Les accordéons Waeterloos

En 1898, Victor Waeterloos répare quelques instruments de musique et en particulier des accordéons diatoniques, pour subvenir à ses besoins. Son fils, François Waeterloos, né en 1893 à Lille, aide son père dès l’âge de 12 ans en commençant à réparer également les accordéons.

En 1927, François vient s’installer à Roubaix, au 173 bis rue de Lannoy. C’est une petite échoppe, bien située, qui lui permet de se faire connaître très rapidement. Le succès est immédiat et il se trouve très rapidement à l’étroit dans sa petite boutique.

L’occasion se présente deux années plus tard, en 1929, puisqu’il déménage juste en face au 186 rue de Lannoy où se situait auparavant l’atelier d’un tailleur : F. Ponteville.

Papier en tête ( Document P. Waeterloos )

Le local est beaucoup plus vaste. François installe son atelier au fond de la maison. et peut y loger à l’étage avec son épouse Hélène, et leur fils Francis.

François est un homme passionné. Il signe un accord d’exclusivité pour vendre les accordéons Scandalli ( marque prestigieuse italienne ) après avoir bénéficié d’une formation chez le fabricant, car seule l’industrie italienne possède la technologie nécessaire.

Accordéon Scandalli distribué par F. Waeterloos et carte postale publicitaire avec quelques fautes d’orthographe ! ( Documents collection privée )

L’accordéon est un instrument de musique complexe, composé de 5000 pièces différentes. Sa réparation nécessite donc du matériel important, des machines outils de précision.

L’accordéon n’a plus de secrets pour François qui les répare très facilement. Il décide alors de fabriquer lui-même ses propres pianos à bretelles ! Il crée la marque Stella. Il s’agit d’un accordéon chromatique, ce qui permet à l’instrument de proposer une gamme de sons plus étendue et améliore de façon très sensible, la plage musicale. Son épouse Hélène s’occupe de la gestion du magasin.

François et son accordéon Stella ( Document P. Waeterloos )

Leur fils, Francis ( 3° génération ) apporte une aide précieuse à l’atelier pour la fabrication, et au commerce pour la vente. Il devient passionné, tout comme son père et son grand père. Il décide de développer l’activité en proposant à la clientèle des partitions, des cahiers de musique, des méthodes de solfèges.

Francis Waeterloos à l’atelier ( photo de gauche ) et au magasin devant les accordéons Stella ( photo de droite ) Documents P. Waeterloos.
Francis Waeterloos, à gauche son père François, à droite le fidèle employé Jean Pavlus ( Document NE 1955 )

Le conservatoire de musique de la rue de Soubise lui passe des commandes très importantes et régulières de matériel et de partitions. Francis prend conscience de l’importance des contacts avec la clientèle ; il entreprend alors une démarche commerciale auprès des professeurs de musique, des fanfares, des harmonies, des écoles de musique, et des accordéonistes célèbres comme Charles Verstraete ou Jean Prez.

Document collection privée

En plus de la gamme « Stella », fortement appréciée par les musiciens professionnels et virtuoses, Francis crée une nouvelle marque qu’il appelle« Pierfi » en l’honneur de la naissance de son fils, Pierre. C’est un accordéon, plus léger, plus compact, et donc mieux adapté pour les jeunes amateurs.

( Document P. Waeterloos )

Francis profite de ce lancement pour présenter sa gamme complète, à la foire commerciale de Lille, en 1956.

Stand à la foire commerciale de Lille ( Document P. Waeterloos )

Francis part dans les Vosges pour se former au métier de luthier, car il souhaite développer la vente et la réparation de tous les instruments de musique. Pendant cette période, son père François gère le magasin, aidé par sa belle fille Marguerite Tanghe, qui s’occupe également de l’éducation de leurs deux fils, Pierre et François. Une fois son diplôme obtenu, Francis propose alors à sa clientèle des instruments à corde, des instruments à vent, en bref une gamme complète, sauf peut-être, les pianos.

Le magasin au début des années 1960 ( Document P. Waeterloos )
Francis présente ses instruments de musique à la salle Watremez en 1966 ( Document P. Waeterloos )

Dans les années 1960-1970, la guitare électrique se développe de façon importante. De nombreux groupes viennent s’approvisionner chez Waeterloos, en particulier les frères Cogoni : « les Sunlights ».

Les orgues, synthétiseurs, amplis, micros, font partie aussi de la nouvelle gamme de produits demandés par les groupes de rock.

Document collection privée

A la fin des années 1960, Francis a l’opportunité de louer le commerce voisin au 188 rue de Lannoy. Cela lui permet d’étendre sa vitrine et de développer la gamme de produits proposés. La place disponible de l’arrière boutique lui permet de stocker les instruments et de créer un bureau.

le magasin à la fin des années 1970 ( Document P. Waeterloos )

Les deux fils de Francis ne souhaitent pas continuer l’activité : Pierre devient professeur d’éducation physique, et François s’oriente vers la pharmacie. Francis continue donc seul. En 1992, il a 65 ans et souhaite prendre une retraite bien méritée. Ne trouvant pas de repreneur à son affaire, il se voit malheureusement contraint de fermer le magasin de musique Waeterloos, en fin d’année 1992.

( Document P. Waeterloos )

Remerciements à Pierre et François Waeterloos pour leurs témoignages, documents et photos.

Avant le Brondeloire vert

Cette fameuse tranchée verte commence au pont de la rue de Mouvaux, en face de la descente de la rue de l’Alma, autrefois occupée par la société anonyme de fabrication de tissus du même nom. Voici un relevé des rues situées entre le chemin de fer et la rue de l’épeule, à partir de la rue du grand chemin, ainsi que leur date de création : rue du Lieutenant Castelain (1894), qui rejoint la rue du Parc (rue particulière existant dès 1860 et entrée dans le réseau vicinal en 1905), de laquelle repart la rue du Vivier (id). Celle-ci croise la rue des Arts, à partir de laquelle se trouve la petite rue de la digue (1867) à hauteur d’un autre pont de chemin de fer qui rejoint la rue du Marquisat (existante en 1867, vicinalisée en 1892) d’où démarre la rue du Brondeloire (classée en 1887), dans laquelle aboutissent la rue Heilmann et la rue Brézin.

