Les huileries de Roubaix et d’Odessa

Juste avant la première guerre mondiale apparaît dans le Ravet-Anceau, au 121 de la rue d’Alger, l’entreprise des huileries de Roubaix, dont le directeur est M. Desprez. Elle forme un vaste ensemble limité par la rue d’Alger, la rue de Cartigny, et le mur du cimetière.

Document coll. particulière
Document coll. particulière

Cette société fonde en Russie une huilerie et savonnerie à Odessa, à la direction de laquelle elle place M. Thieux en 1914. L’entreprise roubaisienne est dirigée en 1918 à 1921 par M. Grelaud. Ses affaires semblent prospérer, puisque, avec la participation de la banque Worms, elle est à l’origine de la fondation de la Société d’études industrielles et commerciales, dont le but est l’exploitation d’entreprises agricoles, industrielles et commerciales en France, dans les colonies, et à l’étranger. Pourtant, la société éprouve des difficultés financières au début des années 20, et elle doit se résoudre à dissoudre cette filiale. Elle prend en 1927 la dénomination de Société des huileries de Roubaix et d’Odessa, avec pour directeur M. Ego.

 

Document archives municipales
Document archives municipales

En 1939 la raison sociale de l’entreprise change et devient les Huileries Darier de Rouffio, huiles comestibles. En 1953, nouveau changement : on trouve maintenant au 121 la société Chimie dans l’agriculture (Y. Dubois) et la société Lestarquit. S’y ajoutent en 1965 France pigments et les transports Wenderbecq et fils, transporteur. En 1973, on ne trouve plus que Y. Dubois, fabricant cette fois ci des aliments, et les transports Wenderbecq. S’y adjoignent en 1979 les SARL Omnico et Taquin, puis en 1981 Hyperemball, une société d’emballage.

 

L'usine en 1965 – Document IGN
L’usine en 1965 – Document IGN

La société des huileries de Roubaix et d’Odessa se préoccupe très tôt de son approvisionnement en matières premières et de l’expédition de sa production : on trouve trace d’un projet de raccordement ferroviaire avec le quai de Marseille, daté de 1920, et non abouti. La voie aurait traversé des terrains appartenant à la société pour accéder au quai. Finalement, la direction opte pour un raccordement à la voie menant à la gare du Pile. La voie traverse par une courbe serrée la rue d’Alger, pour rejoindre la voie de la compagnie des chemins de fer du Nord en traversant les emprises de la société Amédée Prouvost. Ce raccordement est déjà visible sur les photos aériennes de 1932.

 

Le raccordement prévu avec le canal - Document Archives municipales 1920
Le raccordement prévu avec le canal – Document Archives municipales 1920

Par ailleurs, on pouvait remarquer jusqu’à une époque récente un ouvrage militaire fortifié en béton dépassant le mur d’enceinte de l’usine à côté de son issue s’ouvrant rue de Cartigny et empiétant sur cette même rue. Il apparaît que cette casemate, qui n’apparaît pas sur les photos anciennes, a été construite lors de la dernière guerre, sans doute à l’instigation de l’occupant allemand.

 

La casemate de la rue de Cartigny – document IGN
La casemate de la rue de Cartigny – document IGN

 

Du coton à la ruche

Il existait à Roubaix au début du vingtième siècle trois usines Cavrois-Mahieu : la filature de coton de la rue Chanzy, créée en 1865, la filature et le tissage mécanique de la rue Montgolfier fondés en 1887, et l’usine de la rue Carpeaux datant de 1897. C’est ce dernier établissement, situé au n°47 de la rue Carpeaux, qui nous intéresse. En 1914, les deux filatures de coton Chanzy et Carpeaux formaient un ensemble de 50.000 broches à filer et 20.000 broches à retordre et employaient 300 ouvriers. La maison Cavrois Mahieu fabriquait alors des filés de coton, cardés et peignés simples, retors et câblés, gazés et non gazés, mercerisés.  Ses productions firent l’objet de nombreux prix, notamment lors de l’exposition internationale de Roubaix en 1911. Léon Cavrois puis ses fils dirigèrent cette entreprise.

Les usines Cavrois Mahieu Coll privée
Les usines Cavrois Mahieu Coll privée

En 1953, l’usine de la rue Carpeaux est dénommée La Cotonnière de Carpeaux, anciens établissements Cavrois Mahieu. Il semble qu’elle ait cessé toute activité en 1955. Le laboratoire de fabrication pharmaceutique Cruet occupe les lieux en 1961. En 1973, c’est la S.E.P.P.S, toujours productrice de spécialités pharmaceutiques, à laquelle succéderont pour un temps les laboratoires Schering, avant qu’ils s’installent à Lys Les Lannoy.

