Boulevard de Fourmies : l’union des commerçants

Le boulevard de Fourmies a toujours été très riche en commerces de proximité. Les commerçants y font des opérations de promotion, mais, jusque dans les années 60, ils agissent en ordre dispersé. Ils vont pourtant s’unir en octobre 1966. et former un comité pour préparer les fêtes de fin d’année. Ils s’associent à la municipalité pour installer des illuminations, et lancent, pour attirer la clientèle, une première quinzaine commerciale, assortie de distributions de louis d’or. Le président est M. Da Silva, M. Fassin est le vice-président, M. Dujardin le trésorier, et Mme Bacrot la secrétaire.

Photo Nord Matin
Photo Nord Matin

L’année suivante, Nord Eclair nous précise que l’association représente 27 commerçants, situés boulevard de Fourmies entre les places Spriet et du Travail, et regroupant tous les types de commerces. Le comité prévoit de reconduire la quinzaine commerciale à l’automne. Il envisage également d’organiser une braderie.

On apprend également que M. Buisine, président de l’union des commerçants du nouveau Roubaix, est élu membre de la chambre de commerce métropolitaine. Cette même union du nouveau Roubaix organise la même année une manifestation de sympathie à l’occasion du départ en retraite de M. et Mme Lierman-Delbaert, son vice-président, alors que M. Vandeputte en est le secrétaire. Il existe donc deux comités parallèles. Quels sont les liens entre les deux ? En tout cas, on n’entend plus parler dans la presse du comité du Nouveau Roubaix pendant un certain nombre d’années ; seul va se manifester celui du boulevard de Fourmies.

Les illuminations - document Nord Eclair
Les illuminations – document Nord Éclair

Celui-ci reconduit fin novembre 1968 les illuminations et la quinzaine commerciale, assortie de cadeaux attrayants :  il s’agit cette fois de vélos pliants distribués à l’issue de trois tombolas. De plus une caravane publicitaire assure durant quinze jours la sonorisation de cette artère. Le projet d’organiser une braderie prend corps : on la prévoit un lundi de l’année suivante.

Elle a bien lieu le lundi 9 juin 1969 : Nord Éclair la qualifie de « braderie monstre du Nouveau Roubaix ».

La braderie en 1985 – photo Lucien Delvarre
La braderie en 1985 – photo Lucien Delvarre

L’autre point fort de l’année reste la quinzaine commerciale de décembre, associée à une caravane publicitaire et une tombola.

Une idée nouvelle en 1971 : le comité organise en avril, avec le concours du Vélo Club de Roubaix, le premier grand prix cycliste du boulevard de Fourmies, réservé aux cadets, dont le départ est donné place du Travail, devant le café « au rendez-vous des auto-écoles ». Deux mois plus tard, la braderie en est à sa troisième édition ; elle coïncide avec la deuxième ducasse de la place du Travail. La composition du comité des commerçants est modifiée : alors que M.Fassin reste vice-président, le président est M. Martel, le trésorier M. Coetsier, et le secrétaire M. Vincent.

La liste des coureurs – document Nord Eclair
La liste des coureurs – document Nord Éclair

En 1972, il n’y a plus de comité des fêtes : c’est l’union des commerçants qui organise les festivités. Le grand prix cycliste réunit deux fois plus de concurrents que l’année précédente ; la braderie coïncide, cette année encore, avec la fête foraine de la place du Travail. Quant à la tombola de la quinzaine commerciale, elle fera 100 gagnants. Ces animations s’installent dans la durée, et deviennent partie intégrante de la vie du quartier.

L’année 1973 voit le comité patronner au mois de mai une grande exposition de voitures, de caravanes et de bateaux, de quoi préparer les vacances.

Document la Voix du Nord
Document la Voix du Nord

Cette exposition est associée à des ventes promotionnelles chez les commerçants membres de l’union. Les autres manifestations perdurent : le grand gagnant de la quinzaine commerciale se verra offrir un voyage aux Baléares pour deux personnes.

Les commerçants réunis en 1973 - Document la Voix du Nord
Les commerçants réunis en 1973 – Document la Voix du Nord

En 1985, naît l’union commerciale du Nouveau Roubaix, qui englobe apparemment celle du boulevard de Fourmies, qui disparaît donc au terme de près de 20 ans d’activité. La nouvelle association est composée de M. Segard, le président, M.Dubon, vice-président, et Mme Fassin, trésorière.

