Histoire du Lido

Quand les Halles centrales roubaisiennes furent démolies en août 1956, personne ne se doutait que l’emplacement servirait à nouveau, à peine dix ans plus tard, comme surface commerciale. Pensé comme un centre de transit, intermédiaire entre la partie de la rue de Lannoy à démolir, et le futur centre commercial Roubaix 2000, le Lido existera quelques années avant de disparaître à son tour. L’endroit, aujourd’hui occupé par la poste et la Médiathèque, connaîtra là ses dernières heures commerciales. Nous allons raconter son histoire.

La place des Halles en aire de stationnement Photo AmRx

Avant qu’on n’envisage l’emplacement des Halles pour la cité de transit, le maire Victor Provo soutiendra l’option de l’appropriation de l’usine Huet comme centre transitoire, s’il y a assez de candidats. Cette usine se trouvait autrefois entre la caserne des pompiers (aujourd’hui la CAF) et l’entrée de la rue de Lannoy, c’est-à-dire juste à côté du périmètre à démolir et à reconstruire. Le chausseur Papillon se déclare favorable au projet  Huet. Le quincaillier Gamin suggère qu’on installe les baraquements dans le tronçon du boulevard Leclerc, à partir de la poste.

Photo usine Huet Boulevard Gambetta Collection Particulière

On avance sur le projet Huet, mais de manière peu convaincante : la  façade serait abattue puis remplacée par une baie vitrée, le cloisonnement en cellules reviendrait trop cher, et que penser du travail en commun pour des commerces habitués à leur individualité ? La question du logement piétine également : on relogerait des commerçants dans la première barre construite avec les sapeurs pompiers rue Bernard. Un questionnaire est prévu sur l’utilisation de l’usine Huet, et sur l’organisation du futur centre ; il est clair qu’il y a un effort d’adaptation pour les commerçants auquel ils ne s’attendent pas, comparable toutes proportions gardées, au choc des habitants de la rue Edouard Anseele relogés dans le quartier des Hauts Champs. Il y a là un problème humain.

Mars 1964 Plan du centre commercial de transit Place des Halles Publié par Nord Éclair

Une proposition du centre de transit sur la place des halles est finalement avancée par M. Jacques Motte président de la chambre de commerce dès janvier 64. Puis les premiers travaux d’appropriation sont lancés, qui créent quelques bouleversements, notamment pour la circulation autour de la place des halles. La rue Jeanne d’arc devient piétonnière, la rue de la halle sera élargie et la circulation se fera dans les deux sens. Le futur centre commercial de transit sera piétonnier. Il se présentera sous la forme d’un assemblage d’éléments préfabriqués en aluminium et en glace. Les parquets intérieurs sont en chêne et chaque commerçant pourra personnaliser son magasin, d’autant que l’aménagement de l’intérieur et les enseignes lumineuses seront à leur charge. Un précédent cependant : l’auvent qui surplombe chaque magasin reçoit l’éclairage public. Le tout doit être mis à la disposition des commerçants dans le courant du mois de juillet. L’ouverture officielle aurait lieu courant septembre ou après la braderie…

à suivre

La Rue de Leers : une naissance difficile

Les Trois Ponts et le Carihem en 1845

 Une loi accordant aux communes une subvention pour faciliter l’achèvement des chemins vicinaux, est promulguée le10 Juillet 1868. Les municipalités songent aussitôt à profiter de ces subsides.

En janvier 1869 la commune de Leers se préoccupe de l’établissement d’un chemin vicinal reliant Leers à Roubaix qu’elle juge « d’une utilité incontestable, tant sous le rapport industriel qu’agricole ». Ce chemin, d’une largeur de 10 mètres, doit aboutir au pont Caudron, à la limite de Roubaix, et se raccorder au chemin n°15 qui conduit au hameau des Trois Ponts. On décide de l’exécution de ce chemin, à condition que les terrains concernés soient abandonnés gratuitement par leurs propriétaires, dont les biens devraient en contrepartie bénéficier d’une plus-value.