Publicité Cruet Coll Particulière
Publicité Cruet Coll Particulière

Les bâtiments font l’objet d’une opération immobilière en 1982, on commence à réhabiliter et à reconvertir les anciennes friches industrielles. Mais dès 1983, un projet de ruche d’entreprises est envisagé à Roubaix et c’est dans le site rénové de la Cotonnière Carpeaux –le nom lui était resté- que la ville de Roubaix et le Conseil Général  vont installer ce pôle d’entreprises créé sur le principe de la mutualisation des services (standard téléphonique, cafétéria, télécopie, secrétariat, informatique…). C’est la quatrième opération montée dans le Nord, après Saint Pol sur mer, Denain, Maubeuge.

Projet immobilier Carpeaux Pub NE
Projet immobilier Carpeaux Pub NE

Le projet est mis en œuvre en septembre 1988, sous la houlette d’une directrice, Annie Favrie. L’inauguration de la Ruche d’entreprises intervient le 7 février 1989. Le Conseil Général vient en autobus à Roubaix pour visiter et inaugurer cet établissement qui fait honneur à Roubaix et au département. Sa capacité d’accueil est de quarante créateurs d’entreprise, et déjà seize sociétés s’y sont implantées pour cinquante emplois créés.

Inauguration de la ruche Photos NE
Inauguration de la ruche Photos NE

La rue Turgot

Elle reprend le tracé du très ancien chemin de Tourcoing, classé en première place dans le recensement préfectoral des chemins vicinaux pour Roubaix en 1823. Ce chemin y est décrit comme se terminant « près du cabaret de l’Union ». On le voit sur le plan cadastral du consulat passer à peu de distance de l’ancienne ferme du Fontenoy. Le cadastre de 1845 nous le montre partiellement construit, alors qu’on ne trouve pratiquement plus de terrains non bâtis dans celui de 1884 : Les entreprises se partagent la partie nord, proche du canal, et les maisons individuelles se cantonnent à la partie sud.

La viabilisation de l’ancien chemin prend très longtemps, en particulier dans sa partie nord : En 1863, une pétition est envoyée par les riverains. Ceux-ci demandent le pavage du tronçon situé entre la ferme Delcroix (au coin de l’actuelle rue Meyerbeer) et le lieu-dit l’Union, alors que la partie plus vers le centre de Roubaix est déjà pavée « depuis plusieurs années ».

Le chemin n°1 en 1845 - archives municipales
Le chemin n°1 en 1845 – archives municipales

Ce chemin était bordé de fossés à l’origine. Ceux-ci, au fur et à mesure des constructions, sont plus ou moins comblés, et l’écoulement des eaux se fait mal. Les riverains demandent la construction d’un aqueduc central en 1868, alors qu’on vient de tracer le canal qui forme désormais l’extrémité de la rue. Celle-ci est d’abord baptisée rue du Cul de Four, puis prend son nom définitif en 1871. Pourtant le pavage n’existe toujours pas partout ; il est défoncé et peu praticable là où il existe.

Dans les années 70, on se propose de porter la largeur de la rue à 12 mètres sur tout son parcours et on publie à cet effet un plan d’alignement. En attendant, les habitants se plaignent de « l’état d’insalubrité » de la rue, les fossés servant de « dépôts d’immondices de toutes espèces ». On vise notamment l’usine à gaz et l’entreprise Auguste Morel, qui y déverseraient leurs effluents. Pour faire avancer les choses, les riverains proposent en 1875, alors que va s’installer l’école de natation, de participer pour moitié aux frais d’installation de l’aqueduc, de poser les bordures de trottoir en suivant l’alignement, et à compléter le revêtement de la chaussée sur ses accotements.

Document archives municipales
Document archives municipales

 

Enfin, le service de voirie prépare un projet pour la construction de l’aqueduc en 1876. Les travaux sont mis en adjudication. M. Charles Larnou est chargé des travaux, qui sont finalement réceptionnés en 1884.

La rue est, dès le départ, très commerçante, en particulier dans sa partie sud. En 1895, pratiquement chaque rez de chaussée est un commerce, et on trouve en particulier de nombreux estaminets.

Deux estaminets de la rue, avant la première guerre – documents médiathèque de Roubaix
Deux estaminets de la rue, avant la première guerre – documents médiathèque de Roubaix

Par contre, le côté impair et la partie nord est dévolue aux entreprises: l’entreprise Morel (huiles et graisses), l’usine à gaz, et, près du canal, le peignage de l’Union, installé de chaque côté de la rue. Cette usine restera dans le domaine du textile, même si l’enseigne change ensuite : filature, puis retorderie et enfin bonneterie.