Le bout de la rue du Parc et les ateliers Verplancke Doc Google Maps

Un certain nombre d’entreprises étaient adossées au talus de la voie de chemin de fer. La percée s’est faite à l’endroit où se trouvaient autrefois les bureaux de la Compagnie des Mines d’Anzin au n°56, au ras du mur et des sheds de l’atelier de carrosserie Verplancke au n°32. On se retrouve là au bout de la rue du Parc, laquelle rejoignait autrefois la rue de la digue au pied du remblai de chemin de fer. Elle fut désaffectée sur plus de vingt mètres de son parcours, dont l’espace réapparaît aujourd’hui avec la percée verte.

Publicité Coussement doc NE

Le long de la rue du Vivier, côté pair, se trouvaient aux n°8 à 12 la société Coussement, et au n°18 la cité Lequain. Côté impair, on peut encore apercevoir les locaux d’entreprises aujourd’hui disparues, au n°5 les eaux gazeuses, au n°7 les magasins Chatiliez, au n°9 un dépôt de matières colorantes Kuhlmann. Sur le même trottoir, un poste EDF fait toujours l’angle avec la rue des Arts. Dans la rue des Arts se faisaient face en regardant vers le pont à gauche au n°215 les transports Valcke et à droite au n°244-246 la fromagerie Marcillat, produits laitiers.

Les épiceries en gros Kuhn Doc Coll Particulière

La rue du Vivier donne donc dans la rue du Marquisat, où étaient les locaux de l’épicerie en gros Kuhn au n°51, après le débouché de la rue du Brondeloire. Celle-ci reçoit dans son côté impair l’arrivée des rues de Turenne et Heilmann. De fait elle était donc constituée des façades arrières de l’importante usine Selliez laquelle donnait sur les trois rues. Sur son côté pair, dans les années soixante dix, elle comprenait au n°34 les Ets Flipo Richir qui occuperont également l’usine Selliez un peu plus tard, au n°36 l’usine de la société d’articles de sports Vroman, et aux n°38-40 les transports Delachaussée.

Les ets Flipo Manutention 34 rue du brondeloire Doc AmRx

Il faut ajouter à cette liste contemporaine des implantations plus anciennes comme celle du Peignage de l’Epeule qui occupèrent tout le côté pair de la rue du Brondeloire au début du vingtième siècle avant de disparaître dans un mémorable incendie.

Place de la Liberté (suite)

En même temps que l’agrandissement de la place, au tout début du 20ème siècle, va intervenir un événement qui va changer sa physionomie : la construction de la banque de France.

En 1871 une succursale de Roubaix-Tourcoing pour cet établissement s’installe rue de Tourcoing, au 115 bis. On crée quelques années plus tard une annexe à Tourcoing. Rien ne s’oppose plus alors au rapprochement de la banque vers le centre de la ville. La vente des locaux de l’ancienne filature Grimonprez va être l’occasion de ce déplacement.

On construit l’immeuble dans l’alignement des anciennes constructions bordant la place. C’est un bâtiment néo-classique comportant un corps central à deux étages flanqué de deux ailes basses.

Dans l’alignement de l’établissement bancaire est érigée une habitation à un étage destinée au directeur de l’établissement. Une double porte donne accès au côté de l’habitation, ainsi qu’au jardin, qui se prolonge jusqu’au boulevard Gambetta. Le premier directeur en est Georges Thoyer.

On construit également sur la grand-rue un petit bâtiment à la curieuse toiture, qui semble coupée en deux, appuyée sur le pignon de la maison voisine. Pour garantir les caves de l’humidité, la ville fait construire un aqueduc qui se déversera dans le Trichon. La porte principale qui donne accès au public ouvre sur la place. Elle est située dans l’axe du bâtiment central.

Un article du Journal de Roubaix datant de 1909 explique que le marché aux charbons ayant disparu, s’installe un « marché aux puces » où les gens peuvent acheter toutes sortes de choses : « …marchandises les plus invraisemblables et les plus dépareillées : c’est le capharnaüm roubaisien… d’où peuvent bien sortir tous ces débris, toutes ces misères ? ».

Une participante aux ateliers mémoire témoigne qu’on trouvait dans sa jeunesse sur ce marché jusqu’à des dentiers et des paires de lunettes usagées. Elle explique que son grand-père n’achetait jamais ailleurs ses lunettes !

Le tramway n’a pas tardé à investir la place. Très vite une ligne de la compagnie des Tramways de Roubaix-Tourcoing, venue du boulevard Gambetta et se branchant en « Y » sur la ligne de la grand rue longe le trottoir des numéros pairs avant de s’écarter pour prendre son virage vers le boulevard. Cette voie, qui rejoint la grand place par la rue Pierre Motte, permet de désengorger la ligne de Wattrelos entre les deux places, et rend inutile un doublement de la voie dans la grand rue, doublement dont l’évocation soulève un tollé chez les commerçants. La photo montre une motrice de la première série prête à négocier courbe et contre-courbe.

Lors de la mise en service des cars « Mongy » en 1909, les quelques voies du terminus Roubaisien sont placées le long du trottoir de la banque de France. Une courbe à 90 degrés permet aux rames d’accéder à la chaussée opposée du boulevard Gambetta en direction de Lille.

Ce terminus est également employé à l’époque par d’autres, telle la ligne S, à destination de Hem, de l’Électrique Lille – Roubaix-Tourcoing. Le tramway S emprunte le boulevard Gambetta avant de prendre la rue du Coq Français. On voit sur la photo qui suit une motrice à essieux de l’ELRT de type 300. Derrière, une remorque placée là à poste fixe sert de cantine pour le personnel. L’autre photo, très postérieure, montre deux motrices 500, à destination de Lille.

