Alfred Mongy sollicite, en 1901, la concession de plusieurs lignes de tramway autour de Lille, et notamment celles reliant Lille à Roubaix et Tourcoing par le nouveau boulevard qu’il a lui-même imaginé. Il obtient ces concessions en février 1904. Ce même mois, est créée l’ELRT, compagnie de l’Electrique Lille Roubaix Tourcoing, souvent appelée à l’époque compagnie des tramways Mongy parce qu’elle est chargée de réaliser et d’exploiter ensuite les lignes concédées à l’ingénieur par le conseil général.
Parmi ces lignes figure celle qui doit relier Lille à Leers en passant par Fives et St Maurice, Hellemmes, Flers, Hem, Lannoy et Lys, ce qui représente quinze kilomètres et demi. Elle portera l’indice 2, sera réalisée au cours des années 1906 et 1907 et mise en service l’année suivante.
Cette mise en service ne sera réalisée qu’après bien des difficultés, et tout particulièrement à Lille, alors encore enserrée dans ses remparts. En effet, partant d’un terminus situé sur la place des Buisses, le long de la gare, la voie devra franchir les fortifications de la ville, ce qui nécessitera des demandes d’autorisation nombreuses, notamment du ministère des armées, propriétaire des lieux. Le plan qui suit montre le tracé de la ligne et les ouvrages qu’elle doit traverser.
Après bien des discussions acharnées et l’opposition des militaires, les défenses sont déclassées en 1903, et la démolition devient possible. Gustave Delory, maire de Lille, demande au ministère l’autorisation de percer un chemin pour le passage du tramway. L’accord intervient en 1906 et les travaux commencent ; il se poursuivront deux ans avant qu’intervienne la mise en service. La photo suivante, prise à hauteur du boulevard Carnot, permet de se représenter le travail que représentait ce percement à coups de pelles et de pioches.
Le démantèlement se poursuivra jusqu’après la guerre. Au cours des années 20 les anciennes fortifications sont toutes démolies. Le terrain reste vide pendant quelques années ; c’est un lieu de promenade. Puis s’installe un bidonville surnommé « les dondaines », la zone étant toujours inconstructible. Les taudis seront finalement démantelés pour faire place au nouveau quartier d’Euralille.
Le journal de Roubaix nous informe en 1907 de la construction du dépôt de tramways situé à Leers et de l’arrivée des motrices neuves destinées à la ligne.
Celles-ci sont déchargées des wagons de chemin de fer à la gare de l’allumette, puis chargées sur des camions hippomobiles qui les amènent à Leers.
Ces motrices nouvellement arrivées sont du type 10, portant les numéros de 11 à 50 et 101 à 109. Elles seront les seules à parcourir la ligne jusqu’en 1956, date de sa suppression. Comme tous les cars de l’époque, elles reposent sur un truck moteur à deux essieux. Elles comportent 63 places ; leurs plate-formes sont fermées, avec des vitrages de forme arrondie, débordant sur les faces extrêmes. Elles portent à l’origine le triple écusson Lille-Roubaix et Tourcoing.
Lors de la fusion avec les Tramways de Roubaix-Tourcoing, et pour unifier l’aspect du parc, sera modifié par remplacement de leur face avant en 1924. Cette face sera désormais plate.
Mais dix ans plus tard, certaines d’entre elles seront rénovées et adopteront le style des motrices TRT de type 600 avec des vitres latérales arrondies dans le haut.
Quant à la ligne, elle est prête pour l’exploitation en 1908. L’inauguration, le 12 avril, est l’occasion de festivités : à Lys, la municipalité octroie une subvention de 50 francs pour leur organisation. On y met en place des jeux dans les cabarets du quartier du Fresnoy. L’ensemble des communes de la ligne sont traversées par les voitures pavoisées pour l’occasion.
Les officiels se réunissent au dépôt de Leers, nouvellement construit, qui peut abriter 50 voitures appartenant aux lignes Lille-Leers et Roubaix-Leers.
A suivre, la ligne pas à pas…