De la grande barre à l’école de Police

La grande barre est un ensemble composé de 330 appartements, construit en 1962 et situé à cheval sur les communes de Roubaix et de Hem. Les logements sont modernes avec salle de bains, chauffage central, grandes baies vitrées. La grande barre est appréciée, par les locataires, qui découvrent le confort qu’ils n’avaient pas dans leur vieille maison de courée.

La grande barre ( document collection privée )

A la fin des années 60, les problèmes surgissent : mauvaise qualité de la construction, mauvais entretien, situation précaire des locataires suite à la crise textile. A la fin des années 70, la situation se dégrade encore davantage ; incivilités, détériorations volontaires, mauvaises odeurs, humidité, insécurité . . .

De nombreux locataires quittent leur logement et il faut bien constater l’échec de cette muraille de béton d’une longueur de 300 mètres ( voir précédent article sur notre site : La fin de la grande barre )

( document Nord Eclair Sept 1985 )

En 1985, après seulement 23 ans d’existence, la grande barre est rasée. Tout le monde se pose alors la question : Que faire de cet immense terrain ? Le SGAP ( Secrétariat Général pour l’administration de la Police ), à la Cité Administrative de Lille, décide d’y faire construire une école de Police, en début d’année 1990.

( document Archives Municpales )

C’est un projet gigantesque, d’un budget de 225 millions de francs. Le terrain de 30.000 m2 est mis à disposition gratuitement par les mairies de Roubaix et de Hem. L’école comprend des bâtiments destinés à l’éducation, à l’administration, à l’hébergement, et à la restauration. La conception est confiée à l’atelier Gilles Neveux de Roubaix, et les travaux de construction à l’entreprise Norpac, aidée de quelques sous traitants locaux.

Les travaux débutent début 1991, et sont réalisés très rapidement, car moins de trois ans ont été nécessaires pour réaliser le projet. Des terrains de sport déjà aménagés par la ville de Hem, sont repris dans le périmètre de l’école.

( document ENP )

Un contrat de partenariat entre l’Etat et Norpac est signé, pour faire profiter le quartier de retombées positives pour les jeunes sans emploi. Des groupes de travail sont créés entre les élus et les associations, pour l’accueil des policiers, les relations école-habitants, dans ce quartier des Hauts Champs.

L’inauguration ( documents Nord Eclair Sept 1993 )

L’école de Police est inaugurée officiellement en Septembre 1993 par Paul Quilés, Ministre de l’Intérieur, qui vient de succéder à Pierre Joxe. La cérémonie a lieu dans la magnifique et impressionnante cour d’honneur de l’école. Le Ministre visite les bâtiments, passe en revue les gardiens de la paix, puis prononce son discours.

L’importance de l’école est de taille car, en effet, elle va assurer la formation de 400 élèves gardiens de la paix, 200 policiers auxiliaires, et une formation continue d’une centaine de policiers, pour remise à niveau.

( documents ENP )

Aujourd’hui l’ENP, l’école nationale de police, c’est : l’hébergement et la restauration pour 428 personnes, des bâtiments administratifs, 35 salles de cours dont 3 informatique, 2 amphithéâtres, 1 centre de documentation, 3 dojos, 1 parcours sportif, 1 stand de tir, 1 gymnase.

( document ENP )

Remerciements aux Archives Municipales.

Un mariage œcuménique

Le 13 juin 1973 a eu lieu un mariage à l’église réformée de la rue des Arts, et il nous est raconté par la mariée. Mon futur mari était catholique, et venant d’une famille très pratiquante. Chaque semaine ses parents et grands parents allaient à la messe. Ils allaient à l’église Saint Michel avenue Linné à Roubaix. Moi, j’étais protestante et je ne voulais pas me marier à l’église catholique.

Le Temple de la rue des Arts au n°27 CP Méd Rx

Nous sommes allés voir l’abbé Bouquillon qui était le prêtre officiant à l’église Saint Michel. Il a fait une demande à l’évêché pour que mon futur époux devienne protestant. Après l’accord obtenu, l’abbé Bouquillon nous a dit : « il vaut mieux faire un bon protestant qu’un mauvais catholique ! » Quel soulagement pour ses grands parents !

