Dite église du Tilleul, l’église Sainte Elisabeth faillit s’appeler Saint Sépulcre, en commémoration de la Chapelle du même nom qui existait autrefois Place de la Liberté. Mais les édiles et les paroissiens préférèrent honorer Sainte Elisabeth en souvenir d’un autre lieu mémorable de Roubaix, l’hôpital Sainte Elisabeth, qui fut fondé par Isabeau de Roubaix. Cette église fut également dédiée à Sainte Elisabeth de Hongrie, canonisée en 1235.
C’est le 15 mars 1858 que Madame Veuve Delaoutre, née Decrême et ses enfants font la donation d’un terrain de 70 ares 93 centiares situé à l’angle du chemin vert reliant la rue du Moulin à la route de Lannoy et du récent Pavé de Lannoy. Le projet est d’y faire construire une église, un presbytère et des écoles. La construction de l’édifice religieux est décidée par délibération municipale du 16 mai et 28 septembre 1859, M. Tiers Bonte étant Maire. L’adjudication des travaux date du 19 mars 1860. Elle est l’œuvre de l’architecte de la ville Théodore Lepers qui la conçoit en style romano-byzantin. La pose de la première pierre eut lieu le 3 juin 1860 par une pluie battante. Les travaux vont durer trois ans. En 1863, elle est ouverte au culte, après avoir été érigée en paroisse pour desservir les quartiers du Pile, des Trois Ponts, du Tilleul et de la Potennerie. Son premier curé desservant sera l’abbé François Labaye qui obtiendra du Conseil Municipal les premiers crédits pour faire construire la chaire et les stalles. En 1867, après trois ans d’attente, une horloge est placée sur la tour de l’église qui a pour particularité d’avoir des cadrans lumineux. Mais la crainte de l’incendie de la flèche et le mauvais fonctionnement de l’appareil amèneront la suppression de l’éclairage.
L’église Sainte Élisabeth accueillera d’excellentes copies de tableaux de grands maîtres, à la demande du Comte Mimerel en 1867, et du Député Maire Constantin Descat en 1874. Mais on peut également y trouver les œuvres d’artistes roubaisiens, comme une des premières œuvres remarquées de JJ Weerts, Saint François d’Assise étant prêt de rendre l’esprit se fait transporter à Sainte Marguerite des Anges, ou encore le Concert des Anges sur la route d’Egypte d’Henri Meurisse, sans oublier le tableau représentant Jésus au milieu des Docteurs réalisé par Constantin Mils.
L’abbé Tilmant installé curé le 6 juillet 1884 va se charger du grand orgue de Saint Élisabeth. Il lance un appel à ses paroissiens pour remplacer l’orgue initial insuffisant pour une si grande église et de plus en mauvais état. La commande est passée à la maison Schyven et Compagnie de Bruxelles. Le grand orgue sera construit et posé en 1885, il aura coûté plus de 30.000 francs de l’époque. Le jeudi 26 novembre 1885, la cérémonie d’inauguration sera conduite par le Chanoine Berteaux doyen de Saint Martin, avant la messe du Saint Sacrement. Le même jour, Alphonse Mailly, premier organiste de sa Majesté le Roi des Belges donnera la première audition de l’instrument. Quelques temps après, ce sera le tour de M. Koszul organiste de Notre Dame de Roubaix, et de M. Meyer organiste de Saint Martin. Le titulaire du grand orgue de Sainte Élisabeth pour 25 ans sera un bruxellois M. Seutin, auquel succédera M. Edouard Peers.
L’abbé Tilmant s’occupera également de doter l’église d’un autel digne d’elle. Ce sera chose faite en 1897 : l’ancien autel en bois de chêne est remplacé par un Maître Autel monumental de style roman en marbre blanc, dont le dessin est l’œuvre de l’architecte Patteyn d’Hazebrouck. Le 21 novembre 1897, le Chanoine Berteaux procédera à la bénédiction et l’inauguration de cette œuvre incomparable. En 1892, Madame Alfred Motte offre un banc de communion en marbre blanc devant l’autel, suite à un incident lors des obsèques de son mari, quelques années plus tôt. Il y eut tant de monde à cette cérémonie que le banc de communion qui était en bois se brisa. Le banc actuel porte l’inscription en lettres d’or l’inscription suivante : à la mémoire de Monsieur Alfred Motte-Grimonprez. L’abbé Tilmant remédiera enfin au manque de lumière de cette église en faisant agrandir trois des neuf fenêtres du chœur, et par la pose de vitraux plus clairs que les initiaux de 1895 à 1901. Les péripéties entraînées par la loi de séparation des églises et de l’Etat et la première guerre mondiale retarderont la consécration solennelle de l’église, qui interviendra le 29 juin 1933 et dont la cérémonie sera conduite par Monseigneur Jansoone.
L’église Sainte Élisabeth est née sans flèche à son clocher. Le conseil municipal votera un crédit en 1877 pour la pose de la croix du clocher et du coq, lequel fut remplacé en 1898 par un nouveau coq en cuivre faisant fonction de girouette. Il s’envolera au cours d’une tempête en 1929. Plus récemment, en 1972, la démolition de la flèche de l’église sera décidée, en raison de l’envol régulier de ses ardoises, du danger que cela représentait pour les passants et des menaces de son effondrement par grand vent.
Sources :
Notice sur l’église Sainte Élisabeth in Bulletin SER n°40
Abbé Schapman, Vie abrégée de Sainte Élisabeth de Hongrie, suivie d’une notice sur l’église Sainte Élisabeth à Roubaix Editions SILIC 1934
Sainte Elisabeth perd sa flèche
Depuis le début de l’année 1972, l’église Sainte Elisabeth subit les outrages d’un vent violent. Les ardoises de sa flèche s’envolent régulièrement, menaçant de blesser les passants. En avril 1972, il est question de démolir la dite flèche. La démolition de la flèche aura lieu plus rapidement que prévu. En effet, un pan entier d’ardoises, de cinq mètres de longueur, s’est détaché de la flèche et menace de tomber, n’étant plus retenu que d’un seul côté. Les pompiers, la police et la mairie sont alertés. Le quartier fait l’objet d’un périmètre de sécurité Place Sainte Elisabeth, et la circulation est momentanément interdite dans la rue de Lannoy, du boulevard de Belfort jusqu’à la rue Jules Guesde. On fait appel à l’entreprise de démolition Maillier, qui est intervenue sur le chantier Edouard Anseele quelques années plus tôt. Il était plus que temps, des centaines d’ardoises s’envolent et vont atterrir sur la toiture de l’église, sur la place et sur les maisons avoisinantes. La démolition de la flèche de l’église est rapidement opérée, et le sommet du clocher est couvert d’une plateforme. Des réparations sont apportées à la toiture de l’église et on parle de rénovation, compte tenu de son âge vénérable, car elle est plus que centenaire au moment des faits.