De son côté, la ville de Roubaix s’intéresse également à l’amélioration des communications entre les deux communes, « tant au point de vue des intérêts commerciaux, que de ceux de l’alimentation de nos marchés ». Une commission est chargée de cette importante question. Elle insiste sur le fait que le chemin reliant les deux communes est resté dans l’état où il se trouvait il y a deux siècles, à une époque où « Roubaix suffisait lui-même à tous ses besoins ». Elle ajoute : « ce chemin tortueux n’est plus à la hauteur de notre époque ». On projette donc de déclasser ce chemin étroit, passant par les fermes Lebrun et Fremaux, qui a ensuite donné naissance aux rues des Trois Ponts, de Tournai, de Cohem et de Carihem. On pense le remplacer par un chemin direct. Cette proposition est envoyée au conseil général, qui l’accepte. Le vieux chemin est déclassé, et le conseil général vote des crédits pour le nouveau. Mais on s’aperçoit qu’une confusion s’est produite, et que le nouveau chemin classé est celui proposé par la commune de Leers sur son propre territoire, et non celui envisagé par la municipalité roubaisienne sur le sien ! Le conseil municipal réitère donc sa demande de classement pour le nouveau chemin comme branche principale, renonce au déclassement du chemin actuel, et décide, lors des travaux d’établissement de la nouvelle branche, de paver également l’ancienne voie sur trois mètres de largeur et de la classer en deuxième catégorie. Le nouveau chemin partira de l’extrémité du nouveau boulevard Beaurepaire, et traversera en ligne droite les terres de la ferme de Bury-Courcelles et rejoindra Leers au niveau du bas voisinage.

Le tracé prévu pour le nouveau chemin

 Mais d’autres difficultés surgissent : la municipalité de Leers veut modifier le tracé initial sur son territoire, sur lequel se trouvent plusieurs constructions. La ville de Roubaix s’en tient au tracé prévu, pour lequel les riverains ont accepté de céder gratuitement la plus grosse partie du terrain nécessaire. La mésentente s’installe et les travaux ne sont toujours pas réalisés en 1876. A ce moment, Alfred Motte, propriétaire-riverain du boulevard Beaurepaire, offre son concours pour débloquer la situation, venant ainsi en aide à la caisse des chemins vicinaux. Il propose de participer au financement du pavage de la dernière partie du boulevard Beaurepaire, attendu depuis 1869, et de participer par moitié aux frais d’expropriation nécessaires pour le percement de la voie nouvelle. Par ailleurs, M. Simoens propose de démolir à ses frais un bâtiment situé à Leers sur le tracé de la future route. Le projet avance : on prévoit de construire en 1877 un aqueduc sur le ruisseau du pont Caudron en partageant les frais d’établissement entre les deux municipalités. On lance en 1879 une enquête d’utilité publique en vue du classement, qui aboutit l’année suivante.

Pourtant les expropriations traînent en longueur, si bien que M. Degraeve, adjudicataire des travaux de pavage le 24 mars 1880, dont le chantier est arrêté, demande une indemnité pour compenser les retards pris. Finalement, les travaux s’exécutent malgré toutes ces difficultés, et le nouveau chemin voit le jour.

La situation en 1886
 Les documents proviennent des archives municipales

 

On aligne rue de Cohem

A l’origine, il s’agit d’un chemin vicinal conduisant du hameau des trois ponts à Leers en passant par le hameau du petit vinage, d’une largeur de trois mètres en 1838, et qui fait de nombreux coudes pour éviter les propriétés. Il est bordé de deux fossés. Sur cet ancien chemin seront tracées plus tard les rues de Tournai, d’Ypres, de Cohem et de Carihem.

 Le chemin des trois ponts à Leers en 1845

 A la fin du 19eme siècle, la création de la gare de Roubaix-Wattrelos, dite gare du Pile restructure le quartier. On trace la rue Brame qui longe les installations ferroviaires et vient se raccorder à la rue de Cohem. Celle-ci perd son nom pour devenir la rue d’Ypres entre l’extrémité de la rue de Tournai et cette nouvelle intersection. La rue, dont l’axe est pavé, est bordée de fossés, passe au milieu des pâtures longe la ferme Watteau et quelques maisons éparses.

La rue de Cohem à la fin du 19 eme siècle.

 Au débouché de la rue Brame, rectiligne et relativement large, notre rue reste étroite et tortueuse. Très vite, la municipalité cherche à la redresser et à l’élargir pour favoriser la circulation, alors que les riverains souhaitent améliorer le drainage de ces terrains situés à l’endroit le plus bas de Roubaix et facilement inondés.

C’est ainsi que, dès 1891 un riverain, M. Briet demande l’autorisation de construire un aqueduc en front à rue sur l’emplacement du fossé, face à la ferme Watteau, pour déverser les eaux pluviales dans le riez des trois ponts, et qu’en 1905 les riverains demandent la construction d’un aqueduc. En 1910 on prévoit la construction du boulevard industriel dont l’égout ne pourra pas traverser la ligne de chemin de fer. La rue de Cohem devra donc disposer d’un aqueduc pour récupérer ces eaux et les déverser dans celui de la rue Brame. On lance une adjudication remportée par l’entrepreneur Henri Duhem qui effectue les travaux dont la réception a lieu en 1911.

