Ah, l’Hippodrome Théâtre !

Le 5 novembre 1882, un nouveau théâtre, d’initiative privée, est inauguré, il s’agit de l’Hippodrome Théâtre. Il se trouvait non loin de l’emplacement occupé par l’actuelle tour du Théâtre, à côté de l’Usine Motte Bossut et des bureaux de cette société.

L’Hippodrome Théâtre Collection Médiathèque de Roubaix

Cette salle de spectacle contenait de 1500 à 1800 personnes, avec une scène d’une longueur de 25 mètres. En prolongement de la scène et séparé de cette dernière par un rideau métallique, se trouvait un grand foyer d’artistes utilisable dans les pièces à grand spectacle et au besoin comme salle de concert. Dans la partie des bâtiments affectés à l’Administration, il y avait des magasins de meubles, les bureaux de la Direction et la bibliothèque, les cabinets de coiffure, tailleurs, médecins, machinistes, foyer d’artistes, de choristes, de comparses et les loges d’artistes. Le magasin des décors comprenait un atelier de peinture, situé en dehors du théâtre et relié avec la scène par une galerie. Selon un témoin, la salle possédait sept sorties : trois en façade, deux sur les côtés, et deux à l’arrière qui donnaient dans l’ancienne rue des Longues Haies. La façade, construite quelques années après l’inauguration, était digne de celle de la Scala de Milan : colonnes en onyx du Maroc, statues représentant une danseuse et une jongleuse.

Plan de l’Hippodrome Collection Privée

L’Hippodrome Théâtre, qui avait coûté un million deux cent mille francs de l’époque, était admirablement situé sur un grand boulevard récemment créé et très passant, à deux pas de la Grand Place et de la Place de la Liberté. En effet, en 1882, on vient tout juste de reboucher l’ancienne partie du canal, ce qui procure à la ville une grande voie pénétrante, à la suite du magnifique boulevard de Paris, et du parc de Barbieux en cours de réalisation. L’Hippodrome n’aura d’égal qu’à Paris. Son architecture est remarquable, la disposition de la salle est ingénieuse moitié cirque, moitié théâtre. Ses représentations seront diversifiées, entre opérette et opéra, théâtre dramatique et comédies, vaudevilles et grands drames. Le cirque franco-belge viendra y séjourner au moment de la grande foire. Des meetings politiques, conférences, débats électoraux, s’y dérouleront aussi, devant une salle comble : Marc Sangnier, Jules Guesde, Jean Jaurès, parmi tant d’autres, viendront y prendre la parole. Les roubaisiens étaient un public de mélomanes, et ils  étaient férus de bel canto et d’art lyrique. L’Hippodrome théâtre devint donc une scène d’audience nationale, qui recevait des artistes comme Sarah Bernhardt, Cécile Sorel, Sacha Guitry. De grands musiciens vinrent y conduire des concerts, comme Camille Saint-Saens, Charles Gounod.

Programme Collection Privée

Après la seconde guerre, on tenta de le moderniser, un écran de cinéma y fut installé et l’Hippodrome théâtre devint le Capitole. On y organisa même des combats de catch ! Un dimanche de mai 1957, le rideau du Capitole théâtre tomba définitivement sur les dernières notes des Mousquetaires au Couvent. Dernière représentation, dernier spectacle. L’évolution des mœurs, le tourisme, la télévision, le cinéma ont été cités comme responsables de cette fermeture. Après une carrière longue de 80 ans, était-il impossible de poursuivre, en aménageant ?

Le Capitole Collection Privée

La société Le Capitole est dissoute le 16 avril 1964. Une compagnie d’investissements immobiliers reprend les bâtiments ainsi que le café voisin et cette surface de 2700 m² servira à la construction d’un vaste immeuble, et d’une station service au rez-de-chaussée. Ainsi disparut à jamais un des grands lieux culturels et historiques de Roubaix.

Une rue pour Léonie

En août 1914, Marie Léonie Vanhoutte, qui exerçait la profession de giletière, travaille à l’installation des ambulances de la Croix Rouge, rue Pellart, où elle est infirmière de salle. Au moment de l’invasion allemande, elle laisse la place aux infirmières allemandes, en emportant cependant deux objets précieux, qui lui seront fort utiles par la suite, son brassard et sa carte d’infirmière.

