Les dominos de Brossolette

Depuis 1965, le CIL de Roubaix Tourcoing construit des dominos, qui sont des résidences pour personnes âgées, réservées aux « plus vaillants ». Les premiers dominos construits se trouvent dans le quartier de Beaumont à Hem derrière l’église Saint Paul, et rue du Caire à Roubaix. Depuis il y en a eu d’autres, à Leers, Wattrelos, rue de Toul, à Toufflers, à Lys lez Lannoy et à Roubaix, le béguinage Marlot sur l’emplacement de l’ex usine Salembier et le béguinage Brossolette, dans la rue et près de la tour du même nom…

Les dominos du béguinage Marlot Photo Nord Eclair

Un domino est une petite maison individuelle comprenant une chambre, une salle de séjour, une cuisine et un cellier. Un témoin nous emmène visiter un domino de la rue Brossolette.

Les dominos du béguinage Brossolette en construction en 1972 Photo Nord Éclair

Nous sommes dans les dominos qui sont situés rue Brossolette, au pied de la tour du même nom. Ils sont gérés par Villogia. Ce secteur n’est pas du tout résidentialisé, mis à part une grille qui a été posée, parce qu’il y avait des gens qui se servaient de cet espace vert comme d’un raccourci pour repartir sur les Hauts-Champs. C’est ouvert à tous vents, tout le monde peut entrer librement. Malgré tout, il ne s’y passe pas grand-chose. C’est très arboré. Il y a trois barres de maisons, avec des espaces verts qui sont entretenus par Villogia. Mais chacun des habitants essaye de s’approprier un peu les lieux et de personnaliser son espace vert, et le bailleur laisse faire. Accessoirement, les pots de fleurs empêchent les circulations intempestives en vélo au ras des portes. A l’arrière des dominos, la pelouse est entretenue par Villogia, mais les gens qui habitent là s’en servent comme de leur jardin : l’été on y met une chaise-longue, éventuellement un barbecue… Donc, les avantages, sans les inconvénients de l’entretien.

Les dominos Brossolette recto verso Photos Gérard Vanspeybroeck

Il y a une batterie de garages situés au pied de la tour, dont certains appartiennent à des personnes des dominos. Juste derrière, on aperçoit les murs de l’usine Jules. Il n’y a pas de régisseur, et pas de gardien. Ceux qui le souhaitent peuvent se faire livrer les repas du CCAS. Il est évident qui si on n’est pas autonome, on ne peut pas vivre dans un de ces dominos. C’est comme dans un appartement. Les prix sont en fonction des revenus, mais c’est à peu près de 300 euros par mois. Ça reste très raisonnable.

Mes parents arrivent dans ce domino à la fin des années 80, venant de leur appartement de la rue Fragonard. Pour ma mère qui venait du fin fond de la campagne de Wattrelos, aux confins d’Estaimpuis, la rue Fragonard, c’était un grand progrès du point de vue du confort. La rue Fragonard, pour ma mère, c’était vraiment le bonheur, c’était le centre du monde. Un jour mon père décide qu’on va partir habiter dans un domino. Autant dire que, pour ma mère, ça a été un crève-cœur. Elle est partie vraiment en marche arrière jusqu’au domino. Et, comble de malchance, c’est à ce moment là qu’on a commencé à démolir l’église Ste Bernadette, qui était juste derrière, et ma mère, comme consolation, a pu assister à toute la démolition de l’église. Autant dire qu’elle nous a fait une déprime à ce moment là…

Plan réalisé par Gérard Vanspeybroeck

On entre par la porte fenêtre, directement dans le séjour. Il n’y a pas de vestibule, pas de couloir une surface de 53 m2 environ. Un salon salle à manger, une chambre, une cuisine, une salle de bains et un cellier. Il n’y a pas d’autre fenêtre que la porte-fenêtre, ce qui oblige parfois à allumer, même en pleine journée.  Dans la chambre, il y a aussi une fenêtre. Au fond, on arrive dans la cuisine : un évier sur la gauche, la chaudière individuelle de chauffage central au gaz, et une porte fenêtre à l’arrière. Selon la disposition des maisons, les gens entrent par un côté ou par l’autre. Ensuite, un petit couloir avec un placard dans le fond, une trappe qui permet d’accéder aux combles pour y ranger quelques objets. La salle de bains comporte également le WC, et il y a un vasistas pour la lumière du jour, une douche adaptée pour les personnes âgées, sans rebord, qui a été installée récemment. Tout au fond, un cellier avec des possibilités de rangements des légumes. Les orientations diffèrent selon les rangées de bâtiments.

