Le déplacement du monument

C’est en juin 1990, qu’on apprend le déplacement imminent du monument de Jean Lebas, pour cause d’aménagement de l’interconnexion bus Mongy métro, qui sera installée à proximité de Motte-Bossut. La future station de métro Roubaix 2000 sera la première à être achevée sur le territoire roubaisien. La CUDL demande donc à la mairie de déplacer le monument. Il n’est pas question de détruire, juste déplacer, mais où ?

L’emplacement initial CP Méd Rx

En juin 1945, la notification officielle du décès de Jean Lebas parvient à Roubaix. Le député maire de la ville, ancien ministre, est mort d’épuisement au camp de Sonnenburg en Prusse Orientale, où il était retenu prisonnier. En 1948, un comité a recueilli des fonds pour l’érection d’un monument à sa mémoire. Ce monument se dressera à l’entrée du boulevard Gambetta, à proximité de la Place de la Liberté. Comme la semelle qui supportera le mémorial fait vingt mètres de long sur douze de large, il faudra modifier la configuration du boulevard. A cette époque, le boulevard Gambetta est encore constitué d’une chaussée centrale avec deux terre-pleins latéraux, plus deux bas côtés pavés de 9 mètres de large. Il faudra donc modifier le profil du boulevard, qui aura désormais deux chaussées latérales avec un terre-plein central. Les chaussées pavées seront supprimées. On envisage d’ores et déjà la construction d’un nouveau pont pour relier le boulevard Gambetta avec la place Chaptal. Le réaménagement de la partie du boulevard entre la place de la Liberté et la rue Pierre de Roubaix entraînera une déviation par la rue Bernard (aujourd’hui rue Jules Watteuw) pour les véhicules allant vers le canal.

Configuration initiale du boulevard CP Méd Rx

En janvier 1949, après que le boulevard Gambetta ait été modifié, la construction du monument démarre et on prévoit l’inauguration le 1er mai. L’auteur de l’œuvre est le sculpteur roubaisien Albert Dejaeger, grand prix de Rome, et la Maison Ferret marbrier, 210 Grand-rue, spécialiste de la belle pierre, est chargée du chantier. L’ensemble représente une colonne de douze mètres sur laquelle se trouve le buste de Jean Lebas, vers lequel deux statues allégoriques la France et Roubaix élèvent leurs bras désespérés. Derrière la colonne, une autre figure symbolique représente un ouvrier en tenue de travail. On peut lire sur la colonne qui était Jean Lebas, quel rôle il a joué pendant les deux guerres mondiales. Ce monument est finalement inauguré le 23 octobre 1949, et l’on craint déjà que les inscriptions qui sont en bronze métal, s’oxydent et que le vert de gris se délaie sous l’action de la pluie, en coulées salissantes. Deux ans plus tard, les corps de Jean Lebas et de son fils seront ramenés à Roubaix.

Démontage, numérotation, remontage Photos Nord Éclair

La CUDL avait prévu de démonter le monument, de le stocker pendant trois ou quatre ans, soit la durée des travaux du métro, et de le remonter une fois les travaux terminés. Les roubaisiens ne sont pas d’accord, pour des raisons sentimentales, mais aussi financières. Le coût de l’opération se monte à 50 millions de centimes, et il sera pris en charge par la CUDL, si on le remonte tout de suite. Il faut donc trouver un emplacement de manière urgente.

Après concertation avec le Parti Socialiste, plusieurs propositions sont émises : le mettre à hauteur de la rue Henri Dunant, mais c’est encore trop près de l’installation métro. Le situer à l’angle de la rue Pierre de Roubaix et du boulevard Gambetta près de la Caisse d’Allocations Familiales, sur un terrain lui appartenant. On mettra là un chapiteau de l’ancien hospice Blanchemaille. Autre emplacement proposé : avenue des nations unies sur un terrain situé face au centre d’action sociale  On propose place de la gare, au dessus de la station qui s’appellera aussi Lebas, mais cela masquerait la gare, et la place est trop petite. On parle du Rond Point de l’Europe…Mais on va rester sur le terre plein du boulevard Gambetta, à hauteur de la CAF. Le monument sera retourné vers le pont qui permet d’accéder à Wattrelos.