Le prêtre et le pasteur officiant de concert Coll Particulière

Mon mari s’est marié quatre jours après son vingt et unième anniversaire, car ses parents n’acceptaient pas qu’il se marie avant sa majorité. De ce fait nous avons attendu trois ans avant de convoler en justes noces. Nous nous sommes donc mariés le 23 juin 1973 et la cérémonie a été faite conjointement par l’abbé Bouquillon et le pasteur Peuron au Temple de l’église réformée de la rue des Arts.

Remerciements à Hélène Fleurbayx pour ce beau témoignage

La place de la Liberté

Au 15ème siècle, Pierre de Roubaix fait édifier une chapelle dédiée au St Sepulchre le long du chemin de Wattrelos, à ce qui était alors l’extrémité de la grand-rue, dans l’alignement de la rue Pauvrée. Un hospice pour les vieillards la jouxte. Le jardin s’étend jusqu’au Trichon. À la fin du 17ème siècle l’édifice brûle dans l’incendie du centre ville, mais il est reconstruit. Lors de la révolution, il est vendu comme bien national, et on le retrouve ensuite propriété des hospices de Roubaix qui le cèdent finalement à la municipalité.

Plan cadastral 1804 et Journal de Roubaix 1933

En 1815 on installe les services de la douane dans l’ancienne chapelle. Sur les jardins, côté Trichon, est édifiée une caserne de gendarmerie. Le reste de l’espace accueille le marché aux charbons. Un numéro du Journal de Roubaix de 1909 nous retrace ainsi cette époque : Les chariots, appelés « carabeux » apportaient le charbon de bois depuis la forêt de Mormal. Celui-ci était utilisé par l’industrie pour la préparation des laines. Ils se dirigeaient vers un terrain vague devant la chapelle… La place va garder le nom de marché aux charbons jusqu’en 1848. La rue qui longe les habitations est baptisée rue du Sépulchre.

Plan cadastral 1826

Peu de temps après, un plan de 1832 nous montre que les bâtiments de l’Hospice ont disparu et qu’on a ajouté un corps de bâtiment à la gendarmerie, qui forme maintenant un « U ». Celle-ci, servant de caserne a sans doute vu ses effectifs augmenter entre-temps.

La gendarmerie est située face au canal, creusé récemment. La rue de Lannoy le traverse sur le pont dit « de la gendarmerie ». Entre le canal et la gendarmerie, le terrain appartient au fabricant Bulteau-Prouvost, dont l’usine borde la rue du Galon d’eau.

Plan 1832

Mais le bâtiment de la chapelle se dégrade et les douaniers le quittent. L’ensemble est rasé. La place ainsi dégagée prend le nom de place du Sépulchre pour peu de temps, car on y plantera lors de la révolution de 1848 un peuplier, l’arbre de la Liberté au milieu du marché et la place prendra ainsi son nom définitif.

Eugène Grimonprez-Delaoutre, fils de Pierre Grimonprez et d’Hyacinthe Bulteau va ériger une filature sur le terrain situé entre la gendarmerie et le chemin de halage du canal.

Plan cadastral 1845

Même si les bâtiments de la gendarmerie brûlent en 1877, amenant les gendarmes à partir s’installer rue des Arts, et que la ville devient propriétaire de l’ancienne caserne qui appartenait au département, l’issue de la place vers le canal reste toujours étranglé. L’usine Grimonprez empêche encore le débouché de la place vers le boulevard Gambetta.

Les photos suivantes nous montrent, la première, les bâtiments de l’usine face au boulevard Gambetta, qu’arpentent les promeneurs, avec, à gauche la silhouette du café du Broutteux, et, la suivante, les constructions situées le long de la place jusqu’au coin de la grand rue.