 Affiche occupation allemande & Léonie Vanhoutte documents archives municipales de Roubaix

Son premier voyage de passeuse, elle le fait pour son frère, un évacué mobilisable n’ayant pu rejoindre le front, qui souhaitait rejoindre la France libre. Elle fera soixante dix kilomètres à pied de Roubaix à Gand, passera en Hollande, et mènera quatre hommes à la liberté. Lors d’un nouveau voyage, elle recueille des informations sur les mouvements de troupe et les emplacements des batteries ennemies. Elle vient de rencontrer son amie Louise de Bettignies, qui fait d’elle son lieutenant sous le sobriquet de Charlotte, dans un réseau financé par les anglais. Ses missions sont les suivantes : passages de personnes, collectes de renseignements, transferts de correspondance, de la France occupée vers la Hollande, à travers la Belgique.

 Roubaix occupée par les allemands, ici au Pile Photo Nord Eclair

Le 24 septembre 1915, elle sera arrêtée sur dénonciation, à Bruxelles, quelques jours à peine avant Louise de Bettignies. Incarcérées toutes les deux à la prison St Gilles de Bruxelles, elles seront d’abord condamnées à mort, puis déportées à Siegburg en Allemagne, où Louise de Bettignies mourra d’une pleurésie purulente en septembre 1918, alors que Marie Léonie luttait elle-même contre le typhus qu’elle avait contracté à force de soigner ses compagnes de captivité atteintes de cette maladie.  Elle sera libérée le 3 octobre 1918 par des évadés belges et fronçais accompagnés de soldats allemands au moment de la proclamation de la République allemande.

 Léonie Vanhoutte honorée en 1919 et en 1927 Photo Journal de Roubaix

Le 24 Août 1919, elle reçoit la croix de guerre, Elle recevra aussi la Médaille Militaire anglaise, la Croix de Chevalier de l’Ordre de l’Empire Britannique ainsi que la Croix Civique belge. Antoine Redier écrira l’histoire de Louise de Bettignies et de Marie Léonie Vanhoutte en 1923 dans un ouvrage intitulé La Guerre des Femmes publié aux éditions de la Vraie France. Le 27 février 1927, elle obtient la Croix de Chevalier de la Légion d’Honneur. Elle épousera Antoine Redier, son chroniqueur en 1934.

En 1966, elle était promue au grade d’Officier de la Légion d’Honneur. Elle s’éteignit le 4 mai 1967 à l’âge de 79 ans et repose désormais dans l’ancien cimetière de Hauteville, dans le caveau de la famille Redier. Une rue porte désormais son nom dans la cité des Trois Ponts.

On lira avec intérêt

Le livre d’Antoine Rédier La Guerre des femmes, couronné par l'Académie Française
dont sera tiré le film Sœurs d'armes de Léon Poirier en 1937
Et on visitera la magnifique exposition virtuelle de la bibliothèque numérique de la médiathèque de Roubaix intitulée la Fleur au fusil
http://www.bn-r.fr/expositions/lafleuraufusil

De la maison de l’enfance au centre social

Dix ans après sa création en 1949, la maison de l’enfance des Trois Baudets est progressivement devenue un véritable centre social accueillant. Le taux de fréquentation est élevé, et l’on commence à refuser du monde, d’autant que l’habitat s’est développé, du côté des Hauts Champs, où l’on envisage de créer le même type d’établissement, car les installations d’équipements collectifs se trouvent éloignées de ce quartier…

Chantier de construction de la maison de l’enfance des Hauts Champs, futur centre social Photo Nord Eclair

C’est en avril 1962 que commence la construction d’une maison de l’Enfance pour les Hauts Champs, première réalisation sociale communautaire, desservant Hem et Roubaix,  sur le territoire d’Hem, derrière le bâtiment 12 (La Grande Barre). C’est le comité de gestion des centres sociaux dans les quartiers neufs qui fait bâtir, dont la présidente est Mme Albert Prouvost, épouse du Président du C.I.L. L’immeuble est bâti de plain-pied et présente trois corps de bâtiments reliés par des corridors.

