Les jardiniers de Cohem

Jardins ouvriers du groupe Delescluse Photo Nord Éclair Juillet 1961

Un article de juillet 1961 signale que le groupe Delescluse rue de Cohem enlève la coupe de la société des Jardins Populaires. Les établissements de teinture et apprêts Delescluse et cie  situés au n°44 rue de Cohem disposent d’une parcelle de terrain contiguë à leur usine, et ils fondent en 1942 un groupe de jardins ouvriers disponibles pour le personnel. M. Robert Maincent, gérant de l’établissement, M. Marcel Coquerelle, brigadier du groupe, et un groupe de jardiniers dévoués et assidus ont fait de ce terrain un ensemble de jardins parfaitement entretenus. On peut y voir des allées bordées de fleurs, des bancs, des arceaux, une cabane à outils, des châssis de couche. Une fosse à purin et de l’eau du riez voisin complètent l’installation. Le groupe Delescluse reçoit donc la coupe, et cinq jardiniers sont primés à titre individuel.

D’après Nord Éclair

Jardins ouvriers

Usine velours
L’usine Motte-Bossut avenue Motte doc Collection Particulière

La société Motte-Bossut fils et Mengers répartissait sa production de velours entre le n°28 de la grand Rue et le n°161 de la rue de Tourcoing avant de faire bâtir l’usine de l’avenue Motte en 1903. A l’image du bâtiment du boulevard Gambetta, apparaît un nouveau château de l’industrie, avec son donjons et ses créneaux, alors en pleine campagne.

La société est propriétaire des terrains compris dans le quadrilatère, avenue Alfred Motte, rue Jean-Jacques Rousseau, rue Emile Zola, rue Edgar Degas et rue Léon Marlot prolongée.  Les parties non bâties ont été transformées en jardins ouvriers. En 1954, les terrains entre l’usine et l’église Ste Bemadette sont vendus pour la construction d’immeubles collectifs à usage d’habitation. La rue Michelet située entre la rue du chemin vert et la rue Emile Zola, est prolongée jusqu’à l’avenue Alfred Motte en novembre 1963. Cela situe la fin des jardins ouvriers entre ces deux dates.

De l’autre côté de l’usine, les jardins potagers appartenant à la société Motte Bossut se trouvent derrière des palissades en plaques de béton ajourées. Ils disparaîssent au moment de la construction du Collège Jean-Jacques Rousseau, en 1975. Comment ces jardins étaient-ils gérés et attribués ? Faisaient-ils partie de la fédération des jardins ouvriers de Roubaix ?

Jardins
Le plan des jardins Carte IGN 1939
D’après l’histoire des rues de Roubaix par les Flâneurs

L’Association des Locataires du Nouveau Roubaix

Le bureau et l’assistance de l’Association novembre 1960 Photo Nord Éclair

C’est au mois d’octobre 1960 que se réunissent un certain nombre de locataires des groupes Racing[1], Hauts Champs et Pont Rouge sous la présidence de M. Daenens, président secrétaire général de la Mousserie invité par un comité provisoire dans le but d’évoquer les problèmes rencontrés par les résidents des différents groupes.

Sont énoncés dans l’ordre : la question du chauffage et de l’eau chaude, l’augmentation des charges, l’augmentation prochaine des loyers, la prolifération des rongeurs dans les appartements (17 attrapés en moins d’un moins dans le même appartement avenue Motte), les inondations de parkings et de caves, la fragilité des installations sanitaires et des tuyauteries.

La question de la création d’une association de défense des locataires arrive sur le tapis, sur le modèle de celle de la Mousserie. Sont élus président, vice président, secrétaire et trésorier MM Delebois, Leroy, Lescroart et Pietrak. Le siège social est fixé au café de la Fraternité à l’angle de la rue de Lannoy et de la rue Julien Lagache. Appel est lancé aux locataires de la Potennerie et des Trois Baudets.

Quinze jours plus tard, l’association complète son bureau et accueille les habitants du Square des Près et de la Potennerie. Elle se dit apolitique. Des délégués sont nommés par site : pour les Hauts Champs, M. Guichard, pour le Pont Rouge M. Trentesaux, pour la Potennerie M. Julien, pour le Square des Près, M. Duyster, et pour le groupe Racing M. Delebois.

En novembre 1960, l’association a un tel succès qu’il faut la salle du cinéma Carioca à Lys pour la réunion de l’assemblée générale. Il y est dit que toute action doit être menée par l’association, l’action directe d’un particulier étant généralement sans effet…Les bases de l’association des locataires sont lancées.


