Avenue des villas : un prolongement

L’avenue des Villas est maintenant ouverte entre la rue de Lannoy et la rue de Barbieux. Pour se rendre au parc, il est prévu d’emprunter la rue Montyon, qui n’est pas achevée. Elle est toujours barrée par une construction, et constituée par le tronçon d’un ancien sentier communal. De plus, elle forme un angle important avec l’avenue des Villas, et sa largeur prévue n’est que de douze mètres contre 30 à l’avenue des Villas. Ces inconvénients inspirent un autre plan : plutôt que de réaliser enfin la rue Montyon, pourquoi ne pas prolonger l’avenue des Villas en ligne droite par une voie de même largeur qu’elle ?

Le prolongement imaginé – Document archives municipales.

 Les propriétaires des terrains nécessaires à la prolongation de l’avenue sont essentiellement la société Lemaire Lefebvre, Edmond Ternynck-Dorneuil, ainsi que Pierre Delsalle-Defives, qui possède les bâtiments situés le long de la rue de Barbieux, juste dans l’alignement de l’avenue qu’ils barrent entièrement.

Dans une lettre datée du 21 Février 1899, certains des propriétaires concernés acceptent de céder les terrains nécessaires pour prolonger l’avenue entre la rue de Barbieux et l’avenue Lenôtre « en prolongation directe et sans courbe ». La ville s’engage à racheter ou à exproprier les deux propriétés implantées sur le passage de la voie, et à déclasser la rue Montyon, en restituant le terrain sur laquelle elle a été tracée. Ce terrain avait été cédé gratuitement quelques années plus tôt par Maxime Brame, qui le tenait de son père, Jules Brame, député et sénateur, également propriétaire du château de Beaumont à Hem. Le reste de ses propriétés a ensuite été cédé à la société Lemaire et Lefebvre, qui les a acquises en 1896. C’est donc elle qui récupérerait les terrains libérés par la rue Montyon.

Un obstacle toutefois , Edmond Ternynck, qui possède un terrain situé le long de l’avenue Lenôtre entre la rue Bossuet à la rue Montyon, et peu soucieux de voir ce terrain amputé et coupé en deux, entend contraindre la ville à tenir ses premiers engagements en ce qui concerne la rue Montyon. Il refuse tout arrangement amiable.

Le tracé est en nette pente (3,4 %) vers l’avenue Lenôtre et les eaux devront s’y déverser. Il faudra y construire un acqueduc pour les recevoir. Le projet est approuvé par le préfet et déclaré d’utilité publique en janvier 1901.

Document archives municipales

On procède activement aux formalités d’expropriation, d’indemnisation et d’acquisition des immeubles en vue de démolition. Edmond Ternynck, mis devant le fait accompli, accepte finalement un règlement à l’amiable. La rue Montyon est déclassée et supprimée, les servitudes la concernant disparaissent et les terrains qui la constituaient sont redistribués à leurs anciens propriétaires.

Les travaux peuvent démarrer. On se borne à niveler la voie nouvelle et à recouvrir le sol de cendrées. Les riverains vont pouvoir construire le long de la nouvelle avenue.

 

 

Avant l’avenue des Villas

En 1884, la partie sud de Roubaix, que l’on appelait « Roubaix Campagne », n’était constituée que de terres agricoles et de quelques hameaux. Ces terres dépendaient de quelques grosses fermes : Gourgemez, la Haye, la Petite Vigne, Maufait, l’Espierre, le Petit Beaumont… La population de la ville s’est considérablement développée et la partie sud va s’urbaniser progressivement : les usines et les habitations vont gagner ces zones potentiellement libres.

Pl1884-96dpiPlan cadastral de Roubaix Sud en 1884 – Document archives municipales

On veut donc structurer cette zone en traçant des voies le long desquelles s’implanteront les nouvelles constructions. Un projet de boulevard de ceinture se décide dès 1866. Il sera constitué des boulevards Lacordaire, de Reims, de Lyon et de Mulhouse pour relier le quartier de Barbieux à la gare de Roubaix-Wattrelos. Le projet se réalise vers 1888.

Entre temps les terres agricoles ont été, pour une bonne part, reprises par diverses sociétés,  et en particulier par la société Lemaire frères et Lefebvre, qui possède alors la majeure partie de ce qui constitue aujourd’hui le Nouveau Roubaix.

On retrouve souvent le nom de cette société lorsqu’il est question de tracer des voies nouvelles, dans les années 1890 . Certains terrains sont rachetés pour implanter la place du Travail en 1891, le boulevard de Fourmies, jusqu’à la place de l’Avenir, en 1892 et la rue Carpeaux en 1896. D’autres terrains sont cédés gratuitement, par exemple, ceux qui sont nécessaires à la prolongation du boulevard de Fourmies. Enfin, cette même société propose aussi de céder à la Ville des rues qu’elle a construites sur ses propriétés : c’est le cas de la rue Henri Regnault en 1891, la rue Meissonnier en 1895, la rue David D’angers, la rue Rubens et la rue Philibert Delorme en 1896. La société Lemaire frères et Lefebvre construit également des maisons dans le nouveau quartier.

Les ouvertures de rues et les constructions se multipliant, la municipalité veut voir plus grand, et construire une ceinture plus large, qui englobera toute cette zone et reliera la rue de Lannoy et Barbieux, en restant proche des limites de la commune.

QuartiersSud-1896--96dpiPlan des quartiers sud en 1896,  en noir les rues existantes, en rouge les voies projetées Document archives municipales

Dans un rapport au conseil municipal en 1896, le directeur de la voirie propose l’ouverture, entre le chemin de Barbieux et la rue de Lannoy, d’une avenue dite « des villas ». Il souligne l’engagement des propriétaires de céder les terrains concernés à titre gratuit pour que cette ouverture se réalise. Le projet va donc pouvoir prendre corps.

La cité Motte-Grimonprez

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Document Journal de Roubaix du 25 Juillet 1937

Alfred Motte décède à Roubaix en 1887. Par testament, il lègue une rente de près de 17000 francs de l’époque au bureau de bienfaisance, en précisant que les intérêts devraient être capitalisés pendant 100 ans pour servir à diverses œuvres de bienfaisance, telles que maisons d’ouvriers louées à prix modérés, bains chauds et gratuits, hôpital pour maladies infectieuses, primes aux ménages les mieux tenus.

La première fondation devait obligatoirement consister à créer une ou plusieurs cités sans charge de loyer pour les femmes veuves de maris morts d’accidents dans l’industrie.

Plutôt que d’attendre 100 ans, la famille décide de commencer la réalisation dès qu’un million sera produit par la capitalisation de la rente. Ce premier million se fait attendre beaucoup plus longtemps que prévu : cet évènement ne se produit que 52 ans plus tard, en 1937. On construit donc alors avec cet argent, avenue Gustave Delory, une cité comprenant 12 maisons ouvrières pour des familles dont le chef est accidenté du travail. Les maisons sont implantées le long d’une voie privée, séparée de l’avenue par un portail monumental.

C’est ainsi que les Ravet-Anceau de l’époque font mention au numéro 225 de la « Fondation Motte-Grimonprez, bureau de bienfaisance ».

La cité existe encore de nos jours. Elle est en bon état, mais son fronton a été remplacé par un portail plus modeste. Des maisons complémentaires ont été ajoutées derrière celles d’origine. Une plaque indique encore le nom de la fondation.

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