerce. Après la première guerre mondiale, ils font l’acquisition d’un immeuble au 43 et 43 bis rue de Lannoy ( juste à côté du café de la Planche Trouée ). La rue de Lannoy est l’une des artères les plus commerçantes de la ville, ce qui facilite le démarrage commercial de leur petite entreprise.

En 1920, ils engagent d’importants travaux d’aménagements de ces locaux et les transforment en magasin de vente et d’exposition de voitures d’enfants. En 1923, ils construisent un deuxième bâtiment juste derrière le magasin. Ils créent également un dépôt à Paris, rue de la Huchette.

( Document BNR )

Benjamin Louis et Marie ont 11 enfants. Trois de leurs garçons s’occupent de la production :

– à Toufflers, Albert s’occupe des services techniques et Eugène de l’administratif,

– à Roubaix Gabriel s’occupe de la gestion du magasin de la rue de Lannoy.

L’entreprise Drouffe Chevalier devient Drouffe frères, au début des années 20.

( Doc coll. priv. )

En plus de leur gamme de voitures d’enfants, ils fabriquent et distribuent également des lits, des chaises, des moïses, des jouets.

A la fin des années 1920, les frères Drouffe se séparent de l’usine de la rue Pierre de Roubaix pour ne garder que l’unité de production de Toufflers. Le bâtiment est repris par M. Larnou qui habite rue des Fossés, et qui le transforme en cinéma et dancing. Par la suite ce sera le cinéma « Renaissance ».

( Document Journal de Roubaix . Archives Municipales )

Début Juin 1931, des ouvriers du textile manifestent dans toute la ville. Ces événements durent plus de deux semaines. La tension monte entre ouvriers grévistes et forces de l’ordre et le 15 Juin des émeutes éclatent, surtout dans le quartier des Longues Haies et de la rue de Lannoy.( Maxence Van der Meersch en relate les événements dans son livre : Quand les sirènes se taisent )

( Document L’Egalité . Archives Municipales )

Des barricades sont érigées, des rues dépavées, des vitrines brisées, des magasins saccagés: les gardes-mobiles chargent pour réprimer ces manifestations non déclarées.

Les heurts sont très violents et il y a de nombreux blessés. Gabriel Drouffe n’hésite pas un seul instant à soigner un garde-mobile, le lieutenant Le-Thomas, qui a reçu un pavé en plein front. Les émeutiers n’apprécient pas ce geste et les représailles sont immédiates ; toutes les vitrines sont brisées, le magasin pillé, les deux véhicules Citroën ( voiture personnelle et fourgonnette de livraison ), stationnés rue des Longues Haies, sont saccagés et incendiés.

( Documents JP Drouffe )
( Documents JP Drouffe )

Devant tant de haine, Gabriel Drouffe fait paraître, dans la presse locale, une lettre dans laquelle il revendique le devoir de porter secours à tout blessé, qu’il s’agisse d’un garde-mobile ou d’un ouvrier gréviste.

À suivre . . .

Remerciements aux Archives Municipales, et à Jean Pierre Drouffe pour son témoignage et sa documentation.

Bossu Cuvelier ( suite )

Dans les années 50, le commerce de gros connaît une forte croissance et les demandes d’agrandissement des entrepôts de la rue de Cohem se succèdent : en 1951, 1953, 1960, 1969. Un choix immense est proposé à la clientèle : fers, câbles, cornières, barres, cylindres, tôles. . . Bossu Cuvelier livre désormais des profilés aciers dans toute la région.

( Document coll. Priv. )

Pour les particuliers, Bossu Cuvelier est la première « grande surface » . On y trouve de tout :

– au rez de chaussée, la quincaillerie, des outils de bricolage, de l’outillage électrique.

– à l’étage, auquel on accède par le célèbre escalier carrelé de couleur verte, de la très belle vaisselle, des casseroles de grande qualité, des meubles de cuisine et surtout des jouets.

De nombreux roubaisiens se souviennent d’ailleurs des superbes vitrines décorées, à l’époque de Noël, avec l’animation des trains électriques, dans les années 1960.

( Document coll. Priv. )

En 1976, Descours et Cabaud, un gros groupe industriel de la région Lyonnaise dans le domaine de l’acier, rachète Bossu Cuvelier. L’entreprise devient B.C.D.C « Bossu Cuvelier Descours Cabaud» ; elle est dirigée par Jacques Bossu et Pierre Henri Baye. L’année suivante, pour faire face à son développement de la division aciers, l’entreprise décide de déménager rue de Cohem. L’expansion continue ; Bossu Cuvelier s’étend désormais, sur plus de 16000 m2.

( Document Bossu Cuvelier )

Sur la photo ci-dessus, l’entrepôt de la rue de Cohem. A l’extrême droite, on distingue la maison blanche du concierge ; les toits blancs sont occupés par la division Quofi (Quincaillerie Outillage Fournitures Industrielles) ; les toits noirs sont réservés aux dépôts des aciers, et dans le fond, on aperçoit la voie ferrée et l’embranchement particulier SNCF.

( Document Bossu Cuvelier)

L’ouverture officielle de l’entrepôt se fait en Janvier 1978. Un magasin d’accueil est créé pour les professionnels ( voir un précédent article sur notre site « Une quincaillerie , rue de Cohem » ).