Photos Gillham et collection D.Labbe

A ce terminus est adjoint un vaste kiosque dont le soubassement bas est maçonné et les parois complètement vitrées. Le toit est plat, à la différence des kiosques de la compagnie des TRT qui présentent une toiture à quatre pentes douces. Un peu plus tard, on accole un urinoir au kiosque-abri des trams. L’odeur qui s’en dégage alimentera les conversations de roubaisiens pendant des années !

Photos collection D.Labbe

Dans les années 50, on organise un parking en arêtes de poisson pour sacrifier aux besoins accrus de places de stationnement. L’opération se borne à matérialiser les places par de la peinture.

Photo Nord Matin 1951

La démolition du kiosque surviendra en 1954, en vue de la modification du tracé de la ligne due au report du terminus du Mongy à la grand Place. Les journaux s’entendent pour saluer la disparition de l’urinoir.

A suivre.

Les documents proviennent de la médiathèque et des archives municipales.

Jean Cirez : A VOTRE SERVICE

Jean Cirez naît à Roubaix en 1930. Il passe son certificat d’études, puis enchaîne quelques petits boulots. En 1967, il habite au 69 rue Pellart. Il crée avec son ami André Haelvoet, une petite entreprise de dépannage tous corps d’état ( plomberie, chauffage, électricité, rénovation toitures ) et installe son bureau au 75 rue Saint Louis.

Publicité 1968 ( Document JP Cirez )

Les deux hommes se complètent parfaitement : Jean est technicien et homme de terrain, André est plutôt administratif, il s’occupe des devis, des factures, et de la comptabilité. Pour développer l’activité de dépannage, Jean Cirez fait appel à son frère Claude, menuisier, et à son beau frère Jacques, électricien. Jean et André sont très sensibles au service apporté à la clientèle. Ils déposent donc la marque « A VOTRE SERVICE » pour la petite entreprise.

La petite entreprise A VOTRE SERVICE au 75 rue Saint Louis en 1968 ( Document JP Cirez

Les résultats sont satisfaisants et encourageants, dès le démarrage, si bien qu’en 1971, ils créent une SARL et s’installent dans un local de 312 m2 au 149 rue du Collège, qui était auparavant le siège de la « Société Anonyme de tissus nouveautés ». Ils transforment complètement la façade la même année, en créant une baie vitrée et une porte de garage. Jean habite à l’étage, avec son épouse Gisèle.

( Documents collection privée )

Leur expérience et leur qualité de travail sont très vite reconnues par la clientèle, mais également par les fournisseurs. En 1974, l’entreprise Airelec, fabricant de chauffage électrique, contacte Jean Cirez et André Haelvoet, leur propose d’assurer le Service après vente et la distribution de pièces détachées, en exclusivité, sur six départements. L’accord est conclu. Cette nouvelle activité apporte un complément à celle du bâtiment.

D’autres fabricants vont ensuite accorder également leur confiance aux deux hommes, comme les marques Moulinex, Rowenta, SEB, Krups, Tornado, Electrolux avec le label de qualité  »Pièces certifiées constructeurs ». Dès ce moment, la société devient le centre d’entretien de plus de 30 marques ; cela représente 250.000 pièces détachées, et plus de 15.000 références. Jean Haelvoet décède malheureusement cette même année. Jean Cirez décide de continuer seul l’activité.

A l’extrême droite Jean Cirez et son épouse Gisèle, à l’extrême gauche l’un de ses deux fils, Jean Pierre ( Document JP Cirez )

L’entreprise se développe fortement. 11 véhicules de dépannage composent désormais la flotte de l’entreprise, laquelle compte 14 dépanneurs qui sillonnent la métropole.

Une partie de la flotte, devant le siège au 149 rue du Collège ( Document JP Cirez )
Eric, un des techniciens devant le véhicule plateau Peugeot 504 ( Document collection privée )

Jean reprend le 149 ter de la même rue, en 1980. C’est une simple porte cochère, mais un long couloir permet d’arriver dans un local où il crée son magasin destiné à recevoir la clientèle. Cela lui permet de vendre des pièces détachées toutes marques,  »au comptoir ».

Le comptoir ( Document JP Cirez )
La façade ( Document JP Cirez )
La façade après les travaux ( Document JP Cirez )

En 1984, l’entreprise de Jean Cirez fête ses 18 années d’existence et de succès. C’est l’occasion de célébrer cette réussite, par un verre de l’amitié, avec des membres de la municipalité, les 19 salariés, les principaux clients et fournisseurs.

( Document NE 1984 )

Au début des années 1990, Jean Cirez reprend le 149 bis qui était un atelier de bijouterie. Il peut désormais étendre son activité au 149, 149 bis et 149 ter, ce qui représente plus de 1000 m2 de surface et peut alors transformer complètement la large façade de plus de 18 mètres. Tous les travaux d’aménagement sont, bien sûr, réalisés par l’ensemble du personnel ; quand on s’appelle « A Votre Service » on montre l’exemple : le service bien compris commence par soi-même.

Le nouveau comptoir ( Document JP Cirez )

Depuis le début des années 1990, l’activité du SAV dépasse largement celle du bâtiment. L’entreprise « A VOTRE SERVICE » devient alors, un des plus importants centres agréé de France, en matière de Service après vente. De très grosses entreprises comme Darty, Boulanger, Auchan, La Redoute, Carrefour doivent faire appel à l’entreprise Cirez pour la garantie des appareils électro-ménager des constructeurs.

( Document JP Cirez )

En 1993, Jean Cirez décide de prendre une retraite bien méritée. A cette occasion son ami, André Diligent, lui remet la médaille de la ville. Jean transmet l’entreprise à ses deux fils, Jean-Pierre et Pascal, qui vont continuer l’activité. Jean garde cependant un œil bienveillant sur l’activité de la société.