Vue aérienne de 1964, on distingue les trois corps de bâtiment du centre social près de la grande barre Photo IGN

Quelles sont ses activités ? D’abord il y a un service social, déjà une assistante sociale de la Maison de l’Enfance des 3 Baudets y est détachée, et un service médical avec soins à domicile. Puis on y trouvera un centre d’enseignement ménager, qui prépare le CAP. C’est celui des 3 baudets qui déménage, et qui à ce moment là, comptait 40 élèves. Il y aura aussi un cours de couture pour fillettes, jeunes filles et mamans, qui aura lieu le jeudi. Pour l’instant, pas de bibliothèque, ni de consultation de nourrissons, il faut encore aller aux 3 Baudets. On pense à innover : un cercle de loisirs est créé pour les jeunes, qui disposeront d’une vaste salle pour un ciné club, des réunions sportives ou culturelles. Dans un autre local plus petit, il y aura un club philatélique, des cours de musique, de bricolage.

 Cette Maison de l’Enfance des Hauts Champs est d’abord conçue comme un complément harmonieux de celle des 3 Baudets. Elle prend le nom de centre social des Hauts Champs et fonctionne à partir de l’année 1964, sous la tutelle des Maisons de l’Enfance. En 1969, sa gestion est autonome, et il devient un centre social à part entière le 1er janvier 1971.

Cours de coupe couture au centre social Photo Nord Eclair

En 1972, sa directrice est alors Madame De Winter, et dans un quartier sans mairie, sans bureau de poste, de commissariat de police, de salle de spectacle ou encore de terrain de sport, le centre social tente de remédier à toutes ces lacunes. Il propose alors un centre de soins, un bureau de sécurité sociale, une bibliothèque. Il forme les femmes à la cuisine, la couture et à la puériculture. Il y a des cours de français, de secourisme, de la gymnastique volontaire, des kermesses, des fêtes familiales. En 1972, six cents familles sont adhérentes au centre (la carte d’adhésion : cinq francs par an).

 

La question du chauffage, encore

En décembre 1966, le syndicat des locataires des Hauts Champs et quartiers limitrophes se réunit à la maison de jeunes avenue Laënnec à Hem. Le vice président, Monsieur Ingelaere, fait le bilan des actions entreprises au cours de l’année écoulée auprès de la municipalité, des organismes propriétaires  (HLM et Toit Familial) et de la préfecture. Cependant, dit-il,  beaucoup des locataires du Nouveau Roubaix n’ont pas conscience du fait qu’ils peuvent s’exprimer par la voix de leur syndicat, organisme représentatif qui a une très large audience auprès des autorités compétentes. La mobilisation aurait-elle tendance à faiblir ?

Madame Chain fait ensuite un exposé sur le problème de l’eau et du chauffage. Puis on évoque à nouveau la question des équipements sociaux, sportifs et culturels, premier cité des cinq objectifs donnés pour le syndicat par son président M. Desjardins.

Le président prend la parole pour énumérer un certain nombre d’équipements souhaités par les habitants : stade, piscine, maison de jeunes, dont il faudra peut être revoir l’implantation, suggère Monsieur Desjardins. Rappelons qu’elle se trouve sur Hem, à l’extrémité du grand axe  longeant la Grande Barre. Il réaffirme que ce sont des réalisations prioritaires. Enfin, la réunion se termine par une motion de solidarité avec les mal-logés des 46 dernières courées de Roubaix.

En avril 1967, le syndicat des locataires des Hauts Champs et quartiers limitrophes s’associe à la manifestation organisée à Lille, par les syndicats CGT et CFDT, les associations familiales, mouvements d’éducation populaire, associations et mouvements de jeunes, sur le thème des problèmes de l’emploi, de la sécurité sociale, de l’enseignement, du logement social…Le Syndicat signifie qu’il sera présent non en tant quel tel, mais avec ses militants et adhérents regroupés dans leurs organisations respectives.

