Le Crédit Municipal

Le Mont de Piété, ou Crédit Municipal, est un organisme de prêt sur gage, qui a pour mission de faciliter les prêts d’argent liquide pour les plus démunis. Contre le dépôt temporaire d’un objet de valeur, un prêt est accordé immédiatement. C’est la valeur estimée de l’objet sur le marché des enchères publiques qui détermine le montant du prêt. Le prêt est garanti par l’objet.

On raconte qu’un notable aurait déposé sa montre pour honorer une importante dette de jeu. Quelque peu honteux, il avait prétendu l’avoir oubliée chez sa tante. D’où l’expression « chez ma tante » pour qualifier le mont-de-piété. Le décret impérial du 11 juin 1870 signé de Napoleon III autorise la création d’un Mont-de-Piété à Roubaix au 65 rue des Longues Haies, avec de l’autre côté, une façade au 44 Boulevard Gambetta.

La rue des Longues Haies, est un quartier très populaire ou s’entassent les grandes usines textiles de l’époque et les courées ou vivent les ouvriers. Les personnes qui avaient des difficultés financières étaient très nombreuses, et pouvaient donc déposer leurs biens de valeur ( bijoux montres etc… ) au mont de Piété, qui leur accordait un prêt.

Mont de Piété rue des Longues Haies ( coll privée )
Mont de Piété rue des Longues Haies ( coll privée )

Le rez de chaussée était réservé aux dépôts de biens. Les étages étaient loués comme endroits de stockage, aux différentes entreprises textiles du quartier.

En 1918, un décret transforme les monts-de-piété en caisses de Crédit Municipal. Le changement de dénomination correspond au développement de ses activités bancaires parallèlement aux prêts sur gages. Le Mont-de-Piété de Roubaix devient Caisse de Crédit Municipal de Roubaix en 1920. Le directeur est D. Lacquement.

Dans les années 1940 1950 le directeur Gaston Fiévet continue à développer l’activité bancaire, et les prêts sur gages toujours aussi nombreux. En 1954 on compte 4 salariés dans l’agence.

Photo IGN 1953
Photo IGN 1953

Sur cette photo aérienne de 1953 on distingue parfaitement la délimitation des 2 parties du Crédit Municipal ;

– A gauche la façade du Boulevard Leclerc ( Gambetta ) avec au 44 au rez de chaussée le secteur activités bancaires, et à l’étage le logement de fonction du directeur, et au 42 le logement du chef de magasin responsable du service « Prêts sur gages ».

– Et en bas de la photo, la façade rue des Longues Haies.

Le bâtiment du Crédit Municipal n’échappera pas à la folle rénovation urbaine de la fin des années 60. Tout comme son voisin le grand Thêatre-Hippodrome, il sera rasé ( voir le récent article Ateliers Mémoire sur la résidence du thêatre ).

Gaston Fiévet prend sa retraite en 1966. Henri Descamps lui succéde. En 1972 le crédit Municipal achète un immeuble, au 30 rue de Lille, pour y emménager son agence, juste à côté de la station service Elf. C’est une grande maison bourgeoise qui était occupée par un médecin Melle Cl. Pernet.

C’est l’architecte roubaisien Luc Dupire au 109 rue de Dammartin, qui est chargé de l’aménagement de l’immeuble.

Document 1972 Archives Municipales et Google Maps
Document 1972 Archives Municipales et Google Maps

Le rez de chaussée est complètement transformé en un hall d’accueil pour la clientèle et en bureaux, l’étage est destiné au logement de fonction du directeur. Les écuries qui se trouvent dans l’immense jardin sont transformées en salle de stockage pour les objets déposés, avec une deuxième entrée de l’autre côté de l’immeuble, au 71 rue du Curoir. La configuration des locaux est donc la même que dans l’ancien bâtiment à savoir l’entrée rue de Lille pour les services bancaires, et la 2° entrée séparée rue du Curoir pour les prêts sur gages.

Document Nord Eclair 1975
Document Nord Eclair 1975

Les travaux sont achevés en Août 1975 et l’emménagement se fait en Octobre de cette même année, soit plus d’un siècle après l’ouverture de la rue des Longues Haies en 1970. C’est l’occasion de faire un bilan, en citant deux chiffres : Le montant des opérations des comptes de dépôts a été de près de 58.000.000 de Francs en 1974, et le montant des prêts aux fonctionnaires a été de 5.500.000 F pour la même période.