( Document VDN )

Jean Cirez décède malheureusement en cette fin d’année 1993, l’activité continue de façon satisfaisante. Au début des années 2000, les premières difficultés apparaissent : la réduction des marges bénéficiaires, les tensions sociales au sein de l’entreprise, les super marchés de bricolage sont une concurrence directe pour l’activité bâtiment, et en ce qui concerne le SAV, les particuliers s’approvisionnent sur Internet. En 2008, l’entreprise cesse son activité, et ferme ses portes, après 44 ans d’activité. De très nombreux clients de toute la région, gardent encore un très bon souvenir de l’entreprise « A VOTRE SERVICE »

( Document JP Cirez )

Remerciements aux Archives Municipales, et à Jean Pierre Cirez, pour son témoignage et sa documentation.

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Devianne ( suite )

Jean et Michel Devianne sont toujours à l’affût de nouveautés pour le développement de l’entreprise : création de la « jeannerie », avec la mode des jean’s, le lancement d’une gamme complète de blousons en cuir, un service de retouche immédiat, une fermeture tardive le mercredi soir, une ouverture exceptionnelle certains dimanches, l’organisation de l’anniversaire du magasin avec une voiture à gagner…

Michel Devianne choisit ses peaux avec le plus grand soin. Il apprécie en priorité la qualité et la souplesse des cuirs
Publicités ( Documents Nord Éclair )

Jean et Michel Devianne, sont des commerçants et des hommes d’affaires, certes, mais ont le cœur sur la main, et sont engagés pour leur ville avec différentes missions civiles et caritatives. Jean crée l’Accueil Fraternel Roubaisien au 35 rue Pellart : maison qui reçoit la nuit, des sans abris, et des personnes en situation précaire.

Michel s’occupe de l’association Amitié Partage, qui aide des hommes et des femmes en difficultés, à se remettre debout. Il sera d’ailleurs Président d’Amitié Partage pendant quelques années. Michel est également l’initiateur, avec Guy Talpaert, de l’hôpital qui porte son nom. En récompense de toutes ces actions, Michel a reçu la médaille d’or de la ville de Roubaix.

Jean Devianne est juge, puis président du tribunal de commerce de Roubaix. Il est également président de l’UCC Union des Commerçants du Centre. Il organise toutes les campagnes publicitaires des commerçants, les fêtes en centre ville qui ont une renommée régionale.

Jean Devianne, juge au Tribunal de Commerce (document Michel Devianne )

En 1972, Michel Devianne ( huitième génération ! ) devient président du conseil d’administration de la société. Il rachète la maison voisine, au 72 Grande rue. Ce petit commerce inoccupé était auparavant l’agence immobilière NIC, gérée par R Declercq dans les années 1960-1970, et autrefois le magasin de fourrures de Mme Matton dans les années 1950.

Michel fait alors transformer toute la façade du magasin, agrandir la porte d’entrée et créer une nouvelle vitrine, et une porte d’entrée supplémentaire pour la  »jeannerie ». Il devient ainsi le voisin immédiat de Bossu Cuvelier au 74. Il continue de faire confiance à l’architecte Emile de Plasse.

Michel est membre de la chambre de commerce, à l’époque de la fusion avec celle de Lille.

Nouvelle façade ( Documents Archives Municipales )

En 1976, le premier magasin VETIR ouvre à Englos, en face d’Auchan ; il est rapidement rebaptisé « Devianne ». C’est un changement de stratégie pour l’entreprise : ouvrir un magasin en périphérie, dans une zone commerciale, et donc délaisser quelque peu les centres-villes. C’est la première grande surface, vendant des vêtements, hors des villes. En 1983, la société Devianne fête son 101° anniversaire.

( Document Nord Eclair )

Michel Devianne rachète les N° 9, 11 et 13 du Boulevard Leclerc en vue d’agrandir le parking. L’accès sera ainsi plus aisé sur le Boulevard que sur la Grande Rue.

( Documents Archives Municipales )

En 1988, le projet d’extension de 208 m2, à l’arrière du magasin, permet de développer la surface de vente de manière très significative. Le nouveau bâtiment est construit sur une partie du parking ouvrant sur le Boulevard Leclerc. La démolition d’un petit garage de 35m2 est nécessaire.

( Document Archives Municipales )
( Documents Archives Municipales )

La création de la collection femme amène, en 1989, un confort d’achat pour le consommateur, car il peut désormais trouver sous un même toit, les vêtements pour Monsieur et Madame. « Devianne pour Elle » devient le nouveau slogan publicitaire car la mode se conjugue aussi au féminin.

Document collection privée

En 1998, la Municipalité envisage un projet d’urbanisme très important et instruit une étude de faisabilité :

– le rachat du terrain de l’ancienne entreprise Bossu Cuvelier, rasée en 1994, permettrait de prolonger la rue du Collège, afin d’arriver sur le Boulevard du Général Leclerc.

– la reprise du magasin Devianne au 70 72 de la Grande rue, deviendrait nécessaire, car il se situe à proximité immédiate.

– la station Midas de la place de la Liberté, serait déplacée sur un autre emplacement.

– la création d’un immeuble pour l’entreprise Devianne pourrait alors voir le jour, sur un terrain de 3695 m2, dont 1381 m2 de commerces au rez de chaussée, et de 1457 m2 de bureaux pour les 2 étages.

Le terrain en question, serait desservi à la fois par le 70 72 Grande rue, par la place de la Liberté à la limite du N° 5, et par le boulevard Leclerc, à la limite du N° 17.

Le projet est abandonné par la municipalité.

Documents archives Municipales

Le magasin de Roubaix ferme à l’aube des années 2000 ; le magasin de Tourcoing ferme quelques années plus tard. Désormais, l’Entreprise Devianne va confirmer son intention de privilégier les commerces en zones commerciales, plutôt qu’en centre-ville.

En 2005, Michel Devianne a 69 ans. Il souhaite prendre une retraite bien méritée. Ses enfants, ne désirent pas reprendre sa succession, ni continuer dans le domaine du textile, qu’ils estiment fragile. La société Devianne, forte de ses 37 points de vente, est alors cédée à Joël Toulemonde, qui était auparavant le Directeur Général de l’entreprise.