En 1908, le directeur de la voirie insiste sur le fait que « les alignements de la rue Brame se raccordent à ceux de la rue de Cohem d’une manière défectueuse… ». On fait donc des rectifications à de nombreuses reprises dans le but d’aligner la rue sur l’avenue Brame. Tous les riverains sont successivement amenés à céder du terrain pour l’incorporer à la voirie : M. Briet en 1909, La brasserie « la communauté » en 1912, alors qu’on réclame l’éclairage pour la rue de Cohem, qualifiée de « véritable casse-cou » en conseil municipal. M. Berly participe à l’alignement en 1925, M. Watteau et la société Bossu-Cuvelier en 1941, et divers riverains dans les années 50. A force de rogner à droite et à gauche, la rue se redresse et s’élargit progressivement.

Les divers plans d’alignement

 Parallèlement, le caractère campagnard de l’endroit disparaît progressivement durant ces années. Attirées par la proximité de la gare et du canal, les entreprises s’installent le long de la rue qui prend ainsi un caractère plus industriel. On remarque très tôt une brasserie, puis, au début des années 20, s’installe la société Bossu-Cuvelier et Camille Dubrulle qui implante là un entrepôt de métaux, la menuiserie industrielle Baet frères en 1929, la teinturerie Delescluse en 1928.

 Mai 1940 voit la destruction d’un baraquement des établissements Bossu-Cuvelier à la suite d’un bombardement, tandis que la teinturerie Delescluse s’agrandit à plusieurs reprises avant et après guerre. La rue prend l’aspect proche de celui qu’on lui connaît maintenant avec la suppression des ses pavés et leur remplacement par un revêtement de tarmacadam en 1961.

La rue en 1953

 La construction du pont du Carihem, puis la suppression des voies de service de la gare vont enfin influer sur l’environnement de notre rue. On trace la rue Léo Lagrange qui forme un nouveau carrefour avec elle, qui perd son nom au profit de l’avenue Brame jusqu’à ce point. Son débouché se fait maintenant sur un rond-point, on installe des terre-pleins centraux, la société Camaïeu s’installe partiellement sur l’emprise de Bossu-cuvelier et sur les anciens terrains SNCF…

Ainsi pourra-t-on dire de la rue de Cohem que, si, au cours de sa carrière, elle a plus que quintuplé sa largeur, elle aura , en contrepartie, perdu dans le même temps les deux tiers de sa longueur !

 Les documents proviennent des archives municipales.

Réhabilitation

La réhabilitation a commencé par le Carihem en septembre 1980. D’abord il faut remédier aux problèmes de chauffage par des travaux d’isolation thermique. Il faut ensuite améliorer le confort de ces logements : refaire les entrées, installer des baignoires, revoir les revêtements de sol, améliorer l’isolation acoustique des appartements, et remettre aux normes de sécurité les installations électriques. Des travaux de ce genre attendent les vieilles HBM, à plus forte raison qu’elles datent des années 1930, qu’elles sont dans un réel état de vétusté. Par comparaison avec le Carihem, les travaux sont d’une autre importance, car ils coûteront deux fois plus cher.

 Les HBM des années trente Collection Particulière

En avril 1981, une réunion des habitants du Nouveau Roubaix se déroule au centre social de la rue Carpeaux, et on fait le point sur l’étude menée par le CREPAH organisme chargé de l’étude de la réhabilitation. Le directeur des HLM, M. Xavier Grousset est présent, ainsi qu’une cinquantaine d’habitants et le conseiller municipal M. Tytgat. Cette réunion est l’occasion de l’expression des associations : CSCV, centre social, comité de quartier, groupement de défense des locataires. Un journal vidéo est présenté lors de cette réunion, qui a été réalisé par les animateurs du centre social et un opérateur de l’IREP. Des propositions concrètes sont faites : appartements témoins après travaux, création d’une commission avec habitants du quartier pour servir d’interlocuteur avec l’office HLM, création d’une permanence de l’office.

 HBM et HLM concernées par la réhabilitation Collection Médiathèque de Roubaix

En Mars 1983 on apprend qu’il y aura deux tranches de travaux. La première concernera 584 logements collectifs et 191 individuels, les HBM, la seconde les immeubles construits entre 1950 et 1955, les HLM.  Les premiers travaux devraient débuter fin 1983. L’opération doit s’étaler sur cinq ans. La presse signale qu’un grand nombre de logements sont vides en raison de leur dégradation.

