Vingt ans de Bol d’air

Les équipements du Bol d’air vont bientôt se compléter. Le vase de Sèvres en grès disparaîtra en 1962, à cause de son mauvais état. Nous avons déjà raconté son histoire dans un article antérieur. Les concessionnaires du Bol d’Air utilisèrent son emplacement pour établir des pistes de pétanque, et l’espace compris entre le Bol d’Air et le vase est reconverti en golf miniature. Victor Provo, maire de Roubaix, viendra inaugurer début juillet 1962 le golf miniature et les cinq pistes de pétanque qui faisaient partie d’un ensemble de travaux comprenant également de nouvelles terrasses.

Vues aériennes de 1962 et 1971. ext IGN

L’activité du Bol d’Air est également commerciale. En octobre 1962, sept commerçants roubaisiens viennent présenter la mode automne hiver 62/63, parmi lesquels Dany Laure prêt à porter 39 grand rue, Vick grand prix national de coiffures dames 163 rue de lannoy, Elle et lui parfumeur 36 rue de lannoy, Véronique modiste rue Pauvrée, Lucien maroquinier 56 rue de lannoy, la ganterie Ganord et le chausseur Termeulen 138 rue de l’alma. La Régie Renault s’associe et présente entre autres véhicules la Floride dont Brigitte Bardot fit la promotion. A Lobry et son quartette pour l’ambiance musicale et christiane Rabiega speakrine de la radio télévision lilloise depuis 1957 au commentaire. Quatre mannequins Brigitte, Corinne, Rosine et Virginie présentent les modèles avec le sourire, malgré la chaleur. Robes de flanelle, robes du soir en mousseline, mais aussi coiffures agrémentées de paillettes, de plumes ou d’un nœud de velours de maître Vick. Sans oublier les chapeaux qui accompagnent les robes, manteaux, redingotes et tailleurs de Dany Laure. Melons, toques, bonnets et casquettes, et même un ravissant chapeau de plumes de faisan. Lucien le maroquinier intervient pour l’indispensable accessoire de la femme moderne, le sac, dont il propose d’innombrables versions, en daim, en vachette, en lézard ou en agneau. Les mannequins étaient gantés par Ganord, et chaussés avec les escarpins de la maison Termeulen. Une tombola dotée de parfums par le parfumeur « Elle et lui » clotûre l’événement. Roubaix a le goût de ce genre de défilés, qu’on retrouve dans des endroits aussi divers que la salle Watremez ou la Grand Place de Roubaix.

Grande salle en construction photo NE

Mais la question du restaurant n’est pas résolue, comme le souligne un article de novembre 1962. Signes positifs, on pense déjà fléchage spécial en ville et éclairage décoratif pour indiquer et mettre en valeur le futur restaurant. Mais il faudra attendre quelques années encore avant que Victor Provo inaugure le dimanche 29 juin 1969, une nouvelle et immense salle de restaurant de 400 places, sans doute à l’occasion des fêtes célébrant les cinq cents ans de la Charte (ou de la promesse de Charte) accordée par Charles Quint aux roubaisiens. En cette année 1969, la convention du Bol d’air est renouvelée à Loisirs et Sports. C’est également en 1969, au mois de juillet que le 24° Championnat de France de pétanque est organisé à Roubaix1.

Les lieux en 1969 CP Méd Rx

Mais les choses changent en 1981. La société « Loisirs et Sports » se retrouve en règlement judiciaire et sa gestion est assurée par un syndic. Résultat, les jeux ne sont plus réparés ni entretenus et le golf n’a pas réouvert en 1980, les barques et pédalos n’ont pas été remis à l’eau à Pâques. Le lieu est mal protégé, et il y a des risques d’accident. Ainsi un enfant s’est-il déchiré la jambe en jouant sur un toboggan dont une tôle dépassait. Le restaurant et la brasserie sont restés ouverts, et M Colin en a la gérance depuis 1976. Il y a 800.000 francs de travaux pour remettre en état la partie jeux, mais M . Colin ne veut pas prendre en charge. Il fermera le restaurant le 30 septembre 1981. On pense tout raser pour mettre fin au vandalisme, et en mairie, on émet le projet d’un hôtel Sofitel.

Incendie de janvier 1982 Photo NE

Le 15 janvier 1982, un incendie se déclare dans le restaurant qui n’offre plus les garanties de sécurité nécessaires. Le bâtiment se fissure et la société sports et loisirs déclarée en faillite ne peut procéder aux réparations. L’incendie se déclare vers 19 heures dans le restaurant. Il y a deux foyers : l’un au centre du restaurant, près de la cheminée, et l’autre dans la rotonde où se trouvaient les archives de la société sports et loisirs. L’éventualité d’un acte criminel n’est pas exclue.

En juillet 1982, la mairie fait débarrasser les décombres et envisage de remettre en service une buvette et l’aire de jeux, avant un programme plus important comprenant un café, un restaurant et peut-être même un hôtel, à condition de trouver les exploitants pour tous ces services. Comme le dit ironiquement la presse, c’est reparti comme en 1960 !