Celui-ci développe l’entreprise en reprenant de nombreux points de vente : 7 magasins Magvet en 2005, 3 magasins Capmod en 2006 et 11 magasins Stanford en 2010. Le groupe Devianne s’appelle désormais « Verywear ». Son siège se trouve à Wasquehal, dans la zone de la Pilaterie, et plus de 40 magasins sont implantés aujourd’hui sur la moitié Nord de la France.

Photo BT

Le magasin Devianne de la Grande Rue, est loué, en début d’année 2011, à Kilic Mehtap. Il ouvre une solderie à l’enseigne CKDO, mais le point de vente ferme quelques mois plus tard. Depuis, le bâtiment est inoccupé et se dégrade irrémédiablement.

Document collection privée

Depuis 1754, Devianne, c’est une histoire taillée sur mesure. Le petit artisan a fait place au tailleur, puis au maître tailleur. Le petit commerce, a laissé sa place au grand magasin en centre ville, dans un esprit succursaliste, puis au super-marché du prêt à porter en zone commerciale. Les huit générations Devianne ont toujours été capables de s’adapter à la pointe du progrès, toujours en avance sur leur temps, et d’anticiper l’évolution du commerce des « textiliens ».

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Remerciements aux Archives Municipales, et à Michel Devianne, pour son témoignage et sa documentation

Un morceau de rue disparaît

Mai 1999, l’annonce paraît dans les journaux, on va amputer un morceau de Grand Rue, celui qui fermait le rectangle de la place de la liberté à partir de la rue Jean Monnet (ex rue Pauvrée). De l’autre côté du trotttoir c’était autrefois le magasin Nord et Loire qui a disparu (entre autres) pour laisser place à l’entrée de l’ensemble Géant Casino. On va prépare maintenant s’attaquer à la suite de l’alignement des magasins existants pour l’arrivée d’un nouveau cinéma, à ce moment prévu le complexe australien Village Road Show.

Quels sont les immeubles qui vont être abattus ? Il s’agit des n° 43 au 51, des commerces plus que centenaires. Ainsi le n°43 fut-il longtemps un café tenu par M. Vanongeval puis après la seconde guerre, sous l’enseigne « Au Forgeron » par Jules Prez, professeur de musique. C’était aussi le siège des transports en commun Lebas et Dumont et du Trait d’Union Messagers au début des années soixante. Les chaussures Sam viennent s’y installer en 1968 et s’y trouvent encore au moment de la démolition.

Le magasin de chaussures Sam au n°43 Coll particulière

Le n°45 était la célèbre chemiserie de la famille Hamard, à l’enseigne des « Cent mille cravates ». Depuis les années soixante dix, le magasin était occupé par les Tricots Nord Maille.

Les cent mille cravates au n°45 Coll Particulière

Le n°47 a toujours été occupé par un bijoutier, M. Masquelier auquel succéde M. Meurisse à la fin des années soixante. Le n°49 fut longtemps l’échoppe d’un tailleur M Verhelle, puis M. Leroy-Verhelle, avant de laisser la place à la maroquinerie « Au cuir de France », au début des années soixante dix.

Vue aérienne des premiers numéros Photo NE

Le 49bis, c’était la célèbre bijouterie de M Fourgous, « au Coeur d’or », auquel succède M. Daraut. Puis le magasin Lano, confections hommes, s’y installe, tout droit venu de la rue de Lannoy au moment de sa démolition en 1964. Le photographe Bourgeois prendra la suite pendant les années quatre-vingts, venant de la rue Pauvrée. Il se réinstallera par la suite dans la Grand Rue, un peu plus haut, au n°33.

La bijouterie Fourgous, au cœur d’or Coll Particulière

Depuis les années vingt, on pouvait trouver au 49ter les Galeries Ste Anne, mercerie, soieries, tricots. En 1979 l’Office du tourisme y fait un passage avant de s’installer dans l’ancienne entrée du cinéma Casino place de la liberté. Dans les derniers temps, on y trouve Abrinor, une agence immobilière.

Les Galeries Saint Anne au n°49 Coll Particulière

Le n°51 était occupé par les tissus Lesur, puis Massard. Le fabricant de matelas et de literie Cheval vient s’adjoindre aux négociants, en même temps que les jardins populaires de Roubaix.

Vue des derniers bâtiments à démolir Coll Particulière

Le n°53 échappera aux démolitions, c’est un café tenu par Georges Desmytter, qui porte au moment de la démolition l’enseigne des Olympiades.

Les olympiades, le café survivant Coll Particulière

L’ensemble de ces bâtiments disparaît en 1999. C’est en 2004 que s’ouvre le Duplexe, des œuvres de Michel Vermoesen et Daniel Najberg, célébrant le retour du cinéma dans une ville qui en était privée depuis 1986.

Le Duplexe Vue Google Maps

Un berceau chez Ducroquet

Nous possédons un berceau de famille un peu particulier puisqu’il s’agit d’un « chariot alsacien » fabriqué en 1956 à Virieux le Petit (département de l’Ain) par un artisan vannier itinérant. Tous les nouveaux nés de la famille ont dormi dedans et le chariot a été transmis de foyer en foyer au gré des naissances, neuf en tout à ce jour. Pour l’arrivée de notre fille, nous le récupérons fin 1995. Il a donc près de 40 ans et il a déjà beaucoup servi. Aussi va-t-il nécessiter la réparation des arceaux de la capote et, surtout, le remplacement de la parure en tissu.

Le berceau à reprendre Coll particulière

Pas moins de 14 mètres de broderie anglaise sont nécessaires et nous nous rendons chez Ducroquet , mercerie réputée de la Ville, au 95-97 Grand Rue à Roubaix. Surpris et ne sachant pas ce qu’est un « chariot alsacien », Monsieur Ducroquet nous demande quel usage sera fait d’un tel métrage, compte tenu, notamment de son coût. Après nos explications, il enregistre notre commande et nous demande à voir le travail fini, ce que nous avons fait volontiers en lui apportant la photo qui illustre cet article. Ajoutons pour finir que la facturation fut bienveillante !