La réhabilitation est plus importante qu’au Carihem. Au Nouveau Roubaix, il faut refaire l’isolation thermique, les installations sanitaires, la réfection des cours, la confection de loggias, l’évacuation des ordures, le chauffage, l’installation électrique, les toitures, les terrasses, les menuiseries, l’équipement intérieur, et prévoir l’aménagement de locaux collectifs résidentiels.  L’office HLM travaille à rassurer les habitants qui s’inquiètent de l’augmentation prévisible des loyers, en collaborant avec le comité de quartier. La permanence demandée plus tôt est créée : une chargée de mission,  Mme Pavy est basée au 54 rue Léonard de Vinci, et elle reçoit les familles et leurs doléances. L’information des habitants du quartier se poursuit avec des tracts, affiches, cassettes vidéo et réunions publiques. Le centre social Carpeaux a mis un animateur à disposition du comité de quartier, Didier Lebecque. Son rôle est de favoriser l’expression et la réflexion des habitants sur le projet de réhabilitation.

 Croquis paru dans Nord Éclair

En Octobre 1983, l’opération est détaillée par voie de presse : on procédera immeuble par immeuble, on gardera la taille des appartements. Les locataires habiteront ailleurs dans le quartier le temps des travaux. On commencera par l’immeuble n°7, à l’angle angle boulevard de Fourmies et Horace Vernet. Les travaux ne seront pas terminés en 1987.

Concessions automobiles

Sur les photos aériennes, apparaît en 1971 à la limite de l’usine Motte-Bossut velours un bâtiment construit sur une zone jusque là consacrée à des jardins ouvriers. Ce bâtiment, construit perpendiculairement à l’avenue Motte, abrite une concession Renault. Le terrain situé à l’angle de l’avenue et de la rue Jean-Jacques Rousseau doit servir d’aire de stockage pour les véhicules, mais n’est pas encore aménagé.

Photo IGN 1971

 Le garage s’installe et, dès l’année suivante Renault Roubaix insère dans Nord Matin une publicité détaillant ses implantations sur la ville. Y figure la concession située 230 avenue Motte sous la dénomination du garage du Nouveau Roubaix.

Documents Nord Matin 1972

 Daniel Meyfroodt préside alors aux destinées de la concession. Les activités du garage s’étendent, puisqu’en 1975 la mairie est saisie d’une demande de permis de construire pour un bâtiment supplémentaire au nom de la S.A.R.L « Garage et carrosserie du Nouveau Roubaix ». Le permis est accordé, mais une photo aérienne de 1976 montre que le bâtiment est n’est pas encore érigé au mois d’avril :

Le garage Renault en activité. Photo IGN 1976

Cette situation perdure quelques années, puis M. Meyfroodt devient concessionnaire Volkswagen en 1978. Il cède finalement son affaire en 83 à M. Leclercq ; celui-ci continue à commercialiser la gamme Volkswagen-Audi.

Document La Voix du Nord 1983

 D’après un employé du garage, celui-ci, tout en conservant son enseigne, change une nouvelle fois de mains, et c’est maintenant M. Mandron qui le reprend sous la raison sociale MBBM.

Le garage Volkswagen avenue Motte. Document La Voix du Nord

 M. Mandron quitte ensuite Roubaix, pour reprendre la concession Volkswagen-Audi de Villeneuve d’ascq. Il est remplacé avenue Motte par M. Rogier revend le garage à l’Usine qui cherche à s’étendre et qui s’installe avenue Roger Salengro sous la dénomination du garage Valauto Volkswagen-Audi.

Valauto avenue Roger Salengro – Document collection personnelle

 Il est curieux de constater que le terrain, qui faisait partie à l’origine de l’usine Motte-Bossut, revient finalement en possession de l’usine après un intermède automobile qui aura duré une trentaine d’années !

 

La création du parc des sports

Le 2 juillet 1909 un rapport au conseil municipal lu par M. Roussel signale le fait qu’un terrain de 27 hectares situé au pont rouge doit être mis en vente à approximativement 1 franc le mètre carré. L’occasion d’acquérir ce terrain ne devrait pas être négligée par la municipalité, qui pourrait y construire un nouveau cimetière et y déplacer l’abattoir. La municipalité ne pouvant pas se permettre d’effectuer un emprunt, il préconise l’achat du terrain par les hospices qui pourraient le revendre à la commune le jour où celle-ci en aurait besoin. Les hospices se portent donc acquéreurs de ces terres dépendant des fermes de l’Espierre et de Maufait.

La même année, lors d’un autre conseil municipal, le rapporteur insiste sur la nécessité de la création d’un parc des sports, qui pourrait se situer le long de la rue de Lannoy sur des terrains dépendant de la ferme de l’Espierre et appartenant aux Hospices. On évalue la dépense à 200 000 francs dont 80 pour l’achat du terrain. Les finances publiques ne permettant pas cette dépense, le rapporteur envisage la location du terrain aux hospices. On prévoit de créer des terrains de football, une piste de course à pied des installations d’athlétisme, des bureaux, salle de réunion, conciergerie, des vestiaires et salle de douche, des tribunes de 100 mètres de long, ainsi qu’une « porte monumentale d’un aspect décoratif aussi satisfaisant que possible… » Le projet est retardé par la guerre.