Le monument Lebas aujourd’hui

En juillet,  l’entreprise Cazeaux de la Chapelle d’Armentières est chargée de démonter, et de numéroter les morceaux du monument. Le monument Lebas est désassemblé comme ces châteaux écossais achetés par des milliardaires américains, dit la presse. Dès octobre, on reconstruit…

Vie et mort de Saint Antoine

L'église Saint Antoine de Padoue CP Méd Rx
L’église Saint Antoine de Padoue CP Méd Rx

Les habitants du Fresnoy dépendaient de la paroisse Notre Dame avant que ne soit édifiée l’église Saint Antoine de Padoue, sur l’initiative du Chanoine Evrard, doyen de Notre Dame. Elle est construite en 1897 sur les terrains de la ferme Ducatteau Six. L’autorisation de célébrer le culte se fait attendre et c’est seulement le 12 août 1900 qu’elle sera consacrée et ouverte au public. A cette occasion, une superbe cérémonie sera conduite par le Chanoine Evrard devant une foule énorme de fidèles, et l’abbé Dehaeze, qui sera son premier curé, monte en chaire et prononce un sermon de circonstance. Il rend ensuite hommage aux dames de l’œuvre de Sainte Élisabeth, à la société chorale Saint Antoine, à la fanfare La Liberté qui contribue à la fête par l’exécution d’un morceau d’un grand effet. Sous le ministère de l’abbé Marais, il y aura la création d’une maison pastorale rue de Remiremont, d’une école de filles en 1909 et de garçons en 1913, d’un cercle d’études, de deux patronages. Les orgues seront installées en 1926.

Collection particulière
Collection particulière

Avril 1990, c’en est fini de l’église Saint Antoine. L’abbé Gand, qui dirigeait l’archiprêtré de Roubaix, disait que ce local n’était plus adapté à la vie de la paroisse. Trop grand, trop abîmé, trop vandalisé. L’évêché a décidé de démolir. La ville a donc accordé le permis de démolir. Aurait-on pu utiliser le bâtiment qui n’était pas en si mauvais état ? On aurait pu y installer un très beau marché couvert, mais non. Que fera-t-on des terrains ?

Les derniers jours de Saint Antoine Photo Nord Eclair
Les derniers jours de Saint Antoine Photo Nord Éclair

En fait, il y eut trois destructions : l’église, le presbytère et l’école. On démolissait beaucoup à Roubaix à cette époque : les magasins généraux, l’église Saint Rédempteur, la maison des docteurs, une grande partie de la rue de la fosse aux chênes, et bientôt l’église Sainte Bernadette. Le 7 septembre, c’est la fin de l’édifice, et commence le temps de la récupération : les cloches partiront pour la nouvelle église Saint Rédempteur au Pile. Le 15 septembre 1990, c’était la sixième édition de la journée des monuments historiques, qui allait devenir européenne, et que nous connaissons aujourd’hui sous l’appellation journées du patrimoine.

 

 

Inauguration du Lido

Parmi les premiers installés, Blondeau au n°1, Sonora au n°8 Photos Nord Éclair

Alors que les démolitions vont commencer rue de Lannoy, l’inauguration officielle du centre de transit du Lido, prévue pour fin janvier 1965, est reportée. Les commerçants prennent progressivement possession des nouveaux emplacements. La presse s’en fait l’écho : ainsi la maison Gazier-Merlevede, agence exclusive de la marque Sonora, qui se trouvait au 79 rue de Lannoy depuis 1932, s’installe au n°8 du nouveau centre commercial. De même, la maison Blondeau, installée depuis le début du siècle au n°19 de la rue de Lannoy, vient occuper le n°1 du centre commercial.  

Photos prises lors de l’inauguration Nord Éclair

L’inauguration aura finalement lieu le Samedi 27 février 1965, à 11 heures, en présence du maire de Roubaix Victor Provo. Pour l’occasion, une R4 Renault, le dernier modèle de la marque, sera mise en loterie gratuitement. Les commerçants du Lido, qui ont adhéré à l’Union Commerciale du Centre, participeront le soir même au bal avec concours et attractions qui se dérouleront au Colisée. Le Lido n’est plus un simple centre de transit, il est alors présenté comme le premier centre commercial moderne, et les roubaisiens découvrent le premier « shopping center » piétonnier de leur ville.

