La plaine de Beaulieu

Vue aérienne IGN 1951

La vaste plaine de Beaulieu était constituée de terres agricoles. Entre le quartier du Beau Chêne (sur la gauche de la photo aérienne) et le hameau de Beaulieu (sur la droite de la photo) regroupé autour de l’église Notre Dame de Bon Conseil dont nous reparlerons bientôt, il n’y a que de larges espaces de forme rectangulaires avec quelques fermes : le grand Beaulieu, visible en bas à droite de la photo et le petit Beaulieu. C’est là que les urbanistes des années soixante vont implanter une nouvelle cité, estimant que le site est privilégié, par le fait qu’il soit le plus haut de Wattrelos, et qu’il soit à proximité du centre de la ville.

La maquette de la ZUP publiée dans NE

En février 1964, lors de la présentation de la maquette de la future zone de Beaulieu, on annonce la construction de 2.400 nouveaux logements et une augmentation probable de dix mille habitants pour la commune de Wattrelos. La réalisation se fera en trois étapes. La fin des travaux est prévue en 1970. Mais on voit plus loin que le logement. Il faut prévoir des équipements collectifs. Trois groupes scolaires d’un total de 23 classes de garçons et 21 classes de filles, 17 classes maternelles, deux écoles maternelles. Avec équipement sportif, salles vestiaires et douches.

Puis la ZUP qui fait 50 hectares va comprendre un stade de compétition, un gymnase, une piscine couverte, des terrains de jeux pour les enfants. Pour le domaine socio-médical, une halte garderie est prévue. Un équipement commercial, nécessaire à l’approvisionnement de la population : on prévoit trois centres principaux, l’un au cœur même de la cité, le second à l’ouest, le troisième à l’est. Une vingtaine de commerces seraient ouverts dans la cité ? On parle d’une nouvelle église à proximité de la Baillerie ?

Le premier chantier de Beaulieu Photo NE

En juin 1965, une première tranche de 342 logements (182 collectifs et 160 individuels) est commencée. La première tranche a démarré en octobre 1964, et le gros œuvre est bientôt en voie d’achèvement à la fin de l’année. Le samedi 12 juin 1965 à 11 heures, le Préfet du Nord Pierre Dumont inaugure ces logements qui ont été réalisés par le CIL de Roubaix Tourcoing pour le compte de la société anonyme le Bien être familial.

L’inauguration du 12 juin Photo NE

L’agencement intérieur de l’appartement témoin a été réalisé par les établissements Desmarchelier rue Henri Briffaut meubles et appareils ménagers, la décoration et l’ameublement ont été confiés à M. Henri Ducoulombier décorateur, maison Rido décor, place du Crétinier Wattrelos. Cette réalisation va entraîner des aménagements routiers, pour réaliser la future « ceinture routière » de la ZUP de Beaulieu : on va procéder à l’élargissement de la rue Leruste, de la rue de la Boutillerie, et de la rue de la Baillerie jusqu’à 8,50 ou 9 mètres. La rue Vallon et la rue de Beaulieu seront également restaurées.

L’appartement témoin Photo NE

à suivre

Boulangerie Destriez

Au début des années 80, alors adolescent, j’habitais rue Gabriel Péri, à mi-chemin entre la place de Wattrelos et le Sartel. J’avais pour habitude, en rentrant du collège, de me rendre à la boulangerie Destriez pour y acheter les fameux puddings maison ou la délicieuse baguette aux raisins, enroulée dans son emballage bien identifiable.

Cette boulangerie, située à l’angle de la rue de France et de la rue Négrier, était l’un des derniers commerces qui subsistait alors dans cette rue qui compta près d’une vingtaine de boutiques en tout genre dans les années 70 ; librairie, boucherie, coiffeur, garagiste, imprimerie, épiceries, boulangeries…et même un vendeur de chapeaux.

A cette époque j’ignorais qu’Alain Destriez était le « représentant » de la quatrième génération de boulangers et que ce commerce avait plus de 75 ans.

C’est en effet au début du 20ème siècle que le couple (Alphonse) Pollet- (Madeleine) Briffaut (de la famille du Maire de l’époque, Henri) ouvre un commerce à l’angle de la rue de France et de la rue Négrier. Si on y trouvait bien évidemment du pain, le magasin faisait également office d’épicerie…et de coiffeur. Le concept de multi-services n’est donc pas récent !