Le magasin Ducroquet Grand Rue Vue Google Maps

Poste à l’épeule

Nous avons relaté l’existence d’une poste annexe dans le quartier de l’épeule. En l’espace d’une dizaine d’années au début du vingtième siècle, il y eut à Roubaix des petits bureaux de postes de quartier, des recettes auxiliaires, destinées à couvrir les besoins des quartiers. Il y en eut une dans le quartier de l’épeule, au n°21 rue Newcomen qui disparut après la première guerre.

La poste annexe rue Newcomen Coll Particulière

En 1930, le service des Postes Télégraphe et Téléphone est assuré, à Roubaix, par un bureau principal des postes et télégraphes, boulevard Gambetta. C’est là que les épeulois se rendent pour les opérations postales ordinaires et extraordinaires. Un troisième bureau de postes est en construction rue de l’Alma qui sera inauguré en 1933, un peu plus près de leur quartier. La mémoire des anciens épeulois n’a pas conservé trace de bureau de postes dans le quartier. Il faudra attendre plus de soixante ans avant qu’on reparle de la création d’un bureau annexe après la fin de l’établissement Hourez en 1990. Le bureau de poste annexe de l’épeule a été construit à partir du 10 octobre 1994, et la réception des travaux a eu lieu le 13 janvier 1995. Il se trouvait au n°179 de la rue, soit au beau milieu des locaux des anciens établissements Hourez. Il ne fera cependant pas long feu, un incendie le détruira complétement la même année.

Le plan de la poste du n°179 doc AmRx

Il est décidé de réinstaller la poste annexe provisoirement au 61 rue de l’épeule où se trouve déjà des locaux loués par la ville en vue de la création d’une maison des services (mairie de quartier, CCAS). Ce provisoire sera durable : pendant 22 ans, les services postaux et la mairie de quartier partageront ces locaux étroits et inappropriés.

Les locaux qui accueillirent la poste et la maison des services rue des Arts Vue Googlemaps

Une première tentative de reconstruction se présentera avec un projet de 2003 qui proposait l’intégration de la poste dans une une galerie perpendiculaire au supermarché Match. Mais cela ne se fera pas.

Projet de la galerie avec bureau de poste doc AmRx
Le projet vue de dessus doc AmRx

Il faudra attendre l’ouverture de la maison des services des quartiers ouest en avril 2015. Elle ouvre ses portes à l’angle des rues de l’Épeule et Watt. Elle regroupe la mairie des quartiers et le CCAS et attend encore les derniers logements LMH et la Poste. Les travaux étaient commencés depuis plus de trois ans. La mairie des quartiers-ouest a déménagé mi avril au 187 de la rue. Le bâtiment tout neuf se situe à l’angle de la rue Watt, en face de la pharmacie Sainte-Claire. Le CCAS a lui aussi emménagé dans ces nouveaux locaux. Cette mutualisation permet d’avoir un double accueil, plus pratique pour les usagers. D’autres permanences sont toujours proposées dans ces locaux. Le service intercommunal d’aide aux victimes (SIAVIC), le conciliateur de justice et le CAL-PACT y tiennent leurs permanences hebdomadaires. Il reste de la place pour accueillir d’autres associations ou d’autres permanences. « On est dans des locaux plus spacieux, plus agréables et plus lumineux », explique Didier Robin, directeur de la Mairie de Quartier.

La poste de l’épeule aujourd’hui vue Googlemaps

Il faudra encore deux ans pour que la Poste rejoigne l’ensemble. Ouvert depuis le 28 février 2017, au n°173 rue de l’épeule, le nouveau bureau de La Poste a été inauguré en mars. Plus grand, plus lumineux que l’ancien situé rue des Arts, il accueille aujourd’hui près de 120 clients par jour. Et si le projet a tardé à sortir, les clients en semblent aujourd’hui totalement satisfaits.

 

 

L’opération Bell

Vue aérienne 1962 du quartier de l’épeule doc IGN

Depuis 1876, date de son édification, le Couvent des Clarisses a vu maintes fois son environnement évoluer. Le vieux sentier des Ogiers qui passait à proximité est devenu la rue de Wasquehal et la rue des Ogiers à son débouché dans la rue de l’épeule. L’endroit s’est progressivement garni de longues rangées d’habitations ouvrières alors que l’industrie remplissait l’espace entre la voie de chemin de fer et la rue de l’épeule. A titre d’exemple, dans la rue de Wasquehal on trouvait autrefois la Fonderie de l’Epeule, la Société anonyme de finissage anglais, la Société roubaisienne de vêtements imperméables. Un certain nombre de courées y furent édifiées : en 1953, nous trouvons au n° 21 la cour du Brondeloire et la cour Delannoy, au n° 10 la cité Delporte, au n° 30 l’impasse de la Fonderie, au n° 36 la cour Baudaert-Dupriez et au n° 108 la cour Leman. En 1883, le quartier des rues de Wasquehal, des Ogiers et Watt est décrit comme l’un des plus humides et des plus boueux de la Ville, avant la construction d’un aqueduc dont la réception définitive aura lieu le 30 avril 1885. Sa construction fit disparaître les fossés et permit d’élargir la chaussée. Créée par une délibération du Conseil Municipal du 24 février 1893, la rue Bell fut approuvée par la Préfecture le 6 Mars de la même année. Située à la limite des territoires de Croix et de Roubaix, elle est dans l’immédiat voisinage de la société du Peignage de l’épeule. La rue Bell se verra complétée par une nouvelle série de constructions au cours des années 1920.

Premières démolitions angle épeule Ogiers Photo NE

Une nouvelle mutation du quartier se prépare en 1970, il s’agit d’une importante opération de résorption de l’habitat qui concerne les ilots Bell (rue de Wasquehal), Frère (cour située rue de Mouvaux), Aigle d’Or (cour située rue de la fosse aux chênes), Faidherbe II (cours situées rue Cugnot, rue des Vélocipèdes, rue de la limite), la Paix (cours situées rue du fort, rue de la longue chemise), et Petit Paradis (cour située Grand Rue, rue Lacroix, rue Fourcroy). Les locaux utilisés à des fins d’habitation dans ces zones sont déclarés impropres pour des raisons d’hygiène, de sécurité de salubrité. L’opération de résorption va concerner un périmètre en forme de rectangle constitué par la rue de la limite, la rue de Wasquehal, la rue des ogiers, la rue de l’épeule.