Les commerçants installés lors de l’inauguration février 1965 Nord Éclair

La rue du château et la rue Jeanne d’Arc existent encore et on a gardé une partie de la place des Halles pour un modeste emplacement de stationnement pour les voitures et pour les vélos, entre la poste et le centre commercial. Le Lido est un ensemble de 32 parcelles, réparties le long d’un secteur piétonnier composé d’une grande rue à double accès sur la rue Pierre Motte.  Le parking n’est que temporaire, car dès le second semestre 1965, on parle de l’extension de la poste sur ce qui reste de la Place des Halles.

Disposition du Lido doc NE

 

Une si longue installation

Alors qu’on attend l’arrivée d’Intermarché, le départ de C&A est annoncé. Propriétaire des terrains, le groupe n’a pas encore décidé de la suite : soit il y aura le maintien d’une enseigne avec diminution de la surface de vente, soit C&A quitte mais s’engage à trouver un successeur. On apprend qu’Intermarché a également repris le AS ECO de l’avenue Motte, et que des travaux de réfection sont engagés en vue de l’ouverture début mars.

Intermarché arrive, C&A s’en va Photo Nord Éclair

Le 27 février 1989, Jacques Catrice aborde un certain nombre de questions avec l’union des commerçants à la maison des associations place de la liberté. On est en campagne électorale pour les municipales, et il énumère les réalisations de l’équipe sortante : arrivée de l’IUT à l’ancienne poste, opération Motte-Bossut, réhabilitation de l’ilot de la Halle, énième redémarrage de Roubaix 2000, cette erreur monstrueuse. Il n’est pas question d’abandonner les commerçants abusés, et le projet en cours doit être le bon !

Les autres projets sont énoncés : réalisation d’une galerie marchande derrière le contour Saint Martin, un accord reste à trouver avec l’hôtel des ventes, qui est encore situé là. Une résidence Hotelia sera établie à l’entrée de la Grand Rue, et l’on procèdera à la reconquête progressive de l’avenue Lebas, et du boulevard Gambetta. Mais le grand problème roubaisien, c’est la circulation, car le flot des voitures évite le centre ville. Il s’agirait d’un problème de signalisation, car le panneau Roubaix centre n’existe pas ! Un autre souci, c’est que les commerçants n’habitent plus en ville et la désertification des immeubles du centre est à craindre. Il est prévu des mesures d’incitation à réaliser des logements pour étudiants, car cela peut être rentable pour les propriétaires, et amènera de la vie en ville.

Après qu’André Diligent se soit réjoui qu’Intermarché joue le rôle de locomotive pour les commerçants de la galerie marchande, la presse publie des réactions au nouveau projet de Roubaix 2000. N’aurait-on pu consulter riverains et usagers plutôt que de confier cette affaire à des décideurs étrangers au quartier et à la ville ? La question du parking est abordée : le fait que la nouvelle entrée soit située sur la droite du centre, n’y aura-t-il pas confusion avec le parking d’appel réalisé sur la pelouse, dont on déplore la perte, il y en a si peu à Roubaix.

L’accès par la rue Henri Dunant déjà mise en double sens de circulation, va aggraver les choses : à proximité, il y a une maternelle, et les entrées des trois tours. Alors accéder par la rue de Lannoy, pourquoi pas ? Concernant le centre commercial, on évoque les « nouveaux condamnés pour le cercueil ».

Le rez-de-chaussée régresse moins que l’étage, grâce au bon accès piétonnier de la place de la Liberté. L’ouverture du côté du boulevard de Belfort devrait être identique. Mais le désastre, c’est l’étage, malgré les escalators de l’époque Auchan. L’ouverture d’un Restaumarché est la bienvenue, mais pourquoi engager des frais pour une terrasse qui ne servira que quelques jours par an ?

Travaux de carrelage à l’étage Photo Nord Éclair

 Les problèmes d’approvisionnement subsistent. A l’origine, il devait être assuré par des petits véhicules en sous sol, le long de quais desservis par ascenseur avec giratoire au départ du boulevard de Belfort. Mais rien n’a été fait en ce sens.  En Mai, les travaux prennent du retard, mais le centre fonctionne dans la poussière et le bruit. M. Mascart Président du GIE dit que ces travaux sont un mal nécessaire. Madame Libbrecht intendante du centre, annonce beaucoup de demandes de cellules commerciales. A la fin des travaux, on peut compter que 98% des cellules seront occupées. Les commerçants tiennent un langage optimiste : ils rappellent la situation exceptionnelle du centre commercial, et pensent qu’avec les transformations, on va assister un grand et définitif démarrage.  Malgré ce bel enthousiasme, l’ouverture sera plutôt pour septembre, et non mai juin comme annoncé. Quelques plaintes sont quand même remontées à Dominique Plouvier, nouvel adjoint au maire chargé du commerce et de l’artisanat. Le chantier du CIC et des archives du monde de travail ont barré la rue de Lannoy, et la fleuriste installée juste à l’angle de Roubaix 2000 craint pour son commerce. Cela ajouté à la suppression de l’arrêt de bus, c’est une véritable calamité, on ne nous a pas prévenus, pas de signalisation.