( Document Nord Eclair )

En 1983, le Directeur général de Bossu Cuvelier : Hubert de Courcy fait démolir le deuxième étage du 74 et 74 bis de la Grande Rue, pour des raisons de sécurité.

( Documents Archives Municipales )

Les ventes aux particuliers chutent de plus en plus. La Direction prend la décision, en 1985, de fermer les portes du magasin de la Grande Rue, de se séparer de l’entrepôt du Bld Gambetta, et de se consacrer surtout aux entreprises. Le siégé social est transféré Boulevard Leclerc. Le magasin de la Grande Rue est rasé en 1994.

La démolition du magasin de la Grande Rue. On remarque le célèbre magasin des vêtements Devianne et la bijouterie Six ( Document D Labbé )
Entrepôt du Bld Gambetta ( Document Archives Municpales )

En 1994, l’entrepôt de la rue de Cohem vieillit et devient trop petit. L’entreprise change de stratégie et, pour se rapprocher de ses clients, ouvre des succursales dans les principales villes de la région. Le siège social est transféré à la ZI de Lesquin. L’entrepôt de la rue de Cohem emménage dans les locaux de l’ancienne entreprise Stein, au 7 rue de Sévigné, en contrebas du pont de Beaurepaire, avec un embranchement particulier SNCF, puisque la gare du Pile fait désormais partie de l’entreprise.

( Photo Google Maps )

L’entreprise est rebaptisée Prolians en 2000, et en 2012, Prolians Bossu Cuvelier : le spécialiste nordiste des fournitures industrielles, fête son 150° anniversaire. Il reste le leader incontesté de la visserie, boulonnerie, outillage, vêtements de travail, soudure et matériel électroportatif (visseuses, perceuses, raboteuses…).

( Photo BT )

Aujourd’hui, Prolians Bossu Cuvelier possède 16 magasins dans les Hauts de France ; plus de 300 salariés y travaillent. Les fournisseurs sont réputés, les clients très importants comme Eiffage, Ramery, Arcelor Mittal.

20.000 références sont en stock dans tous les domaines de l’industrie : Produits métallurgiques – Tréfilerie – Outillage et fournitures industrielles – Chauffage Plomberie – Sanitaire – Energies nouvelles – Quincaillerie de bâtiment et d’agencement – Matériel de BTP – Équipements de protection individuelle. Prolians Bossu Cuvelier fait toujours partie du groupe Descours et Cabaud, avec au total 675 points de vente et 13500 salariés.

Actuellement on trouve :

– à la place du magasin de la Grande Rue, un immeuble avec, au rez de chaussée, une agence Pole Emploi,

– au Boulevard Gambetta, la résidence étudiante Nemea,

– à l’emplacement de la rue de Cohem, le parking de l’immense Sté Camaïeu.

 

Remerciements aux Archives Municipales, ainsi qu’à Magali Muset, Arlette Thullier, Lucette Bernardi et Armelle D.

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Bossu Cuvelier

Louis-François Bossu naît, en 1835, à Roubaix et Elma Cuvelier naît, en 1842, à Houplines. Ils se marient et ont 6 enfants Marie, Louise, Paul, Louise-Elisa, Henri et Albert. Louis-François est quincaillier. Il crée son commerce avec son épouse, à Roubaix, au 74 Grande Rue, en 1862, à l’enseigne Bossu Cuvelier. C’est un emplacement idéal car c’est une grande artère commerçante de la ville. Les débuts sont difficiles ; à cette époque, les livraisons se font en véhicules hippomobiles, ou en charrettes à bras. Les employés apportent leurs quotas de charbon pour chauffer les bureaux ! La volonté, la ténacité, le sens du commerce du couple permettent cependant d’envisager un avenir prometteur.

( Document coll. Priv. )

Louis-François développe son commerce de quincaillerie, en se spécialisant en serrurerie, poëlerie, appareils de chauffage en fonte, aciers, fers, cuivres …Il livre également les usines textiles, en petit outillage de tissage et peignage mécanique.

Il stocke ses produits dans un local, au 90 bis de la même rue, et ensuite dans un entrepôt situé derrière son magasin, sur le Boulevard Gambetta, au 81 83, avec un accès beaucoup plus aisé pour les livraisons et les expéditions. Le magasin de la Grande Rue est destiné à recevoir les particuliers, pour la quincaillerie, la serrurerie, le petit outillage etc. A l’étage, on y trouve de la vaisselle, des articles de ménage, de la droguerie. . .

L’entrepôt du Boulevard Gambetta est plutôt réservé à l’activité de grossiste pour les outillages industriels, fers, aciers, tôles …

Les deux bâtiments sont complètement séparés ; il y a juste un accès par une petite porte. Les deux entités sont différentes.

( Document coll. Priv. )

Au début des années 1900, il rachète le 74 bis à un torréfacteur de cafés (Marquette Dusart), et fait transformer la façade des deux magasins réunis. Après la première guerre mondiale, la France a besoin de se reconstruire. Bossu Cuvelier va alors connaître une ascension fulgurante, surtout pour l’activité de gros : division aciers et fers. L’entreprise compte une quarantaine de salariés, dans les années 1920.