Document médiathèque de Roubaix

Un plan de 1923 recense les propriétaires des terrains. La plus grosse part appartient aux hospices qui possède également les bâtiments de la ferme de l’Espierre. Ces terrains s’étendent également de l’autre côté de la voie ferrée. Quelques autres propriétaires se partagent des terrains de taille plus modeste le long de l’avenue Salengro.

 En 1924, on procède à l’achat de ces parcelles à M. Deroubaix-Despelchin, Mme Veuve Derache-Bonte, la société des terres de Maufait, et M. Henri Catteau.

Les travaux démarrent en mars 1929. Le journal de Roubaix, dans une édition du mois d’août 1930 évoque une ouverture prochaine des installations. Le parc municipal des sports couvre huit hectares. L’architecte en est Jacques Greber, à qui on doit également les plans de l’école de plein-air.

Photo Journal de Roubaix

 A droite de l’entrée, une salle de gymnastique avec, en galerie, une piste permettant l’entraînement à la course à pied par mauvais temps. A gauche, un café-restaurant, l’habitation du concierge et les bureaux de l’administration. Au fond, deux terrains de tennis grillagés et un terrain d’honneur de deux hectares. Les tribunes abritent des vestiaires et des douches. On draine pour assécher les terrains argileux. Les eaux sont réunies dans un unique collecteur.

Document médiathèque de Roubaix

 Ces installations ne tarderont pas à être mises à la disposition des sportifs roubaisiens.

 

Le quartier du Fresnoy-Mackellerie

 Avant que ces deux noms ne fassent l’objet d’un regroupement administratif contemporain, le Fresnoy et la Mackellerie étaient des lieux dits particuliers. Le terme « Fresnoy » désignait un lieu où poussaient les frênes, arbres très courants dans nos régions et appréciés pour les travaux de charronnage. Roubaix avait donc ses terres du Fresnoy. Selon des sources érudites, la Macquellerie était un fief croisien du XIIème siècle. Le secteur est alors traversé par des voies très anciennes. Le chemin de la Mackellerie, souvenir du fief médiéval, menait de Croix à Mouscron par Tourcoing, et fut  longtemps le chemin d’intérêt commun n°112. A la fin du dix neuvième siècle, c’est encore un chemin étroit et tortueux pavé sur une largeur de trois mètres et bordé de deux fossés. C’est l’actuelle rue de la Mackellerie. Dans son prolongement, on trouvait l’ancien sentier du bas Fresnoy qui deviendra la rue Cuvier, et au-delà le boulevard d’Armentières. Mais une voie importante formait un carrefour avec ces deux chemins. Il s’agissait d’un chemin très ancien qui reliait jadis la route royale de Lille à Menin à la frontière belge de Wattrelos/Herseaux. Ce chemin comprenait dans son tracé roubaisien la rue de Mouveaux (orthographe de l’époque), la rue du Grand Chemin (d’où le nom), la rue St Georges (rue du Général Sarrail) et la Grand Rue. Pour le quartier qui nous occupe, il s’agit de l’actuelle rue de Mouvaux. Enfin, il y avait le sentier du Fresnoy qui à l’origine partait de l’extrémité de la rue Nain et se prolongeait jusqu’à Tourcoing. Dans la première partie du dix neuvième siècle, c’est une contrée champêtre, avec des moulins sur les hauteurs du Fresnoy et des fermes le long du sentier du même nom.

Ce pont peut être considéré comme une porte d’accès au quartier Collection Médiathèque de Roubaix

L’arrivée du chemin de fer en 1842 va contribuer à isoler ce bout de campagne, qui subira assez vite les assauts de l’industrie et de l’urbanisation. La rue du Fresnoy se voit amputée d’une partie de son parcours, et la passerelle qu’obtiendront tardivement (en 1908) les riverains ne compensera jamais le passage supprimé.

On voit ici l’accès à la rue du Fresnoy par l’escalier de droite qui aboutit rue de l’Ouest Collection Médiathèque de Roubaix

De fait le passage à niveau est bientôt remplacé par un pont dès 1856 à cause du remblai du chemin de fer. L’activité du négoce des charbons se développe notamment dans la rue de l’Ouest située derrière la gare. De grandes entreprises se sont implantées dans le périmètre du quartier, pour en citer quelques exemples : la teinturerie textile Dubar et fils au n°86 rue du Fresnoy, l’entreprise Louis Glorieux et fils, important tissage installé au chemin de la Mackellerie qui faisait battre 2765 métiers mécaniques en 1885. Eugène et Louis Cordonnier ont fait édifier leur usine au n°15 rue du Luxembourg.