Quel est l’état des lieux du quartier en 1972 ? La rue Bell, créée en 1893, longue de 190 mètres sur 10-12 de large, se déroule du n°3 au 61 et du n°22 au 72. On y trouve un serrurier M. Créteur au 3, un coiffeur dames Mme Duhem au 25, après la rue Morse. Il y a des maisons inoccupées aux n° 9, 13, 39. Du côté pair, le Patronage St Sépulcre est au 36, et la maison du 72 est inoccupée. Établie de 1871 à 1888, la rue Cugnot fait 160 mètres de long sur 10 de large et présente une soixantaine de numéros pairs et impairs. Un pharmacien, M.Goddefroy occupe les n°1 à 5, la crémerie Descamps le n°11, les Taxis Vanhoorde le n°33. Côté pair, la technique électrique est aun°6, et on dénombre deux cours, Delmotte n°16, Cour Fontaine n°24. Les n°10,14,22 sont inoccupés. La petite rue Foucault date de 1891, fait 110 mètres de long sur 12 de large et s’étend du n°1 au n°41 et n°2 à 38. La rue des Ogiers est plus ancienne, établie en 1871, elle ne fait que 95 mètres de long sur 12 de large. Malgré son parcours assez court, on y trouve un boulanger au 7, deux coiffeurs au 3 et au 14. La rue des vélocipèdes fait 115 mètres de long sur 8 de large et comprend peu de numéros : du n°1 au 39 et du n°2 au 46. Une entreprise de couverture Debarge est au 17, puis une succession de courées, Cour Malfait 21bis, cour Faidherbe 25, Cour Huvelle 6, Cour Vandenbroeck 40bis. Enfin la rue de Wasquehal réalisée en 1871, fait 430 mètres de long sur 10 à 12 de large et s’étend du n°2 au 118. On y trouve les Clarisses au n°2, la cité Delporte au 10, l’impasse de la fonderie (16/18), l’impasse fleurie 32, cour Baudaert Dupriez 36, cour Leman 108, et beaucoup d’inoccupés, environ 1/3 de la rue. Il s’agit donc d’une partie de quartier relativement ancienne, près d’un siècle d’existence, où s’est développé un habitat serré fait de courées et de barres, dont on va démolir l’intégralité des bâtiments ou presque.

Le projet Lecroart Photo NE

Le projet est de supprimer 58 habitations rue Bell et de construire 117 logements PLR et pour l’ilot Faidherbe II, démolir 80 habitations et construire 92 HLMO. L’architecte chargé du dossier est Omer Lecroart. La déclaration d’utilité publique a été décidée en juillet 1970 et les mesures d’expropriation démarrent en septembre 1972 pour la partie Faidherbe II, concernant notamment la cour Vanderdonck rue des Vélocipèdes et la ruelle Cugnot, comme nous l’apprend l’encart dans le journal daté de février 1973.

La visite de M. Vivien Photo NE

En 1972, c’est le début de l’opération démolition : rue Bell 2 à 72 (tout le côté pair) et rue de Wasquehal 42-44. Pendant l’été 1972, le quartier reçoit une visite ministérielle et sa première coulée de béton. Robert-André Vivien (1923-1995) homme politique français, député de Seine puis du Val-de-Marne, est alors secrétaire d’État au Logement et il participe activement à la solution du problème des bidonvilles et à la création de l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat (ANAH). Il est en visite aux Ogiers.

Le premier bâtiment des Ogiers et la partie Vélocipédes dégagées Photo AmRx

Après cette visite, la première coulée de béton se déroule rue des Ogiers en présence du Préfet, en juillet. Le premier bâtiment réalisé sera celui des Ogiers. Les mesures d’expropriation prendront quelque temps, ce qui explique la chronologie de réalisation des nouvelles constructions.

Plan des immeubles Vélocipèdes Doc AmRx

En Septembre 1974, la partie Vélocipèdes est construite, et la rue Cugnot est épargnée par les démolitions. Coût trop élevé de l’opération ? Volonté de garder une rue déjà viabilisée ? Il manque encore les grands immeubles au fond qui seront réalisés en 1975.

Le quartier de nos jours vue google maps

 

 

 

 

Devianne

En 1754, Pierre François Devianne est tailleur d’habits à Blandain, en Belgique, près de Tournai (première génération de tailleurs). En 1882, Jean Louis Devianne (cinquième génération) est maître-tailleur, à Néchin, près de Leers, sur un chemin mitoyen à deux pas de la frontière, ce qui explique le nom figurant sur son enseigne : « Aux Deux Nations ».

Jean Louis Devianne ( document Sté Devianne )
Le commerce de Jean Louis Devianne est également un estaminet (document Michel Devianne )

Grâce à son expérience et à son professionnalisme, Jean Louis développe très rapidement son activité. Son fils, Albert, naît en 1881, à Templeuve. Il devient artisan tailleur à son tour, et reprend la boutique de M Vangeluwe, tailleur en 1911, à Roubaix, au 14 bis rue de Tourcoing, à l’enseigne « A la Ville de Courtrai ». Albert Devianne est tailleur pour hommes, mais également pour femmes, c’est à dire qu’il crée des « vêtements sur mesure ». Il vend aussi des vêtements confectionnés pour hommes et enfants ; c’est le début du « prêt à porter ».