Cette rue a abrité également un école de garçons, dont le bâtiment, reconverti ensuite, existe encore aujourd’hui, et l’école de natation, qui, alimentée par les eaux du canal, a fermé ses portes à l’ouverture de la piscine de la rue des Champs.

 

document IGN 1962
document IGN 1962

Sur la photo aérienne, nous retrouvons notre rue limitée en bas à gauche par le quai de Gand et en haut à droite par la rue St Vincent. On voit que, du côté pair les installations industrielles prédominent, dont l’usine à gaz et ses réservoirs.

Mais la rue a subi une transformation complète dans la dernière partie du 20ème siècle : pratiquement toutes les constructions sont démolies pour être remplacées par des bâtiments modernes, certains terrains restant encore pour l’instant en friche. On a peine à retrouver des traces du passé de cette rue…

 

Photos Coll. particulière
Photos Coll. particulière

Des H.B.M. aux Hauts Champs

A la fin des années 20, le logement reste un problème à Roubaix. Les constructions, arrêtées entre 1914 et 1922 accusent un sérieux déficit. La population continue à augmenter et les taudis abondent. Le journal de Roubaix, en 1925, s’inquiète de cette crise du logement, et présente les premières réalisations de l’office municipal d’habitations à bon marché, maisons individuelles et immeubles collectifs.

Le Journal de Roubaix – 1925
Le Journal de Roubaix – 1925

Mais d’autres organismes se préoccupent également de ce problème et notamment la Maison Roubaisienne, société anonyme coopérative d’habitations à bon marché, dont le siège est situé 3 rue de l’hôtel de ville, propose à la ville un projet de lotissement sur une superficie de 1 hectare 95 situé derrière l’usine de velours Motte-Bossut. Ces terrains, limités par les rues Leconte-Baillon (qui prendra à cet endroit le nom de Jean-Jacques Rousseau, Beurnonville (future rue Emile Zola), Jules Michelet et du Chemin vert, appartiennent pour une bonne part aux consorts Descats, eux-mêmes héritiers Leconte-Baillon. Le lotisseur prévoit la vente de ces maisons individuelles aux acquéreurs : Monsieur Hache, le directeur de cet organisme, écrit en 1929 à la mairie que ces immeubles « sont destinés à devenir la propriété d’un certain nombre de mutilés et de fonctionnaires… ».

L'ensemble du lotissement – photo IGN 1962
L’ensemble du lotissement – photo IGN 1962

Dès 1928 la société, par la voix de son directeur, demande, prévoyant le drainage du quartier, l’autorisation de construire un aqueduc rue de Beurnonville à partir de la rue de Lannoy, puis la participation de la ville pour financer ces travaux. La rue de Beurnonville est alors une voie particulière, à peine tracée, puisque la société demande l’alignement à suivre pour creuser l’aqueduc.

Plusieurs types de maisons sont prévus, dont la taille et l’aspect diffèrent :Les alignements sont constitués de maisons de type E. à 1 étage (2 chambres) ou 2 étages (3 chambres). Leur plan est très classique : au rez de chaussée, un couloir latéral empiétant sur une première pièce (salon) ; puis, une pièce plus grande avec l’escalier placé dans l’alignement du couloir. Au fond une cuisine, précédant les Wc et une salle de bains. Le long de la cuisine, une cour. Au premier, deux chambres. Au second, lorsqu’il existe, une chambre supplémentaire et un grenier. Le Wc ouvre sur la cour, suivant la réglementation de l’époque.

 Plan et coupe d'une maison de type E à deux étages.

Plan et coupe d’une maison de type E à deux étages.

Ces maisons ont soit une, soit deux fenêtres au premier, selon le sous-type pour celles à un seul étage. Celles à deux étages n’ont toujours qu’une seule fenêtre :

Variantes de maisons de type E – photos Jpm
Variantes de maisons de type E – photos Jpm

A l’extrémité de ces alignements, on trouve parfois des maisons au toit à trois pentes de type C. Elles sont plus vastes que les autres, la porte centrale étant encadrée de deux fenêtres. On peut les trouver également combinées par blocs de deux. Ce type offre trois chambres à l’étage, dont une très grande. Ici, le Wc est placé à l’intérieur, dans la salle de bains :

 

Maison de type C – photo Jpm
Maison de type C – photo Jpm

Mais l’extrémité des alignements est le plus souvent constituée d’un type A, dont l’entrée forme un décrochement, type qu’on rencontre aussi assez souvent combiné par blocs de deux. Ce type de maison présente deux variantes, l’une présentant des murs de brique, l’autre revêtue de ciment.