Photos Nord Matin 1952

En 1889, la filature a cessé ses activités, et les bâtiments qui empiètent sur la place appartiennent à Léontine Grimonprez, veuve d’Alfred Philippe Motte. Les autres, le long de la place, sont à sa belle-mère, la veuve Liévine Grimonprez-Delaoutre, veuve du filateur Eugène Grimonprez. En outre, le coin situé en face du Broutteux, est loué au brasseur Desurmont qui y a installé un cabaret.

La municipalité, après maintes discussions, frappe d’alignement le bâtiment en mauvais état, pour empêcher les travaux de réparation et forcer ainsi sa démolition. Elle a l’idée d’y construire un théâtre puis, cette idée étant abandonnée, elle veut simplement élargir la place. Une délibération municipale de 1890 souligne que le passage entre la place et le boulevard est trop étroit pour laisser le passage aux tramways. La mairie cherche donc à acheter l’immeuble pour le démolir. Il est à noter sur le plan suivant que le passage entre l’ancienne filature et les autres bâtiments a pris le nom de rue de Lannoy, dont il est le prolongement.

Le bâtiment à démolir

Des pourparlers ont lieu avec la municipalité pour l’immeuble débordant sur la place, que Mme Grimonprez a vendu à la veuve Motte, venant elle-même de décéder en 1899. Pour ce qui est des bâtiments longeant la place et comportant des écuries et remises, les contacts sont pris avec la banque de France, qui cherche à s’implanter dans le centre-ville. Les interlocuteurs sont donc les héritiers, représentés par Albert Motte. Entre-temps, le bâtiment qui fait obstacle à l’ouverture de la place menace ruine aux dires des services de la voirie, ce qui permet à la ville, soucieuse des deniers publics, de marchander le prix d’achat. On finit en 1900 par tomber d’accord sur la vente, et la mairie va s’empresser de démolir une partie des bâtiments, tout en conservant la partie louée par M.Desurmont jusqu’à expiration de son bail en 1905. La photo suivante nous montre l’ancienne filature partiellement démolie entre 1901 et 1906. A gauche le café du Broutteux, et au fond, la grand rue.

Photo Nord Matin 1952

En 1906, la dernière partie de l’usine disparaît finalement. La ville va maintenant pouvoir aménager la place notablement agrandie, le marché aux charbons gagner un surcroît de superficie, et la banque de France ériger son agence.

Document collection particulière

A suivre…

Les documents proviennent des archives municipales et de la médiathèque de Roubaix.

31 rue Paul Lafargue

André Carissimo est un industriel roubaisien, dans le domaine du textile. Il décide de faire construire en 1928 sur un terrain de 3360 m2 avenue Gustave Delory à l’angle de la rue Paul Lafargue, une construction à usage d’habitation, par l’architecte René Dupire au 52 Boulevard de Cambrai

Document Archives Municipales
Document collection privée

C’est un hôtel particulier, une maison de maître de 265 m2 de surface au sol, la façade fait 19m de long sur plus de 14m de large avec deux étages. Au rez de chaussée, on y trouve : le hall d’entrée, le vestiaire, le vestibule, la cuisine, le salon, la salle à manger, le living-room, la salle d’enfants, l’escalier, l’ascenseur, le monte charge, l’escalier de service, et un garage de 40 m2

Documents D Gaudenzi

André Carissimo est marié avec Agnès Toulemonde. Ils ont deux filles Agnès née en 1912 et Françoise née en 1924. Pour une raison méconnue, André Carissimo décide au milieu des années 1930, de changer son adresse postale. Son habitation devient le 31 rue Paul Lafargue, et il condamne son entrée principale de l’avenue Gustave Delory, en plantant un arbre face à la grille ; arbre qui existe toujours de nos jours. André et Agnès vont résider dans leur somptueuse demeure, pendant près de trois décennies.

Photo de la grille avenue G Delory ( Photo BT )

André Carissimo décède à la fin des années 50. Son épouse reste dans la grande propriété, et décède à son tour en fin d’année 1975. En 1976 les héritiers décident de céder l’ensemble de la propriété à M Claude Duhamel qui habite 12 rue Clémentine Durieux à Wasquehal, Une promesse de vente est signée. Le projet prévoit la démolition pure et simple de l’habitation et d’y construite à la place, un immeuble de 6 étages, comprenant 23 appartements avec 23 boxes et 21 places de parking !