Une partie du bureau du syndicat, M. Desjardins, Président, entouré de Mme Delion, secrétaire et M. René Valque Photo Nord Éclair

Quelques jours plus tard, le Syndicat remobilise ses troupes autour de la question du chauffage par le sol, l’un des premiers dossiers déjà abordé en 1960 ! Suite à une enquête auprès des locataires, une réunion publique est organisée pour informer les adhérents sur les différentes actions qui vont être entreprises dans les jours suivants. Il est question de rencontrer les différentes sociétés propriétaires afin d’obtenir un réglage complet et plus strict du chauffage et de la société qui en a la charge. En effet, les charges de chauffage et d’eau chaude pèsent lourdement sur le budget familial. De plus, ce type de chauffage est remis en cause, non seulement parce qu’il ne permet pas l’utilisation personnalisée, mais surtout qu’il n’est pas bon pour la santé.

En 1965, au moment de la construction des cubes du chemin vert, la chaufferie près du bâtiment Degas Photo IGN

Cette démarche sera relayée nationalement, et une lettre a été envoyée à tous les médecins de Roubaix, pour étayer de leur avis, l’action du syndicat des locataires. Le Président termine la séance en rappelant qu’il s’agit plus d’humaniser les conditions de vie de l’ensemble des Hauts Champs, plutôt que de gêner les sociétés propriétaires dans la location de leurs appartements.

Rénovation des HBM

En 1984, la rénovation des immeubles HBM va commencer. Comment en est-on arrivé là ? Un article daté de février 1979, relate la visite de Bernard Carton, adjoint à l’urbanisme, aux comités de quartier, et particulièrement à celui qui regroupe à l’époque les représentants du secteur Justice Hauts Champs Chemin Neuf Nouveau Roubaix Edouard Vaillant.

Il est venu pour insister sur l’importance de la concertation sur la question des aménagements futurs du quartier. Il en vient à parler de la rénovation des vieilles HBM[1], donnant sur le boulevard de Fourmies et sur l’avenue Motte. Ces grands immeubles qui ont fait la fierté du Nouveau Roubaix datent du début des années trente, et on commence à s’intéresser à leur modernisation. Un programme de réhabilitation est annoncé, qui devrait concerner 300 logements.

Les vieilles HBM dans les années soixante Collection Particulière

En avril, le journal Nord Éclair signale un certain laisser aller dans le quartier, notamment rue Rubens où les papiers rejoignent les feuilles des arbres par terre. Les riverains garent leurs voitures sur les pelouses et les transforment en bourbiers. On est loin de l’aspect champêtre et salubre des immeubles du temps de Jean Lebas.

En janvier 1980, la question a avancé : les organismes de logement social concernés sont d’accord avec le principe, mais s’inquiètent du coût pour les locataires. Le Carihem et les immeubles HBM du Nouveau Roubaix sont concernés, pour des raisons différentes, l’insonorisation pour le premier, le coup de neuf pour le second.

Les locataires eux s’inquiètent déjà : l’augmentation annuelle des loyers près de 15%, le chauffage insuffisant des hlm de la rue Carpeaux et du Nouveau Roubaix, entre autres sujets de mécontentement.

Les HBM en 1980 Photo Nord Éclair

Le mot réhabilitation ne parle pas aux habitants. Le comité de quartier organise alors en juin 1980 une réunion qui se déroule au centre familial Carpeaux. Sont invités le groupement de défense des locataires, la CSCV (Confédération Sociale du Cadre de Vie) et la CNL (Confédération Nationale du Logement). Dans le débat qui s’instaure, il apparaît qu’une part du loyer payé par les locataires doit servir à l’entretien et aux réparations des logements, ce qui n’a pas l’air d’être le cas. Une dame témoigne : voilà 56 ans que j’habite dans mon appartement et jamais de gros travaux n’ont été réalisés ! Les locataires font part de leurs craintes quant à l’augmentation du loyer qu’entraînera la réhabilitation.