Le comité de la nouvelle association – document La Voix du Nord
Le comité de la nouvelle association – document La Voix du Nord

 

La bijouterie du quartier

Les participants de l’atelier mémoire du Centre ont fait l’étude des commerçants de la Grand Rue, parmi lesquels cette bijouterie située au n°137, dont l’histoire nous a été racontée par la fille de la maison. En 1928, le n° 137 formait une seule maison, occupée par les cycles Deletombe. Puis le bâtiment se divise en deux : en 1932, on y trouve le coiffeur Van Eeno et le marchand de journaux Liénart. Au moment de l’installation de l’horlogerie bijouterie en 1942, l’autre partie était occupée par l’Optique André, gérée par M. Chantepie auquel a succédé M. Raymond Dumortier, sous la même enseigne. Amand Battiau et sa femme ont donc ouvert le magasin en 1942. Mais Amand est décédé en 1945 et sa veuve s’est remariée avec M. Richard.

L'horloger bijoutier et l'opticien, tous deux au n°137 Photo Coll Particulière
L’horloger bijoutier et l’opticien, tous deux au n°137 Photo Coll Particulière

Autour de la bijouterie, il y avait une cour et une petite maison, aujourd’hui disparus. Ce terrain a été repris par l’institution Jean XXIII, pour faire une salle de sports juste derrière. La bijouterie se situait donc en face de chez Deruyck, le marchand de musique bien connu. Après il y avait le Galon d’eau, les graines…

Le grand père horloger Doc Coll Particulière
Le grand père horloger Doc Coll Particulière

Le père Battiau était artisan horloger, comme le grand-père, qui avait un atelier au n°170 rue de l’Ommelet. Il avait appris le métier avec des livres que sa fille possède encore. Horloger créateur, il fabriquait lui-même des pendules. Les deux artisans, père et fils faisaient des modèles uniques, et le grand-père a été récompensé d’une médaille de Besançon pour une de ses pendules.

Le père horloger et une pendule originale Coll Particulière
Le père horloger et une pendule originale Coll Particulière

« Nous avions une clientèle de classe moyenne, les gens avaient tous leur réveil matin, et au plus il faisait tic-tac, au plus ils l’aimaient. Les réveils silencieux, les gens n’en voulaient pas, parce qu’ils ne faisaient pas de bruit. On vendait des coucous, des régulateurs, des montres, des réveils. Ça allait des grands machins qui sonnaient tous les quarts d’heure, aux coucous qu’on faisait marcher quand les enfants venaient parce qu’ils aimaient bien l’entendre ». Le père Battiau avait créé une grande pendule qui servait d’horloge publique. Les gens qui partaient travailler le matin la regardaient, et quand elle s’arrêtait, ils venaient prévenir, car ils disaient qu’ils n’avaient pas eu l’heure. Anny se souvient des carillons, ça sonnait tous les quarts d’heure. Elle dit qu’elle ne supporte pas de ne pas les entendre les tic-tac. Elle n’aime pas le silence, car elle dormait à côté de l’atelier, où toutes les pendules sonnaient. A six ans, elle savait remonter les horloges.

L'horloge "publique" de Monsieur Battiau Coll Particulière
L’horloge « publique » de Monsieur Battiau Coll Particulière

Dans cette horlogerie bijouterie, on a vendu des marques, bien sûr, comme : jaz, vedette, lip, zenith, lov, et on avait des buvards publicitaires. Pour la bijouterie or, pas de marque, mais on faisait aussi les bijoux Fix et Murat, c’était du plaqué, dit un témoin. Il y avait des catalogues. En bijouterie, on faisait les colliers, les bagues… Pour les cadeaux, c’était différent de maintenant. Avant les gens se fiançaient, on faisait des bagues de fiançailles, puis ils se mariaient, il y avait des alliances. On avait les baptêmes, pour lesquels on vendait chaînes, médailles, bracelets, et cadeaux Christofle, timbales, ronds de serviette, coquetiers. A la Sainte Catherine, on offrait les couverts Christofle à la pièce, pour que les filles célibataires montent leur ménage. Ensuite on avait les  communions, c’était la première montre, moment très important, de marque Lov, spéciale communions, et les chaines, les croix, et les gourmettes. On avait une clientèle, car tout le monde travaillait. On allait chez son bijoutier, c’était la bijouterie du quartier.