La rue du Luxembourg Photo PhW

C’est à partir de cette époque que la construction se développe dans le quartier du Fresnoy-Mackellerie. L’ensemble des rues italiennes se construit en deux temps. Leur classement dans le domaine vicinal municipal s’effectue entre 1867 et 1885, et pour la plupart elles seront bâties dans les premières années du vingtième siècle. L’importance de la population amène la création de deux églises : la première, Saint Antoine, est édifiée en 1897, face à la rue de Remiremont. Elle est ouverte le 12 août 1900. La seconde, Saint Vincent de Paul est construite un peu plus tard rue du Danemark à l’emplacement de l’ancien tissage Glorieux.

L’église Saint Antoine Collection Particulière

Signe de l’évolution industrielle et commerciale du quartier, la construction d’une gare annexe en 1908, la gare de débord de l’Allumette, qui a remplacé les champs du bout de la rue du Luxembourg. La diversité des entreprises est également remarquable : fonderies, brasseries, négociants, transporteurs, sans parler de la vivacité du petit commerce dans les petites et grandes rues du quartier.

Tout ceci a contribué à créer un quartier de forte densité urbaine, dont le patrimoine immobilier a vieilli, en même temps que l’activité industrielle disparaissait progressivement. Comment le quartier du Fresnoy-Mackellerie a-t-il vécu l’évolution de son patrimoine humain et immobilier ? Voilà le sujet des futurs travaux de l’atelier mémoire, dont vous trouverez les chroniques régulières dans ce blog…

Le ventre de Roubaix

 L’implantation d’un marché couvert est envisagée dès 1852 à Roubaix. L’abattoir[1] eut la priorité, qui sera construit en 1860. Le Minck, sorte de halle au poisson, où l’on vendait à la criée, est édifié en 1863, sur la place du Trichon.

C’est l’époque de la construction des grandes halles métalliques en France. A Paris, les Halles Centrales sont dessinées par Baltard et construites par Pierre Joly à partir de 1854.  Ses successeurs, César Jolly, Delafoy et Théophile Joly terminent les halles Baltard en 1866[2]. Ils construiront ensuite les Halles centrales de Lille, rue Solferino en 1878, ainsi que le Palais du Trocadéro. Entre-temps, la ville de Tourcoing a fait construire les siennes en 1877.

Le marché de la Grand-Place autrefois Collection Médiathèque de Roubaix

Les deux grands marchés de Roubaix se situent à l’époque sur la Grand Place et sur la Place de la Liberté, également appelée Place du marché aux charbons, du nom de son ancienne fonction, quand le canal arrivait jusque là. Une enquête du 29 mars 1879 menée par le préposé en chef, directeur de l’octroi roubaisien, rapporte que le marché de la Grand Place accueille une cinquantaine de marchands de légumes et de fleurs, une douzaine de marchands de fruits, une dizaine de volaillers, plus d’une trentaine pour le beurre, les œufs et le fromage. Quant au marché de la Place de la Liberté qui se tient le mardi, il s’y trouve ordinairement vingt trois bouchers, six charcutiers, trois tripiers, deux bouchers chevalins.

Pour l’emplacement des futures halles centrales, le choix se porte sur un terrain bordé par les rues Pierre Motte, Saint Martin et de la Sagesse. La proximité de la Grand Place, à moins de dix mètres, est un argument déterminant pour le choix définitif de l’emplacement. Il faut néanmoins prévoir quelques travaux : une quatrième rue devra compléter le rectangle formé par les rues Pierre Motte, Saint Martin qui deviendra la rue de la Halle, la rue de la Sagesse, ce sera la rue Jeanne d’Arc. Le coût total des travaux, démolitions, nivellement et construction, s’élève à 785.000 francs.

Les Halles centrales avant 1928 Collection Médiathèque de Roubaix

 Le 15 octobre 1879, le conseil municipal décide officiellement la création d’un marché couvert composé de deux pavillons carrés séparés par une rue couverte. Il est fait appel aux constructeurs qui doivent déposer leurs projets dans les deux mois. Le 7 février 1880, les différents projets sont tenus à la disposition des conseillers pour consultation pendant huit jours. Parmi les propositions, se trouve celle de la maison Jolly, Delafoy et Théophile Joly d’Argenteuil, qui respecte les contraintes de prix et envisage même d’effectuer les travaux de maçonnerie qui n’étaient pas inclus dans le projet de superstructure.       

On en sait plus sur la Halle : elle fera près de quatre-vingt mètres de long sur trente de large, sur une surface de près de 2.500 m². Sa façade longitudinale comprend treize travées de six mètres, et la travée du milieu permet un passage pour voitures qui s’élargit à l’intérieur, formant une rue couverte. Les espaces entre les travées sont de deux mètres, afin de faciliter la circulation de la clientèle. La façade transversale comporte cinq travées de six mètres.