Vue générale des dominos de la rue Brossolette Photo Gérard Vanspeybroeck

En ce qui concerne la vie collective,  beaucoup d’évolution en fonction du turn-over. La piste de pétanque qui est aujourd’hui abandonnée, était autrefois très utilisée. Maintenant la plupart des gens qui habitent dans les dominos possèdent des voitures. Ça les rend très mobiles, ils vont se balader, ce qui n’était pas vrai avant, les gens vivaient plus là,  il y avait plus de vie collective.

Le jardinier, l’horticulteur et le fleuriste

Voici l’histoire professionnelle d’une famille du quartier Raverdi Potennerie. M. et Mme Hector Hoste étaient au service du château du Raverdi, propriété occupée par l’industriel Georges Heyndrickx et sa famille jusqu’à la première guerre. M. Hector Hoste était le jardinier et Mme Hoste la cuisinière. Après la guerre de 14-18, ils se sont installés avec leurs enfants boulevard de Reims. A cette époque, la rue Montgolfier vient d’être prolongée de la rue de la Potennerie jusqu’à la rue Jean Baptiste Notte, coupant ainsi le grand parc de la Potennerie formé par les propriétés Heyndrickx et Motte.

Dans les années 1920, Hector avec ses deux fils, André et René s’installent jardiniers sur un grand terrain de la rue Philippe Auguste loué à la famille du “château”. Ils y cultivent surtout des fleurs, font l’entretien de jardins à l’extérieur, et un peu à la fois, ils construisent des serres. . A l’époque, on faisait des chrysanthèmes qui ne venaient pas de Hollande. Les deux fils font construire leur maison et s’installent l’un au 198 rue Dupuy de Lôme et l’autre au 42 rue Philippe Auguste. Le terrain exploité donne sur les deux rues, et il y avait là les couches qu’on allait ouvrir ou fermer. Il y avait une petite cheminée avec une chaudière, car en hiver, ou au moment de la Toussaint, quand il faisait très froid, on chauffait les serres au charbon.

L’exploitation de la rue Philippe Auguste en 1935 Collection particulière

Après la guerre, Hector Hoste est décédé, la famille augmente et les deux frères se séparent. René Hoste part s’installer, toujours pour les fleurs, près du cimetière de Roubaix, Place Chaptal. André Hoste et son épouse continuent l’exploitation et rachètent la moitié du terrain de la rue Philippe Auguste. Pendant la guerre, ils ont surtout cultivé les légumes, qui étaient vendus sur place au voisinage. Puis la vie a repris, les occasions d’offrir des fleurs sont devenues plus fréquentes, et Mme Hoste a décidé qu’ils allaient construire un magasin de fleurs, au 198 rue Dupuy de Lôme.

Madame Hoste et le magasin de fleurs de la rue Du Puy de Lôme Collection Particulière

C’est leur fils, également prénommé André, qui après avoir fait un stage chez un grand fleuriste parisien, donnera  à ce magasin une renommée que beaucoup lui envieront. Doué et courageux, il a fait des choses magnifiques, comme par exemple  l’inauguration  d’IBM rue Verte, la décoration de la Préfecture au moment des vœux, la Lainière. C’étaient des occasions exceptionnelles, et de la véritable décoration florale. La belle histoire de la famille et du magasin de fleurs s’est arrêtée à la fin des années 1990 quand André fils a pris sa retraite.

Le jardinier, l’horticulteur, le fleuriste Collection particulière

Tranches de travaux

En octobre 1976, c’est par une conférence presse donnée par Pierre Prouvost, adjoint au maire et Jean Papillon président de la chambre de commerce de Lille Roubaix Tourcoing qu’est présentée la première tranche de travaux du secteur piétonnier. Elle concerne la réalisation d’un trottoir piétonnier d’une largeur de 8 à 10 mètres, sur un côté de la Place de la Liberté jusqu’à Roubaix 2000, agrémenté de vitrines et de plantes. La circulation automobile se fera du côté de la Banque de France, à sens unique, la rue Louis Catrice permettant aux automobilistes venant de Wattrelos par la Grand Rue de rejoindre la boulevard Gambetta. Le Mongy disposera d’un site particulier sur le terre plein central du boulevard Leclerc prolongé sur la Place de la Liberté.