La fameuse montre de communion doc Coll Particulière
La fameuse montre de communion doc Coll Particulière

Les réparations les plus fréquentes sur les montres, c’était l’axe du balancier était cassé, en général c’est parce que la montre était tombée. Mais les gens juraient leurs grands dieux que non, qu’elle n’était pas tombée, que c’était un défaut. Ou encore cette dame qui est venue un jour avec le balancier de son horloge, en disant qu’il ne bougeait plus !

Intérieur et devanture de l'horlogerie bijouterie Coll Particulière
Intérieur et devanture de l’horlogerie bijouterie Coll Particulière

Maintenant il n’y a plus beaucoup d’artisans. Chez les bijoutiers d’aujourd’hui, ce sont des chaînes, les montres à quartz sont jetables, on ne répare pas et pour les grandes marques, il faut les renvoyer à l’usine. D’ailleurs la bijouterie du n°137 n’a pas fait de grandes marques, parce qu’elles voulaient un seul magasin qui en gardait l’exclusivité.  On a fermé en 1992, le beau père était veuf, « son magasin, c’était son magasin », sinon on aurait arrêté avant. On est restés cinquante ans au même endroit, et il n’y a pas eu de repreneur, car les petits commerces périclitaient.  Le stock, ou ce qu’il en restait, a été vendu en salle des ventes, après trois mois de soldes avec autorisation préfectorale.

Merci à Anny pour ce magnifique témoignage

Une parfumerie libre service

Les établissements Marcel Glorieux  (Parfumerie De Glory) se trouvaient précédemment au 70bis rue Pierre de Roubaix, d’où ils venaient  d’être expropriés. Cela correspondait à la portion de la rue Pierre de Roubaix qui a disparu lors de la construction du bloc Anseele, entre la caserne de Pompiers (aujourd’hui la CAF) et le théâtre Pierre de Roubaix, du n°28 à 82. En 1961, l’entreprise avait pour voisins au n° 68 une dame Duthoit, marchande de vins, au n°70 il y avait deux vieilles demoiselles retraitées, et au n°72 un boucher, M. Cafier.

Le nouveau magasin De Glory photo NE
Le nouveau magasin De Glory photo NE

C’est en septembre 1963 que les établissements Marcel Glorieux créent un libre service de parfumerie pour leurs détaillants, au n°1 rue de l’Ouest. A l’époque, ils sont les distributeurs exclusifs des marques suivantes : « Souvaist, De Glory, Tresport, Softol, G. Morand, Atomisaure, Ilona, Ventalor, Robust, Don Jaime et Thérèse ». Cette création fait l’objet d’une inauguration, avec vin d’honneur. Vont y assister M. Verbrackel représentant M. Provo, maire de Roubaix et Monsieur Pierre Herman député, entre autres personnalités. Le magasin d’exposition a été réalisé avec l’aide d’artisans roubaisiens. C’était un grand magasin, avec de nombreux rayonnages, dans lesquels les détaillants venaient se servir avec des chariots. Une réception particulière fut prévue le 9 septembre pour eux.

Le tragique incendie Photo NE
Le tragique incendie Photo NE

La mémoire collective a retenu l’eau de Cologne et la laque de Glory. La marque De Glory était plus connue que le nom de l’entreprise Glorieux. Une participante se souvient que ses beaux parents tenaient une épicerie avec un petit rayon parfumerie et que le représentant de la maison Glorieux passait régulièrement. Il vendait des petits flacons selon les saisons, au mois de mai, c’était le muguet. Il y avait aussi les filets pour les cheveux, les petites pinces à cheveux qu’on appelait les invisibles, les savonnettes. Le représentant livrait un peu de tout aux petits commerces de quartier.

En mars 1964, c’est le drame. A peine un an après l’inauguration, un incendie ravage la parfumerie. Il y a des victimes : le directeur de la firme et son père. Le papa est malheureusement décédé, mais le directeur en réchappe. Il semble que la société ait repris ses activités, car le Ravet Anceau indique encore la présence de la parfumerie Glorieux en 1978. Les témoins du quartier confirment qu’elle fait partie du paysage du quartier, mais ne se souviennent pas jusque quand.

Les appartements d'aujourd'hui Photo Google maps
Les appartements d’aujourd’hui Photo Google maps

Maintenant, le bâtiment a été aménagé en appartements  individuels, qui forment le début de la rue de l’Ouest.