Le premier commerce dans les années 1920

Dans les années 20, un des fils Pollet (également prénommé Alphonse) prend avec son épouse Madeleine Reuscart, la succession de ses parents et limite son activité à la boulangerie.

Mme Madeleine Reuscart épouse Pollet, derrière son comptoir

C’est en effet au début du 20ème siècle que le couple (Alphonse) Pollet- (Madeleine) Briffaut (de la famille du Maire de l’époque, Henri) ouvre un commerce à l’angle de la rue de France et de la rue Négrier. Si on y trouvait bien évidemment du pain, le magasin faisait également office d’épicerie…et de coiffeur. Le concept de multi-services n’est donc pas récent !

Paule, leur deuxième fille, épouse dans les années 40 un dénommé Jacques Destriez , alors apprenti dans la boulangerie. Salarié par ses beaux-parents, ce dernier reprend le commerce avec son épouse et élargit son activité en proposant des gâteaux et pâtisseries diverses en plus de la traditionnelle boulangerie.

Le couple Pollet-Destriez a une fille et deux garçons (Alain et Christian) et c’est « naturellement » que ces derniers suivent les pas de leur père en devenant à leur tour apprentis boulangers-pâtissiers.

En 1975, Alain et son épouse Evelyne, reprennent le commerce qu’ils gèrent jusqu’en 1994, date à laquelle Alain passe le flambeau à son frère cadet Christian…qui était auparavant salarié dans cette entreprise familiale.

Alain Destriez en compagnie de son épouse, ses parents Jacques et Paule et de ses enfants.

Christian dirigera la boulangerie  jusqu’en 2013 et cédera son affaire à Isabelle et Marc, les actuels propriétaires, qui ont dignement repris le relais à la tête de ce commerce centenaire.

La boulangerie de nos jours

Publicités cyclistes 1900

Ces publicités ont été extraites principalement des pages du Journal de Roubaix. Beaucoup de textes, peu d’images, pas de héros encore, nous sommes en 1900. L’histoire est à suivre…

Couvreur et Debeuf Concessionnaires des marques parisiennes et américaines, rue de la gare 68

Constantin Dépositaire Peugeot dès 1899, Rue Pauvrée 26

Cambien Ernest vélos et machines à coudre, Boulevard de Paris 16

Dussart et Accou industriels rue Corneille

Maurice Garin concessionnaire La Française à Roubaix

Dussart & Accou montent en puissance

Constantin dépositaire belge

Clément, Cycles, mais aussi motocycles et voiturettes, boulevard de Paris 16

La chaussure Boucau cycliste créée en 1896, rue Pierre Motte 2

Le complet (pour) cycliste en 1899 ! rue Nain 20

Vroman sports

L’une des premières sinon la première entreprise de fabrication d’appareils de sports, la société Vroman sports. Un choix de publicités diverses.

Voir notre article sur l’histoire de la maison Vroman !

Le premier super marché

Le boulevard des Couteaux se trouve entre ses bâtiments collectifs et ceux de la Mousserie. Une grande concentration de population que les commerces du Sapin Vert ne suffisent pas à ravitailler. Cette situation, une cité et peu de moyens, n’est pas unique mais c’est à Wattrelos qu’on va lui trouver une solution. En 1960 va s’y installer un super marché. Le premier du genre.

Le projet de super marché Docks Photo NE

Qu’est ce qu’un« supermarché » ? Les points de vente en libre-service d’une surface inférieure à 400 m2 sont qualifiés de supérettes ou de libre-service. De 400 m² à 1.000 m² , la catégorie des petits supermarchés réunit des magasins plutôt urbains et axés sur l’alimentaire. De 1.000 m² à 2.500 m² , la catégorie des grands supermarchés réunit des points de vente plutôt ruraux, offrant un assortiment essentiellement alimentaire avec cependant un complément non-alimentaire plus développé en fonction des attentes de la clientèle. Le super marché de Wattrelos avec ses 1.300 m² entre dans la 3e catégorie.