Document Archives Municipales

Fort heureusement le projet n’aboutit pas, et le dossier devient périmé en Mai 1978. La propriété est reprise par Mme Maes gérante de la SCI Les Hauts de Barbieux qui a son siège au 52 rue Louis Lejeune à Wasquehal. Mme Maes propose de louer l’ensemble de l’habitation au traiteur Robert Lecocq. Celui-ci décide de transformer l’immeuble en restaurant « Les Hauts de Barbieux » qui ouvre en 1979 ( voir sur notre site, un précédent article, intitulé : Robert Lecocq ) Le restaurant de Robert Lecocq continue son activité jusque dans les années 2010.

Documents collection privée

Aujourd’hui le bâtiment existe toujours. Les Hauts de Barbieux sont des salons de réception, occasionnellement loués pour des banquets et mariages

Photos BT

Remerciements aux Archives Municipales

Descartes et Beaumarchais

La création de l’ORSUCOMN intervient en 1970. Cette association a été créée en accord avec les administrations, les collectivités locales, la communauté urbaine, les offices d’HLM et plusieurs associations et organismes. Elle a pour objet de promouvoir de manière générale la résorption des courées dans la Communauté Urbaine et d’y concourir activement. Les statuts de cette association ont été déposés en Préfecture du Nord le 28 novembre 1969, et le Ministre de l’équipement et le Secrétaire d’État au logement ont passé convention avec elle le 23 avril 1970. Les programmes de résorption 1970 concernent à Roubaix et pour le quartier de l ‘épeule : l’ilot les Ogiers, l’ilot Vélocipèdes, l’ilot Fort Briet et l’ilot Fort Sioen. Les injonctions de démolir se succèdent. Les forts Briet et Sioen font alors triste figure : maisons inoccupées avec des baies murées, des murs de façade fissurés, des maçonneries dégradées.

Projet du Toit familial pour l’opération Descartes Beaumarchais doc AmRx

Le 2 novembre 1970 c’est la déclaration d’utilité publique qui est annoncée par voie de presse, et consécutivement l’acquisition par voie d’expropriation de plusieurs maisons dans les forts Sioen et Briet. Il est alors question de construire 166 logements au titre du programme à loyer réduit et 72 logements HLM. La démolition commence. C’est à présent l’opération Descartes Beaumarchais, du nom de rues du quartier. La délivrance du permis de construire intervient le 26 avril 1971 et la société « le Toit Familial » va finalement construire 81 logements PLR et 164 HLM. La fin de chantier est finalement déclarée le 10 septembre 1975. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Il y a eu des retards dans la construction qui a été rendue difficile par la faillite du maître d’oeuvre et de plusieurs entreprises, avec comme résultat un retard de deux ans dans les travaux.

Chantiers de l’épeule en 1974 Photo NE

Les locataires se constituent en association et confectionnent un livre blanc de revendications. Une invitation est lancée aux personnalités concernées : le directeur du GIL, la société HLM, mais il n’y aura pas de représentants du préfet, ni de la municipalité . L’association de défense est composée comme suit : M. Hus (président ), Mmes Robert, Gillant et Maes, MM Gouvé, Pelsmaekers, Dopierala, Martini et Bruggeman. Une liste des défauts a été réalisée : halls d’entrée non sécurisés, prospectus bouchant les boîtes aux lettres, on se fait adresser le courrier ailleurs, le nettoyage des entrées n’est pas effectué. Il y a des problèmes avec les ascenseurs et les lumières de secours dans les escaliers sont inexistantes.

Le bâtiment de la rue Descartes en 1977 Photo NE

La qualité intérieure des logements laisse à désirer : dalles de plastique sol se décollent, fissures dans les murs, fuites d’eau, portes ou fenêtres qui ferment mal, plinthes mal posées, peinture qui s’écaille, une seule prise électrique dans la cuisine, immeubles mal insonorisés. La réception définitive des travaux n’a pas eu lieu, mais la société est obligée par la municipalité de louer les appartements. Il faut donc remédier aux problèmes. 64 ont été mis en état, il en reste 96 à faire, c’est la condition de la réception définitive avec comme date limite des travaux juin 1977.