Remerciements aux participants pour leurs témoignages

 

 

La vérité sur la Basse Masure

Des articles parus il y a quelque temps laissaient entendre que le café de la Basse Masure existait encore, et qu’il s’était transformé en boucherie. Il n’en est rien. Nous allons en faire la preuve, après un bref rappel des faits.

Le café de la Basse Masure en 1924 Photo JdRx
Le café de la Basse Masure en 1924 Photo JdRx

Le café de la Basse Masure était situé le long du chemin vers Mouscron au siècle avant dernier. Ses murs étaient recouverts de plâtre, et elle était déjà habitée en 1817 par une famille de 17 enfants ! Une « cantine » fut bientôt ouverte, où l’on vendait de l’épicerie et des alcools divers. Puis l’épicerie buvette devint un vrai café, qui fut une halte obligée pour les gens qui allaient de la Fosse aux Chênes vers Mouscron. Le café eut sa célébrité, en la personne de « Cho de l’Basse » François Fauvarque, son tenancier, lequel alliait bonne humeur et parties de boules mémorables. Le café se trouvait souvent sur le parcours des sorties carnavalesques et des cortèges ludiques. C’était un autre temps, sans voitures et sans télé.

Le café à l'orée des années soixante Photo NE
Le café à l’orée des années soixante Photo NE

L’urbanisation rattrape bientôt le café, et la Basse Masure devient un quartier, un genre de cité très animée. La maison tenait bon, elle restait le siège de tournois de boules, et s’associait régulièrement aux fêtes annuelles du Cul de four et de la Basse Masure.  Le café de la Basse Masure a-t-il survécu ? A-t-il été transformé ? Un témoignage de l’ancienne bouchère de la rue des Récollets, dont le magasin est cité comme étant l’ancien café, vient démentir cette assertion. En effet, sa boucherie a toujours été recensée dans la rue des Récollets, au n° 36 en 1929, alors que l’estaminet a longtemps été au n°70 de la rue de la Basse Masure. Le café n’existe plus en 1973, alors que la boucherie existe toujours vaillamment au n°36 de la rue des Récollets. A-t-il été démoli comme le café de la planche trouée dans le quartier des longues haies ? La réponse est affirmative, la démolition a été effectuée à la fin de l’année 1961, alors qu’il n’était plus qu’une ruine. Alors pourquoi cette erreur ? Les photos que nous a aimablement confiées Mme Gauquie nous renseignent sur ce qui s’est passé.

La boucherie de la rue des Récollets en 1973 Coll. Privée
La boucherie de la rue des Récollets en 1973 Coll. Privée

Sur cette photo de 1973, on voit très nettement l’emplacement de l’ancien café, qu’occupe un parking de voitures garées en épi. La boucherie apparaît comme la dernière maison de la rue des Récollets, au n°36.

La boucherie Gauquie en 1979 Coll Privée
La boucherie Gauquie en 1979 Coll Privée

En 1979, M et Mme Gauquie, voulant profiter d’un éclairage supplémentaire pour leur magasin, firent procéder à des travaux. Ainsi la boucherie eut une ouverture sur la rue de la basse masure, ce qui a pu faire croire qu’elle en constituait l’angle.

Merci à Mme Gauquié de nous avoir expliqué l’évolution de ce bout de quartier, photos à l’appui.

Autres sources : le Journal de Roubaix , Nord Éclair, annuaires Ravet Anceau

 

Après le café, la Presse du Parc

Les pompiers de la belle époque en exercice devant le café du parc Photo JdeRx
Les pompiers de la belle époque en exercice devant le café du parc Photo JdeRx

Quelques nouvelles informations et découvertes nous amènent à évoquer de nouveau le café du Parc. Il se trouvait à l’angle du boulevard de Paris (aujourd’hui du Général de Gaulle) et du boulevard de Cambrai, à deux pas de l’entrée du Parc de Barbieux. Construit avant 1900, c’était un café de « bonne renommée », idéalement placé pour les promeneurs. Il dut faire d’excellentes affaires en 1911, car il était proche de l’entrée de l’exposition internationale et du terminus des tramways. Il disposait d’une terrasse vers le parc, et d’une salle de concert, dont la station service reprendra la surface. Cette petite scène accueillit nombre d’artistes : chanteurs, musiciens, acrobates, comiques. Maurice Chevalier en personne y aurait fait plusieurs apparitions ! Pour donner une importance de la clientèle, l’ancien propriétaire, M. Gaston Dutilleul, disait qu’il avait employé dans son café plus d’une vingtaine de garçons !