Inter marché, pas encore ouvert Photo Nord Éclair

En septembre, les travaux d’infrastructure sont pratiquement terminés, mais les surfaces Intermarché ne sont toujours pas ouvertes. Puis en décembre, on apprend qu’Intermarché ne sera pas installé avant mars 1990, soit près d’un an de retard ! Il est rappelé que le groupe Intermarché a absorbé 66 AS ECO ! Pour Roubaix 2000, il ne reste plus que quatre cellules commerciales à vendre. Et on parle des enseignes Mac Donald et Feu vert pour remplacer C&A. Malgré le retard, l’avenir se présente bien…

 

La ferme du Hutin

Le quartier du Hutin était autrefois situé en pleine campagne, et divisé en Bas-Hutin et Haut-Hutin. Il englobait les terres situées entre la Grande Vigne (ferme Salembier rue d’Oran) et le territoire de Wattrelos. Il était traversé par plusieurs sentiers, parmi lesquels le Sentier du Mont-à-Leux qui passait près des fermes. Le Hutin était d’ailleurs le nom d’une cense et d’un hameau qui apparaissent dans les recensements de 1596 et de 1673. D’après l’historien Leuridan, la cense est occupée pendant deux siècles par la famille des de Lespaul, et elle prendra le nom de cense Delespaul. En 1850, un Constantin Delespaul, propriétaire, assiste au mariage du couple de cultivateurs Auguste Ferret et Elisa Houzet qui va exploiter la ferme.

La ferme du Hutin en 1868, au moment du projet de rue du Hutin, et à gauche du projet de canal doc AmRx

En 1868 est établi le tracé de la future rue du Hutin qui reprend en partie le sentier du mont à leux. On parle alors de la ferme Ferret. La ferme sera reprise par le couple Théodore Joseph Houzet et Amélie Joseph Lutun. Mariés à Roubaix le 31 juillet 1872, ce wasquehalien et cette tourquennoise d’origine vont exploiter la ferme désormais dénommée Houzet. En effet, leur fils et leur petit fils leur succèderont. Ils deviennent également propriétaires de la ferme, qu’ils rachètent à une dame Watine. Cependant le quartier se développe à partir de 1889. Le 24 mai 1889, les propriétaires riverains s’engagent à abandonner les terrains nécessaires et à participer aux frais de voirie. En 1890, c’est l’ouverture de la rue Delespaul, prélude à la réalisation du quartier, qui fait l’objet d’un projet d’urbanisme le 22 juin 1894. C’est le début de la fin des champs et pâtures de la ferme du Hutin.   

La structuration du quartier du Hutin en 1914 doc AmRx

Le petit fils de Théodore,  Henri Théodore Houzet-Bouckaert, reprend la ferme en 1924. Cette ferme a changé plusieurs fois de numéro (on cite les n° 6 18 44). Elle comportait une étable pour les vaches, une écurie pour deux chevaux, un pigeonnier, un poulailler, avec poules pintades et canards. On y stockait aussi les betteraves, le foin, les graines et futures semailles pour le potager. La cave était fraîche et bien garnie : conserves de pâté, jambon, lait, beurre, fromage, légumes, vins, tonneaux de bière, la température était idéale. Le fermier récupérait les drèches de la brasserie moderne, fraiches ensilées ou séchées pour la nourriture des bovins, ce qui donnait parfois au beurre un gout de bière. On y tuait le cochon, et on préparait le boudin, les pâtés de tête et de foie, des saucisses, on faisait fumer le jambon dans des tonneaux puis ils étaient cuits lentement dans un bouillon de légumes.

Photo aérienne 1953 IGN

Quand Henri Théodore Houzet reprend la ferme,  il n’y a que deux maisons et un café à proximité et des pâtures et des champs. Mais la ferme est peu à peu enserrée par les constructions. Bientôt l’exploitation de la ferme ne suffit pas, le fermier envisage sa reconversion dans une entreprise de transport. Il achète un camion Chevrolet que conduira son fils. Puis, sur le coin de pâture qui lui reste, il construit des garages. Les terrains de la ferme avaient une superficie de près de 10 hectares.