à suivre

D’après Nord Éclair

[1] Habitations à bon marché construites en deux tranches fin des années vingt et début des années trente

Du théâtre à la tour

En Janvier 1964, le journal Nord Éclair titre : le glas va-t-il sonner prochainement pour l’Hippodrome ? Le vénérable théâtre de l’Hippodrome avait ouvert ses portes le 5 novembre 1882, quelques mois à peine après le comblement du canal. Pendant trois quarts de siècles, il aura été un des lieux de spectacle favoris de la population roubaisienne. A la fois cirque, salle de théâtre et d’art lyrique, de meetings et de débats politiques, et dans les derniers temps salle de cinéma, l’Hippodrome théâtre a fermé ses portes en 1957.

L’hippodrome théâtre, en cinéma Capitole Collection Particulière

En 1963, la Compagnie d’Investissements Fonciers a racheté le dernier café adossé au vieux théâtre, et annoncé un projet de construction d’un immeuble et d’une station service. En Juillet 1964, c’en est fini du vieux théâtre, jeté à terre par les bulldozers. Cependant le projet ne démarre pas immédiatement. La surface n’était-elle pas suffisante ?

Les bureaux de l’entreprise Motte Bossut et le rond point de l’Europe en 1969 Photo Nord Éclair

Il faut attendre 1971 pour qu’il soit envisagé de récupérer l’espace occupé par deux cafés et par les bureaux de la maison Motte Bossut, situés à l’angle de la rue du Coq Français et du boulevard Leclerc, dans le prolongement de l’usine. Le crédit municipal situé sur le même trottoir au n°42 serait également concerné par la démolition, mais on ne sait pas où le reloger.

Projet publié en 1972 par Nord Éclair

Le projet de construction est alors porté par le CIL de Roubaix Tourcoing, et il est envisagé une importante opération immobilière comprenant un immeuble de 16 étages, des commerces, un restaurant, une station service. Un second immeuble de dix étages est prévu le long de la rue Vincent Auriol. La démolition intervient en octobre 1971. On prévoit de donner le nom de Résidence du Théâtre à la tour de seize étages…

Derrière l’église

Après la seconde guerre, l’église Ste Bernadette était à l’orée d’une plaine champêtre, en face de l’église d’aujourd’hui, sur l’emplacement actuel du siège d’une importante entreprise textile roubaisienne. Un vaste terrain se trouvait alors derrière son imposante masse, qui fait l’objet en janvier 1949 de tous les soins de l’Union des Sociétés Sportives de Roubaix, qui souhaite l’aménager en stade. Situé entre la briqueterie et l’église, cet emplacement a été aplani et présente l’aspect d’une pelouse bien entretenue. On prévoit sur ce terrain de sports d’y pratiquer le football, le basket, l’athlétisme. Un vestiaire est prévu avec boxes et douches. Le temps de l’inauguration est proche, n’étaient ce les 300.000 francs qui manquent encore pour parfaire la réalisation. L’abbé Lehembre, aumônier de l’U.S.S.R, 83 rue Henri Lefebvre, s’occupe de réunir les fonds. L’U.S.S.R à cette époque, c’est six sociétés de gymnastique, onze clubs de football, six clubs de basket. Le tout est subventionné par la ville et agréé par les autorités militaires.

André Diligent inaugurant le stade de la Centrale Photo Nord Éclair

L’inauguration intervient le 10 mai 1949 et André Diligent, adjoint au maire coupe le ruban pour l’occasion. La cérémonie ait été fixée à 15 heures, mais le stade de la Centrale (c’est le nom qui lui fut donné) avait déjà été envahi bien avant par un grand nombre de sportifs. L’envahissement fut endigué et l’on put procéder à l’inauguration à laquelle succéderont un défilé scandé par la Fanfare d’Hem, puis des matchs de football, de basket et des exhibitions de gymnastique.

On ne sait pas encore quand les activités de ce stade cessèrent. Il y eut bien d’autres activités derrière l’église dont l’histoire reste à écrire. Ainsi les débuts de l’école sainte Bernadette, avant qu’elle s’en aille avenue Delory, ou encore les œuvres paroissiales ou les activités du patronage. Les témoignages sont toujours les bienvenus. L’horizon de cette petite plaine se ferma avec la construction de la cité des Hauts Champs à partir de 1958.