Démolition du café en 1964 Photo NE
Démolition du café en 1964 Photo NE

Le café du parc fut démoli début 1964, alors qu’il ne fonctionnait plus depuis quelques années. A sa place fut bientôt construit un ensemble comprenant un immeuble d’appartements et une station service.

Construction de l'immeuble et de la station service Photo NE
Construction de l’immeuble et de la station service Photo NE

Nous avons parlé de l’évolution de la station service aujourd’hui devenue une célèbre enseigne de boulangerie et de pâtisserie. Mais l’endroit est aussi bien connu des roubaisiens par sa maison de la presse, toujours bien achalandée. A l’occasion de son inauguration de la Presse du Parc, en août 1966, sa propriétaire de l’époque, Mme Cattoire, organisa un cocktail de bienvenue. On y trouve toujours la presse quotidienne, hebdomadaire et mensuelle, des articles de papeterie, mais c’est aussi une véritable librairie, où l’on est toujours très bien accueilli.

La Presse du Parc au moment de son inauguration Photo NE
La Presse du Parc au moment de son inauguration Photo NE

Mémoire de la braderie de l’Art

Roubaix se trouve au pays des braderies. Sur son territoire, elle en organisait traditionnellement plus d’une vingtaine chaque année. Une braderie d’un nouveau genre connaît sa première édition en décembre 1991 : la braderie de l’art. Le concept est à la fois simple et particulier : pendant 24 heures, des artistes vont créer des œuvres en partant d’objets de récupération. Le journal de l’époque situait le prix de ces objets qui étaient vendus au public entre 1 franc et 1000 francs !

Les logos des deux premières braderies Publiées par NE
Les logos des deux premières braderies Publiées par NE

Cette braderie existe toujours, et depuis quelques années, elle se déroule en décembre dans les locaux de la Condition Publique. Cet ancien établissement public, propriété de la Chambre de commerce de Roubaix, avait pour mission de contrôler et certifier la qualité de différentes matières textiles avant leur vente, essentiellement la laine, le coton et la soie. Sa reconversion en manufacture culturelle date de 1999, et la Condition Publique constitue un superbe écrin pour la braderie de l’art.

La braderie de l'art à la piscine Photo Guy Sadet NE
La braderie de l’art à la piscine Photo Guy Sadet NE

Mais d’autres lieux ont accueilli cette manifestation intra muros, organisée par l’association Art Point M. La piscine de la rue des Champs fut le premier décor de la braderie de l’art, pour ses quatre premières années. Fermée depuis novembre 1985, elle attendait sa reconversion en musée, laquelle sera effective le 21 octobre 2001. La piscine permit ainsi à la braderie de l’art de se mettre dans le bain et de faire ses premiers pas.

Roubaix 2000, vide Photo NE
Roubaix 2000, vide Photo NE

C’est Roubaix 2000, ou du moins son fantôme, qui recevra la braderie de l’art en 1995. La galerie commerciale en attente de démolition, offrit ses surfaces abandonnées pour  l’expression des artistes et la vente de leurs créations. Il y aura aussi l’usine Cavrois de la Potennerie en 1996 et 1997, puis le parking de Mac Arthur Glenn, patrie des courants d’air. Mais depuis un certain temps la Condition Publique abrite désormais la Braderie de l’Art, chaque année début décembre. Les fans nous pardonneront d’avoir sans doute oublié d’autres lieux d’accueil. Nous les remercions à l’avance de compléter notre propos.

Retour sur le garage du Nouveau Roubaix

Nous avons pu obtenir le témoignage de M. Meyfroodt sur l’histoire du garage de l’avenue Motte. Laissons-lui la parole…

« Après avoir effectué le début de ma carrière en qualité de chef de vente chez Simca , j’ai fait construire mon propre garage en 1971 sur les terrains, jardins ouvriers mis en vente par Motte-Bossut, qui jouxtaient l’usine et que j’ai achetés à Monsieur André Motte.

M. Meyfroodt chez Simca Lille – Photo collection personnelle
M. Meyfroodt chez Simca Lille – Photo collection personnelle

Après avoir obtenu le permis de construire, la construction a démarré et j’ai choisi de représenter la marque Renault en accord avec la succursale située à l’époque Boulevard Gambetta à Roubaix.