Les garages derrière la ferme, vue aérienne de 1964 Photo IGN

Les enfants ne reprendront pas l’exploitation : le fils sera contremaître dans le textile et la fille partira en Afrique du Sud. Faute de pâtures, le fermier vend ses six vaches. Né dans la ferme comme son père et son grand-père, Henri Houzet cessera son activité en 1956. Si l’exploitation a cessé, le bâtiment existe toujours avec sa cour carrée typique des vieilles censes d’autrefois.

La ferme du Hutin en 2013 vue Google

Remerciements à Agnès Deffrenne Houzet à qui nous devons la description de la ferme et de ses activités.

 

 

 

 

La construction du Lido

Le 10 juillet 1964, alors que les vêtements Marchand annoncent leur transfert place de la liberté, le chantier du centre de transit est commencé. Le 25 Août 1964, la presse titre : le chantier du centre de transit est en panne, à cause des congés payés !  Puis elle rectifie le tir, tout le monde ne chôme pas, notamment les entreprises Ferret Savinel et Léon Planquart, qui travaillent activement. Néanmoins le chantier a pris du retard, et l’inauguration ne se fera pas en 1964.

Les travaux d’août 1964 Nord Éclair

C’est en décembre 1964 qu’intervient la réception provisoire des travaux entrepris par la société d’aménagement de la région de Roubaix. Elle est effectuée par le maire Victor Provo, l’adjoint Georges Pluquet et Fernand Delcour, le directeur des services techniques de la ville. Il est fait mention du LYDO dans l’article de presse comme nom du futur centre de transit. Dès le 4 décembre 1964, les établissements Blondeau annoncent leur transfert par voie de publicité. Fin décembre, on assiste aux premières installations. L’inauguration officielle est prévue pour fin janvier 1965, mais elle aura lieu avec un mois de retard.

Les premières installations de décembre 1964 Nord Éclair

 

Cinq nouvelles locomotives !

Début 1989, l’arrivée d’Intermarché est annoncée pour venir à la rescousse du centre commercial Roubaix 2000. On prévoit un investissement de 37 millions, dont plus de 28 millions pour Intermarché. La stratégie commerciale évolue : plus de locomotive unique de type Lemaire, Auchan ou AS ECO, mais cinq moyennes surfaces, cinq Mousquetaires de la même firme. Il y aura Intermarché (alimentaire) Bricomarché (Bricolage) Vestimarché (Vêtements) Restaumarché (restaurant avec terrasse sur le toit de Roubaix 2000) et Logimarché (confort ménager). On peut se demander quelle fut la réaction des commerçants indépendants du centre commercial, dont l’activité se trouvait ainsi concurrencée…

Sans doute pensaient-ils bénéficier de la restructuration de la galerie marchande, du réaménagement de l’accès aux parkings souterrains. La présence sur place du restaurant universitaire n’est pas remise en cause. Modification importante, la suppression de l’accès aux parkings du côté de la place de la Liberté, du fait de l’implantation de la future bouche de métro Motte-Bossut. Enfin pour couronner le tout, Roubaix 2000 changerait de nom ?

C’est le coup de la dernière chance, comme le laissent entendre les propos critiques tenus par Jacques Catrice, adjoint au commerce : Roubaix 2000, ce bouchon posé dans le bas de la rue de Lannoy, une erreur de conception dont nous avons hérité sans l’avoir demandé !

A cette occasion, la ville de Roubaix n’a pas hésité à céder pour le franc symbolique les 2300 m² de surface commerciale dont elle avait encore la propriété. Elle fait autant pour les indépendants que pour Intermarché. La gestion des cellules coûte cher, et ce n’est pas la vocation de la ville de gérer un centre commercial. Il est donc procédé à la cession de 1800 m² à Intermarché et 460 m² aux commerçants indépendants.