Maisons de type A en bout d'alignement et en bloc de deux – photos Jpm
Maisons de type A en bout d’alignement et en bloc de deux – photos Jpm

Le second type présente également des différences en ce qui concerne les fenêtres, celle du rez-de chaussée est décalée vers le pan coupé et se prolonge sur celui-ci par une fenêtre supplémentaire.

Type A ciment en bloc de deux – photo Jpm
Type A ciment en bloc de deux – photo Jpm

Ce type offre un espace appréciable, une grande salle commune séparée par des portes battantes d’un salon sur la rue, un vestiaire, une salle de bains et une cuisine au rez de chaussée, trois chambres à l’étage. Le Wc est à l’extérieur, derrière la maison.

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Les travaux de viabilisation faits, la société se préoccupe de bâtir. En 1929, elle dépose un premier dossier pour la construction de 60 maisons. Le directeur des travaux municipaux donne un avis favorable et prévoit de revêtir les chaussées de Tarmacadam. Le conseil municipal accepte la construction et M. Gaston Duburcq, rue Inkerman est nommé commissaire-enquêteur pour mener l’enquête commodo et incommodo.

L’année 1930 voit aboutir à la mairie une autre demande pour la construction de 2 maisons type A1 rue de Beurnonville, ainsi que celle de 26 maisons rue Leconte-Baillon (J.J. Rousseau) : 3 type A1, 11 type E3, 6 type E2, 6 type E1. L’année suivante, la société envoie un dossier de construction pour 37 autres maisons rues de Beurnonville et d’Epinoy, comprenant 3 type C, 3 type A1, 4type E1 et 27 type E3. Toujours la même année, une demande complémentaire pour 78 maisons supplémentaires rue d’Epinoy et Zola, « ayant obtenu un nouveau prêt de la caisse des dépôts… ».

Elle dépose enfin en 1935 un dossier pour la construction de 15 maisons dans les rues Michelet et Zola, comprenant 6 type A1 et 9 type E3.

Une disposition typique : maisons basses encadrant un bloc de deux étages – photo Jpm
Une disposition typique : maisons basses encadrant un bloc de deux étages – photo Jpm

La consultation d’un Ravet-Anceau d’avant-guerre nous indique une population modeste avec en majorité, des employés (34 % et ouvriers (19%), un nombre important de fonctionnaires (17,5%), dont un nombre significatif d’agents de police, quelques commerçants et quelques retraités.

Si les fonctionnaires ne constituent pas la majorité des habitants, cet opuscule n’indiquant pas l’état de santé de la population, il est difficile d’assurer que les mutilés qu’avait prévus la Maison Roubaisienne sont bien présents en nombre significatif dans le lotissement…

La rue L. Loucheur, constituée uniquement de maisons doubles – photo Jpm
La rue L. Loucheur, constituée uniquement de maisons doubles – photo Jpm
Les documents proviennent des archives municipales.

Le cancer de la passerelle

Depuis plusieurs années, le Pont du Carihem qui date de 1973, est déclaré en grand péril. De nombreuses fissures sont apparues à cause d’un mouvement des murs de soutènement. Il faut agir, il en va de la sécurité de la circulation et de celle des riverains. Le pont est atteint du cancer du béton, réaction chimique entre cailloux et ciment. Le Pont du Carihem peut être sauvé, mais il faut reconstruire une partie des murs de soutènement et effectuer quelques réparations. Les remblais sont également en cause, car ils sont constitués d’un matériau expérimental constitué de résidus de soufre venant des Ets Kuhlmann, après une étude « positive » de la Direction départementale de l’Equipement. Ils devront être intégralement remplacés, ainsi que la chaussée. Ce qui va donner au chantier une durée approximative de huit mois.

Marteaux piqueurs en action septembre 89 Photo NE
Marteaux piqueurs en action septembre 89 Photo NE

En mars 1988, la décision a été prise à la Communauté Urbaine d’effectuer des travaux. Cela coutera  7 millions de francs. Le temps d’une délibération du conseil municipal, de son retour de la préfecture, de lancer les appels d’offre…ce n’est qu’au mois de septembre 1989 que les marteaux piqueurs entrent en action.