Document Nord Eclair 1975
Document Nord Eclair 1975

L’inauguration a lieu le samedi 13 Décembre 1975. Sur cette photo on reconnaît le maire de Roubaix Victor Provo, avec à sa droite son adjoint le docteur Guislain. qui visitent les nouveaux locaux et qui passent devant de nombreuses bicyclettes mises en dépôt par les clients

Au centre de la photo, ( de profil ) le directeur du Crédit Municipal : Henri Descamps

 

Le bâtiment de nos jours et l'enseigne, représentant un Grype ou Griffon, créature légendaire ( Photos BT )
Le bâtiment de nos jours et l’enseigne, représentant un Grype ou Griffon, créature légendaire ( Photos BT )

 

 

L’opération Balzac

Jusqu’au milieu des années 60 on pouvait voir, côté pair de la rue de l’Ommelet, entre les rues Pellart et Lavoisier, on trouve un ensemble d’habitations vétustes : la courée Hourez-Castelain, située entre les numéros 36 et 38, et le fort Balzac, entre les numéros 44 et 60, composé lui-même de plusieurs courées. Il comportait alors 84 maisons réparties en six alignements parallèles, fermés par une longue rangée perpendiculaire qui s’étendait jusqu’à la rue Lavoisier. Ces ensembles étaient reportés derrière les maisons placées en front à rue. Un passage plus large situé au centre du dispositif, noté impasse Balzac dans le Ravet-Anceau de 1885, commandait deux autres accès perpendiculaires plus étroits qui desservaient les différentes courées. L’ensemble est partiellement édifié en 1845, alors que, sur le plan cadastral de 1884 il apparaît construit dans son ensemble. A cet époque, il appartient pour l’essentiel à la veuve Henri Mulliez-Despatures. La cour Hourez-Castelain doit son nom à son propriétaire, qui tenait une crèmerie au 34 entre les deux guerres. Derrière le site, l’abattoir et la savonnerie Bass et Compagnie.

Document IGN
Document IGN

La fin des années 60 est le théâtre de vastes opérations visant la lutte contre les taudis, la suppression des courées et des logements insalubres. Dans ce but, le PACT (Propagande et Action contre les Taudis ) se porte acquéreur en 1969 du fort et le CIL construit avec le concours financier de l’État un collectif comprenant 39 logements de type P.S.R. (Programme Social de Relogement). C’est une cité de transit, destinée au logement les gens expulsés par l’opération de résorption des courées et ne disposant que de trop peu de moyens pour payer un loyer, même dans un HLM. L’ensemble comporte une antenne sociale placée au rez de chaussée.

Photos IGN et Nord Matin - 1969
Photos IGN et Nord Matin – 1969

Les finitions sont en cours en Août, et l’ouverture a lieu début 1970, la gestion étant confiée à la société d’HLM « Le Toit Familial ». La presse salue alors la construction de ce « magnifique collectif », aux « lignes sobres et modernes ».

Pourtant, dix ans après, le ton a changé : Dès 1981 les journaux dénoncent l’état de l’immeuble. Un représentant des locataires de l’immeuble déclare « le groupe Balzac n’a rien à envier aux bidonvilles ! ». On réclame des travaux importants de réhabilitation : Nouvelles portes aux entrées, (toutes les vitres en sont brisées), remplacement de l’installation électrique dans les entrées, dératisation régulière, (les rats pullulent depuis la démolition de l’abattoir), échange des boites aux lettres, remplacement au rez de chaussée par du béton du bardage isolant arraché sur les façades, rénovation des peintures, équilibrage du chauffage.

Les boites à lettres – photo Nord Eclair
Les boites à lettres – photo Nord Eclair

Le CAL, qui assure la gestion, promet des réparations, tout en doutant de leur pérennité, insiste sur le fait que les rentrée dues aux loyers ne permettent pas de faire face aux dégradations continuelles et fait un appel au civisme des locataires. Il faut dire que les 150 enfants utilisaient provisoirement comme terrain de jeu un espace libre, propriété du lycée Jean XXIII, avant qu’on y construise de nouvelles classes.

Photo la Voix du Nord
Photo la Voix du Nord

On songe à détruire ce véritable ghetto avant qu’il ne devienne invivable pour tous. 1982 voit un projet de projet de démolition. Mais les locataires, d’accords pour quitter les lieux, veulent disposer de nouveaux logements satisfaisants à proximité et forment un atelier-relogement, qui joue le rôle d’intermédiaire dans les discussions et les démarches. L’année suivante, quelques familles déménagent, mais les logements libérés sont vandalisés. Les autres sont en attente et la situation se dégrade pour eux. On met en cause l’inertie des organismes de gestion et de la mairie. L’association de quartier prend sur elle de murer certains appartements. Les dernières familles quittent les lieux en mai 1984. Vingt cinq familles sont relogées dans le quartier, les autres doivent aller plus loin. La démolition prévue pourrait être différée à cause du coût des travaux. Finalement, ceux-ci débutent en Novembre.