( Document BNR )
( Document coll. Priv. )

En 1921, Albert Bossu s’associe avec Camille Dubrulle. Ils font l’acquisition d’un terrain d’environ 8000 m2, rue de Cohem, pour y construire un entrepôt de stockage pour son activité de gros, et fait venir directement l’acier en grosse quantité, en particulier de Lorraine, à des prx négociés au plus bas. C’est un emplacement stratégique, puisque cette parcelle bénéficie d’un embranchement particulier pour les voies ferrées, la gare du Pile étant toute proche. Ce nouvel entrepôt rue de Cohem remplace le dépôt du 90 bis Grande Rue qui n’a plus d’utilité et va être loué, en 1935, aux Ets Delbecque ( machines outils et outillage ).

( Document coll. Priv. )
( Documents Bossu Cuvelier )

L’activité de vente aux particuliers se développant également, le manque de place motive l’entreprise à reprendre les deux maisons voisines, du 76 puis du 78 de la Grande Rue. Le 76 est occupé par un cafetier : Degreve-Verbeurgt, le 78 par B. Nodot de la coopérative des vendeurs de journaux. En 1934, Bossu Cuvelier demande à l’architecte Fernand Lefebvre de Roubaix de transformer les deux maisons en commerce de détail. La façade mesure désormais plus de 30 mètres. L’agrandissement disponible permet d’ajouter des nouvelles familles de produits, comme des articles et mobiliers de jardin.

( Document coll. Priv. )

Tous les dirigeants de Bossu Cuvelier ont eu le sens du commerce, de la publicité et de la communication.

Création d’un panneau publicitaire en 1951 ( Document D. Labbé )

En 1954, Jean Bossu, Directeur de l’entreprise, souhaite transformer les façades des 76 et 78 Grande Rue, car les 2 immeubles sont vétustes et délabrés . Il fait appel à l’architecte Marcel Forrest, de Tourcoing, pour son projet d’amélioration de la façade complète du 74 au 78 pour un investissement de 12.900.000 Frs.

( Document Archives Municipales )
La façade, avant et après ( Documents Archives Municipales )

Bossu Cuvelier devient une société importante, mais garde son esprit familial. Les salariés sont fidèles à leur entreprise. En 1955, Léon Hennebicq devient le doyen des quincailliers de France, car il compte 69 années de présence chez Bossu Cuvelier !Lors d’une cérémonie en la présence de Jean Bossu et de M le maire, Victor Provo, il reçoit la croix de chevalier de la Légion d’Honneur, d’ Antoine Toulemonde, président de la chambre de commerce. Pour fêter cet événement exceptionnel et rarissime, Jean Bossu décide de fermer le magasin une journée complète.

( Document Nord Eclair )

À suivre . . .

Remerciements aux Archives Municipales, ainsi qu’à Magali Muset, Arlette Thullier, Lucette Bernardi et Armelle D.

Les gaufres Rita

Alphonse et Alfred Demeuleneire sont frères. En 1911, ils créent un atelier de fabrication de gaufres, au 80 rue du Moulin ( actuellement rue Jean Moulin ) ; ils fabriquent des gaufres sèches et des gaufres fourrées à la vanille, à la vergeoise, au miel. Ils livrent des grossistes avec leurs marques déposées : la Parisienne, la Tzarine, la Japonaise, et surtout la Mirella.

( Document coll. priv )

 Les gaufres sont découpées et fourrées à la main ; leur qualité irréprochable entraîne un succès immédiat. Rapidement, le manque de place se fait cruellement sentir et, en 1928, ils déménagent leur atelier dans des locaux beaucoup plus vastes au 49 et 51 rue Daubenton. Ils créent la marque « Succès du jour » ainsi que la marque « Rita ».

( Documents coll. priv )

La pâtisserie artisanale ne cesse de grandir et de se développer, rachetant les maisons voisines de la même rue, avant d’allonger son emprise sur l’arrière pour atteindre la rue Saint Joseph où est édifiée une superbe façade. La superficie au sol, est désormais de 1600 m2. Dans les années 30, les deux frères Demeuleneire diversifient leur production, en ajoutant une gamme de pains d’épices, de couques et de biscuits.

( Document J.J.Desprets )

La fabrication des célèbres gaufres Rita, reste artisanale. La recette reste jalousement protégée par des brevets. Les gaufres Rita sont conditionnées en sachet aluminium de 6 gaufres, et également en boites métalliques d’1 kg.

( Documents coll. priv )

Adolphe et Alfred Demeuleneire investissent ; ils achètent des machines modernes et performantes pour gagner en productivité et arriver à une quantité de 25.000 gaufres fabriquées quotidiennement.

( Documents D .Labbé )
Habillage des boîtes et chargement du fourgon Renault, par le tapis roulant, pour expédition
( Documents D. Labbé )

A la fin des années 40, Alphonse Dubrulle, le beau-frère d’Alphonse et Alfred Demeuleneire, reprend l’affaire. Il achète le 43 rue Daubenton et aménage la façade et les bureaux des 45, 47 et 49. L’entreprise livre les commerçants directement avec les célèbres véhicules publicitaires. Les camions et camionnettes Rita ( de marque Renault, exclusivement ) livrent tout le Nord de la France, mais également la Normandie et la région Parisienne.


Les véhicules rue St Joseph ( Document J.J. Desprets )
Le fourgon Renault 1000 KG, la Renault Colorale, le camion Rita ( Documents J.J. Desprets ) 

Pour l’entretien de ses nombreux véhicules, Alphonse Dubrulle installe un atelier dans les locaux de la rue Daubenton, pour le graissage vidange et même le lavage des Renault.