[1] Groupe d’immeubles rue Louis Braille

Pour aller plus loin avec Edouard Anseele

anseeleCo-fondateur du parti des travailleurs socialistes flamands en 1877, Edouard Anseele sera un des pionniers du mouvement coopératif. Il crée en 1880 la boulangerie coopérative Vooruit (En Avant), qui devient un modèle en tant qu’entreprise (assurer les bonnes conditions de travail et de salaire à ses ouvriers) et en tant que coopérative (abaisser les prix de revient notamment grâce à la modernisation de son équipement, et diminuer le prix des aliments destinés aux ouvriers). La coopérative Vooruit finance également la propagande socialiste. C’est sur ce modèle que sera créée à Roubaix la coopérative La Paix située boulevard de Belfort 73. En 1884, Edouard Anseele crée le journal Vooruit, et rejoint le Parti Ouvrier Belge l’année suivante. Il poursuit l’expérience coopérative en fondant en 1904 la première production industrielle coopérative (Samenwerkende Maatschappij), et un peu plus tard la Banque Belge du Travail à Gand sous forme de société anonyme. Il sera conseiller communal puis échevin de la ville de Gand. Premier socialiste flamand au Parlement, il sera député de Liège de 1894 à 1900, puis de Gand de 1900 à 1936. Après la première guerre, il s’occupe du ministère des travaux publics, c’est la première participation socialiste au gouvernement. Il sera également ministre des chemins de fer, de la marine, des postes et télégraphes de 1925 à 1927, puis ministre d’état en 1930. Edouard Anseele a écrit un roman populaire à succès Sacrifié pour le peuple, et un roman historique La Révolution de 1830. La chute de la Banque Belge du Travail en 1934 correspond à la fin de sa carrière politique. Malgré le scandale, sa popularité reste intacte jusqu’à sa mort en 1938.

Jean Pierre Popelier nous communique :

Fondateur en 1880 à Gand de la boulangerie coopérative « Vooruit », qui connut un développement remarquable. Elle devait à la fois assurer des bonnes conditions de travail et de salaire à ses ouvriers, abaisser ses prix de revient grâce notamment à l’introduction de fours perfectionnés et de pétrins mécaniques, et en conséquence diminuer le prix des vivres destinés aux ouvriers, tout en finançant la propagande socialiste. En 1884, il crée le journal Vooruit dont il sera directeur et rédacteur. Conseiller communal puis échevin de sa ville, de 1889 à 1917, il fut député de Liège de 1894 à 1900, puis de Gand de 1900 à 1936. Il a été également ministre des Chemins de Fer, de la Marine, des Postes et Télégraphes de 1925 à 1927 et ministre d’Etat en 1930. Edouard Anseele a publié un roman populaire Sacrifié pour le peuple qui connut un très grand succès et fut traduit en plusieurs langues. Il a également écrit un roman historique La révolution de 1830. homeusers.brutele.be/germinal/1886 Evénements de 1886 Avec César De Paepe, le l’aile gauche du POB critiquait la participation à la Commission du travail et déclarait qu’elle n’était constituée que pour la forme et qu’elle n’aboutirait à rien. Le POB (BWP) de Gand par contre (où Edward Anseele dominait avec ses coopératives) accepta la proposition du roi, à condition que des délégués puissent y participer. L’histoire donnera raison à Depaepe: la commission se contenta effectivement de » prendre note des conditions de vie et d’écouter les demandes des travailleurs ». Edouard Anseele fut jugé à Gand à cause de son appèl aux soldats flamands de ne pas tirer sur leurs frères wallons. La question posée au jury pour Anseele :  » Est-il coupable d’avoir contesté la force des lois et d’avoir incité directement à leur désobéissance? » fut répondu par un OUI. Il a été condamné à 6 mois de prison et il s’est constitué prisonnier revenant d’une Conférence Internationale Ouvrière à Paris où il représentait la Belgique. EDOUARD ANSEELE. SA VIE – SON OEUVRE AUTEUR: BERTRAND (LOUIS) Edité par EGLANTINE Paru en 1925 www.institutliebman.be/fichiers/POB%201911.pdf LE PARTI OUVRIER BELGE (EN 1911) VU PAR DE MAN ET DE BROUCK»RE diatribe contre l’ultra réformisme de Anseele et du Voruit http://barthes.ens.fr/clio/revues/AHI/ressources/documents/avtguer.html Congrès socialiste de Marseille en septembre 1892, (le Peuple, Bruxelles, 26 septembre 1892.) cité in LENTACKER Firmin, La frontière franco-belge étude géographique des effets d’une frontière internationale sur la vie de relations, Lille 1974.  » Le gantois Edouard Anseele veut qu’on vote une motion réprouvant ces incidents xénophobes ;  » le capitalisme exploite les divisions de la classe ouvrière ; il engage des étrangers à bas prix, mais il excite aussi l’égoïsme des ouvriers français… On a crié A bas les belges! Et Basly n’a rien désapprouvé… Ce n’est pas un socialiste… Le cri des ouvriers de tous les pays est celui-ci, Vive l’Internationale!  » La région gantoise, «subit l’attraction d’un socialisme allemand en passe de s’organiser et de prendre un envol décisif». (M. Liebman, Les socialistes belges 1885-1914, p.41) En effet en Allemagne, dès 1869, le Parti Ouvrier Social-Démocrate est fondé à Eisenach par W. Liebknecht et A. Bebel, proches de Marx, C’est ce programme avec ses forces et ses faiblesses qui inspire dès 1875 la fédération ouvrière gantoise, formée en 1874 autour de militants tels E. Anseele. C’est finalement en 1879 que les formations flamande et bruxelloise s’unissent en un Parti Socialiste Belge En février 1885, une grève importante éclate dans le Borinage ; ouvriers et chômeurs s’unissent dans la lutte. Edouard Anseele décide de distribuer du pain fabriqué par les coopératives aux chô-meurs et aux ménages ouvriers et ce dans tout le pays. Ce geste de solidarité est mieux apprécié par la population que tous les discours qui chantent les vertus de l’unité. Le 6 avril 1885, cent douze représentants d’associations ouvrières majoritairement bruxelloises et flamandes, rassemblés à Bruxelles sous la présidence de Louis Bertrand, déclarent adhérer à la Constitution d’un Parti Ouvrier Belge (POB).

Pour aller plus loin avec Edouard Anseele www.ps-federation-liege.be