Les boutiques se présentent sous la forme de 36 groupes à quatre emplacements, dont la surface est de 4 m² et qui occupent la surface principale de la halle. Il y a également une trentaine de groupes à deux emplacements situés le long des murs de la halle. L’aménagement intérieur comprend des bureaux et des cabinets d’aisance. Le marché couvert est ouvert au public le 22 janvier 1882, alors que tous les étaux ne sont pas encore occupés, mais la halle centrale est cependant noire de monde. La réception des travaux de voirie, dernière étape du grand chantier de la halle centrale intervient en août 1882. Dès lors, on peut accéder par la porte monumentale sous l’horloge à un premier ensemble de soixante douze petites boutiques occupées par des marchands de fruits et légumes. Les boutiques jumelles et latérales sont tenues par des bouchers. Au milieu de la halle centrale, on traverse l’allée couverte, après avoir dépassé la tribune de la criée, on atteint le domaine des bouchers, de la triperie et des volaillers, qui occupent la droite de l’emplacement, les crémiers et les épiciers se tenant sur la gauche. Telle était la disposition des marchands en 1882.

Images de la démolition des Halles centrales en août 1956 Photo Nord Éclair

 La halle centrale sera démolie en 1956, son emplacement restera quelque temps un parking puis on y construira en 1967 la cité de transit du lido, destinée à accueillir les commerçants de la rue de Lannoy. Aujourd’hui, l’endroit n’est plus un lieu d’activités commerciales, puisqu’il est occupé par la poste et la médiathèque de Roubaix.

 


[1] Aujourd’hui disparu, il se trouvait à l’emplacement du collège en face de la place Jean Baptiste Clément, ex place de l’abattoir.
[2] D’après l’article du site de la ville d’Argenteuil.

Le Garage des sports

Le garage vu de l’avenue Motte Photo Delbecq – Archives municipales

La multiplication des automobiles a eu très tôt pour corollaire celle des garages et stations services. C’est ainsi qu’au carrefour de l’avenue Motte et de la rue de Lannoy, deux importantes voies de communication, vient s’implanter un garage automobile. Dès 1934, Julien Lejeune, habitant 103 rue Ma Campagne, informe les services municipaux de son intention de faire construire Avenue Alfred Motte à Roubaix un immeuble à usage de garage d’Automobiles. Le bâtiment prévu se développe sur 25 mètres le long de l’avenue.

Le plan de façade du garage Document Archives municipales

 Julien Lejeune diffère sans doute son projet, puisque qu’on ne trouve aucune mention de ce garage automobile, dans le Ravet-Anceau de 1938. Celui-ci voit finalement le jour, car on le distingue sur une photo aérienne prise par l’Institut Géographique national en 1950. Le Ravet-Anceau fait par ailleurs mention en 1953 d’un Garage des sports, au nom de J. Lejeune, situé au 326. Le bâtiment du garage est rectangulaire, le faîte du toit est parallèle à l’avenue Motte. Il est prolongé jusqu’au coin de la rue de Lannoy par un bâtiment coiffé d’une toiture perpendiculaire à la précédente. Ce bâtiment présente un pan coupé dégageant l’angle des deux rues.

En 1962 des travaux modifient l’aspect du garage : une extension de près de 10 mètres est ajoutée, qui forme un angle droit au bout du bâtiment initial. Elle est construite sur un terrain libre, à côté de la propriété. D’autre part, le bâtiment faisant l’angle des deux rues est remodelé : il possède désormais un toit constitué de deux parties en angle droit laissant la place à une terrasse.

Entre 1965 et 1968, ce garage devient une station-service Antar et prend le nom de Relais des sports. Le gérant est alors R. Delporte. Un plan daté de 1966 nous en montre la disposition : la terrasse surplombe le bureau de la station et les pompes de distribution de carburant. Devant ces pompes, une piste permet aux voitures de venir se ravitailler. Les cuves contenant le carburant sont enterrées sous l’ancien garage, et la nouvelle extension abrite le pont élévateur et l’équipement de graissage.

Ce relais des sports perdure jusqu’après 1983, alors qu’en 1987 il est remplacé par l’entreprise Roubelec, protection contre le vol. A ce moment, un étage coiffé d’un toit à quatre pans vient s’ajouter au dessus d’une partie du garage initial.

Enfin s’installent dans le bâtiment les pompes funèbres Douillez, sans modifier son architecture extérieure.