Le trottoir piétonnier traverse le boulevard jusqu’au centre commercial Roubaix 2000. Il ne sera plus possible aux automobilistes de tourner à gauche vers la place de la Liberté, ils devront aller jusqu’à hauteur de la rue Henri Dunant pour tourner à gauche afin de rejoindre cette place. Le terre plein du boulevard Gambetta est rendu aux piétons, on supprime les parcmètres, on va y planter des arbres ! Un nouveau parking d’une contenance de 65 voitures se situera derrière le café des Olympiades, on pourra y accéder de la Place de la Liberté.

Le secteur piétonnier se prolonge boulevard Leclerc, jusqu’à la rue Pierre Motte, avec des aires de stationnement et des plantations d’arbustes. Le coût des travaux se monte à deux millions et demi de francs ! Pour le financement, la moitié par l’Etat, l’autre moitié par la communauté urbaine. L’aménagement du site des transports en commun relève du ministère des transports et de la communauté urbaine, la ville finance l’éclairage et les plantations. Les travaux démarrent en janvier après les fêtes sur la demande des commerçants.

Le début des travaux Nord Éclair janvier 1977

La seconde tranche, concerne l’aménagement des abords de Roubaix 2000, du côté du boulevard de Belfort. La rue de Lannoy devient une desserte pour les habitants de la résidence des tuileries. On devra désormais passer par la rue de la tuilerie, tourner dans la rue Winston Churchill et par la rue St Jean pour rattraper la rue de Lannoy qui démarre à présent après le boulevard de Belfort. L’espace récupéré le long du centre commercial est rendu aux piétons après avoir été approprié. De l’autre côté, la rue Henri Dunant permet aux voitures de relier les boulevards de Belfort et Gambetta, et on prévoit de percer le terre plein pour l’accès à la place de la Liberté.

Enfin, pour augmenter l’attractivité de Roubaix 2000, la maison des docteurs située boulevard Leclerc, a été rachetée par la communauté urbaine pour être démolie, afin de favoriser l’accès au parking. Lequel parking sera réaménagé, par des travaux de peinture, d’éclairage, de sonorisation, de numérotage et de fléchage. Et les commerçants s’engagent à rembourser le parking à leurs clients. Il faut diriger le visiteur vers Roubaix 2000 !

 

La piscine des trois villes

C’est en juillet 1974 que débutent les travaux de construction de la piscine des Hauts Champs, l’appellation piscine des trois villes viendra plus tard. Elle doit ouvrir fin août, début septembre 1975. En mai, on annonce que le gros œuvre ne sera terminé qu’en juin, et qu’il faudra s’occuper des abords, de la construction de la maison du concierge, du gazon, et poser une clôture. Bref, le chantier a pris du retard. Les habitants espèrent toutefois que la structure sera ouverte pour l’été, car l’équipement répond à la demande des familles qui ne partent pas en vacances. Mais ce sera plutôt pour septembre, car le problème du personnel n’est pas encore réglé. Si l’on a trouvé un gérant, le syndicat intercommunal doit encore recruter trois maîtres nageurs diplômés.

Le chantier de la piscine en mai 1975 Photo Nord Eclair

En juin, le syndicat intercommunal reçoit une délégation de l’union des associations des trois villes, et la piscine est à l’ordre du jour. Les participants s’entendent sur quatre points : l’ouverture de la piscine aux handicapés adultes avec deux séances spécifiques par semaine, l’accès réservé pour deux séances hebdomadaires à un club de natation représentatif des trois villes, l’ouverture aux scolaires et la mise en place d’un accueil favorisant les relations humaines. Deux questions restent posées : l’ouverture pour l’été et les tarifs. Le principe d’une concertation régulière est adopté, et l’on se penche déjà sur le projet d’aménagement d’un terrain d’aventures derrière la Grande Barre.

La piscine pendant l’été 1976 Photo Nord Matin

Un an plus tard, à l’occasion de la grande canicule de l’été 1976, les habitants apprécient qu’on ait construit une piscine avec un toit ouvrant et une porte coulissante. Le temps a fait mentir les météorologues, il fait beau et chaud, même dans le Nord ! Les jeunes du quartier des trois villes ont pu bénéficier de cette piscine à ciel ouvert dont beaucoup avaient prédit qu’on la laisserait couverte. Il reste encore des aménagements à réaliser sur le pourtour. Cette piscine connaîtra une première rénovation en 1992. Elle bénéficie à nouveau d’un vaste chantier de rénovation, prévu jusqu’en novembre 2011.