Le chantier du super marché Photo NE

Le vendredi 8 avril 1960, Maurice Duquesne PDG des Docks du Nord vient inaugurer le nouveau super marché (en deux mots) des Couteaux. Il rend hommage à son promoteur Michel Delhaize. C’est lui, avec ses frères Georges et Etienne, qui a su traduire et adapter pour les consommateurs français les précieux enseignements qu’une sérieuse enquête menée aux Etats Unis en 1957 lui a permis de recueillir. Ce super marché, dit-il, c’est l’oeuvre de toute une équipe dynamique qui sait s’adapter aux événements mais sait aussi les précéder. Parmi les officiels, Melle Brienne représentant M. Hirsch Préfet du Nord, MM Delvainquière maire de Wattrelos et Holvoet adjoint. Lancry directeur des travaux municipaux, Constant commissaire principal, et le président de l’association des locataires de la Mousserie.

Pub ouverture Photo NE

Les visiteurs vont apprécier les vastes proportions harmonieusement mises en valeur par une décoration du meilleur goût. Des allées larges garnies du plus extraordinaire éventail de produits de toute nature. Les dimensions sont importantes : 1.300 m² de terrain 760 m² de surface couverte, dont 400 de surface de vente, et 250 de réserves, trois chambres froides de 18 m² pour les denrées périssables. Logement du gérant, parking. Trois caisses de sortie. Les ménagères se procurent en entrant de très pratiques paniers roulants. Le super marché comprend 185 mètres de rayons pour l’épicerie, 84 mètres pour les liquides, et 20 mètres pour les fruits et légumes, 10 mètres pour la crémerie et ainsi de suite pour la boucherie, charcuterie, vollailes, poissons, mâtisserie, boulangerie, confiserie, plus les rayons non alimentaires (articles ménagers, entretien, droguerie) le tout abondamment garni. Isolé du grand passage, dans une jolie pièce de 50 m² attenante au super marché fonctionne le rayon textiles : confection, lingerie féminine, sous-vêtements, indémaillable, linge de maison. Le super marché docks peut être considéré comme la « station service intégrale » de la ménagère.

Vue intérieur Photo NE

Le nouveau super marché DOCKS de Wattrelos qui fonctionne en libre service est une grande réalisation qui fera date dans l’aménagement commercial du Nord. En fait c’est le premier supermarché en bordure de cité, avant Auchan. Son slogan : la qualité la meilleure au plus juste prix ! En 1908, Georges et René Delhaize avaient créé à Lille, la société des Docks du Nord. Ils bâtissent en 1960, dans le Nord à Wattrelos le premier super marché du groupe. C’est le début de l’ère des hypers. La même année, le premier supermarché Carrefour est ouvert à Annecy, Casino ouvre son premier super à Grenoble. L’année suivante, en 1961, Gérard Mulliez ouvre sous l’enseigne Auchan, dans le quartier des Hauts-Champs à Roubaix, dans une ancienne usine.

La ducasse du Sapin Vert en 1947

En 1947 la guerre n’est pas finie depuis longtemps, on se souvient encore des allemands quand ils se présentaient chez le marchand de légumes, corrects, impeccables, jamais un mot, du moment que qu’il n’y avait pas de résistance. Dans le quartier du Sapin Vert comme partout ailleurs, il y a eu des résistants, des fraudeurs et des gens paisibles. On ne donnait ni les uns ni les autres. Le 13 mai 1944, les anglais ont lâché 56 Tonnes de bombes sur le dépôt de locomotives de la rotonde lequel a sauté. Un témoin rapporte que des dégâts étaient encore visibles près de la rue Boucicaut en 1956.

La place du Sapin Vert autrefois Coll Particulière

Le dimanche commence tôt : dès 7 heures, réveil en fanfare par la Jeune Garde de Tourcoing. L’ambiance est très musicale, à 11 heures concert apéritif dans tous les cafés du quartier. Les commerçants du Sapin Vert organisent un grand prix cycliste en début d’après midi sur un circuit de 60 kilomètres. Départ devant la maison Goset 6 rue du Mont à Leux et arrivée devant la maison Charlet 75 rue du Tilleul. Il y a pour 7.500 francs de prix avec le concours de l’Excelsior de Roubaix. La course est réservée aux débutants. Le Club cynophile fait ensuite une démonstration de chiens de défense, rue des Villas avec le concours du Club Cynophile Tourquennois. À 19 h 30, l’Olympique artistique wattrelosien va exécuter ballets et danses au rond point de l’avenue Joffre et de la rue du Haut Vinage. Le lundi 22 septembre, une braderie se déroule à partir de 14 h 00 rues du Tilleul, de l’Union et du Mont à Leux. À 21 heures, rue du Sapin Vert, il y a un feu d’artifice.