Confirmations à la paroisse Ste Bernadette Photo Nord Éclair

En avril 1959, Monseigneur Dupont, évêque auxiliaire de Lille, vient administrer le sacrement de confirmation à deux cent vingt enfants de la paroisse Ste Bernadette. Nous découvrons ici les bâtiments qui se trouvaient derrière l’église, avec les nouveaux immeubles des Hauts Champs juste derrière…

L’emplacement du futur collège Photo Nord Éclair

En juillet 1973, la presse annonce la construction prochaine d’un collège d’enseignement technique derrière l’église Sainte Bernadette, rue Léon Marlot. Il s’agira d’un établissement privé où l’on donnera un enseignement commercial et on préparera au CAP et au brevet. L’ouverture est prévue à la rentrée de septembre, pour deux classes au moins. Quand il sera terminé, ce CET accueillera entre 300 et 400 élèves.

Conférences de jardinage

Avant d’être la cité de tours et d’immeubles que l’on connaît depuis les années soixante dix, le quartier des Trois Ponts était un espace mi industriel, mi champêtre, où se trouvaient des cultivateurs, des horticulteurs et des jardiniers. Dans cette dernière catégorie, il y eut de nombreux jardins ouvriers, à proximité des usines et dépendant d’elles, comme le groupe Cohem situé derrière la teinturerie Delescluse, ou des groupes municipaux, dont celui des Trois Ponts, créé en 1935. Chaque ensemble de jardins était animé par un brigadier, dont le rôle était d’animer la vie des jardins par ses conseils et recommandations, mais aussi de faire respecter la réglementation en vigueur. Les jardiniers participaient sous sa férule à un concours annuel où ils remportaient des prix pour la qualité de leurs cultures et pour la bonne tenue et l’ornementation florale de leur jardin.

Jardinier des Trois Ponts Photo Nord Éclair

Les jardiniers se réunissaient régulièrement à l’occasion de causeries ou de conférences, données par des ingénieurs horticoles, ou des chefs jardiniers de la ville de Roubaix. Ces réunions se déroulaient comme suit : le conférencier faisait son exposé, puis il répondait bien volontiers aux questions de l’assistance, avant qu’ne tombola et le verre de l’amitié ne viennent terminer la séance. Ces conférences se déroulaient dans des lieux très divers. Pour le quartier des trois Ponts, il y eut la salle des fêtes de l’école Jean Macé, mais aussi le café Delaforterie ou le café Cohem.

Conférence dans le café Cohem Photo Nord Éclair

Une des dernières conférences eut lieu au café Cohem en décembre 1968. Elle fut organisée par la société d’horticulture et des jardins populaires de France dont le siège est à Valenciennes. Ce jour là, un professeur d’horticulture vint parler des travaux de saison (élagage, semis), de la conservation des plantes, de l’utilisation des engrais.MM Bolsius délégué régional de la société et Delaforterie, trésorier de la société des Trois Ponts assistaient à cette conférence avec une nombreuse assistance. Une tombola suivit l’exposé.

Ces conférences étaient très suivies et attiraient beaucoup de monde. Elles étaient la preuve que l’activité du jardinage créait des liens et des échanges que la disparition des jardins a définitivement enterrés.

Les têtes et la toiture

Avril 1986, la Ville de Roubaix, par la voix de Jacques Catrice, adjoint au maire chargé du commerce, est résolument optimiste sur l’avenir de Roubaix 2000. Après le départ d’Auchan, il fallait trouver une locomotive pour le centre, et c’est chose faite avec AS ECO. Mais il faut que les commerçants se redynamisent et reprennent confiance. Il faut également que les cellules vides soient rapidement occupées. Jacques Catrice rappelle que la municipalité aide et appuie les projets des commerçants dans la mesure de ses possibilités, mais ne s’immisce pas dans leur manière de gérer les affaires. Il est convié aux réunions de l’union du commerce de Roubaix, avec voix consultative, mais pas au-delà.

Roubaix 2000 en 1986 avant sa couverture Photo Nord Éclair

Certes, il y a des raisons d’espérer. Plusieurs commerces vont bientôt s’installer dans le centre commercial, suite à des conditions de location ou d’achat intéressantes. Un poste permanent de police municipale va être installé dans Roubaix 2000 pour sécuriser les lieux et passages. Un projet d’aménagement a été validé par la grande surface et la majorité des commerçants. Dans les six mois qui suivront l’achèvement de la couverture, le centre commercial sera entièrement rempli. Le démarrage des travaux est imminent, et c’est la fin annoncée de la maison des courants d’airs.