Des autos et des piétons

Le drame de Roubaix 2000 est d’être séparé du centre ville par un boulevard à grand flux de circulation automobile. En effet, depuis l’ouverture du centre commercial, le passage des voitures en flot continu sur les boulevards Leclerc et Gambetta ne favorise pas l’accès par la place de la Liberté. Que faire ? Un passage souterrain est envisagé par la communauté urbaine, mais le projet est enterré. Ce devrait être un tunnel souterrain de grand gabarit vu le trafic, et cela coûterait trop cher. Il faut signaler que pendant l’été 1976 apparaissent les passages souterrains sur le boulevard du Mongy, notamment au Sart. Mais il y eut sans doute d’autres arguments (présence d’un égout collecteur, configuration du terrain…) On évoque alors une passerelle pour piétons, en précisant qu’il faudra amener les gens à l’utiliser, et qu’elle ne devra pas rallonger le parcours. Il semble que cette proposition ait fait long feu.

Puis on évoque la diminution du flux automobile, qui semble prochaine, avec les deux projets routiers en cours de réalisation : le contournement de la ville par Hem, vers la toute récente zone industrielle de Roubaix Est située à Leers, et la future pénétrante Tourcoing Roubaix, qui va emprunter le tracé de la rue Saint Vincent de Paul, et qui aboutit sur les plans place de la Liberté !

Le projet de pénétrante publié dans Nord Éclair

Suite aux articles de presse, les premières réactions entraînent un véritable tollé des habitants et des familles, qui demandent de situer ailleurs le débouché de cette dernière voie. Le boulevard Gambetta coupe déjà le centre ville en deux, la pénétrante coupera la ville en deux !

Roubaix 2000, masqué par la circulation de la Place de la Liberté en 1972 Photo Nord Éclair

Concernant la liaison à Roubaix 2000, la réflexion continue. Il faut que le centre commercial tende les mains au reste du centre ville, et que son parvis soit attractif. Cela contribuerait grandement à l’aménagement d’un large secteur piétonnier, une esplanade comprenant la place de la Liberté et Roubaix 2000. L’idée est lancée, les consultations commencent. M.Papillon président de la chambre de commerce de Lille Roubaix Tourcoing, fait une proposition de ce genre de la rue Jules Guesde jusqu’à la rue du vieil abreuvoir. Un sondage auprès des commerçants de la rue du vieil abreuvoir donne une légère majorité des oui au secteur sans voitures. Finalement, le projet de trajet piétonnier partirait du boulevard de Belfort, jusqu’à la grand place de Roubaix, englobant Roubaix 2000, une partie de la place de la Liberté et la Grand rue entre la rue Pauvrée (actuelle rue Jean Monnet), et la Grand Place. On se réunira avec les responsables des rues piétonnières de Lille et de Tourcoing afin de recueillir les fruits de leurs expériences.

En février 1976, l’idée sera soumise en conseil municipal, suite à la proposition de Pierre Catrice, répondant à l’invitation de Jean Papillon, devant les différents représentants de commerçants roubaisiens. A cette occasion, Pierre Catrice parle du désenclavement de Roubaix prévu avec la rocade sud est, pour libérer les avenues Motte et Salengro et informe les participants de l’évolution du projet de pénétrante Tourcoing Roubaix : elle débouche à présent rue de l’Hommelet, avec une petite desserte sur la place de la liberté avec la rue Pauvrée. On parle aussi du métro. On évoque le secteur piétonnier place de la Liberté Grand Place, et Pierre Catrice le présentera au conseil municipal. En mars, le projet avance, mais que fera-t-on du Mongy, danger potentiel pour la circulation, qui à cette époque va encore jusqu’à la Grand Place ?

En mai les commerçants se déclarent favorables à un trottoir piétonnier Place de la Liberté, boulevard Leclerc, rue Pierre Motte et Grand Place, après une rencontre avec les tourquennois et les lillois. M. Donnay pour Lille, affirme que les conditions de travail des commerçants se sont améliorées, mais sans trop d’effet sur le chiffre d’affaires. A Tourcoing, le chiffre d’affaire a augmenté de 25%. Un sondage effectué donne 94% de clients satisfaits pour les deux secteurs piétonniers (rue de Béthune à Lille et rue Saint Jacques à Tourcoing). Mme Harmand présidente de l’union des commerçants du centre, dit alors que le piétonnier, c’est l’avenir. Elle demande concertation et sondage avec les commerçants. En octobre, c’est décidé : un secteur piétonnier sera réalisé en plusieurs étapes de l’église Ste Elisabeth jusqu’à l’église St Martin, et la première tranche concernera le chantier de la place de la Liberté jusqu’à Roubaix 2000.