Photo la Voix du Nord
Photo la Voix du Nord

Les photos aériennes montrent en 1986 un terrain vague en bordure de l’avenue des Nations Unies qu’on vient de tracer. Deux ans plus tard, on assiste à la construction d’un nouvel ensemble : C’est un hôtel Formule 1 qu’on édifie sur l’emplacement de l’ancien fort Balzac.

Photo Jpm
Photo Jpm

Les documents proviennent de la médiathèque et des archives municipales

Le Broutteux

C’est un café brasserie que tous les roubaisiens connaissent, à l’angle de la place de la Liberté et du Boulevard du général Leclerc.

Le Broutteux aujourd'hui Photo Site Le Broutteux
Le Broutteux aujourd’hui Photo Site Le Broutteux

Le broutteux est à l’origine un ouvrier tisserand qui fabrique à domicile des pièces de tissu sur son otil (métier à tisser). Il les livre ensuite aux manufactures du bourg roubaisien, au moyen d’une brouette, d’où son surnom. Le Broutteux est en quelque sorte le premier artisan producteur de tissu, bien avant qu’on ne parle des grandes usines monstres roubaisiennes.

Le café « Le Broutteux » a été créé en 1882 par Ph. Eyames. Cet estaminet convivial accueillait les ouvriers à la sortie des usines textiles toutes proches (Motte Bossut au Boulevard Gambetta ainsi que celles de la rue des Longues Haies). Les familles y venaient également consommer, lors de leurs emplettes dans le centre ville.

Façade du Broutteux ( côté place de la Liberté ) vers 1910
Façade du Broutteux ( côté place de la Liberté ) vers 1910 Coll Part

En 1908 le propriétaire Ed. Verhaeghe agrandit son café et y installe une scène pour accueillir des orchestres.

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C’est la fête au Broutteux tous les samedis, dimanches et jours fériés. L’établissement devient alors un « Café Concert » Dans les années 1920, le propriétaire Victor Mulliez propose une animation différente chaque semaine, centrée autour d’un orchestre attitré, et d’un voisin, Jean Poulin, travesti en Charlot.par ailleurs commerçant du quartier.

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A la même époque, un espace est réservé dans le café à Henri Telliez, fabricant et réparateur de briquets, qui contribue à l’animation du commerce. Les affaires continuent à prospérer. Raoul Wattez rachète le commerce au début des années 1930 et poursuit la double activité qui a fait son succès ; café-concert le week end, et brasserie des familles en semaine. C’est, de tous, le propriétaire qui est resté le plus longtemps dans les lieux.

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Toujours soucieux d’animer son établissement, le Broutteux autorisait Georges et Denise Luthanie,  qui avaient un commerce de jouets Grande rue en 1951, à vendre quelques articles devant la façade du café, sur des panneaux pliants qu’ils transportaient sur une baladeuse.

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Au début des années 1970, crise oblige, le commerce tombe en décrépitude. Un homme d’affaires lillois, M. Clibouw, reprend le café, qui a perdu beaucoup de sa valeur, en 1975. Il va y effectuer des gros travaux de transformation pour redorer le blason de cette enseigne centenaire.

Le Broutteux au début des années 1970
Le Broutteux au début des années 1970

Le nouveau propriétaire va racheter un petit local situé juste à côté, au 65 Boulevard Gambetta pour l’agrandissement. Il va supprimer les fenêtres extérieures, pour les remplacer par des grandes baies vitrées, aménager le premier étage en salle accueillante de restauration de 120 places, avec des grandes fenêtres pour donner de la lumière à l’établissement. Le tout surmonté d’un bardage représentant un homme poussant une brouette. Les travaux d’aménagement seront réalisés par l’entreprise JC. Watterlot, de Lille.

Les travaux - Photo Lucien Delvarre
Les travaux – Photo Lucien Delvarre

Après deux ans de fermeture pour travaux, le Broutteux ouvre enfin en 1978 et va redémarrer superbement. De plus il profitera de la transformation du quartier en secteur piétonnier. Du choix, des prix . . . Plus de 30 bières pression ! La bouteille de champagne à 45,00 Frs, l’assiette anglaise à 10,00 Frs, des croques, des crèmes glacées . . . et l’animation musicale de fin de semaine est maintenue. Autre attrait du Broutteux, ses horaires d’ouverture : de 9h du matin à 1h du matin et jusque 2h du matin le week-end.