à suivre

Remerciements à Jean Pierre pour les éléments et l’iconographie

1Voir l’article de Bernard Termeulen dans le site http://roubaix-sports.com

La naissance du Bol d’air

Depuis la disparition du café de la Laiterie pour cause de gène de circulation ferroviaire en 1951, il n’y a plus de café digne de ce nom dans le Parc de Barbieux. Souvent réclamé notamment de 1957 à 1960 par M. Marcel Horent, membre du conseil municipal, le projet d’un centre de délassement est finalement retenu.

Vase et transvasements Photos NE & NM

Il fallait en définir l’emplacement. Un article de presse de février 1961 indique qu’on est en train de préparer un espace le long de l’étang qui se situe au-delà de l’avenue du peuple belge et qui s’étend vers le fer à cheval. Un port fera partie de ce centre de délassement, où pourront s’amarrer barquettes et pédalos. En attendant, on débarrasse la grande pièce d’eau de la vase et le syndicat des pécheurs transfère à grand peine les poissons qui s’y trouvent, carpes, gardons, cyprins… vers l’autre pièce d’eau du parc, avant d’être dirigés vers le canal.

Le bâtiment en cours de construction Photo NE

Des palplanches sont plantées le long des rives et le fond est vite atteint, se trouvant au maximum à un mètre de profondeur. Quand la pièce d’eau fut partiellement curée, la pelouse fut éventrée pour les charpentiers et les maçons. Un gracieux bâtiment fait de moellons et de briques s’est progressivement élevé. Léger et élégant, ce premier bâtiment abrite un bar et une buvette où l’on servira des repas froids, des pâtisseries.

Un deuxième bâtiment est en construction, qui tourne le dos aux rails du Mongy destinés aux bureaux de l’entreprise, avec un vaste préau sous lequel le promeneur pourra s’abriter en cas de pluie. Devant ce bâtiment on prévoit une plaine de jeux avec manèges et pistes de patinage pour l’amusement des enfants. L’embarcadère est encore à faire en cette fin avril, qui terminera la première tranche de travaux. Si l’affaire s’avère rentable, il est question d’un restaurant, de salles de réunion et de banquet, à partir de l’année prochaine. En attendant les travaux ont pris un peu de retard, et ne seront terminés que fin juin.

Inauguration Photo NE

Le vendredi 30 juin, c’est l’inauguration du centre de délassement du Parc Barbieux. En présence des réalisateurs de la société Loisirs et Sports Rodolphe de Croy-Roeulx et Richard Duflot, M. Kléber Sory adjoint au maire coupe le ruban tricolore pour accéder à la future salle de restaurant, antichambre de la terrasse bien fraîche et du petit port où attendent barques et pédalos.

Le promoteur belge Rodolphe de Croy-Roeulx, barbieusard de fraîche date selon son expression, annonce déjà la suite du programme, avec l’implantation d’une rôtisserie, de bowlings, et pourquoi pas du futur musée du vieux Roubaix qui cherche en vain un lieu. Kléber Sory évoque quelques souvenirs de l’exposition du Progrès Social de 1939. Il eût été déplacé sans doute de citer la Laiterie qui survécut aux deux guerres et même aux deux expositions s’étant déroulées dans le cadre du parc.

Officiels en bateau Photo VDN

Quelques personnalités s’en vont canoter au gré de l’eau. Ainsi MM. Texier, directeur de l’Ensait, Catrice et Jullien, adjoint et conseiller municipal. La plupart des entrepreneurs ayant participé au chantier sont roubaisiens : la société Jules Plankaert s’est chargé de la charpente, la SARL Buisine et Sagard des peintures, la miroiterie Tousson, le béton armé Delfosse Guiot. Jusqu’aux parasols qui ont été forunis par la maison Mac Mahon du boulevard de Paris ! Pour l’éclairage du Parc, la municipalité a fait appel aux établissements Vernier et Cie installé boulevard Gambetta à Roubaix.

Annonce de l’ouverture au public

Il a fait beau, très beau cet été là et les roubaisiens se sont rendu en foule dans ce nouvel équipement qui s’est déjà avéré trop petit ! La presse locale titre : Rush sans précédent au Parc Barbieux ! On a fait la queue pour les barques, et les promeneurs s’ils ont pu goûter à l’ombre des frondaisons, n’ont pas tous profité d’une boisson fraîche tant il y avait de monde.

Terrasse et embarcadère CP Méd Rx

Seul bémol peut-être pour les riverains de l’avenue Le Nôtre, le stationnement bilatéral et longitudinal des voitures est autorisé de l’avenue du peuple belge jusqu’au débouché de la rue Verte. Des panneaux sont également posés : interdiction de doubler, vitesse limitée à 30 km/h, et quelques stops pour garantir la sécurité des carrefours.

à suivre

Sources

Presse NM, NE, VDN

Le mystère du vase de Sèvres

Parmi les monuments qui agrémentent çà et là le beau jardin, alias le Parc de Barbieux, se trouvait autrefois un imposant vase de Sèvres en grès céramique. L’auteur de cette œuvre était le sculpteur Gauvenet, entré à la Manufacture nationale de Sèvres en mai 1908, pour y être sculpteur de 1912 à 1925, puis artiste-sculpteur de 1925 à 1943. Il est l’auteur de nombreuses sculptures et formes, et notamment des vases.