En 1947, Yvette a dix sept ans. Elle est née pendant une précédente ducasse du Sapin Vert. Fille de commerçants du quartier, elle travaille chez chez La Vogue à Tourcoing. Elle voit les préparations de la prochaine ducasse. Deux ou trois jours avant, il faut monter les manèges, et la ducasse va durer deux jours. Les commerçants du quartier y participent activement. Le boulanger offre gratuitement petits pains et petits bonbons, le samedi soir pour la retraite aux flambeaux, et il y avait des bons pour aller sur les manèges, offerts par l’union des commerçants.

La Reine du Sapin Vert 1947 Photo Coll Arickx

Puis on s’apprête à élire la Reine du Sapin Vert. L’élection est organisée par l’union des commerçants. Les candidates devaient s’inscrire au café Vanelslander où avait lieu également l’élection. Le jury était composé de commerçants et d’autres personnes. Les filles devaient défiler devant le jury en soulevant la robe pour montrer les jambes. Les candidates sont les jeunes filles du coin, comme Yvette et ses copines du quartier. Il y a Mimi, Jeannine et trois autres filles. Les robes sont prêtées par le comité des commerçants. Yvette sera la Reine 1947. La Reine et ses dauphines ont défilé dans les rues du Sapin vert, sur un char, le dimanche suivant la ducasse. Elle se mariera deux ans plus tard, après avoir fait la connaissance de son futur mari au dancing Métro situé au Laboureur à Wattrelos grâce à Mimi qui était une candidate à l’élection.

Le lundi de la ducasse, on dansait dans tous les cafés au son de la musique (disque ou radio) sauf dans un café où il y avait un orchestre. Les commerçants avaient prévu de faire l’élection du plus beau bébé mais cette idée a été annulée on ne sait pour quel motif.

Remerciements à Patrice pour le témoignage et à Michèle pour la relecture et la correction

Le marché du Laboureur

Le marché du laboureur à Wattrelos a lieu le dimanche matin. Un must, tu peux pas test ! T’arrives et déjà on te donne un tract politique tandis qu’un groupe de musique typique te joue « El condor pasa » à la flûte de Pan. T’es tout de suite dans l’ambiance ! Avec ton panier à provisions, tu slalomes entre les poussettes et les gens qui discutent des dents du petit dernier. Une odeur de poulet rôti du dimanche te saisit les narines mais tu passes devant la rôtisserie en te disant qu’il y a trop de monde et que tu vas te rabattre sur des nouilles sautées à la vietnamienne. Tu remontes le flux de gens qui mangent des nems, c’est fou ce que les gens aiment bien manger des nems le dimanche matin ! Tu es tout surpris d’entendre une chanson de Marc Aryan qui sort d’une sono. C’est le vendeur de cd improbables. Tu cherches une compil’ de Charden avant Stone ou un pirate live de Frédéric François ? Il l’a ! Tu vas discuter de la météo tout en achetant des gaufres artisanales à la vendeuse qui, telle Charlie Chaplin dans Les temps modernes, et par tout les temps, roule des boules de pâte (pas sous les aisselles quand même !) et retourne ses moules à gaufres qui vont « Crouic, Crouic » . Ah les gaufres ! Surtout ne quitte pas le marché sans en acheter.

Le marché du Laboureur Photo VDN

Tu arpentes les étals des marchands de fruits et légumes où un sympathique vendeur t’explique la différence entre un kaki dur et un kaki mou, quand une irrésistible envie de « demander Nord Éclair, de demander La Voix du Nord » te saisit, vas donc savoir pourquoi ? Un conseil si le marchand de journaux ambulant passe près de toi en poussant son cri de guerre qui fait de Tarzan un joueur de seconde division, bouche-toi les oreilles parce que ce stentor de la PQR pourrait te faire perdre un peu de ton audition. Et puis au marché tu peux aussi acheter de la mercerie comme des fermetures Eclair si tu es du genre à te faire péter la braguette régulièrement, tu peux aller à la camionnette du « Porc d’attache » (jeu de mot ! Je remets un franc dans le nourrain) Mercure d’or 2003 pour sa salade de museau que le monde entier nous envie (ou pas…), tu peux aussi acheter des bonbons de toutes les couleurs, des fleurs pour ceux et celles que tu aimes à prix démocratique : « Allez, on en profite 3 bouquets achetés, un gratuit ! Mais madame, j’ai pas autant d’amoureuses !! » Tu peux admirer la façade art nouveau de l’église Sainte-Thérèse. Tu peux enfin retrouver des amis au palais des sports et boire une bière ou deux… Bon, c’est pas tout ça mais faut que j’aille réchauffer mes nouilles (non ce n’est pas une contrepèterie !)