 

 

 

La rectification du carrefour

Pour faire face à l’afflux de trafic au carrefour, on se préoccupe dès 1886 de favoriser la circulation des tramways. Devant le conseil municipal, M. Roche défend le projet de dégager l’alignement de la rue Neuve (de nos jours, rue du Maréchal Foch), en démolissant les immeubles entre la rue de Lille et le boulevard de Paris,  pour faciliter le passage des tramways de Lille. En effet, la rue de Lille obliquait alors vers la gauche pour rejoindre la rue Neuve en suivant l’alignement de la rue des Loups. Pour aller à droite en direction du boulevard de Paris, il fallait contourner un groupe de maisons placées dans le prolongement de la rue du Moulin, dont l’axe ne correspondait pas à celui de la rue Neuve.

Cet îlot appartient alors aux hospices de Roubaix, et les immeubles sont loués à un certain nombre de commerçants. On trouve au coin de la rue de Lille (n°1) et de la rue du Moulin (n° 2 et 4) un vieil estaminet à l’enseigne de l’ancienne barque d’or, au nom de M.Desbarbieux. Au n°6 de la rue du moulin, un sellier, M. Dupureur-Barot, au n°8 un négociant en vins, M.Coulon-Cuvelier, et au n°10, un autre estaminet au nom de M.Depauw. Rue de Lille, avant la rue des Loups, il y a une pâtisserie au n°3, au nom de R.Vanhaelst. On voit sur le plan qui suit les cinq commerces concernés et en rouge, le tracé du nouvel alignement.

Le projet en 1911 – document archives municipales

Le projet est pourtant reporté pour des raisons financières, le bail de ces commerçants ne se terminant qu’en 1924, ce qui représente des indemnités conséquentes à verser. En 1910, on reprend l’idée, et les immeubles situés entre la rue de Lille et le boulevard de Paris et appartenant aux hospices de Roubaix sont frappés d’alignement pour dégager les entrées de la rue du Moulin et de la rue de Lille, qui serait ainsi redressée. Les immeubles concernés sont un cabaret au coin du boulevard de Paris loué à M Desurmont, brasseur, et tenu par M. Dubus, un tapissier au n°6, Mme Veuve Rohart, un bourrelier au n°4, M. Dupureur, et l’estaminet de la barque d’or au n°2, au nom cette fois d’Henri Duvillers.. Au n°3 de la rue de Lille se trouve toujours la pâtisserie Vanhelst, et un terrain est loué à la compagnie des tramways de Lille à l’angle du boulevard de Paris.

Par ailleurs, il est également prévu d’exproprier trois immeubles situés au bord du boulevard de Paris, où exercent le boulanger Moreau, le photographe Shettle, et le marchand de vins Grimonprez. Il s’agit en fait de démolir tous les immeubles situés entre la rue de Lille et le boulevard de Paris jusqu’au débouché de la rue des Loups, pour créer une vaste place publique… La commission concernée juge que pour des raisons financières, il vaut mieux s’en tenir à la première partie du projet.

L’estaminet Dubus au numéro 10 – document coll. particulière

La ville reprend les baux et fait évacuer les occupants pour pouvoir démolir, mais Dupureur regimbe : il n’envisage pas d’abandonner aussi précipitamment une maison de commerce aussi bien placée dans l’intersection des plus belles et des plus vitales artères de la ville… La guerre survient, qui repousse les travaux de démolition. Ceux-ci sont finalement réalisés, et l’Écho du Nord nous montre en 1930 une palissade couverte d’affiches et de panneaux publicitaires cachant un terrain vague, et qualifié de véritable lèpre dans le quartier. On voit que les immeubles à l’entrée du boulevard de Paris sont toujours debout.

Le site en 1930 – photo Echo du Nord

En 1932 voit le jour un projet de construction d’un immeuble moderne, et le journal l’Égalité précise que le syndicat d’initiative les amis de Roubaix intervient pour que l’immeuble soit conçu dans le style flamand, bien dans la note locale. On décide aussi de démolir les n° 2 à 10 du boulevard Paris, appartenant à la « foncière des Flandres », avant de construire l’immeuble de rapport. Ces bâtiments, dont on voit le premier sur la photo précédente et qu’on retrouve sur la suivante, abritent au n°2, à l’angle, le pâtissier Vanhelst,  exproprié en 1912 du n°3 rue de Lille, et qui a repris la boulangerie de M. Moreau, le photographe Shettle au n°4, un expert comptable au n°6, suivi des entrepôts du Nord, négociant en vins.

Les immeubles à démolir – document collection particulière

Les travaux vont bon train et l’immeuble prend forme l’année suivante. L’Égalité déclare : par son architecture il se rapproche de l’Hôtel des Postes, tout voisin, et, comme cette construction, il ne manque pas d’élégance.

L’immeuble en construction – photo l’Egalité 1933
Le même, terminé – document médiathèque de Roubaix

Mais l’histoire de ce carrefour ne s’arrête pas là, et nous ne manquerons pas de la détailler davantage…