Le pavillon des deux villes à l'exposition des arts décoratifs de 1925 Coll. Particulière
Le pavillon des deux villes à l’exposition des arts décoratifs de 1925 Coll. Particulière

Ce vase de couleur blanc crème provenait de l’Exposition des Arts décoratifs de 1925, à laquelle participèrent conjointement les villes de Roubaix et Tourcoing. Ses dimensions étaient considérables : 7 mètres 30 de hauteur, trois mètres de diamètre, à sa partie le plus ventrue. C’est une délibération du conseil municipal du 18 juin 1926 qui nous donne l’origine de la présence de cette urne monumentale. Il s’agit d’un don de l’État à la ville de Roubaix.

Le vase de Sèvres du Beau Jardin CP Méd Rx
Le vase de Sèvres du Beau Jardin CP Méd Rx

Nos édiles ne souhaitèrent pas le placer à l’intérieur du parc, dont il aurait immanquablement obstrué la vue. Ils préférèrent lui donner comme emplacement un rond-point situé en bordure de l’avenue Jean Jaurès, situé à égale distance de la Laiterie et de l’extrémité du parc côté Croix. C’était un des points les plus hauts du parc, qui conviendrait parfaitement à sa mise en valeur, sans gêner pour autant la perspective d’ensemble du parc. Il en coûta 12.200 francs pour installer ce monumental vase.

Victor Provo inaugurant le golf miniature Photo Nord Matin
Victor Provo inaugurant le golf miniature Photo Nord Matin

Il disparaîtra en février 1962, à cause de son mauvais état. Les concessionnaires du Bol d’Air utilisèrent son emplacement pour des pistes de pétanque plus prosaïques, la pelouse comprise entre le Bol d’Air et le vase étant reconvertie en un golf miniature. C’est un véritable centre de délassement, pour reprendre les termes de l’époque, que Victor Provo, maire de Roubaix,  inaugura début juillet de la même année. Le golf miniature et les cinq pistes de pétanque faisaient partie d’un ensemble de travaux comprenant également les nouvelles terrasses du Bol d’Air.

Le golf miniature Coll. Particulière
Le golf miniature Coll. Particulière

Quand les loisirs prenaient le pas sur les commémorations symboliques…

Un bol d’air dans le Beau Jardin

Près de dix ans après la démolition du cabaret de la Laiterie, le parc Barbieux manque d’animation. On évoque en conseil municipal l’installation d’une brasserie en novembre 1960, la création d’un centre de délassement en avril 1961. M. Horrent, rapporteur de la commission nommée à cet effet, remarque que « …la promenade pure et simple n’a plus l’attrait de jadis… » et déplore que le parc n’offre pas d’autres distractions. Il propose de créer des jeux pour enfants et adultes, ainsi qu’un établissement « attrayant et reposant » pour y « consommer en toute quiétude », et fait alors état de contacts avec la société anonyme « Loisirs et Sports », spécialisée dans ce domaine.

Cette société obtiendrait une concession de longue durée en échange de la construction des installations. La ville accorde cette concession pour une durée de quinze ans, et les travaux commencent très vite. Le maire de Roubaix inaugure les installations en juillet.

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Une première phase prévoit l’installation d’un embarcadère pour le canotage, des promenades en petit train et à dos d’animaux, et un établissement de consommation « pour l’attente et le repos ». On aménage les voies d’accès et les bords de l’étang, et on construit deux corps de bâtiments présentant un décrochement. Les barques sont installées et n’attendent plus que les plaisanciers. Une terrasse plantée de parasols prolonge les bâtiments.

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Cette première phase doit être complétée par deux autres, comprenant un golf miniature, une ou plusieurs salles de restaurant et de banquets, et des pistes de bowling.

Dans une édition de février 1962, la Voix du Nord salue le succès de l’établissement et annonce l’installation du golf miniature, l’extension des cuisines, et l’aménagement d’un sous-sol dans le bâtiment actuel. Le journal évoque par ailleurs la possibilité de construction d’un restaurant par la même société dans le centre du parc, près du kiosque à musique. Un bâtiment supplémentaire, présentant un deuxième décrochement est bâti dans l’alignement du précédent pour la saison 1962. Le golf miniature est installé près de l’embarcadère ; mais il n’est terminé qu’en fin de saison.

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En novembre de cette même année, on utilise le site pour des opérations de promotions : un défilé de modes, la présentation de la gamme Renault, avec, en vedette, la Floride…

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Les choses restent en l’état jusqu’en 1969, où on complète le centre avec une salle brasserie de 400 places. Le nouveau bâtiment est détaché du précédent. Placé le long de l’embarcadère, il en épouse la forme. Son ouverture a lieu fin juin, à temps pour la belle saison.

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Les documents proviennent d’une collection particulière, les journaux et délibérations des archives municipales.