Le magasin 14 bis rue de Tourcoing ( document collection privée et Michel Devianne )
La plaque de la façade du magasin de la rue de Tourcoing (document Michel Devianne )

Au début des années 1920, Albert ouvre un nouveau magasin de confection pour hommes, à Tourcoing, au 41 rue de Tournai, à l’enseigne « Au Printemps ». Le succès étant également au rendez vous, au début des années 1930, il ouvre un deuxième magasin à Tourcoing, au 50 rue Carnot. Albert habite avec son épouse Jeanne Devianne, née Mormentyn, à Roubaix, à l’étage du magasin de la rue de Tourcoing, avec leurs 5 enfants Marie-Thérèse, Jean, Pierre, Marguerite et Monique, tous nés au-dessus du magasin. En 1927, il reprend un atelier mécanique de confections au 3 bis rue Saint Joseph. Il y emploie 20 tailleurs sur place, mais également des tailleurs qui travaillent à leur domicile.

Le magasin 2 rue Pierre Motte ( document Michel Devianne )

A la fin des années 1930, il ferme le magasin de la rue de Tournai à Tourcoing, pour déménager au 50 rue Carnot à Tourcoing. Il ouvrir un deuxième magasin à Roubaix, au 2 rue Pierre Motte, à l’enseigne « A Jeanne d’Arc ». Albert possède dès lors trois magasins au service de la clientèle. Il choisit alors son nom comme enseigne : « Les Vêtements Devianne », et commence à communiquer par la publicité. Il installe également, place de la fosse aux chênes, un magasin vendant uniquement des vêtements de travail, de la marque Adolphe Lafont.

( Documents collection privée )

Dans les années 1940 et 1950, les magasins continuent de se développer, en vendant à la fois du  »sur mesures » et du  »tout fait ».

Publicité 1945 ( Document collection privée )

Jean Devianne, le fils d’Albert, après de brillantes études à l’EDHEC à Lille, reprend à son père, la tenue et la gestion des trois magasins, et en particulier celui de la rue de Tourcoing. Il devient maître tailleur, diplômé. Après cinq années de captivité, en 1945, il reprend la direction des trois points de vente, vides de tout stock. C’est une période difficile. Il habite au 151 bis rue du Collège, à Roubaix, avec Madeleine, son épouse née Callens. Ils ont 6 enfants : Michel, Philippe, Françoise, Raphaël, Bernadette et Jean-Luc.

Jean Devianne est ambitieux, bien décidé à prendre la succession de son père, et à réussir. Il souhaite ouvrir un magasin en centre ville. Il fait l’acquisition d’un hôtel particulier, au 70 de la Grande Rue, en 1954. C’est une magnifique demeure, occupée par Mme Van Nieuwenhuysse, veuve d’un chirurgien ORL, qui avait son cabinet au 5 rue Pauvrée. A droite de la propriété une porte cochère donne sur un jardin, au bout d’un long couloir au milieu duquel se trouve la porte d’entrée du bâtiment d’habitation.

La maison de Mme Van Nieuwenhuysse ( Document Archives Municipales )

L’année suivante, Jean fait appel à l’architecte Joseph Dhoosche, de Tourcoing, pour transformer la maison en magasin de prêt à porter. C’est donc un projet important : une transformation complète, avec installation d’un ascenseur pour accéder à l’habitation à l’étage. Le magasin ouvre en 1956. Jean revend alors les magasins de la rue Pierre Motte et de la rue de Tourcoing, pour en assurer le financement, avec l’aide financière de ses fournisseurs. Michel Devianne, autodidacte, le fils de Jean, entre dans l’entreprise et commence sa formation, à l’âge de 17 ans. Il obtient son CAP d’aide-comptable, après avoir suivi des cours du soir à l’institut Turgot.

La façade et le plan du magasin ( Documents Archives Municipales )

Au début des années 1960, la circulation automobile se développe de façon très importante et il devient de plus en plus difficile de trouver une place de stationnement pour se garer, près du magasin. En 1966, Jean et Michel Devianne décident donc de créer un parking privé de 41 emplacements, à la place du jardin. Ils profitent de l’occasion pour agrandir le magasin en ajoutant un nouveau bâtiment : au rez de chaussée se trouve le magasin, et au sous sol, les ateliers. Il fait transformer la façade de la Grande rue. Il fait appel à l’architecte Emile de Plasse au 230 rue Pierre de Roubaix.

Agrandissement du magasin et création du parking, accès par le porche ( Documents Archives Municipales et D. Labbé )

Devianne habille les stars. Sur la photo de gauche ci-dessous, Jean Devianne et Jacques Brel. Sur la photo de droite, Henri Salvador.

( documents Michel Devianne )

Jean et Michel Devianne, pour l’agrandissement de leur magasin, décident de marquer un grand coup publicitaire. Ils invitent le chanteur Pierre Perret, en Mars 1967, pour un gala gratuit qui réunit plus de 1500 personnes, sur le nouveau parking à l’arrière du magasin.

Pierre Perret, lors du gala de réouverture ( Document VDN 1967 )

Jean et Michel Devianne sont des hommes de communication. Ils sont parfaitement convaincus que la publicité est indispensable dans ces années 1960-1970, d’autant que la concurrence est rude entre les commerçants de prêt à porter, comme Herbaut-Denneulin, Blondeau, Marchand, ou le Palais du vêtement. Chaque semaine, ils font paraître une publicité dans Nord Eclair, différente à chaque fois, en fonction de la saison, comme par exemple :

Janvier Février – les pardessus, blousons d’hiver et lodens

Mars Avril – les imperméables pour les printemps pluvieux

Mai Juin – les costumes de communions pour garçonnets et les costumes de cérémonies pour les mariages

Juillet Août – les vêtements ultra légers, comme le « costume Plume » de 881 g

Septembre Octobre – les parkas pour la rentrée des classes

Novembre Décembre – les trench-coat, blazers, chemises et pulls

Publicités communes aux magasins de Roubaix et Tourcoing ( Documents Nord Eclair )

Ils investissent aussi, en publicité sur des panneaux bien situés ( avenue Jean Jaurès ) et sur l’avant des tramways mongys. Le nouveau slogan :  »Bien habillé par Devianne »

La Pub sur le Mongy Grand Place ( document Michel Devianne )

à suivre…

Remerciements aux Archives Municipales, et à Michel Devianne, pour son témoignage et sa documentation.