(Documents D. Labbé )

Après guerre, le fils d’Alphonse Dubrulle, Jacques, vient aider son père à la gestion de l’entreprise. En 1956, la société devient SA, compte 60 salariés et continue de prospérer.

( Document D. Labbé )

En 1986, Jean-Jacques Desprets, PDG de la Sté Sucrema à Tourcoing, reprend les gaufres Rita. Sucrema fait partie de la holding Lori qui fabrique en particulier la madeleine Loridan, bien connue. En 1987, toute l’entreprise Rita est transférée rue Ma Campagne à Tourcoing, pour regrouper l’ensemble de la production. C’est la fin de l’histoire roubaisienne de la gaufre Rita !

Le bâtiment de la rue Daubenton reste inoccupé quelques années et, en 1994, la friche Rita est transformée par l’architecte Jean Charles Huet de la rue Ingres, en pépinière artistique « Chez Rita ». Les 1600 m2 au sol sont transformés en 32 cellules-ateliers et 8 appartements d’artistes.

( Document « Chez Rita » et Archives Municipales )

La gaufre Rita est, à ce jour, produite et distribuée par une très grosse entreprise belge, la Société Poppies de Zonnebeke.

( Documents Sté Poppies )


Remerciements aux Archives Municipales, à Jean-Jacques Desprets et à Daniel Labbé pour leur documentation.




Le Lloyd Continental

Alfred Verspieren est le premier courtier indépendant français. En 1880, il crée à Roubaix une société de courtage à son nom. Il s’installe 8 rue Dammartin. Son cabinet d’assurances se développe rapidement, grâce à son image de sérieux et de compétence auprès des industriels de la métropole.

A. Verspieren 1901 ( Document coll. priv. )

Alfred Verspieren est également Directeur Général de la M.C.I : Mutuelle du Commerce et de l’Industrie qu’il a créée en 1904. C’est un consortium d’industriels désireux de se protéger contre des risques tels que grèves, émeutes, troubles qui ne sont pas couverts habituellement par les compagnies d’assurance

(Document coll. priv. )

En 1920, suite à des sinistres désastreux qui frappent les industriels de la laine et du coton, les compagnies deviennent méfiantes. Le fils d’Alfred, Pierre Verspieren-Dewavrin, crée la compagnie Lloyd Continental Français, spécialisée dans l’assurance des risques d’incendie de l’industrie textile.

(Document coll. priv. )

La tâche n’est pas aisée, surtout dans une région dévastée, ruinée, après la guerre de 1914-1918, mais Pierre est optimiste ; il a de l’audace, du courage et de la volonté. Peu à peu, l’activité se développe. En plus des contrats d’assurance incendie, le cabinet propose désormais des produits d’assurance auto, habitation, vol, maladie, dégât des eaux . . .

En 1929, la famille Verspieren crée la Société Auxiliaire de Crédit, qui a pour objet de financer les ventes à crédit de voitures, de matériel…

Les deux sociétés ( Verspieren et Lloyd ), étroitement unies poursuivent un développement rapide et parallèle.

(Document ANMT )

La famille Verspieren dirige l’entreprise depuis plusieurs générations. Dans les années 1960, on trouve à la tête de l’entreprise : Charles Verspieren-Dufour, Michel Verspieren-Coisne, Pierre Verspieren-Caulliez.

(Document coll. priv. )

Le cabinet, très fortement implanté dans la région Nord, atteint désormais une dimension nationale. Dans les années 1970, on compte 15 Directions régionales, 23 inspections, 750 agents et courtiers. Le personnel administratif est composé de 1200 personnes dont 700 collaborateurs motivés à Roubaix.

De nombreuses demandes de permis d’agrandissement des locaux de la rue Dammartin sont déposées en Mairie, par l’architecte L. Maillard à Tourcoing, pour faire face au cruel manque de place. Or ce sont, à chaque fois, des demandes de construction de locaux provisoires et démontables, en matériaux légers, car la Direction a un projet bien précis : construire un nouvel immeuble. . .

(Document Archives Municipales )

En 1971, la décision de construire un nouvel immeuble est récente, mais le projet ambitieux existe depuis bien longtemps, et fait suite à une longue période de préparation. Il faut d’abord acquérir et libérer une quinzaine de propriétés voisines, nécessaires à la construction du bâtiment, à la création des parkings et des espaces verts soit 23.000 m2 au total. Les travaux sont confiés au cabinet d’architectes E. Maes et L. Maillard à Lille qui programme la construction en 3 tranches de travaux.

(Document Archives Municipales )


Le projet est bien défini : construire un nouveau siège administratif agréable, fonctionnel et moderne. Ce sont des bureaux paysagés, sur des plateaux de 1700 m2 ; cela permet de prévoir d’éventuels changements d’implantation à l’avenir. Les conditions de travail sont très agréables, que ce soit pour l’éclairage, la climatisation, ou l’insonorisation. Les couleurs des bureaux sont chaudes et chatoyantes. La Direction met en place des horaires mobiles pour le personnel. Une cafétéria, pouvant servir 650 repas quotidiennement, est construite. C’est une nouvelle conception d’environnement, de mode de vie, et de communication.

 Pose de la 1° pierre ( Document Nord Éclair )

Jeudi 15 Novembre 1973, M le Maire Victor Provo pose la première pierre du futur bâtiment, entouré de ses adjoints : Mrs Léonce Clerambeaux, Pierre Prouvost et André Thiebaut. Ils sont accueillis par Pierre Verspieren PDG et Charles Verspieren vice PDG, qui est également président de la chambre de commerce de Lille-Roubaix-Tourcoing.