instantaneL’annonce de l’arrivée d’Inter marché Photo Nord Éclair

L’ouverture de la nouvelle configuration est prévue le 20 mai 1989. On en sait plus sur la localisation des moyennes surfaces : Vêtimarché à la place du Colisée 2, Restaumarché restera installé au 1er étage, du coté boulevard Leclerc, Logimarché prend la place de la Macif relocalisée et Intermarché reprend AS ECO et on y entrera désormais par l’avant et non plus le côté. Beaucoup de cellules sont réaménagées, refondues et le débat autour du nom Roubaix 2000 continue. La propriété du centre commercial a donc évolué : Intermarché et ses cinq enseignes en possèdent 56%, les  indépendants 38,5%, et la ville 5,5%, du fait de la surface du restaurant universitaire. Les investissements pour les travaux d’aménagement se répartissent de la manière suivante : l’accès aux parkings est à la charge de la ville. Les frais d’aménagement intérieurs incombant à la co propriété sont financés par un emprunt de 8,7 millions remboursables en 8 ans à un taux inférieur à 10%. En plus de sa participation, Intermarché garantit le prêt par une caution solidaire d’un million, et la mairie est caution à hauteur de la surface possédée (5,5%).

travauxLes travaux commencent Photo Nord Eclair

La suppression des accès au parking en front de boulevard, due à la construction prochaine de la station de métro, entraîne la réalisation d’un parking d’appel de 80 places devant la nouvelle entrée sur le côté, rue Henri Dunant. Ce parking est prévu sur la pelouse qui longe la rue Watteeuw. Un second accès latéral doit être réalisé le long de la rue de Lannoy par la rue de la tuilerie. Intermarché ne reprend pas la gestion des parkings souterrains, à la différence d’AS ECO. On recherche un repreneur, et on parle bientôt de la Sogeparc.

 

 

Le quartier ECHO

Le quartier ECHO est un regroupement contemporain de lieux dits et de rues. La lettre E pour entrepont, correspond aux habitations et aux rues se trouvant entre les deux ponts, celui du canal et celui du Laboureur à l’orée de Wattrelos. La lettre C reprend l’initiale de la rue de Cartigny.  La lettre H est l’initiale d’un très ancien lieudit le Hutin. La lettre O est l’initiale d’une rue importante, la rue d’Oran. Le regroupement opéré donne un quartier situé au nord est et à l’est de la ville, délimité par le parcours du canal à l’ouest, le cours de l’Espierre au nord, la voie de chemin de fer à l’est et à nouveau le canal au sud.

Extrait Plan début du XXème siècle Médiathèque de Roubaix

En partant du nord, le Hutin était le nom d’une cense et d’un hameau au début du XIXème siècle. C’était la pleine campagne; et le Hutin divisé en « Bas-Hutin » et « Haut-Hutin » par le sentier du Mont à Leux, englobait tout le secteur situé entre la Grande Vigne et le territoire de Wattrelos.

La ferme Brasserie Salembier Photo PhW

Plus au sud,  la rue d’Oran traverse le lieudit la Grande Vigne. Ouverte en 1887, elle part de la ferme brasserie Salembier, et se dirige en ligne droite vers le passage à niveau du chemin de fer. En 1894 démarre la construction de l’école publique, futur groupe scolaire Paul Bert Edgar Quinet. De 1910 à 1939, la rue sera presque entièrement urbanisée. L’industrie y était fortement présente avec La Lainière de Roubaix  créée en 1911. C’est là que naîtront les laines du  Pingouin, les chaussettes Stemm, les tricots Korrigan, les créations  Intexa, et Rodier. La Lainière a cessé ses activités à la fin de l’année 1999.

Collection particulière

Plus bas encore se trouvait le chemin de Cartigny qui menait au hameau du Crétinier à Wattrelos. La rue de Cartigny se développe à partir de 1895. On y relève la présence du cimetière communal de Roubaix qui fut établi de 1848 à 1920. Rue de fleuristes et de marbriers, elle a connu très tôt un fort trafic surtout avec la desserte du Peignage Amédée Prouvost et de la Lainière.  Les matches du stade Amédée Prouvost amenaient beaucoup de monde.  Les nouvelles rues de la fin du dix neuvième siècle portent les noms de villes d’Algérie: Constantine, Oran, Philippeville, Biskra, Blida, Mascara, Mazagran, Bône. C’est dans la rue d’Alger que se trouvaient en 1895  la filature de coton Etienne Motte et Cie au n°30, la Société Anonyme des Peignages de Roubaix au n°176, le tissage Henri Bonnet au n°232, et le tissage Dubar Delespaul au n°292.