à gauche : Nord Eclair 1978, à droite, coll. particulière
à gauche : Nord Eclair 1978, à droite, coll. particulière

En 1984 Serge Fauvel, un ancien salarié du Broutteux depuis 1982, rachète le commerce et continue l’activité qui reste florissante. En 1997, il achète un petit local juste à côté, au 32 place de la Liberté, alors occupé par un dépositaire des laines « Berger du Nord » puis par une viennoiserie, et agrandit encore l’établissement. Cette petite surface de vente supplémentaire permettra, au rez de chaussée, de moderniser la cuisine et d’y vendre des pizzas et à l’étage d’agrandir encore la salle de restaurant. Le Broutteux accueille toujours ses clients dans une ambiance conviviale, et propose une cuisine traditionnelle avec des plats régionaux.

Photos du site « Le Broutteux » et collection particulière
Photos du site « Le Broutteux » et collection particulière

Avec près de 140 ans d’existence, le Broutteux s’affirme sans conteste comme l’un des grands cafés du centre de Roubaix. Et ce n’est pas terminé : Serge Fauvel laisse entendre qu’il pourrait bien encore agrandir son établissement en faisant l’acquisition d’un petit local Boulevard Leclerc, juste à côté, qui était il y a quelques années le « Palais de la Fortune » tenu par JL. Verhaeghe, et surtout des projets d’agencement magnifiques et importants pour l’intérieur de son café brasserie, en s’inspirant de ce qu’il a réalisé dans son autre établissement, « l’impératrice Eugénie ».

 

Les documents proviennent de la médiathèque de Roubaix et des archives municipales

 

 

Les cuisinières Verdière

Au tout début des années 1910, Augustin Verdière reprend l’entreprise J.B.Kesteloot créée en 1871 fabricant de cuisines mais également de coffre-forts. L’entreprise est composée d’un magasin de vente au 59 et 61 Boulevard Gambetta et d’un atelier, et d’un deuxième point de vente au 134 rue Pierre de Roubaix.

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Augustin se spécialise dans la fabrication de cuisinières à carreaux, en faïence et en tôle, au charbon. Les affaires sont florissantes, et il embauche une dizaine d’ouvriers, dans son atelier de production de la rue Pierre de Roubaix. Ses deux fils Alphonse et André viennent ensuite l’aider dans l’entreprise.

cv2-96dpiLe fils d’Augustin, Alphonse Verdière, sa femme Jeanne et leur fille Gabrielle, devant la façade du magasin au 59 61 Boulevard Gambetta en 1922.

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Augustin Verdière décède à la fin des années 1920. En avril 1930 la mairie de Roubaix autorise sa veuve à démolir le magasin en bois du boulevard Gambetta, et à construire une maison en dur, à usage de commerce avec deux étages.

L'ancien magasin, et les plans du nouveau
L’ancien magasin, et les plans du nouveau

Puis survient le décès d’Alphonse au début des années 50. André Verdière reste donc seul à gérer l’entreprise. Les affaires deviennent de plus en plus difficiles, André doit faire face à la concurrence des nouveaux modes de chauffage au gaz et surtout au mazout. L’arrêt de la production de cuisinières est inévitable, et se produit en 1955. L’atelier et le magasin de la rue Pierre de Roubaix ferment définitivement, en 1964 ; le magasin sera transformé en habitation, et l’atelier démonté et remplacé par un jardin d’agrément.

Le magasin avant et après transformation
Le magasin avant et après transformation

Le magasin du Boulevard Gambetta changera complètement d’activité ; il se spécialisera dans le commerce d’articles ménagers, et profitera pleinement du succès des années 60. Cinq personnes étaient présentes dans le magasin pour vendre les casseroles et autres cocottes-minute, surtout le samedi, et lors de la fête des mères.

Après la mort d’André, tous les autres membres de la famille (épouse, sœur, beau frère, nièce…) viendront gérer le commerce et continueront l’activité. En 1977 ils décident de prendre une retraite bien méritée, et donc d’arrêter l’activité. En 1978 le magasin sera cédé, et deviendra un magasin de confections pour homme, avec l’enseigne L’HOM.

Dans les années 80 le magasin sera divisé en 2 parties ( 59 et 61 ). On y trouve aujourd’hui une boulangerie et un assureur.

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Les documents proviennent des archives municipales de Roubaix, de Google view, et d’un collectionneur privé.