Document Nord Eclair – 1975 – Archives municipales
Document Nord Eclair – 1975 – Archives municipales

Après quelques années d’activité avec Renault, en 1978 je fus contacté par VAG France (Volkswagen Audi Group) qui était à la recherche d’un nouveau concessionnaire car celui de Villeneuve d’Ascq, la CDA, avait basculé chez Peugeot. En choisissant de changer de marque, j’ai accepté de reprendre l’ensemble du personnel de la CDA qui était spécialisé sur ces marques allemandes Volkswagen-Audi, ce, en plus de mon propre personnel.

Sur la photo de l’inauguration sur laquelle je suis à droite ; à droite se trouve Monsieur Ghyssels : Président du Directoire De Volkswagen France. Vous pouvez également y redécouvrir les voitures de 1978. Je passais également du statut de « Sarl Garage du Nouveau Roubaix » en SA GNR , c’est-à-dire Société Anonyme Garage Nouveau Roubaix.

Documents Nord Matin - Janvier 1978 et Nord Eclair - Février 1978 – Archives municipales
Documents Nord Matin – Janvier 1978 et Nord Eclair – Février 1978 – Archives municipales

Après avoir stocké pendant plusieurs années, mes véhicules d’occasion sur le parking ce, par tous les temps, j’ai pris la décision , en 1975, de faire construire une grande extension à mon garage afin que toutes ces voitures soient à l’abri des intempéries.

Documents Archives municipales - 1975
Documents Archives municipales – 1975

Il est vrai qu’avant la construction du 2ème bâtiment de la concession Volkswagen-Audi, les véhicules neufs et d’occasion étaient stockés sur notre parking, et nous avons rapidement constaté que les peintures de ces voitures étaient endommagées par les retombées de suies acides provenant de la grande cheminée de l’usine Motte-Bossut. Devant l’étendue des dommages, nous avons été dans l’obligation de suspendre les livraisons des camions de transports de voitures neuves en provenance de VAG-FRANCE à Villers Cotterêts. Les inspecteurs de VAG-FRANCE se sont déplacés pour constater les dégâts, car nous étions contraints de repeindre les voitures…. neuves, principalement les métallisées, plus fragiles. Devant le nombre de véhicules touchés, la direction de Motte-Bossut dut se rendre à l’évidence et fut contrainte de remplacer la grosse chaudière d’usine alimentée alors en fuel par une nouvelle installation au gaz. Cela créa un froid qui ne fut heureusement que passager. L’incident, onéreux pour les deux parties, fut clos.

Je fus concessionnaire pour cette marque jusque 1983, et vendis mon affaire à Christian Leclercq. »

Documents Archives municipales – 1975

Remercions M.Meyfroodt qui, après avoir consulté le précédent article sur le sujet, nous a contacté et a accepté de témoigner. Bel exemple d’interactivité que chacun peut suivre ; n’hésitez pas à apporter votre propre témoignage pour enrichir les sujets des blogs.

Les magasins populaires

La rue Pierre Motte est de longue date une importante rue commerçante, du fait de sa proximité de la Grand place de Roubaix, mais également pendant plus d’un siècle de la présence des Halles centrales de Roubaix. Une rue perpendiculaire à la rue Pierre Motte en perpétue le souvenir. L’enseigne Darty a quitté Roubaix depuis le printemps 2013. En attendant de savoir ce qui lui succédera, nous nous sommes penchés sur l’histoire du 15 rue Pierre Motte .

Rue Pierre Motte, le futur emplacement des magasins populaires CP Coll Méd de Rx
Rue Pierre Motte, sur la gauche, le futur emplacement des magasins populaires CP Coll Méd de Rx

En 1898, le n°15 de la rue Pierre Motte est un estaminet, tenu par M. Turbe. Dix ans plus tard, les magasins Carré, puis Nollet Carré occupent l’endroit. Ensuite, ce sera le magasin « Au soldeur » dont le propriétaire était M. Henri Moha, et qui possédait également  tous les numéros de la rue jusqu’aux Bains Roubaisiens, soit du n°15 au n°29. Ce qui donne une idée de la surface présente. Une telle surface ne pouvait que convenir à l’emplacement d’un nouveau type de commerce, le magasin populaire à prix unique.