Le lotissement de nos jours Google Maps

Une demande d’abattement sur les loyers en cas de trouble de jouissance est formulée par les locataires et acceptée par les bailleurs. Il faut également faire les extérieurs et sécuriser la circulation avec des stops. Le certificat de conformité sera donné le 27 août 1979, soit quatre ans après la fin de chantier.

 

Le commissariat du boulevard de Belfort

Le vendredi 27 Novembre 1982, le secrétaire d’état à la sécurité publique, Joseph Franceschi est à Roubaix, pour visiter le commissariat au 301 avenue des Nations Unies. Il constate qu’il va être manifestement très difficile d’agrandir les locaux devenus trop étroits (voir sur notre site, l’article intitulé : le commissariat de la rue Pellart). Pourquoi, dans ce cas, ne pas créer un nouveau commissariat ? Il lorgne alors sur le terrain vide, juste en face, de l’autre côté de l’avenue. Ce terrain était l’emplacement de l’ancienne usine textile Lepoutre, rasée depuis. M Franceschi propose à la ville de Roubaix, un échange entre ce terrain de l’ancienne usine Lepoutre qui appartient à la Mairie, et le monument historique du commissariat actuel, appartenant à l’état, et qui peut devenir un lieu culturel. L’échange est conclu tacitement.

( Document NE 1982 )

Finalement, la municipalité propose un autre terrain situé boulevard de Belfort, qui est l’emplacement de l’ancienne usine textile : la SATAIN, juste à côté de la Bourse du Travail. Un accord est signé entre le Ministère de l’intérieur, M. le Préfet, le SGAP (Secrétariat général de la Police à Lille) et M. le Maire de Roubaix André Diligent.

Terrain vierge au début des années 1980 ( Document Archives Municipales )

Le terrain est loué provisoirement, en 1984, à la concession Renault, pour y présenter des voitures d’occasion. Sur la photo ci-dessous, on distingue les véhicules exposés, l’abri pour recevoir la clientèle, et surtout l’immense fresque Renault, que le garage a fait réaliser sur le mur latéral de la Bourse du Travail.

Terrain avec Renault 1984 ( Document Archives Municipales )

Le terrain de 4529 m2 est idéalement placé, à proximité du centre ville, au milieu des grandes artères de circulation ( les boulevards de Beaurepaire et Belfort, la rue Pierre de Roubaix élargie qui donne sur les boulevards Gambetta, Leclerc et l’avenue des Nations Unies ) afin que les véhicules de Police-Secours puissent arriver rapidement sur les lieux d’intervention. Une demande de permis de construire est déposée en 1986. Le cabinet d’architectes Bassez et Franck à Lille, est choisi pour mener à bien le projet.

Façade ( Document Archives Municipales )

Après avoir visité quelques commissariats sur la métropole, les architectes ont défini un projet avec des objectifs fonctionnels, comme par exemple :

– une cour intérieure ( pour les véhicules de police ) à l’abri des regards, et avec deux sorties ( boulevard de Belfort et rue Pierre de Roubaix )

– des cellules de détention avec un accès discret, à l’écart du domaine public.

Le confort de travail, la circulation, la commodité ont été pris en compte dans le projet.

Les surfaces au sol sont importantes : Bureaux 2200 m2, Garage 1100 m2, Parking 1200 m2.

Le rez de chaussée est fonctionnel et accueillant. On y trouve : le salon d’attente, le chef de poste, le service des étrangers, les renseignements, le service des accidents, le bureau des objets trouvés, la permanence pour les services de nuit.

La façade extérieure est en briques rouges.

Plans ( Documents Archives Municipales )

Les bureaux se situent aux étages. Ils sont confortables et nombreux, car affectés à un ou deux agents. Aux étages, on trouve le bureau du commissaire, le poste de commandement, la salle de réunion, une salle de cours, le fichier de l’identité judiciaire, et l’appartement de fonction du Commissaire principal.