(Document ANMT )

En juin 1975, c’est l’inauguration du bâtiment, sous la présidence de Norbert Segard, ministre du commerce. Les deux frères, Charles et Pierre Verspieren, accueillent : MM. Provo, sénateur maire de Roubaix, Chadeau, préfet, Camata, préfet de police, Delesalle, président de la chambre de commerce, ainsi que des personnalités importantes de la région, des chefs d’entreprise, et des professionnels de l’assurance.

De gauche à droite : Charles Verspieren, Norbert Segard, Victor Provo, Pierre Verspieren
( Document ANMT )

Après une visite rapide des locaux, tous les invités se retrouvent au restaurant du 4° étage pour les discours d’usage : éloges et félicitations sur cette magnifique construction.

En 1978, l’entreprise Lloyd Continental, qui a désormais son adresse au 1 ter rue du maréchal De Lattre de Tassigny, décide de repeindre les boiseries du vieux bâtiment de la rue Dammartin, avec la même couleur verte, d’origine.

(Document ANMT )

Dans les années 80, l’entreprise se développe encore de façon importante. En 1995, pour ses 75 ans d’existence, le Lloyd Continental organise dans le hall de l’immeuble, une exposition de 400 objets sur l’histoire de l’entreprise.

(Document ANMT )

La compagnie d’assurance Swiss Life qui souhaite renforcer sa présence sur le marché français, rachète le Lloyd Continental en 1999, et devient le 3° assureur de France avec plus de 2 millions de clients en portefeuille.

Swiss Life (Document Google Maps )

Quelques années plus tard, en 2005, la famille Verspieren, avec 138 ans d’expérience, reprend ses activités de courtage en assurances. Pierre-Anthony Verspieren ( 5ème génération ) dirige désormais l’entreprise basée à Wasquehal. Les affaires sont florissantes et le groupe Verspieren est le troisième courtier français. La devise reste : Indépendance, Engagement, Passion et Créativité.

Remerciements aux Archives Municipales, et aux Archives Départementales du Monde du Travail ( ANMT )



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Roussel 144 rue de l’épeule

Émile Roussel, né à Herseaux en 1848, est référencé dans le rapport municipal de 1880 parmi les teinturiers chineurs et imprimeurs au n°144 rue de l’épeule à Roubaix. Il est également cité comme maître teinturier apprêteur lors du décès de sa première épouse Marie Louise Jolivet en 1879. Membre de l’Ensait, il contribue à la création de l’école de teinture et reçoit en 1882, la médaille d’or de la fondation Kuhlmann que lui remettra l’abbé Vassart, l’éminent professeur de teinture. Le 31 décembre 1885, il est fait officier d’académie. Le 23 décembre 1888, il est membre de la chambre de commerce de Roubaix, dont il sera longtemps le secrétaire. Il recevra la croix de la Légion d’Honneur en 1900, à l’occasion de l’Exposition Internationale de Paris.

Publicité Emile Roussel Coll Particulière

En 1898, l’entreprise s’est agrandie, elle figure désormais aux n°144 à 148, et elle y a gagné un associé, puisqu’elle apparaît de la manière suivante : E. Roussel et J. Declercq teinturiers. C’est sans doute une affaire de famille, puisque deux des sœurs d’Émile Roussel ont épousé des Declercq, lesquels sont originaires de Renaix. On est aussi en plein quartier de l’épeule, puisque Émile Roussel réside au 151 de la rue de l’épeule et que son associé J Declercq est au n°38 de la rue du Trichon. L’usine ne semble pas avoir connu les sévices de l’occupation comme sa voisine quelques numéros plus loin, la société de vêtements Selliez. Ayant fait fortune, honoré par ses pairs, Émile Roussel décède le 19 juillet 1922, en son domicile du 85 rue de Barbieux à Roubaix.

Vue de l’usine à la belle époque CP Méd Rx

Dès juin 1923, la société Émile Roussel et fils entreprend des travaux d’aménagement sous la direction de l’architecte René Dupire demeurant alors rue du Trichon, qui mène à bien la construction d’une salle des machines et d’une nouvelle chaudière. En octobre, on aménage des écuries, une droguerie, un atelier, toujours avec René Dupire. En février 1925, l’entreprise s’offre une nouvelle porte sur la rue de l’épeule. En avril 1927, elle s’adjoint une usine de préparation des tissus. Au mois de mai, elle fait construire à l’angle de la rue de l’épeule et de la rue Brézin, des bureaux, un logement pour le concierge et une annexe.

L’usine Roussel, ses derniers jours doc AmRx

Au décès d’Alphonse Scrépel en 1928, l’entreprise Scrépel devient Société anonyme des Établissements Scrépel, et Benoît Roussel, fils d’Émile Roussel en est l’administrateur, aux côtés de Charles Scrépel fils, Paul Delannoy et Léon Deschepper. Le regroupement des deux sociétés Roussel et Scrépel intervient en 1971, et l’entreprise est dénommée Société Nouvelle des établissements Emile Roussel et fils et Scrépel réunis. En mai 1982, la société Roussel Scrépel comportait deux unités, l’une au 148 rue de l’épeule avec 130 salariés et l’autre au 10 rue de la tuilerie avec 68 salariés. Le 5 mai 1982, la fermeture de l’usine du 148 est décidée ce qui entraîne le licenciement de 120 salariés. Un an plus tard, Yves Roussel, le PDG de la Société nouvelle Émile Roussel et fils et Scrépel réunis, propriétaire du 144-148 rue de l’épeule, autorise la société Gro à acquérir et démolir l’usine, le 22 mars 1983. La demande est déposée le 13 septembre 1983, et la démolition se déroule du 13 février 1984 au 4 juin 1984.