La rue d’Avelghem autrefois CP Médiathèque de Roubaix

La Grand Rue traverse l’actuel quartier de l’Entrepont, lieu d’habitation et d’industrie. Ainsi la société de filature et de retorderie Etienne Motte constituée en 1887 s’étendait sur cinq hectares. De même la rue d’Avelghem sépare les habitations des industries dont le nombre s’est fortement restreint à la fin du siècle dernier. Sur les terrains situés entre cette rue et le canal, Alfred Motte (frère de Louis Motte-Bossut) avait fait construire dès 1878 un peignage important s’étendant sur 14 hectares. 

Présentation du Cul de four

Le quartier du Cul de four se constitue progressivement dans la seconde partie du dix neuvième siècle. On se rendait autrefois à Tourcoing par un chemin qui démarrait à la Place de la Fosse aux Chênes et serpentait par la campagne. Cette première voie constituera plus tard le tracé des rues Saint Joseph, Turgot et Cadeau, avant que la rue de Tourcoing ne soit ouverte entre 1835 et 1836. Cette ouverture va favoriser l’industrialisation du quartier le long de son tracé : les noms des rues Duflot et Jacquard en attestent, la première du nom d’un industriel qui fut installé là, la seconde du nom de l’inventeur du métier à tisser.

Église St François des Récollets Coll Part

En octobre 1857, les Frères Récollets arrivent à Roubaix, venant de Gand, pour exercer leur ministère auprès de leurs compatriotes flamands, que l’expansion de l’industrie textile a attirés à Roubaix. Le 21 novembre 1857, est posée la première pierre du Couvent Saint Joseph, et le 15 mai 1859 démarre la construction de la Chapelle du Couvent, future église Saint François d’Assise, conçue par l’architecte Dewarlez. L’église est bénie le 23 juin 1860. Entre-temps, c’est un quartier tout entier qui se bâtit, auquel on donnera le nom de Saint Joseph. Il est à l’époque entouré au nord par le sentier de la basse masure, à l’est par le sentier de l’Ommelet à la Basse Masure, au sud par le chemin des Sept Ponts, et à l’ouest par l’ancien chemin de Tourcoing, autrefois nommé rue du Cul de Four (aujourd’hui rue Turgot et deuxième partie de la rue St Joseph). On prévoit d’ouvrir des rues, dont la rue de Flandre et la rue St Joseph, ouvertes en 1857. Puis on réalise la rue Daubenton qui sera réalisée en trois étapes de 1860 à 1875 jusqu’à sa jonction avec la rue de Constantine.

Le canal de Roubaix Quais d’Anvers et de Gand Photo Nord Eclair

Entre-temps la réalisation du nouveau tracé du canal dans les années 1870 renforcera l’activité du quartier par le nord : ainsi le quai de Gand dénommé en 1867 accueillera les magasins de stockage des charbonniers ou des entrepreneurs, et des transporteurs (voituriers-camionneurs.  De grandes structures métalliques apparaissent, grues mobiles, appareils électriques de déchargement pour le coke, appareils fixes de déchargement des charbons, portiques pour le déchargement des matériaux. Le quartier est ainsi délimité dans sa configuration actuelle depuis le début du vingtième siècle. De nouvelles rues apparaissent dans les années 1880, Iéna, Wagram, Marengo, Meyerbeer où s’installent des activités diverses : une brasserie, une école de natation, remplacée par une usine d’incinération, et aujourd’hui par une grande surface commerciale.

Brasserie de l’Union Roubaix Tourcoing rue Meyerbeer Photo Collection particulière

La rue Turgot et la rue de Flandre assuraient la circulation du nord vers le sud dans le quartier, mais il faut attendre les années 1890 à 1900 pour joindre la rue de Tourcoing au boulevard de Metz. La rue Voltaire et la rue Rollin, assureront cette jonction. La rue Olivier de Serres viabilisée en 1884 établit la jonction entre la rue Voltaire et la rue Daubenton, alors qu’une école s’y est installée depuis quelques années. La place du Progrès est créée en 1896, et c’est l’aboutissement de la structuration du quartier engagée depuis 1890 qui comprend l’appropriation de l’ancien fort Bayart en rue (1891) et la création des rues Grétry et Labruyère (1891).