En 1879 est lancé pour la première fois le concept de magasins populaires. C’est aux Etats-Unis que Franck Winfield Woolworth choisit de privilégier l’emplacement en centre-ville, une surface moyenne, de nombreuses collections, des prix réduits[1]. Mais c’est seulement à partir de 1931 que l’idée vient à séduire l’Europe. C’est après la crise des années 1930, que s’ouvre à Rouen le premier magasin à prix unique, Monoprix.  Au même moment, les Nouvelles Galeries lancent Uniprix et les Magasins du Printemps créent Prisunic, tous sur le même créneau de magasins citadins à bas prix[2].

L'ouverture d'Unifix Pub Journal de Roubaix 1934
L’ouverture d’Unifix Pub Journal de Roubaix 1934

En 1934, la société roubaisienne des grands bazars modernes demande l’autorisation d’aménager le n°13 de la rue Pierre Motte en logement, et de démolir un vieil immeuble au n°15 occupé par le magasin « au soldeur », et enfin d’édifier sur cet emplacement augmenté de la propriété de M. Nollet, un immeuble dont l’enseigne sera UNIFIX. Le samedi 15 septembre 1934, les magasins UNIFIX procèdent à l’ouverture de leurs magasins au 15 rue Pierre Motte à 10 heures du matin.

La réouverture d'Unifix Pub Journal de Roubaix 1934
La réouverture d’Unifix Pub Journal de Roubaix 1934

Le 23 novembre 1934, un incendie détruit une bonne partie des magasins UNIFIX de la rue Pierre Motte. Le feu provoqué par un court-circuit a fait un million et demi de dégâts. La société demande l’autorisation de reconstruire le magasin et les réserves. Dès le mois de décembre 1934, UNIFIX reprend ses activités.

Il semble que les magasins du n°15 de la rue Pierre Motte soient devenus pendant la guerre la propriété de la société centrale de magasins à prix uniques sise 102 rue de Provence à Paris, sous l’enseigne PRISUNIC. En effet, un courrier adressé au maire de Roubaix et daté du 28 mai 1942 certifie que la dépense à effectuer pour les transformations de l’immeuble du 15 rue Pierre Motte ne dépassera pas les 100.000 francs. Le 20 août 1943, la même société demande l’autorisation d’établir sur la façade du magasin l’enseigne PRISUNIC. A-t-elle été posée ? Nous faisons appel aux témoins de l’époque.

L'ouverture de Monoprix en 1950 Pub NE
L’ouverture de Monoprix en 1950 Pub NE

MONOPRIX ouvrira ses portes le samedi 1er avril 1950 à 10 heures. Pendant plus de vingt cinq ans, Monoprix proposera le libre service intégral afin de rendre les magasins plus fluides, des produits à des tarifs plus compétitifs, ses propres marques : Montjoly et Beaumont pour l’alimentation, Florine pour le textile, Kilt pour le bazar, Sipratic pour l’entretien. A Roubaix particulièrement, on lui doit la création d’un parking supplémentaire de trente places sur le toit du magasin. Sa fermeture est annoncée en juillet 1976, en raison de la baisse du chiffre d’affaires, due à l’ouverture récente d’un supermarché Auchan dans le centre commercial Roubaix 2000.

Monoprix en 1973 Pub NE
Monoprix en 1973 Pub NE
Sources : archives municipales de Roubaix
Presse : Le Journal de Roubaix et Nord Eclair

 


[1] Extrait de jeanchristophe.canalblog.com Monoprix, sur le Magasin Populaire

[2] Extrait de Wikipédia sur Monoprix

Une station éphémère

Le 57 de l’avenue Brame abritait entre les deux guerres, l’entreprise Vandecrux. Après sa fermeture, s’installe une station service, inaugurée en juin 1972. Celle-ci s’implante en front à rue, là où se trouvaient auparavant quelques bâtiments de peu d’importance, de part et d’autre d’une cour herbeuse, plantée d’un hêtre pourpre vieux de 70 ans.

Document La voix du Nord
Document La voix du Nord

Les quelques bâtiments situés le long de la rue sont rasés, l’ensemble est nivelé, mais on préserve le hêtre et on construit, adossés à l’ancien bâtiment industriel, des bâtiments modernes éclairés par des parois de verre : un abri pour la distribution du carburant, un local réservé à la vente en boutique, une aire de lavage à la brosse rotative, un autre pour le graissage. La station est ouverte par la société des pétroles Pursan, dont le directeur pour la région Nord est M. Dujardin. Les gérants de ce commerce sont M. et Mme Basly.