Le supermarché Fraismarché GRO doc AmRx

Le supermarché Fraismarché GRO est construit le 23 octobre 1984. Puis en 1990, l’enseigne Fraismarché GRO fusionne avec d’autres supérettes pour donner naissance à la marque MATCH. Après plus de vingt ans de présence, le 9 juillet 2012, la ville de Roubaix apprend la fermeture imminente de plusieurs magasins MATCH et notamment celui de l’épeule. Les raisons invoquées sont les suivantes : problèmes d’accès au parking, actes d’incivilités, braquages… Il faut sans doute y ajouter l’échec de la marque dans les négociations autour de ce qui deviendra l’espace Géant Casino.

Le supermarché le Triangle vue Google Maps

Supermarché d’envergure à vocation halal, le Triangle ouvre rue de l’Épeule à Roubaix le 22 juin 2013 dans les locaux de l’ancien supermarché Match. Le premier magasin de la marque a ouvert en 1999 à Saint-Étienne-du-Rouvray, en Haute-Normandie. Des contacts sont pris avec la municipalité, une collaboration est mise en place avec le Pôle emploi de Roubaix. Au total, quinze postes à la clé : du boucher, au boulanger en passant par des employés de libre service et des caissières. Depuis, le supermarché Triangle a connu les désagréments d’un braquage en décembre 2013 et s’est également fait épingler par les services d’hygiène.

Le carrossier Robert Barbe

Robert Barbe : trois générations successives d’artisans à Roubaix. Robert-Arthur Barbe est né, en 1883, à Menin. Il est charron ; il fabrique et répare des chariots, des charrettes, des voitures hippomobiles, et en particulier, le cerclage ( bandage en métal ) des roues en bois, pour éviter leur usure prématurée. Il est également forgeron. Il crée son atelier artisanal en 1911.

85 rue de Cartigny 1928 ( Doc Archives Municipales )

En 1928, il a son atelier au 154 rue de Constantine. Il demande un permis de construire pour édifier un bâtiment au 85 rue de Cartigny, à l’angle de la rue de Biskra. Il habite au 126 rue du Caire avec son épouse Julie Deboevere. Ils ont un fils Robert-Nestor, né en 1911.

( Document L. Barbe )

L’arrivée des véhicules automobiles modifie complètement son activité. Des roues en bois, il passe aux premières roues équipées de pneumatiques et se spécialise dans la carrosserie des voitures et surtout des camions. Dans les années 1930, Robert-Nestor devient adulte et développe la petite entreprise. Le principe est assez simple : les clients achètent la base du camion, c’est à dire le tracteur et le châssis. Le carrossier équipe la partie chargement, en fonction du choix du client. La transformation dépend bien sûr des métiers de chacun (transport, déménagement, livraison… ).

Les camions GBM au quai d’Anvers ( Document L. Barbe )

Robert est créatif. Il invente et propose le « plateau plat » à ouverture latérale. C’est un camion idéal pour les brasseurs car, à l époque, les brasseries livrent la bière en caisse, directement aux particuliers. L’ouverture latérale permet aux livreurs d’accéder directement au chargement en évitant ainsi des manipulations inutiles et fatigantes. Ce camion connaît un énorme succès. Les brasseries ( la GBM : Grande Brasserie Moderne, les Débitants Réunis, les Enfants de Gayant ) passent des commandes importantes. Robert-Nestor Barbe se marie, en 1937, avec Prudence Lowie, qui va s’occuper de la gestion administrative de l’entreprise. Leur fils Robert-Patrick naît à Roubaix en 1942.

85 et 91 rue de Cartigny ( Photo Google Maps et document Archives Municipales )

En 1946, Robert et son épouse habitent 65 rue Mazagran, et ce jusqu’en 1953, date à laquelle ils font l’acquisition d’une maison d’habitation au 91 rue de Cartigny, à côté de l’atelier. Robert achète également un local juste en face, de l’autre côté de la rue de Biskra.

( Doc Archives Municipales )

Robert-Patrick 8 ans, en 1950, devant le camion Poutrain chargé de ballots de lin (Document L. Barbe )

Au début des années 60, Robert-Patrick, après ses études aux Arts et Métiers à Lille, travaille à l’atelier et aide son père à développer l’entreprise. Les locaux deviennent, encore une fois, trop petits. En 1968, il fait l’acquisition d’un immense local, au 167 rue Daubenton, précédemment occupé par les Ets Pauchant : une scierie et fabrique de caisses d’emballages.

167 rue Daubenton ( Photo Google Maps )

C’est un bâtiment immense. De nombreuses machines sont installées, y compris d’énormes cabines de peinture, pour peindre les carrosseries. Pour les décorations publicitaires des camions, Robert confie les travaux aux Ets Dedryver, au 16 bis rue de l’Espierre, à Tourcoing. Vingt cinq personnes travaillent désormais dans l’entreprise : tôliers, menuisiers pour les planchers en bois, spécialistes en capitonnage, ouvriers pour les réparations, un gestionnaire de stock pour le magasin et une secrétaire au bureau.