La ducasse du Sapin Vert en 1970

Septembre 1970 je rentre en CM2 à l’école de garçons Jean Zay, qui n’était pas encore mixte à l’époque, dans la classe de M. Martineau, un petit homme moustachu à l’éternelle blouse de Nylon bleue. Sans doute pour adoucir le choc, on offre aux élèves des tickets pour des tours de manèges gratuits lors de la ducasse du Sapin-Vert qui a lieu le week-end suivant.

Vue de la ducasse Photo NE

Ah la ducasse ! Elle part de la place du Sapin-Vert où se trouve la “chenille” un manège vieillot mais que nous aimons bien car lorsque la toile, mue par des roues de vélo aux multiples rayons, recouvre complètement les voitures en bois, les filles se mettent à crier alors qu’on ne leur a même pas encore pincé les fesses ! On passe devant le camion du marchand de barbe-à-papa où j’achetais mes fameux chewing-gums à la cannelle avec mes images de monstres à coller (j’en ai déjà parlé, j’étais cinglé de ça), pour descendre la rue du Sapin-Vert. Là, on trouve un marchand ambulant qui vend des raquettes en plastique avec un ballon à gonfler accroché par un élastique, des crécelles en bois, des sifflets imitant le chant du rossignol. Mais ce qui nous intéresse le plus, parmi ce bric-à-brac coloré, ce sont des petites balles en tissu, de la taille d’un œuf, bourrées de chiquettes de papier très serrées et attachées à un élastique très long. On fixe l’extrémité de l’élastique au bout du doigt et hop ! On lance la petite balle de la taille d’un œuf sur le chapeau d’un type ou la crane d’un autre. La balle nous revient instantanément dans la main puis on prend l’air le plus innocent possible. Attention hein ! Il faut être adroit et rapide et choisir un type qui a l’air brave sinon gare au retour de l’élastique !

Vue de la ducasse Photo NE

On passe devant les manèges aux pompons, délaissant tank, voitures de sport ou autobus qui sont faits pour les petits. On snobbe encore plus le manège des canards qui voguent sur de l’eau un peu croupie et dont les yeux lumineux les font ressembler à des cousins de Donald Duck sous amphétamines, pour aller directement aux autos-tamponneuses. Là, faut faire gaffe de pas trop se frotter à la bande de la Mousserie, descendue de leur quartier pour l’occasion, Un décor en bois peint représentent des couples de jeunes qui dansent le twist, enfin j’imagine qu’ils dansent le twist, vu qu’ils se tortillent. Il y a de grosses notes de musique et même une clé de sol dessinées sortant d’un juke-box. Deux énormes baffles rouge et noir crachent le tube des Aphrodite’ child “It’s five o’clock” mais la voix de Demis Roussos et les arpèges de Vangelis sont couverts par le bruit des cris, des rires et des chocs des voitures les unes contre les autres. La classe c’est quand tu arrives à faire monter une copine avec toi, pas question de lui laisser le volant bien sûr, ton père l’a répété plusieurs fois déjà : Il faut se méfier des femmes au volant ! Et puis c’est qui l’homme, hein ? Bon, si la copine est sympa, on ira, peut-être, jusqu’à lui offrir une bague du manicrac. Plaisir d’offrir, joie de recevoir… même si on préfèrerait plutôt se payer un squelette en plastique fluo, ou encore mieux, un porte-clé avec une femme nue qui fait la danse du ventre !