L'inauguration - Document La voix du Nord
L’inauguration – Document La voix du Nord

L’inauguration se fait en présence des délégués des directions régionale et nationale de Pursan et Total, mais également de personnalités plus locales : personnalités municipales, des mondes de l’automobile et de l’ industrie, ainsi que M. Desruelles, directeur de l’A.C.N.F

Le commerce attire les automobilistes du quartier, grâce à l’accueil du couple. Malheureusement, cette implantation coïncide avec l’ouverture d’Auchan Leers, qui offre des prix sans commune mesure avec ceux de notre station. Celle-ci fonde encore sa publicité sur la qualité de ses produits : super Total au chrome et huile GTS spéciale autoroute, et met en avant ses points de fidélité. Cette option n’est apparemment plus au goût du jour, et l’attrait du bon marché l’emporte. Une photo aérienne de 1981 nous la montre encore en activité, mais le Ravet-Anceau de 1983 n’en fait plus mention : elle a entre-temps disparu .

Document IGN 1981
Document IGN 1981

De nos jours, il ne reste plus trace de la station. L’ensemble des bâtiments, même le bâtiment industriel au deuxième plan, et surtout le hêtre pourpre, ont disparu. On trouve à la place des bâtiments très récents, construits au début des années 2000.

 

Document collection particulière.
Document collection particulière.

Une question se pose : qu’est donc devenu le hêtre pourpre, contemporain du tracé de l’avenue, et quand a t-il disparu ?

 

 

 

Roubaix 2000, démolition

Dès 1995, la ville négocie avec les propriétaires et locataires de la galerie le rachat de leurs surfaces commerciales. Les commerçants seront relocalisés, indemnisés. La ville a également voté le rachat des surfaces occupées par Intermarché. On discute déjà de la suite, en affirmant qu’il ne faudra pas se louper encore une fois !

Roubaix 2000, premier étage, 1995 Photo NE
Roubaix 2000, premier étage, 1995 Photo NE

Premier effacement : le parking de Roubaix 2000 change de nom en mai 1995, et devient le parking de l’Eurotéléport. Puis, en décembre 1995, c’est la braderie de l’art qui vient s’installer dans la galerie de Roubaix 2000. Mars 1996, l’étage est désert et commence à intéresser les vandales.

Le nouveau parking Photo NE
Le nouveau parking Photo NE

Octobre 1997, le sort de Roubaix 2000 est réglé. On va démolir ce qui fut la grande espérance des années soixante dix, le centre commercial des années modernes. Alors qu’on commence à démolir, un panneau publicitaire annonce : Roubaix 2000, 55 magasins à votre service. Ce sont les dernières traces. La première étape du chantier de démolition a été la pose d’une ceinture de grillage de 250 mètres de long sur 46 de large , pour ôter l’amiante notamment présente dans les faux plafonds du resto U. L’entreprise France Déflocage s’est chargé de ce nettoyage délicat. Puis l’entreprise ATD (entreprise spécialisée dans la démolition Normandie Petit Quevilly), à pied d’œuvre depuis septembre 1997, s’est chargée de la démolition de l’intérieur du bâtiment, cloisons, habillements, bois, façades intérieures, 11.500 m² de surface à nettoyer sur deux niveaux. D’octobre à fin janvier la structure est une dernière fois exposée aux courants d’air.

Démolition et accès au parking Photo Lucien Delvarre
Démolition et accès au parking Photo Lucien Delvarre

Le chantier de démolition a commencé du côté de la rue de Lannoy, sur le terre plein, car on veut éviter toute chute lourde (il y a les parkings en dessous) et on trie la ferraille. Puis les pelleteuses ont grignoté mètre par mètre les structures du centre commercial du côté du boulevard de Belfort.

Le chantier vue du boulevard de Belfort Photo Lucien Delvarre
Le chantier vue du boulevard de Belfort Photo Lucien Delvarre
Progression du chantier Photo Lucien Delvarre
Progression du chantier Photo Lucien Delvarre
La réapparition de la rue de Lannoy Photo Lucien Delvarre
La réapparition de la rue de Lannoy Photo Lucien Delvarre

Étrange retour de l’histoire, la réapparition de la rue de Lannoy est envisagée. Va-t-elle renouer avec la tradition des rues commerçantes de Roubaix ?

Remerciements spéciaux à Lucien Delvarre, photographe et passeur de mémoire

Sources NE