Camion Mercedes ( Document L. Barbe et Nord Eclair )

Les commandes de grosses entreprises affluent. Parmi elles, citons :

– des entreprises de transport : Dubois, Brocvielle, Mussche

– des entreprises de VPC : La Redoute, Les 3 Suisses, Daxon, Damart

– des entreprises de déménagement : Voreux Lauwers, …

– des entreprises diverses : Verquin, Union biscuits, La Voix du Nord, et bien d’autres.

Robert est un bon commerçant ; il se lie d’amitié avec de nombreux clients, en particulier les responsables de transport des grosses sociétés. Il édite même des publicités communes comme celle ci-dessous.

Carrosserie du camion des transports Dumont ( Document Nord Eclair ) et Robert Barbe père et fils ( Document L. Barbe )

Au décès de son père, en 1987, Robert-Patrick prend la direction de l’entreprise. Dans les années 90, la profession change et évolue ; les fabricants comme Cargovan ou Durisotti proposent désormais d’installer des « kits mécano » : kits de carrosserie pour véhicules industriels, à poser en un temps record, afin de réduire les coûts, ce qui entraîne des réductions de personnel. En 2000, Robert a des problèmes de santé. Il cède son affaire à deux associés : Jean Bekaert et Philippe Woestelandt qui continuent l’activité et développent les aménagements intérieurs de véhicules utilitaires, avant de disparaître au milieu des années 2010.

Photo BT

Aujourd’hui, le bâtiment du 167 rue Daubenton a été transformé en plusieurs parties. On y trouve désormais un atelier de réparation de véhicules d’occasion; l’habitation a été divisée en plusieurs appartements et, derrière, il y a un projet de réhabilitation des énormes entrepôts, en vue de leur transformation en de nombreuses parcelles avec entrée au 24 rue Olivier de Serres.

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Remerciements aux Archives Municipales, et à Laurence Choteau Barbe pour son témoignage et sa documentation.

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Les vêtements Selliez, rue Heilmann

Avec la société des vêtements Georges Selliez, nous allons évoquer une des plus importantes entreprises de confection de France, dont l’une des usines se trouvait au n°26 de la rue Heilmann. Georges Selliez (1869-1934) fils d’un négociant originaire d’Haspres, est né à Roubaix. Le jeune employé de commerce ne tarde pas à se lancer dans l’aventure textile : en 1898, il crée la première manufacture de draps pour hommes à Roubaix, rue Heilmann. C’est sa propre femme, Elise Desmarchelier qui va former les premières mains féminines de cette nouvelle industrie. Puis Georges Selliez va étudier, à Leeds et Manchester, l’organisation et les méthodes des grands ateliers collectifs anglais et les introduit en France avec des outillages inconnus jusqu’alors. En 1908, le Ministre du Commerce et de l’Industrie Jean Cruppi lui confie une mission aux U.S.A. Il part y étudier les méthodes du taylorisme pour les adapter dans l’industrie de la confection. Le rapport qu’il rédige à ce sujet fait quelque bruit.

Georges Selliez Photo Monde illustré 23

En 1912, Georges Selliez confie aux architectes Vandekerchove et Loof de Roubaix la réalisation de ses ateliers de confection. Ces messieurs sont les concessionnaires des bétons armés Hennebique et ils vont donner à l’usine de la rue Heilmann l’allure qu’elle aura longtemps, faite de grandes vitres et de supports en béton. Elle occupe un important espace entre la rue Heilmann, la rue de l’épeule et la rue de Turenne.

L’usine Selliez, Photo Monde illustré 1923

Pendant la première guerre mondiale, l’usine est réquisitionnée par les allemands pour fabriquer des sacs pour les tranchées, ce qui provoque une émeute et la répression allemande sous forme de rançonnement en argent ou de déportation d’otages. La fabrication n’aura qu’un temps, la matière venant bientôt à manquer. L’usine est alors transformée en caserne. Puis à leur départ, les allemands procédent à un nettoyage par le vide, comme partout ailleurs.

Intérieur de l’usine Selliez Photo Monde illustré 1923

En mars 1919, Georges Selliez aidé par deux jeunes associés, Paul et Eugène Prouvost Crépy, qui furent de glorieux aviateurs pendant la grande guerre, remet l’usine en route avec un personnel d’élite et expérimente de nouvelles machines. Dans des salles baignées de lumière, on coud des boutons, on monte des paires de manches. Des machines à points invisibles, à faufiler, à rabattre remplacent le travail à la main.

Intérieur de l’usine Selliez Monde illustré 1923

En 1923, la Société Anonyme des Vêtements Georges Selliez à Roubaix produit 1500 complets par jour et, de leur côté, ses usines de Tourcoing, Carvin, Paris, Vienne, totalisent 7500 pièces par jour, réalisant ainsi la plus forte production sur le continent.