La gène pour les garages Photo NE
La gène pour les garages Photo NE

En mars 1990, on est encore loin de la fin du chantier.  Les garages Toyota et Citroen installés dans l’immédiate proximité du pont, protestent et menacent de ne plus payer leur taxe professionnelle. Depuis ces travaux, la voie se termine en cul de sac ! Les garages ne sont plus accessibles. Pétitions au maire, qui n’en peut mais, car c’est la CUDL qui est en retard : l’évacuation des remblais (12.000 m3) lesquels contiennent du chlorate de soude, nécessite des précautions et des aménagements. Un terrain appartenant à la société Rhône Poulenc à Wattrelos va accueillir ces remblais, selon le principe du retour à l’envoyeur. Cela a donné l’impression que le chantier s’est arrêté, mais il va reprendre, assure la CUDL, et tout sera terminé en septembre.

Le nouveau pont Photo NE
Le nouveau pont Photo NE

En septembre 1990, soit un an après le début des travaux, et deux ans et demi après la décision, le chantier est terminé. On aura donc réparé l’ouvrage d’art en substituant le matériau expérimental par un remblai physiquement et chimiquement stable, avec dispositif d’étanchéité et système de drainage. On a ensuite procédé au remplacement des appareils d’appui du tablier et à la reconstruction des murs garde-grève. Le profil du pont a été modifié, il est désormais en travers de la route ce qui permet d’élargir le trottoir du côté du lycée. Les automobilistes peuvent à ce moment emprunter un nouveau pont, dont la double voie est aujourd’hui réduite à une seule. Mais ceci est une autre histoire.

D’après les articles parus dans NE

Un nouvel hôtel des postes

L’augmentation des activités postales fait qu’il est question dès les années soixante, de construire un nouvel hôtel des postes. En effet le bel immeuble construit en 1927 ne suffit plus pour accueillir les tâches ordinaires, à savoir le tri, le départ et l’arrivée de courrier, les paquets, les guichets, le téléphone, auxquelles se sont ajoutés les chèques postaux, les virements, la vente par correspondance. Plus de trente millions de catalogues expédiés en 1963 ! En janvier 1964, on apprend que la Direction Départementale des PTT a jeté son dévolu sur la Place des Halles, pour une surface de 4.500 m². Entretemps le centre du transit du Lido s’est installé en août 1964 et occupera le terrain repéré jusqu’en 1973. Une fois démonté, ce centre commercial provisoire accueillera quelques démonstrations commerciales et circassiennes.

L'annonce du projet Photo NE
L’annonce du projet Photo NE

Puis le projet de poste centrale refait surface, et le début des travaux est annoncé pour le 24 mars 1975 pour une durée de 18 mois. Finalement le chantier est ouvert début mai. Cent vingt pieux de béton ont été réalisés pour soutenir l’édifice, et les bâtisseurs ont du creuser à plus de vingt mètres pour trouver un sous sol stable. Rappelons qu’autrefois le Trichon et les douves de l’ancien château étaient  situés à deux pas de l’endroit. La construction va pouvoir commencer et on attend l’ouverture pour la fin de l’année 1976.

Vue aérienne du chantier Photo NE
Vue aérienne du chantier Photo NE

Les travaux prendront un peu plus de temps. En avril 1977, le bâtiment est terminé et on annonce l’ouverture pour l’automne.

Ouverture à l'automne Photo NE
Ouverture à l’automne Photo NE

Le nouvel hôtel comporte deux étages, et se présente sous la forme de deux ailes en équerre. La façade principale est orientée vers la rue Pierre Motte. A l’intérieur, côté usagers, sont prévus quinze guichets et vingt cabines téléphoniques.

Intérieur de l'hôtel des postes Photo NE
Intérieur de l’hôtel des postes Photo NE

Finalement le nouvel hôtel des postes est ouvert au public le lundi 12 décembre. Il emploie à cette époque quatre cents agents, et se classe au 2ème rang d’importance de la région. Dès avant l’ouverture, le receveur déplore les conditions d’accès : un nouveau plan de circulation et l’absence de parking ne contribuent pas au bon fonctionnement de la nouvelle poste. Le maire de Roubaix lui répond que c’était à l’administration des PTT de prévoir un parking souterrain dès la construction de l’édifice.

Vue du chantier en 1977 Photo NE
Vue du chantier en 1977 Photo NE

Pour l’instant, les usagers roubaisiens utilisent l’espace situé devant la poste, mais ce parking sauvage va bientôt disparaitre, car la nouvelle bibliothèque est en voie de réalisation. Puis le secteur sera remodelé, avec des problèmes récurrents de l’époque à Roubaix, le stationnement et l’accès piétonnier.