Les études continuent, un déplacement à Dieppe en novembre, où depuis l’apparition du secteur piétonnier, l’on trouve les clients moins agressifs, les ventes plus diversifiées, mais la rue devient un désert après 18 h 30, car il n’y a pas d’animation, ce qui n’est pas le cas de Roubaix, qui propose trois cinémas dans le secteur projeté. On projette d’aller voir à Courtrai comment ça se passe. Le 12 janvier 1977, c’est parti, les travaux commencent.

Le syndicat et la piscine

Le 4 février 1971 une réunion regroupe au centre social des Hauts Champs les trois municipalités de Hem, Lys lez Lannoy et Roubaix, le CIL, les grandes administrations et les associations de locataires. Le principe de la création d’un syndicat intercommunal est adopté, dont la mission sera de définir les besoins du quartier en équipements, et de les réaliser.  Il y a plus de dix ans que le quartier existe, et l’on se préoccupe enfin d’en faire autre chose qu’une cité dortoir.

M. Leplat, maire d’Hem estime que ce syndicat devra s’occuper des équipements sportifs et socio culturels, et que cette association permettra d’obtenir des subventions plus importantes. M. Thibeau, adjoint au maire de Roubaix, pense que le quartier des Trois Villes forme un tout qui bénéficie d’équipements scolaires en nombre suffisant, mais pour le reste, il faut compléter. M. Desmulliez,  maire de Lys, voit dans cette création de syndicat la possibilité d’éviter les établissements concurrentiels. Un plan d’aménagement d’ensemble pourra ainsi être mis au point.

Historiquement la construction des logements par le cil et l’office départemental des hlm s’est faite pour répondre à la demande importante des logements, sans qu’il soit pensé aux équipements collectifs. Ils ont ainsi paré au plus pressé. De plus, rappelle M. Gacon, directeur du CIL, ces immeubles ont été réalisés avec des financements ne permettant pas de faire autre chose que du logement. Il ajoute que la vocation du CIL est de construire des logements, non des crèches ou des bureaux de poste. L’environnement, c’est-à-dire les espaces verts et l’installation de l’éclairage public aussi, pas plus loin.

Puis c’est au tour des édiles de s’exprimer sur l’état des lieux. M. Leplat rappelle l’avis défavorable donné par sa municipalité à la construction de la grande barre. Un projet d’assainissement aurait du être préalable, celui du riez d’Elbecq, obtenu récemment quinze ans après l’accord pour la construction de la cité (3 décembre 1956). Il estime que les structures scolaires sont suffisantes, et que les deux salles de sport (Brossolette sur Roubaix et rue Blaise Pascal sur Hem) doivent pouvoir répondre aux besoins. Le plus urgent est d’aménager le terrain de sport derrière la grande barre, dont la réalisation est prévue.

Aménager le terrain derrière la Grande Barre…Photo Nord Éclair

M. Thibeau ne voit pas la nécessité d’un dispensaire, d’une crèche ou d’une pouponnière dans l’immédiat. Il faudrait par contre une structure du type foyer socio éducatif de Wattrelos. Il manque de salles de réunion dans le quartier, le centre social ne peut suffire. Il faudrait aussi quelques cafés dans le secteur. Le roubaisien pense que ses élus roubaisiens ne seront pas tentés par la construction d’une nouvelle salle de sport, ni d’une piscine, des efforts ayant déjà été faits dans la ville. Mais il est d’accord pour l’aménagement du terrain derrière la grande barre, et propose même de prendre en charge une partie du drainage. Le lyssois Desmulliez souhaite des équipements qui serviront au plus grand nombre : salle de réunions réclamées par la population, espaces verts, petits coins de détente, équipements sportifs. Lys participera au financement d’équipements aux Hauts Champs, d’autant qu’il y aura bientôt 1000 habitants lyssois dans le quartier de Longchamps. Il envisage un certain nombre d’aménagements derrière l’école maternelle Anatole France, un petit terrain omnisports et une salle de réunion… Les trois représentants sont d’accord pour refuser l’implantation de mairies annexes dans le quartier, mais plutôt des bureaux de renseignement où l’on n’y établira pas d’actes d’état civil. La création d’une  commune libre ou le rattachement du quartier à l’une des trois villes, sont envisagés, mais la solution du syndicat intercommunal est retenue, avec le souhait de la participation des habitants !