En tête Selliez Coll Méd Rx

Esprit ouvert, homme tourné vers l’avenir, Georges Selliez s’investit aussi dans l’enseignement : il sera officier de l’Instruction Publique en 1928, membre du Conseil Supérieur de l’École Nationale des Arts et Industries Textiles, membre du Conseil Général de la Ligue Française de l’Enseignement et par ailleurs conseiller municipal de Roubaix, Vice-Président du Parti Radical Socialiste. Il sera également président de la FAL de Roubaix. Il décède en 1934. Ses associés Prouvost Crépy prennent la suite et gardent la marque. La société Flipo Manutention est propriétaire des locaux en 1980 et en sera vraisemblablement le dernier occupant avant que cette usine soit démolie. Un article de presse évoque le nouveau parking Flipo en janvier 1999. L’espace ainsi libéré forme ainsi une place qui accueille aujourd’hui le marché et à laquelle on a donné le nom d’un épeulois célèbre, Victor Vandermeiren.

Roussel rue Watt

Fronton du 48 rue Watt vue Google Maps

Le fronton de l’entrée de l’usine du 48 rue Watt affiche fièrement 1887. C’est la deuxième implantation d’Émile Roussel, après le 144 de la rue de l’épeule. Mais il s’agit de la société Roussel Desrousseaux, du nom de la deuxième épouse d’Émile, Célina Desrousseaux, qu’il a épousé le 25 février 1884, à Roubaix. Émile Roussel a-t-il voulu anticiper la transmission de ses usines aux enfants de ses deux lits ?

En tête Roussel Desrousseaux doc AmRx

En 1929, l’entreprise figure au Ravet-Anceau comme suit : S.A.R.L Émile Roussel et fils (Rayon E Roussel Desrousseaux et fils) teinturier apprêteur. La famille (ou la société) est également propriétaire de deux courées donnant dans la rue de l’épeule, au bout de son parcours, dont l’une s’appelle la cour Desrousseaux. Le 30 mai 1950, la société Émile Roussel et fils demande la possibilité d’approprier en logements le n°51 de la rue Watt. À partir de 1970, le site de la rue Watt ne cesse de s’agrandir, est-ce une stratégie pour rapatrier les éléments du 144 rue de l’épeule et regrouper les deux sociétés ?

Le premier agrandissement vers la rue de l’épeule doc AmRx

Le 6 juillet 1970, la société Émile Roussel Desrousseaux obtient l’autorisation d’agrandissement de l’atelier de teinturerie, les travaux sont rondement menés, terminés le 20 novembre 1970, et déclarés conformes le 4 février 1971. Au préalable, il a fallu démolir les n°243 et 245 de la rue de l’épeule. C’est un premier agrandissement de l’entreprise vers la rue de l’épeule où elle dispose à présent d’un bâtiment en front de rue, voire d’un accès. Quelques jours plus tard, le 12 février 1971, une nouvelle demande d’agrandissement d’atelier entraîne la disparition des n° 249 et 251 de la rue de l’épeule. Le dossier est bouclé et les travaux sont terminés le 24 janvier 1972.

Deuxième agrandissement doc AmRx

Vingt ans plus tard, une demande d’extension va entraîner en Janvier 1991 la démolition totale des numéros 237 239 241 de la rue de l’épeule. En Février 1991 l’extension est demandée et les travaux commencent. À ce moment, l’entreprise Roussel Desrousseaux occupe 9405 m² entre la rue Watt, le boulevard Montesquieu et la rue de l’épeule.

L’emprise de l’implantation en 1990 doc AmRx

Mais la teinturerie Roussel-Desrousseaux, devenue filiale du groupe Chargeurs, est bientôt mise en vente, en mai 2003. Depuis septembre 2002, l’entreprise enregistrait en effet une baisse des commandes, et son principal fournisseur, Les Tissages de Linselles, a été mis en liquidation judiciaire. Dans une interview du 19 mai 2003 donnée au magasine Investir, Eduardo Malone, le président du groupe Chargeurs déclarait : « il faut payer ce qu’il faut pour enterrer les sociétés qui ne sont pas rentables ». L’entreprise est en cessation d’activité, d’après Bernard Brossard, le secrétaire du comité d’entreprise, le 4 juillet 2003. Même si les commandes des derniers clients seront bel et bien honorées, soixante quinze salariés, soit la totalité du personnel, sont menacés de licenciement. Suite à diverses manifestations (enterrement symbolique de l’entreprise avec brûlage du cercueil) le plan social est ouvert le 2 juillet 2003 avec comme revendication de la part des employés une indemnité pour préjudice moral. Située entre la rue Watt, la rue de l’épeule et le Boulevard Montesquieu, la teinturerie Roussel-Desrousseaux, cette ancienne entreprise textile familiale récemment intégrée au groupe Chargeurs, était spécialisée dans le secteur d’activité de l’ennoblissement textile, elle a fermé ses portes en 2003.

La mosquée Bilal photo site Mosquée Bilal

Depuis 1979, l’association musulmane de la mosquée Bilal offrait un lieu de culte pour les musulmans vivant dans le quartier de l’épeule et les autres quartiers avoisinants et aussi de donner la possibilité d’apprendre la langue arabe. Elle se situait rue de Wasquehal avec une salle de prières de 50 m² !

En 2005, grâce aux dons de ses fidèles, l’association a acquis un local d’une superficie 1500 m² du site Roussel rue de l’épeule. Les travaux de la mosquée Bilal ont débuté en début de l’année 2010. Elle est inaugurée en août 2012 avec son grand dôme et sa salle de prière. En septembre 2014, l’association a fait édifier un minaret qui surplombe la mosquée Bilal de ses dix huit mètres de haut.