Cependant ce n’est pas tout à fait la belle unanimité. M. Michel Jacquart, président du GIE depuis juin 1985, vient de démissionner le 28 mars dernier de son poste de président, décision entérinée par 6 membres sur 8 présents ce jour là. Michel Jacquart, par ailleurs directeur de Naja tourisme, donne ses raisons : en septembre 1985, un accord est intervenu entre les commerçants, la municipalité et la grande surface pour créer un poste de directeur du centre commercial rémunéré par le conseil syndical et chargé de mener toute action en faveur du développement de Roubaix 2000. Il lui semblait important que ce directeur vienne de l’extérieur de la structure. Mais la majorité s’est prononcée pour Madame Macqueron (Maison de la Presse) comme directrice du centre, faute de candidats présentant un profil plus intéressant. M. Jacquart estimait que sur les trois candidats extérieurs au centre qui s’étaient présentés suite à une petite annonce dans la presse, l’un d’eux présentait un profil intéressant. Madame Macqueron a quand même été élue à l’unanimité des membres présents du conseil syndical, fin janvier 1986, pour une mission de trois mois. D’où la démission du président.

Un nouveau président est alors élu pour faire l’intérim. Il s’agit d’André dubois, tenancier du café le Belfort, élu à l’unanimité des membres présents, le 4 avril. Mme Macqueron et lui veulent éviter toute polémique. En mai, un nouveau président sera élu.  Madame Macqueron fait alors le bilan de son activité de directrice depuis janvier. Elle s’est occupée du suivi du dossier de la couverture, de la commercialisation des cellules vides, et des recherches d’économies à faire sur la copropriété. Pour ce dernier point, des compteurs de calories seront installés chez chaque commerçant, et chacun ne paiera que sa consommation, mais toute sa consommation. Elle présente l’argumentaire pour l’arrivée de nouveaux commerçants. Le centre commercial, c’est 46 commerces, dont une grande surface. Une dizaine de cellules déjà aménagées appartenant à des particuliers ou des commerçants sont  immédiatement utilisables, de même que les cellules inoccupées gérées par la mairie. On peut donc accueillir vingt à trente commerces des types les plus divers. Les conditions de vente et de location sont attractives, deux à trois fois moins chers qu’ailleurs. La situation géographique de Roubaix 2000 est très intéressante, en plein centre ville, avec un quartier en plein renouvellement : la caserne des pompiers démolie a laissé place à de nouveaux locaux pour la caisse d’allocations familiales, l’ancien hôtel des postes a été reconverti en université, et l’usine Motte Bossut devenue un centre international de la communication, est en passe d’accueillir les archives du monde du travail. Tout cela augure de l’arrivée d’une nouvelle clientèle constituée d’étudiants, de chercheurs et de fonctionnaires. L’ancien resto self de Roubaix 2000 va d’ailleurs être transformé en restaurant universitaire avec des services midi et soir. Un peu de statistiques pour terminer : 20.000 véhicules passent en moyenne chaque jour devant le centre. Et en moins d’une heure le samedi 27 octobre 1984, 3.500 personnes ont traversé le boulevard Gambetta devant Roubaix 2000 et 2.500 du côté du boulevard de Belfort. Le centre commercial serait-il devenu l’endroit où l’on passe ? Mais tout ce passage garantit-il que les gens s’arrêtent, consomment ou achètent ? L’arrivée de la police municipale et le gardiennage mis en place par les commerçants ont résolu le problème des petits délinquants. Ces arguments ont l’air de satisfaire les membres du GIE, car Madame Macqueron voit sa mission reconduite pour 3 mois.