 …un souci partagé par les trois villes Photo Nord Éclair

La création du syndicat intercommunal est actée plus d’un an après en mars 1972. A ce moment, le projet d’une piscine entre la maison médicale et le groupe Longchamps est arrêté. Elle sera réalisée dans le cadre de l’opération des 1000 piscines industrialisées de la jeunesse et des sports. Le quartier des trois villes aura une piscine couverte avec un bassin de 25 mètres sur 10, et elle sera construite à partir de 1973. Son coût : 1.250.000 francs, l’Etat finance à hauteur de 300.000 francs, et le reste est à la charge des communes, en gestion tripartite. Le maire d’Hem estime déjà le déficit annuel à 10 millions de francs. La création du syndicat a vraisemblablement été accélérée pour obtenir cette piscine.

Les travellators d’Auchan

Le centre commercial Roubaix 2000 se prépare à accueillir Auchan, ce qui n’empêche pas l’ouverture d’un nouveau magasin de vêtements. Inaugurée en février, la Calèche est située au rez-de-chaussée, arbore de larges vitrines et propose en entrée libre un choix exceptionnel et des cabines d’essayages dans un décor à l’américaine.

Auchan dans Rx 2000 CP méd Rx

C’est également fin février qu’Auchan fait son ouverture dans le centre commercial. A l’occasion du quinzième anniversaire de son ouverture, le supermarché Auchan de l’avenue Motte a été relooké : parking refait, magasin repeint, implantation des produits revue, allées élargies, nouvelle signalétique, produits frais en libre service ou en vente traditionnelle. La nouvelle implantation d’Auchan dans Roubaix 2000 va bénéficier de l’expérience de l’entreprise et des mêmes améliorations. Car il s’agit dans un premier temps d’effacer l’échec des prédécesseurs. Pour les transformations de l’ex surface Lemaire, Auchan a mis les grands moyens. L’accès au parking souterrain est désormais facilité par les tapis roulants permettant aux caddies de descendre du magasin jusqu’à la voiture. Une heure de parking est offerte sur présentation du ticket de caisse. Auchan garantit un large choix de produits alimentaires, et propose également des rayons de charcuterie fine, de poissonnerie, de fromage à la coupe, de fruits et légumes, en libre service ou en vente traditionnelle. Le choix dans les produits et le choix dans les méthodes de vente ! Auchan va plus loin en répondant aussi aux demandes qui avaient été formulées pour l’arrivée de nouveaux magasins dans le centre commercial : les article de droguerie, de bricolage, les appareils du petit électro-ménager, la vaisselle et les articles de ménage sont également proposés à la clientèle. Les termes employés dans la communication publicitaires sont forts : ils s’agit de réconcilier la clientèle avec la surface de vente, et beaucoup ne la reconnaîtront pas ! Auchan ajoute à cela des prix d’inauguration défiant toute concurrence pour le lancement des deux nouvelles surfaces en Mars, Auchan Motte et Auchan Roubaix 2000.

C’est une enseigne en plein développement qu’accueille le centre commercial. Auchan en 1976, c’est déjà un réseau de dix huit hypermarchés en France et quatre projets pour 1977, c’est un chiffre d’affaires de trois milliards de francs !

 

Mais cette réussite n’est pas sans quelques conséquences. En juillet 1976, suite la mise en œuvre d’un système de transports gratuits des clients vers les supermarchés, Auchan se voit infliger une amende avec sursis pour concurrence déloyale. Il sera mis fin à l’expérience, et il est intéressant de noter que le tribunal a considéré le préjudice subi par certains commerçants était plus moral que matériel ! Auchan n’aurait donc concurrencé que… l’ELRT !

Conséquence plus directe et roubaisienne : en juillet également, la fermeture annoncée du Monoprix de la rue Pierre Motte pour la fin de l’année 1976 ! On parle quelques semaines plus tard déjà de l’arrivée de Darty…

Le centre commercial de Roubaix 2000 n’en poursuit pas moins ses activités d’animation.