Le stand de tir pour l’entraînement des policiers, se trouve à l’extérieur du bâtiment pour éviter les nuisances sonores, bien que l’isolation phonique soit performante.

Une cafétéria, une salle de sports avec douches sont à disposition pour l’ensemble du personnel.

Les espaces verts ne sont pas oubliés, puisqu’on décompte 240 m2 de terrasses et jardinières.

Construction ( Photos Lucien Delvarre )

Le Permis de construire est accordé et les travaux de construction commencent le 12 Janvier 1988. Plus de deux ans de travaux sont nécessaires pour la réalisation de l’ensemble, car la date de déclaration d’achèvement des travaux est le 29 Mars 1990.

Le déménagement se fait progressivement pendant le printemps et l’été 1990.

( Document NE 1989 )
( Photo Lucien Delvarre )
( Photo Google Maps )

En Octobre 1990, les policiers apprécient ce nouveau commissariat flambant neuf. Bien sûr le cadre a totalement changé, mais c’est surtout l’ambiance qui s’est métamorphosée. La tension est palpable, car le projet de réforme des services de ce nouveau commissariat, présenté par le commissaire M. Le Roy et le Directeur Départemental des Polices Urbaines M. Morineaux a du mal à être accepté par l’Intersyndicale et en particulier pour la fermeture la nuit, des commissariats des villes voisines comme Wattrelos, Wasquehal et Hem.

Les conflits de cette fin d’année 1990 sont-ils à l’origine du report de la date d’inauguration officielle de ce nouveau commissariat de police ?

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Remerciements aux Archives Municipales.

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La Roseraie

Joanny Dufour Marsy est un industriel. Le siège de l’entreprise Dufour est basé chez lui, au 30 rue du Château. La société fabrique des courroies en cuir pour machines-outils, dans son usine de Charenton, dans la région parisienne. Les affaires sont florissantes, au début des années 1900, grâce à l’industrie textile roubaisienne. Il fait l’acquisition d’un terrain, avenue des Villas (aujourd’hui, le 45 avenue Gustave Delory), en 1910, pour y construire une maison individuelle. Il s’agit d’une grande avenue où les industriels commencent à faire bâtir de somptueuses villas. J. Dufour préfère une habitation plus modeste que les hôtels particuliers de l’avenue ; il fait appel à l’architecte Albert Bouvy, pour créer une maison à colombages : un chalet coquet et plein de charme.

Façade Sud 1913 ( collection privée )

L’habitation est confortable : au rez de chaussée, on trouve un vestibule, une cuisine, une petite salle et un grand séjour de 38m2 qui donne sur une terrasse extérieure. Au 1er étage, il y a 4 chambres, le second étage est composé de 2 chambres et un grenier.

Le terrain est immense, en forme de L sur 3387 m2. J. Dufour est passionné d’horticulture et y fait donc planter des arbres, des arbustes et surtout des rosiers. Sa demeure devient « La Roseraie ».

Façade Nord 1913, au fond à gauche, une des villas avenue G. Delory, aujourd’hui Comexpert ( collection privée )
( document Archives Municipales )

A la fin des années 1920, Marcel Delvas, négociant en laines, son épouse Thérèse et leurs deux filles : Colette et Jacqueline habitent les lieux.

Au milieu des années 1930, le nouveau propriétaire est Robert Delcourt. Il dirige un négoce de vins et spiritueux : L’Économie, rue Jules Guesde. Robert est marié avec Monique Pollet : la fille de Charles Pollet, un des frères fondateurs de La Redoute. Avec leurs enfants, ils vont habiter La Roseraie pendant de longues années.

Robert aménage un garage pour deux voitures dans le fond du jardin et construit un puits décoratif devant la maison. La famille apprécie les charmes de ce pavillon dans un parc verdoyant et magnifique.