Le parking temporaire Photo NE
Le parking temporaire Photo NE

La perle du Cul de four

Des entreprises importantes, le quartier du Cul de four en a connu, telles que la brasserie de l’union Roubaix Tourcoing, ou encore l’usine de fabrication des extincteurs Mather et Platt. Ces sociétés ont progressivement disparu, malgré quelques tentatives de reprise, comme la brasserie Nord Lorraine pour la première citée.

Née de la fusion de deux petites sociétés Manuplastic et Afiplast, rue Franklin Roosevelt à Mouvaux, à la fin des années cinquante, la société Afiplastex est venue s’installer dans les anciens locaux du 27 de la rue d’Iéna autrefois occupés par la société anonyme des manufactures de laines filées. En 1987 elle se lance dans un grand chantier de modernisation et de rénovation. La construction d’une nouvelle halle de 2.500 m² permet d’accueillir trente presses ultra modernes. L’usine s’étend alors sur une surface totale de 9.000 m². Un lourd investissement, 15millions de francs pour une entreprise dont le chiffre d’affaires de l’époque est de 50 millions de francs. L’usine est située près de la nouvelle voie rapide urbaine avec une nouvelle façade rue Meyerbeer. Les services économiques de la ville de Roubaix ont soutenu le projet en permettant d’obtenir plus facilement les permis de construire.

Vue intérieure de l'usine Photo NE
Vue intérieure de l’usine Photo NE

Cette société fait vivre plus de cent dix salariés. Que produit-elle ? Des pièces en matière plastique selon la méthode de l’injection : cassettes pour photocopieurs, boîtiers pour vélomoteurs, ses clients sont  Thomson CSF, l’aérospatiale, Léanord (ordinateurs).

Plaque d'inauguration Photo NE
Plaque d’inauguration Photo NE

Après dix huit mois de chantier, la nouvelle halle et son matériel ultramoderne sont inaugurés le mardi 21 juin 1988 en présence du sénateur maire André Diligent. L’usine est alors qualifiée de « perle de technologie dans un écrin peu aguichant ».

Pont roulant Photo NE
Pont roulant Photo NE

Malgré des clients prestigieux, Rank Xerox, Toshiba, Renault, Whirlpool, l’entreprise est mise en règlement judiciaire en 1991, ce qui réduit presque de moitié sa clientèle. En 1993, la société se sépare de 42 personnes alors qu’elle n’en compte déjà plus que 82. Le chiffre d’affaires est tombé à 20 millions de francs en 1996. Un nouveau redressement judiciaire intervient en décembre 1996. L’histoire se termine le 27 mars 1997, date à laquelle la société roubaisienne Afiplastex est mise en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Roubaix-Tourcoing. Malgré une offre de reprise déposée par le groupe Heideman, et la mise en place de la zone franche, c’est  la fin de l’entreprise, et les 25 salariés que comptait encore Afiplastex sont licenciés.

D’après les articles de NE

Le 104 boulevard de Fourmies

En 1946, Monsieur et Madame Delplace, propriétaires d’une papeterie-imprimerie située 48 avenue Jean Lebas, décident d’ouvrir un deuxième magasin. Leur choix se porte sur un ancien café situé au coin du boulevard de Fourmies et de la rue Puget, tout à côté de l’usine Dazin-Motte. Ce commerce, sans doute le plus ancien de la rue, était un estaminet en 1898, tenu par H. Dubron, et c’est la seule maison individuelle recensée dans le Ravet-Anceau cette année là. Ce commerce va ensuite évoluer et devenir une boutique de vannier en 1936, puis un commerce de meubles en 1939. En s’installant à cet endroit après la guerre, la famille trouve – vestige de l’estaminet – une bourloire dans la cour, le long du mur de l’usine.

La papeterie en 1946
La papeterie en 1946

 En 1946, la façade est dans son état d’origine. On distingue à droite le mur d’enceinte de l’usine Dazin-Motte. A droite, le terrain formant le coin de la rue Puget est fermé par une clôture de ciment. La boutique vend de la papeterie, des registres, des articles de bureau, des fournitures scolaires. Assez tôt, on associe à tout cela la vente de jouets éducatifs. Au début, le magasin est tenu par une des filles du couple, toute jeune, pendant que ses parents continuent à officier avenue Lebas, tout en logeant boulevard de Fourmies. Au bout de quelques années, ils laisseront l’ancien commerce de la rue de la gare à une autre fille, pour venir diriger le magasin du Nouveau Roubaix.

L'intérieur du magasin
L’intérieur du magasin

Le commerce évolue graduellement et se transforme. On commence par y vendre des journaux et des magazines. Par la suite, y trouve de plus en plus des jouets et la place manque pour exposer . On commence par agrandir la vitrine. Cette nouvelle vitrine intègre une porte en verre, et sa partie haute permet de présenter aux passants les jouets volumineux.