Parmi les artistes prévus du 24 novembre au 4 décembre : les duettistes bretons Yves et Gilles avec le groupe régional Paroles, les kamikazes, démonstration de karaté, cascades japonaises, combats de samouraï, par deux jeunes professeurs de karaté de Tourcoing, MM Roger Boudrez et Michel Petit. En décembre, Remy Bricka homme orchestre, Harry Band danses de tout pays et pendant dix jours le mime Hervez Luc. Roubaix 2000 a-t-il pris son rythme de croisière ?

Amicale sans local

Le Jeudi 26 février 1976, est créé le foyer d’éducation populaire des Hauts Champs, suite à la volonté des parents d’élèves de l’école Brossolette de voir l’action éducative prolongée au delà du temps scolaire. Quels sont les souhaits formulés ? La création d’un foyer du 3e âge, d’un club de basket, de cyclotourisme, de ping pong, de photographie, de musique et d’une section de défense du consommateur. On retrouve dans cette création la tradition des amicales laïques et les vœux émis font immédiatement penser à toutes celles qui ont été créées à la fin du dix neuvième siècle (Turgot, Archimède…), ou à celles des années trente (Jean Macé Pasteur, Jules Guesde).

Le bureau de l’association Photo NE

Roland Losfeld, alors directeur de l’école Brossolette, également secrétaire de la fédération des associations laïques, réunit une trentaine de personnes intéressées. Assistent à cette réunion le vice président de la FAL, M. Plouvier, le représentant de la FLASEN M. Geerarts, M. Hendoux, animateur permanent FAL, Mme Szediak, responsable du conseil de parents d’élèves Cornec. Le bureau est élu, M. Depoortère en est le président, M.Losfeld secrétaire et Mme Flipot la trésorière. Il faut noter que certaines des activités souhaitées sont déjà mises en œuvre chez des particuliers. Il ne reste plus qu’à trouver des locaux…

En attendant, les activités cyclotouristes démarrent rapidement : des élèves de CE2, CM1 et CM2 effectuent des sorties dont le but est pédagogique : la découverte de l’environnement, avec la visite de l’établissement qui produit l’eau minérale de Willems, ou un travail d’enquête sur la douane de Toufflers sont les objectifs assignés à ces sorties à vélo. Quatre accompagnateurs et deux voitures assurent la sécurité d’un parcours étudié au préalable pour éviter d’emprunter des routes trop importantes.

Appartement de la Potennerie Rouge

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Pour avoir un de ces appartements, il fallait être marié depuis au moins un an, habiter la ville de Roubaix. La mairie de Roubaix avait un quota d’appartements dans ce nouveau lotissement pour les enseignants qui travaillaient sur Roubaix. Donc on a habité cet appartement, au numéro 2.

Nous étions au troisième étage. C’était beau, ultramoderne, mais il n’y avait pas d’ascenseur. Il y avait une cave, où l’on pouvait mettre les boulets pour le chauffage au charbon, et les vélos… On n’a jamais eu de vol. On mettait les caisses de bière avec l’argent, pour les livraisons de la Grande Brasserie Moderne…J’ai un souvenir sur le chauffage. Comme il n’y avait pas de chauffage permanent, en hiver les tuyaux d’eau étaient gelés, on nous avait dit qu’il fallait mettre des journaux autour des tuyaux et chauffer pour dégeler. Donc j’ai fait ça, et ça a failli mettre le feu à l’appartement !

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Le plan de l’appartement

On entrait dans un petit hall où se trouvaient les toilettes, ensuite, il y avait une porte qui amenait à la cuisine. Il y avait des éléments dans la cuisine, et dans un coin, un endroit pour mettre une cuisinière mixte : à l’époque, j’avais une Coussement, le grand chic !  Les cuisinières Coussement mixtes à feu continu, c’était quelque chose ! On faisait des pommes de terre au four là dedans !… Elle était mixte, il y avait deux brûleurs à gaz…Je crois qu’il y avait ensuite l’entrée de la salle de bains, la chambre, et le grand balcon.

