A l’origine, cette rue, dont l’orthographe a beaucoup changé avec le temps, est un très ancien chemin vicinal bordé de nombreuses fermes qui quitte, au hameau de Lomelet, entre la Grande Vigne et la Fosse aux chênes, le chemin de la Vigne pour mener à celui des trois Ponts. Il longe successivement le Galon d’eau, le Tilleul, et traverse finalement le hameau du Pile. Ce chemin, bordé de fossés, ne figure plus dans la liste des chemins vicinaux en 1838, et la nomenclature de 1861 indique qu’il a été converti en rue et qu’il est pavé sur toute sa longueur.
Dans le courant du 19ème siècle, la révolution industrielle se traduit par la construction d’usines textiles qui remplacent les champs. Il faut loger tous ces ouvriers et la rue de l’Hommelet voit alors s’élever à la place des censes des maisons ouvrières, organisées le plus souvent en courées. En 1845, on ne remarque plus qu’une seule ferme au milieu des habitations ouvrières.
Le Ravet-Anceau de 1885 n’en mentionne plus aucune. On ne trouve pratiquement plus le long de la rue que des courées et impasses dont l’impasse Balzac, rassemblant 67 maisons, dont on a raconté l’histoire dans un précédent sujet de ce blog.
Il faut nourrir cette population, et lui offrir les objets quotidiens indispensables. La rue est donc tout de suite très commerçante : En 1885, sur 80 maisons recensées le long de la rue, 20 estaminets, 16 commerces de bouche, et 15 autres commerces, qui représentent au total près des deux tiers des habitations en front à rue.
On y trouve également, au 112, la filature Mulliez frères, mais d’autres usines sont installées dans le voisinage, justifiant l’afflux populaire.
Avec ses commerces de proximité et sa population vivant dans les courées, la rue a déjà l’aspect qu’elle va garder presque un siècle. Il est à signaler que, vu le nombre d’enfants dans le quartier, on y édifie une école pour les filles au numéro 127, à gauche en venant de la grand rue , juste avant la rue de la Paix.
Au cours de son existence, la rue a toujours été très animée. Son dynamisme se manifeste par de nombreuses festivités et l’organisation annuelle d’une braderie renommée. La Voix du Nord de 1948 fait état d’une fête organisée par la « commune libre de l’Ommelet ».
Il faut attendre les années 70 pour voir évoluer la rue. A cette époque, la plupart des maisons sont au moins centenaires et ont été peu entretenues par leurs propriétaires. Dans le cadre de la démolition des taudis, la rue va retenir l’attention des autorités.
Le premier acte sera, en 1969, la démolition de 84 maisons constituant l’îlot Balzac prélude à la construction d’un immeuble de transit. Il sera suivi, l’année suivante, de l’opération Dumas-Mulliez concernant 80 maisons entre l’impasse Alexandre Dumas et la rue de St Louis. Est également concernée l’ancienne usine Mulliez et 79 maisons vétustes. On va construire à la place trois immeubles.
Puis on annonce, en 1971 sur étude de la CIL, la construction de 209 logements HLM dans le secteur Dumas-Mulliez délimité par les rues de l’Hommelet et St Louis. Les terrains en cours de libération et la livraison est prévue avant l’été 1972.
Une autre tranche est prévue l’année suivante qui concernera l’ensemble la zone située entre les rues Pellart, Lacroix, St Louis et Hommelet (22800 m²), mais les travaux sont différés et le côté rue Pellart toujours pas réalisé.
On entame en décembre 1971, de l’autre côté de la rue le chantier La Paix. On y démolit 132 logements pour construire un foyer Logement pour les vieillards comprenant 80 appartements, dont l’ouverture est prévue pour1974. Le foyer deviendra ensuite l’Ehpad du nouveau monde.
Nord Eclair titre : « les HLM poussent sur les anciennes courées ». Monsieur Chaban-Delmas se déplace pour constater les progrès de l’opération.
Plus bas dans la rue et côté ouest en face de l’immeuble Balzac, on démolit 54 maisons des impasses Vernet et Sévigné, ainsi que quelques maisons en front à rue de l’Hommelet côté est non loin de la grand rue, mais, ici, on ne prévoit pas de reconstruire : on pense déjà ménager de l’espace pour la future pénétrante qui aura finalement raison de tout le bas de la rue au niveau du carrefour avec la grand rue.
Après un statut-quo de quelques années, la percée de l’avenue des Nations Unies, longtemps à l’arrêt, finit par toucher la zone des rues Pellart et de l’Hommelet. L’avenue est prolongée par une vaste courbe débouchant boulevard Gambetta. Elle va causer la destruction de tout le bas de la rue de l’Hommelet entre la grand rue et la rue Pellart.
Ces démolitions se déroulent toujours de la même manière : C’est d’abord l’exode des propriétaires et locataires qui habitent, pour certains, depuis très longtemps le quartier. On retrouve à chaque fois les mêmes étapes : acquisition, relogement, avec tout ce que ça sous entend de déchirement pour les habitants expulsés, et démolition, suivie de la construction d’habitations où certains auront pu, peut être, être relogés sans quitter le quartier dans des immeubles neufs poussés sur les îlots démolis un quelques mois plus tôt… La rue de l’Hommelet, elle, aura complètement changé d’aspect au cours de ces opérations.
Les documents non légendées proviennent de la médiathèque de Roubaix et des archives municipales