La deuxième vitrine
La deuxième vitrine

Mais la place manque encore. La jeune fille se marie et on construit, dans les années 50, le long de la rue Puget une maison pour loger les parents, et, sur le coin, un bâtiment bas qui permet d’augmenter la surface du magasin. A la même époque, on modifie la vitrine qui recule pour augmenter la surface d’exposition. Le renfoncement, offre aussi la possibilité d’exposer de la marchandise supplémentaire dans des présentoirs mobiles. On voit sur la photo des sacs à main ce qui montre que le commerce s’étendait également à la maroquinerie.

La nouvelle vitrine en retrait de la rue
La nouvelle vitrine en retrait de la rue

Par ailleurs, Mme Delplace fait creuser une ouverture sur le sous-sol, qui lui permet d’exposer les voitures d’enfants en contrebas. Un escalier permettait aux clients d’aller examiner ces objets de plus près. La vitrine du bâtiment bas formant le coin prend toute la surface possible, tandis que le magasin s’étend à tout le rez-de chaussée à la fin des années 50. Le premier (ancien et nouveau bâtiment) étant dévolu au logement des différents couples.

Le bâtiment formant le coin.
Le bâtiment formant le coin.

Dans les dernières années, l’imprimerie, encore sise avenue Jean Lebas, vient s’installer au boulevard de Fourmies. M. Delplace installe alors son atelier sur l’emplacement de l’ancienne bourloire.

Ce commerçant s’y entendait en fait de publicité, et n’hésitait pas à décorer sa camionnette pour attirer l’attention des clients potentiels lors des fêtes :

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Leur fille quitte le commerce en 1964, mais celui-ci continue quelques années encore, tenu par les seuls parents. Puis, vient l’âge de la retraite et le commerce est fermé en 1974. Monsieur et Madame Delplace vont s’installer dans une ferme et déménageront tout le mobilier du magasin, comptoirs compris, dans la camionnette ! C’est enfin un cabinet médical qui ouvre à cet emplacement en 1978.

Le magasin, dans son état final
Le magasin, dans son état final
 Nous tenons à remercier la fille de la maison, qui a tenu le commerce de longues années, et grâce aux souvenirs et aux documents de qui cet article a pu être réalisé.

 

 

 

 

 

 

La briqueterie des Hauts Champs

Le Ravet-Anceau de 1900 nous présente, sous la rubrique fabricants de briques, la société Delecourt frères, située 50 boulevard de la République. Sont-ce ces mêmes frères qui prennent ensuite leur essor chacun de son côté ? Toujours est-il qu’à partir de 1925 apparaît au 47 rue de l’Amiral Courbet le siège social de la société Alfred Delecourt, installée jusque là à Rosendaël, près de Dunkerque. Cette société, spécialisée précédemment dans les briques silico-calcaires, voisine alors dans le Ravet-Anceau avec une autre société, celle d’Alphonse Delecourt et fils qui possède plusieurs briqueteries dans la métropole lilloise. Y a-t-il un rapport familial entre tous ces Delecourt, briquetiers ?

La raison sociale de l’entreprise de la rue de l’Amiral Courbet devient vers 1930 Alfred Delecourt, fils et gendre, alors que son activité s’exerce sur la plaine des Hauts-Champs, ainsi que l’attestent les photos aériennes de l’époque.

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L’entrée de l’entreprise s’ouvre face à la rue du chemin vert, et dans son prolongement. Elle comporte un vaste bâtiment servant de four pour cuire les briques, surmonté d’une haute cheminée, et d’un grand nombre de séchoirs, disposés parallèlement les uns aux autres et constitués d’une simple toiture, sous laquelle sèchent les briques récemment moulées. On extrait l’argile des terres environnantes grâce à un système mécanique de chaînes de godets qui raclent la surface supérieure du sol. Des wagonnets parcourent les emprises pour transporter les terres extraites et les amener à l’atelier de moulage des briques.

La briqueterie en 1947 – document IGN
La briqueterie en 1947 – document IGN

Tout ceci formait un ensemble imposant qui couvrait une bonne partie du quartier. Sa production a certainement été employée au début des années 30 à la construction des immeubles HBM et de l’église Sainte Bernadette qu’on voit au premier plan sur la photo suivante, datant de 1956, et sur laquelle on distingue les bâtiments de la briqueterie, et sa haute cheminée :

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Nord Matin, dans un article de 1951, nous présente cette entreprise. L’article précise que la société aurait été fondée en 1892 rue de l’Union (?). On y apprend qu’elle est dirigée depuis de nombreuses années par M. Camille Verkest, que les séchoirs représentent une surface de 12000 mètres carrés, et que la production de l’usine est de 30 000 briques par jour.