 Projet de toiture publié par Nord Éclair

Qu’en est-il des travaux ? En avril 1986, Michel Ripoli, architecte à Wasquehal, présente le projet de couverture du centre commercial. Il rappelle que cela fait un an et demi qu’on travaille sur ce  projet, et que les avis divergeaient entre ceux du bas et ceux du haut, entre les commerçants et la mairie…Il évoque les projets : aménager un hôtel sur la moitié de l’étage, un promoteur était intéressé, mais pas de suite. Une réhabilitation totale était souhaitée, mais le budget ne le permettait pas. On voulait aussi refaire toute la décoration intérieure, là aussi, ce n’était pas possible, on verrait plus tard. Il fallait donc parer au plus pressé, et s’occuper de la couverture. Cette toiture va recouvrir 3000 m² de surface, ce qui est actuellement à découvert, plus les passages latéraux, et les auvents existants seront supprimés. Il s’agira d’une couverture en polycarbonate, matériau transparent ou translucide. Le translucide est plus résistant à la chaleur, mais il faut attendre l’avis de la commission de sécurité. Transparent, c’est évidemment plus agréable. MM Ripoli et Sauvage (lui est architecte à Marcq en Baroeul) ont travaillé avec le bureau d’études SETRAC à Lille qui a participé à la construction de Roubaix 2000 en 1968. Ils sont donc bien au fait de l’existant. La toiture sera soutenue par des charpentes métalliques, qui reposeront sur les piliers de béton actuels. Mais le toit ne se posera pas par ses extrémités latérales, il y aura un petit jour. Pour le support des plaques de polycarbonate, on utilisera une sorte de treillis métallique et les arches seront en aluminium. Il est précisé que ce type de couverture est souvent utilisé dans les bâtiments scolaires, les halls publics, les équipements sportifs. Quand les travaux seront finis, on remettra bien sûr la sonorisation, les lumières d’ambiance et la vidéo.

Projet de toiture publié par Nord Éclair

 La demande de permis de construire a été déposée en avril 1986. Il faut compter deux mois pour la réponse municipale, puis deux mois pour la réponse de la Direction Départementale de l’équipement à Lille, à cause de la proximité du site Motte Bossut classé bâtiments de France. Les travaux débuteraient donc en septembre pour se terminer en décembre.

Le groupe Carpeaux

Autrefois se trouvait à l’angle de la rue Ingres et de la rue Carpeaux un grand terrain de football entouré d’une bande de jardins ouvriers. L’usine Platt dont les bâtiments existent encore aujourd’hui, jouxte cette surface entre la rue Ingres et le boulevard de Lyon.

L’emplacement en 1953 Photo IGN

C’est sur cet emplacement que va être édifié le groupe Carpeaux, qui est réalisé par l’Office public HLM à partir de l’année 1960. En juin 1960, une visite de chantier réunit quelques personnalités, dont le maire Victor Provo, et les représentants des HLM, de la ville, les architectes et les entrepreneurs. Ils découvrent ainsi un grand bâtiment de quatre étages, comportant 69 appartements et deux autres constitués chacun par seize appartements. Une tour de huit étages, dite altière, présente quatre appartements par niveau et au rez-de-chaussée, la place est prévue pour accueillir deux magasins. Des garages sont prévus pour les véhicules des futurs habitants. Les personnalités visitent un logement témoin, c’est-à-dire peint et meublé comme s’il était habité. Puis ces messieurs gravissent les étages de la tour par les escaliers, car l’ascenseur n’est pas encore installé. Un vin d’honneur servi au rez-de-chaussée récompensera leurs efforts.

Le même emplacement en 1962 Photo IGN

Ce chantier a précédé de peu celui du boulevard de Reims, dont l’adjudication des travaux venait d’être lancée début 1960.

La tour Carpeaux en 1964 Photo Nord Éclair

Ce groupe est composé d’appartements agréables et confortables et il est doté du chauffage central. Les architectes Aureau et Verdonck sont les auteurs de ce magnifique lotissement. On peut y loger 133 familles. Le rez-de-chaussée de la tour Carpeaux a longtemps été occupé par un petit centre commercial, tenu par les Docks du Nord. Avec le temps, le groupe Carpeaux est entouré de petits arbres et de pelouses et présente un aspect de verdure agréable, malgré la présence automobile accrue.

Le groupe Carpeaux en 2012 Photo PhW