Vue de la ducasse Photo NE

Pas mal de stands de tir se trouvent dans cette ducasse. Carabines à plombs pour viser une petite cible rouge et blanche (level 1), casser une pipe blanche (level 2) voire une ficelle (Level 3) ! Stand de fléchettes avec ballons à crever mais mon préféré : un stand avec fusil à flèches. Il faut viser des silhouettes de “Bunny et ses amis” réalisés en bois peint. Une fois atteinte, la silhouette bascule et fait stopper une roue qui tournait derrière elle. La roue s’arrête sur un chiffre compris entre 1 et 4. Quelquefois la ventouse de la flèche reste collée sur la silhouette, ça veut dire qu’on est vraiment balèze ! En fonction du chiffre obtenu on reçoit des bâtons de nougat enrobés dans du papier brillant mais là où c’est bizarre c’est qu’on peut garder les nougats pour les échanger à la fin de la ducasse contre un Bambi en peluche. Mais attention, il en faut vachement des nougats pour obtenir ce satané Bambi ! Et puis, j’aime bien les nougats moi… Bof de toute façon il était moche ce Bambi, c’était même pas le vrai, le vrai il a pas un pelage mauve ! Et puis des peluches, je peux toujours essayer d’en gagner une à la loterie. C’est simple : on achète des petits tickets roses roulés dans une bague en plastique, on déroule pour voir si les numéros correspondent à ceux qui ont été désignés par le hasard de la grande roue qui tourne. Parfois on gagne une poupée géante, un pistolet en plastique ou un service à café en alu mais on peut aussi bien se retrouver avec un kilo de sucre en morceaux et là c’est la honte car tu dois te trimballer ton paquet de sucre pendant toute la ducasse !

Le top du top c’est de gagner une bouteille de mousseux. Il suffit d’aller au stand qui présente plein de bouteilles vides. Là on te donne trois petits anneaux en bois et il faut essayer d’entourer le goulot d’une bouteille avec l’anneau. Oui, ça parait facile comme ça mais en fait non. Je n’ai jamais gagné de bouteille ! Bah, ça m’aura évité de faire comme mon pote Bernard qui a gagné sa bouteille et a tenu à la boire en cachette. On a dû le raccompagner chez lui, il avait vomi partout du mousseux chaud et pissé dans son froc !

Le Transalpin Photo ducasses du nord

Pas de manège de chevaux de bois à cette époque, non la ducasse du sapin-vert est une ducasse moderne ! Que les derniers manèges dans le vent comme… Le transalpin ! Le roi des manèges, situé tout au bout de la ducasse, comme s’il fallait le mériter, à l’intersection de la rue des écoles. Un tour en avant, un tour en arrière, ça file, ça décoiffe. On fait la queue pour les tickets au guichet. Faut dire que le type dedans prend son temps et toutes les minutes il allume son micro et meugle : “Allons-y jeunesse, en voiture, en voiture ! Venez rouler, venez vibrer. Le transalpin n’attend pas !”. C’est aussi le manège le plus cher : 1,50 franc alors que les autres sont à 1 franc. Mais ça vaut la peine, seulement… faut aimer la vitesse, c’est pas pour les chiffes-molles et les dégonflés ! Quand on a tout dépensé nos sous, s’il nous reste quelques pièces au fond de la poche, on se paye des croustillons hollandais tout chauds, avec le sucre glace dessus. Là, tu comprends pourquoi, faut surtout pas en manger avant d’aller dans le transalpin, surtout quand il part à l’envers ! C’est gras les croustillons, pas faciles à digérer…

Les avions Photo NM

Quelle chance j’ai d’habiter dans un quartier avec une si belle foire aux manèges ! C’est marrant de penser que là, juste derrière le mur, il y a mon école et sa cour de récré. Je suis dans un autre monde, on est dimanche et demain la cloche sonnera, on rentrera en classe en se disant que, tout près, de l’autre coté du mur, il y a les manèges… Vivement 16h30 mes parents voudront peut-être bien que je fasse un ou deux tours avant de rentrer à la maison de la rue Marcel Vaneslander et puis j’ai envie d’aller dans les avions… Ouais je sais c’est pour les petits de 8 ans et j’ai dix ans mais peut-être qu’avec un peu de bol les copains ne me verront pas !

Le manège Transalpin est extrait d’un magnifique site sur les manèges de foire dont voici l’adresse :http://ducasses-du-nord.e-monsite.com. Régalez-vous !