En même temps que l’agrandissement de la place, au tout début du 20ème siècle, va intervenir un événement qui va changer sa physionomie : la construction de la banque de France.
En 1871 une succursale de Roubaix-Tourcoing pour cet établissement s’installe rue de Tourcoing, au 115 bis. On crée quelques années plus tard une annexe à Tourcoing. Rien ne s’oppose plus alors au rapprochement de la banque vers le centre de la ville. La vente des locaux de l’ancienne filature Grimonprez va être l’occasion de ce déplacement.
On construit l’immeuble dans l’alignement des anciennes constructions bordant la place. C’est un bâtiment néo-classique comportant un corps central à deux étages flanqué de deux ailes basses.
Dans l’alignement de l’établissement bancaire est érigée une habitation à un étage destinée au directeur de l’établissement. Une double porte donne accès au côté de l’habitation, ainsi qu’au jardin, qui se prolonge jusqu’au boulevard Gambetta. Le premier directeur en est Georges Thoyer.
On construit également sur la grand-rue un petit bâtiment à la curieuse toiture, qui semble coupée en deux, appuyée sur le pignon de la maison voisine. Pour garantir les caves de l’humidité, la ville fait construire un aqueduc qui se déversera dans le Trichon. La porte principale qui donne accès au public ouvre sur la place. Elle est située dans l’axe du bâtiment central.
Un article du Journal de Roubaix datant de 1909 explique que le marché aux charbons ayant disparu, s’installe un « marché aux puces » où les gens peuvent acheter toutes sortes de choses : « …marchandises les plus invraisemblables et les plus dépareillées : c’est le capharnaüm roubaisien… d’où peuvent bien sortir tous ces débris, toutes ces misères ? ».
Une participante aux ateliers mémoire témoigne qu’on trouvait dans sa jeunesse sur ce marché jusqu’à des dentiers et des paires de lunettes usagées. Elle explique que son grand-père n’achetait jamais ailleurs ses lunettes !
Le tramway n’a pas tardé à investir la place. Très vite une ligne de la compagnie des Tramways de Roubaix-Tourcoing, venue du boulevard Gambetta et se branchant en « Y » sur la ligne de la grand rue longe le trottoir des numéros pairs avant de s’écarter pour prendre son virage vers le boulevard. Cette voie, qui rejoint la grand place par la rue Pierre Motte, permet de désengorger la ligne de Wattrelos entre les deux places, et rend inutile un doublement de la voie dans la grand rue, doublement dont l’évocation soulève un tollé chez les commerçants. La photo montre une motrice de la première série prête à négocier courbe et contre-courbe.
Lors de la mise en service des cars « Mongy » en 1909, les quelques voies du terminus Roubaisien sont placées le long du trottoir de la banque de France. Une courbe à 90 degrés permet aux rames d’accéder à la chaussée opposée du boulevard Gambetta en direction de Lille.
Ce terminus est également employé à l’époque par d’autres, telle la ligne S, à destination de Hem, de l’Électrique Lille – Roubaix-Tourcoing. Le tramway S emprunte le boulevard Gambetta avant de prendre la rue du Coq Français. On voit sur la photo qui suit une motrice à essieux de l’ELRT de type 300. Derrière, une remorque placée là à poste fixe sert de cantine pour le personnel. L’autre photo, très postérieure, montre deux motrices 500, à destination de Lille.
A ce terminus est adjoint un vaste kiosque dont le soubassement bas est maçonné et les parois complètement vitrées. Le toit est plat, à la différence des kiosques de la compagnie des TRT qui présentent une toiture à quatre pentes douces. Un peu plus tard, on accole un urinoir au kiosque-abri des trams. L’odeur qui s’en dégage alimentera les conversations de roubaisiens pendant des années !
Dans les années 50, on organise un parking en arêtes de poisson pour sacrifier aux besoins accrus de places de stationnement. L’opération se borne à matérialiser les places par de la peinture.
La démolition du kiosque surviendra en 1954, en vue de la modification du tracé de la ligne due au report du terminus du Mongy à la grand Place. Les journaux s’entendent pour saluer la disparition de l’urinoir.
A suivre.
Les documents proviennent de la médiathèque et des archives municipales.