École rue Olivier de Serres Photo PhW

Nombre de rues et d’activités ont depuis disparu de ce quartier autrefois très animé. Que s’est-il passé ? Quelles sont les traces de ce passé ? Comment se présente l’évolution du quartier ? C’est à partir des souvenirs de l’après seconde guerre mondiale que l’atelier mémoire du Cul de four se propose de restituer la mémoire du quartier, selon l’adage bien connu : c’est avec l’éclairage du passé que l’on comprend le présent et que l’on prépare l’avenir !

 

Appartements de la rue Greuze

 Construits de 1958 à 1960, les bâtiments des Hauts Champs ont donné leur nom aux rues qui les desservent, quand elles ont été viabilisées, plus de vingt ans après la réalisation des logements. L’immeuble n°7, dit pavillon Jean Baptiste Greuze est donc à l’origine de la rue du même nom. Thierry se souvient que les portraits des différents peintres étaient reproduits sur les pignons des bâtiments. Jean Baptiste Greuze, Edgar Degas, Jean Baptiste Chardin, Claude Monet, Maurice De Vlaminck furent ainsi présents dans le quartier, ainsi que le poète Charles Pranard. Le bâtiment Greuze qui nous occupe aujourd’hui, se situe entre la rue Michelet et la rue Chardin. Il est perpendiculaire à l’usine Motte Bossut, et aux deux bâtiments Chardin et Monet qui l’entourent.

 Deux anecdotes sur son environnement : la transformation de l’usine Motte Bossut en 1985 en magasin d’usines a posé très vite la question des parkings pour la clientèle. Il fut un temps question d’utiliser les espaces de part et d’autre du bâtiment Greuze, côté avenue Motte et côté bâtiment Monet, mais les résidents s’opposèrent à ce projet. L’espace entre la rue Michelet et la rue Claude Monet fut néanmoins approprié en places de stationnement. C’est sur cet emplacement que passera bientôt la ligne de bus à haut niveau de service, qui repose à terme la question du stationnement.

Plan des Hauts Champs 1962 Nord Éclair
Vue du bâtiment Greuze Extrait Google Maps

 Concernant le bâtiment Greuze, il a fait l’objet d’une réhabilitation : les entrées étaient autrefois des portes de bois avec un battant, elles sont aujourd’hui en PVC avec des serrures. De même, les boites aux lettres qui étaient à l’intérieur du hall d’entrée, sont aujourd’hui plus accessibles pour la distribution du courrier, car situées à côté des nouvelles portes. Le bâtiment a également reçu un revêtement de laine de verre sous les plaques de sa façade actuelle.

Studio Bâtiment Greuze Croquis Thierry Dony

 La description suivante des deux types de logement correspond à celle des autres bâtiments de la cité des Hauts Champs. Le logement type 2 (studio) se présente de la manière suivante : l’entrée (1) donne dans un petit couloir. Sur la gauche, la porte de la chambre (7), dans laquelle il y a un placard et des fenêtres individuelles. Dans l’entrée, la porte de droite donne accès à la salle de séjour (2), à partir de laquelle on peut aller dans la cuisine (3) équipée d’un évier et d’une gazinière,  dans la salle de bains (4) et dans les toilettes (5). Une petite pièce (6) séparée par une cloison amovible ou un rideau permet au choix, de faire un salon ou une pièce de rangement.  Cet appartement est bien pourvu en placards de rangement, ce qui évitait l’achat de meubles importants de type armoire ou penderie. Dans certains de ces placards toutefois, à chaque étage, se trouvaient les manettes de réglage de la tuyauterie du chauffage.

Logement de type 3 bâtiment Greuze Croquis Thierry Dony

 Le logement de type 3 (deux chambres) se présente comme suit : on entre par un couloir, dont les deux premières portes à gauche et à droite desservent la cuisine (5) et la première chambre (2), puis les toilettes (3) et la salle à manger (7). Une seconde chambre (6) est accessible par la salle à manger. On peut entrer dans la salle de bains (4) par les deux chambres. Une anecdote lors de la réhabilitation : la salle de bains était autrefois équipée d’une baignoire sabot. Après les travaux, la nouvelle baignoire dépassait sur la porte d’entrée de l’une des chambres. Il y a une porte entre la cuisine et la salle à manger, et des placards de rangement, il y avait de quoi ranger. Une baie vitrée (8) longe la cuisine et la salle à manger, avec une porte qui permet d’accéder au balcon. En 1970, nous dit notre témoin, on a posé des fenêtres pour isoler le balcon, ça nous faisait une pièce en plus.

Merci à Thierry Dony pour les croquis et les précisions