Ensuite, venait le séjour, et une seconde chambre avec une double porte. On l’a ouverte, donc ça faisait un grand séjour. Il y avait un feu continu dans le séjour sur le côté. Ça ne chauffait pas très fort, mais c’était un feu continu qui était loué en même temps que l’appartement. C’était le chauffage au charbon, il fallait monter les seaux à charbon. La cuisine était grande, la salle de bains aussi. Pour chauffer la salle de bains, on devait laisser la porte ouverte. On devait chauffer à mort… Le chauffe-eau était une ELM Leblanc. Le feu continu, c’était une espèce de feu gris-noir… C’était un truc allemand. C’était de la fonte, parce que c’était difficile à chauffer, mais, une fois que c’était chaud…

Les équipements de 1954 pubs journaux

Pour avoir cet appartement, j’ai fait la demande à la mairie de Roubaix. A l’époque, il n’y avait pas de surloyer, tout le monde payait le même loyer. Je ne crois pas que c’était cher, non, c’était très raisonnable, mais on était deux à travailler…

On a été les premiers à avoir une télévision, parce que le voisin, la porte à côté, était représentant en télévisions. Donc, on a été pratiquement les premiers sur Roubaix à avoir une télévision. Et il y avait une antenne, justement, qui avait été installée par le CIL. C’était une Philips, et elle a duré douze ans ! La télé était dans le séjour. Les gens passaient chez moi. On regardait l’émission de Jean Nohain, 36 chandelles, il y avait aussi Cinq colonnes à la une…

Le parc était magnifique, il n’y avait pas de barrières, c’était bien entretenu, bien fréquenté…

Merci à Camille Mullié pour ce témoignage, Photos PhW

Ces appartements ont été construits par le CIL en 1953 et 1954. Ils font partie de la série commencée au Galon d’Eau et poursuivie au square des Près. Nous parlons de Potennerie Rouge à cause de la couleur des briques employées, et pour distinguer ce lotissement de celui qui le jouxte, dit la Potennerie Blanche, qui a été construit après de 1958 à 1960.

L’aumônerie des Trois Ponts

La question de l’implantation d’une église dans le quartier des Trois Ponts est posée dès la réalisation des logements situés autour de la rue de Maufait, avant la construction de la cité des Trois Ponts, au début des années soixante. On pense édifier un tel édifice, et l’emplacement est d’ailleurs prévu sur un plan de la future cité daté de 1963. Elle se trouve alors à l’angle de la future avenue de Verdun et de la future rue Léo Lagrange, ce qui sera l’emplacement actuel de l’aumônerie…

Le projet de la cité des Trois Ponts en 1963

Une aumônerie n’est ni une église, ni une chapelle. L’abbé Jacques Delfosse en donne la définition suivante : l’aumônerie reçoit tous les élèves qui souhaitent une réflexion sur la foi, sur l’évangile, sur la vie d’un chrétien à l’heure actuelle[1]. Les établissements scolaires voisins concernés sont le lycée Van Der Meersch, le collège Jean Jacques Rousseau et le collège Gambetta de Lys Lez Lannoy. Cette aumônerie est composée d’une grande salle où sont célébrées des messes et où se tiennent les grandes réunions, de quatre petites salles de réunion, d’un oratoire, et de l’appartement de l’aumônier.

 

Mais avant de parler de l’aumônerie des Trois Ponts, il faut évoquer celle qui fut inaugurée en avril 1957 par son Eminence le cardinal Liénart, évêque de Lille, qui se trouvait 380 rue de Lannoy. Ce « foyer catho » selon l’expression de la presse[2], a été réalisé avec le concours de générosités roubaisiennes. Une messe est célébrée par l’abbé Delva, aumônier des Turgotins[3], en présence de l’évêque de Lille, de l’abbé Carlier, curé de la paroisse Notre Dame de Lourdes. L’abbé Antoine-Marie Leclercq, futur aumônier des lycéens, dirige les chants de la cérémonie.

Monseigneur Gand inaugurant l’aumônerie des Trois Ponts

Vingt ans plus tard, le dimanche 20 novembre, c’est Monseigneur Adrien Gand vient à son tour inaugurer la nouvelle aumônerie des Trois Ponts, sise aux n°201 203 de l’avenue de Verdun. L’abbé Jacques Delfosse présente son aumônerie comme un lieu de libération par rapport à soi, par rapport aux idéologies qui nous agressent, par rapport au monde qui nous entoure. Qu’y fait-on ? La catéchèse, les retraites, des messes le mercredi et le samedi en fin d’après midi, un journal, des permanences, la préparation des camps de vacances…


[1] Nord Eclair 17 novembre 1977
[2] Voix du Nord avril 1957
[3] Elèves de l’Institut Turgot