Vue générale de l'usine et détail d'un séchoir – Photos Nord Matin
Vue générale de l’usine et détail d’un séchoir – Photos Nord Matin

L’activité de la briqueterie ne dépassera pourtant pas la fin des années 50 : les années qui suivent vont voir la construction des grands ensembles qui constituent aujourd’hui le quartier, et notre briqueterie va être démolie progressivement pour faire place à ces immeubles qui, commençant par l’enserrer, vont finalement l’investir entièrement.

Photos IGN
Photos IGN

Pendant une période transitoire, les activités de la briqueterie sont arrêtées et la société place un gardien pour éviter que les enfants des premiers immeubles construits ne s’approprient les lieux. Peine perdue, et nombreux sont les témoignages de jeux dangereux sur les emprises de l’entreprise: les wagonnets sont pris d’assaut, ainsi que les trous provoqués par l’extraction, désormais remplis d’eau ! Finalement, les constructions rasées et les remblais effectués, la construction du nouveau quartier se poursuit.

L’ancienne briqueterie dans le nouveau quartier

Les autres documents proviennent des archives municipales.

L’ entreprise Cordonnier

Venant de la rue de Mouvaux, et à gauche de la rue, passés quelques commerces et maisons particulières, les établissements Cordonnier s’étendaient sur un vaste terrain circonscrit par les rues de Mouvaux, Boucher de Perthes et la voie ferrée.

Ils étaient constitués de deux bâtiments hauts, placés l’un sur la rue du Luxembourg, l’autre le long de la voie ferrée. Deux autres ensemble d’ateliers étaient situés le long de la rue de Mouvaux d’une part, et de la rue Boucher de Perthes d’autre part.

Les anciens établissements Cordonnier en 1962. Document IGN
Les anciens établissements Cordonnier en 1962. Document IGN

L’usine, qui figure déjà dans le plan cadastral de 1884, a pour adresse le 7 de la rue de Mouvaux et figure sous les noms de Louis Cordonnier, fabricant et filateur en 1886 , Louis Cordonnier frères et Léon Screpel, fabricants de tissus en 1895. Ce n’est qu’en 1906 qu’elle apparaît au 15 du la rue du Luxembourg, mais la raison sociale a changé entre-temps : on trouve en effet mention de Masurel-Leclercq, tissage mécanique, puis G. Masurel-Leclercq et fils.

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On la retrouve ensuite sous le nom de filature Lepoutre et Cie en 1914, alors que figure au 5 rue de Mouvaux la société anonyme de tissage, anciens établissements Cordonnier, puis société des anciens établissements Cordonnier, filature de laines peignées. Cette entreprise voisine en 1953 avec la société anonyme Manulaines (laines peignées) au numéro 9. Les différents bâtiments semblent avoir abrité plusieurs activités (au moins filature et tissage).

A près guerre, réside au 15 rue du Luxembourg le dépôt de la SARL des anciens établissements Cordonnier. A partir de 1961 s’installe au numéro 21, partageant les locaux de cette entreprise, la société Westaflex-France, qui fabrique des tuyaux souples, ainsi que, vers 1965, la société logique de l’Electronique (SOCAP Electronique).

Cette dernière société fait place à Westaflex en 1970. Dans une partie de l’usine s’installe en 74 G Devilder, négociant en déchets textile, remplacé en 1979 par G Losfeld, fromager en gros. A cette époque, Cordonnier et Westaflex figurent toujours au Ravet-Anceau à cette adresse.

En 1984 ne restent plus dans l’ancienne usine que Losfeld et Westaflex. On trouvera sur le site, après leur fermeture, les restos du cœur. Le bâtiment le long de la rue de Mouvaux, lui, deviendra un garage (voitures italiennes, puis japonaises) avant d’être démoli assez récemment. (L’exposition des voitures se faisait face à la rue de Mouvaux).

Document Nord Eclair 1990
Document Nord Eclair 1990

La tour située près du chemin de fer a brûlé un 14 juillet au début des années 70, et a disparu. L’autre, celle donnant sur la rue du Luxembourg, est utilisée comme garde-meubles sous l’enseigne de Liberty Box. Tous les bâtiments qui longeaient la rue de Mouvaux ont finalement été rasés, et ont fait place à une pelouse.

Cliché collection particulière.
Cliché collection particulière.

 

Les autres documents proviennent des archives municipales.