Vue depuis l’avenue G. Delory, le mur d’enceinte et la barrière en bois ( document Archives Municipales )

Robert décède en 1988. Son épouse Monique a bien du mal à gérer seule cette grande propriété. Avec les années, la Roseraie s’est dégradée : pannes de chaudière, fuites à la toiture, humidité dans les murs, décoration à refaire. En 1989, les travaux de rénovation deviennent trop importants ; Monique et ses enfants décident de céder la propriété à un promoteur immobilier, la société Palm Promotion. Cette filiale du groupe Rabot Dutilleul, confie le dossier à l’architecte Jacques Lapchin et propose d’édifier sur le terrain un lotissement de maisons et d’appartements, en locatif, à caractère social. Ce choix entraîne inévitablement l’abattage de très nombreux arbres centenaires.

( document Archives Municipales )
( document Archives Municipales )

Les riverains réagissent ; une quarantaine de familles se mobilisent pour défendre l’environnement et leur cadre de vie. Une association : Delory–Lafargue-Anatole France, est créée ; des pétitions sont signées et adressées à M. le Maire.

( document Archives Municipales )
Photo prise du fond de la propriété ( document Archives Municipales )
( document Nord Éclair )

André Diligent et ses adjoints, Jacques Lamaire et René Vandierendonck, apportent quelques légères modifications au projet de Palm Promotion, mais le permis de construire est signé.

( document Archives Municipales )
( Photo BT 2019 )

Il n’est pas toujours facile de trouver un accord entre nature, écologie, esthétique et une nécessaire mixité sociale.

Remerciements aux Archives Municipales.

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Quatre maisons à l’Entrepont

Le carrefour de la grand rue et de la rue d’Alger s’orne dès la fin du 19ème siècle de quatre belles maisons de maître, dont trois aujourd’hui disparues, assorties de parcs imposants. Au vu des photos anciennes, on ne peut s’empêcher de s’intéresser à ces propriétés. Quelle est leur histoire, pour qui ont-elles été construites, qui les a habitées ?

Les quatre propriétés – Photo IGN 1947

Cette histoire remonte à 1868, lors que Alfred Motte choisit de s’associer avec les frères Meillassoux pour fonder la teinturerie Motte et Meillassoux frères, installée rue du Coq Français. Venus de Suresnes, les Meillassoux s’installent alors à Roubaix.

La proximité des deux familles est affirmée en 1883 par le mariage d’Étienne Motte avec Louise Meillassoux, Le père d’Étienne, qui porte le même prénom, est le frère d’Alfred Motte ; sa mère est Catherine Desurmont. Louise est fille d’André, un des frères Meillassoux et de Léontine Duval. Son frère, Edouard Meillassoux, est marié à Germaine Desmazières.

Étienne Motte fonde une filature de coton à l’angle de la rue d’Alger et de la grand rue. Il fait construire au coin de ces deux rues, dans une enclave de l’usine, une maison entourée d’un parc. Le document ci-dessous montre l’usine ; le parc et la maison sont visibles en bas à droite.

Le recensement de 1906 nous indique qu’Étienne Motte, né en 1852 et filateur de coton habite la maison sise au 393 grand rue. A cette époque, sa femme Louise est malheureusement déjà décédée à l’âge de 27 ans. Leurs enfants Étienne, Jacques, Marie, Jean Marie, Ursule et Catherine vivent avec leur père. Une photo ancienne montre, à gauche, la maison, qui présente, sur le coin, un curieux angle rentrant et une vaste façade sur la grand-rue. Un bâtiment bas la prolonge côté rue d’Alger. Un mur de clôture ferme le parc côté grand rue. Il s’étend jusqu’au dépôt des tramways.

Étienne Motte décède à son tour en 1919. Son fils Étienne, troisième du nom, époux depuis 1907 de Germaine Pollet habite la maison avec sa famille. Après la guerre, on retrouve à cette adresse dans le Ravet-Anceau jusqu’aux années 60 Motte-Lepoutre, industriel.

Mais l’usine ferme et, en Juin 1970 la communauté urbaine achète l’ensemble du terrain aux établissements Motte. On prévoit d’y construire deux établissements scolaires. Les constructions ne traînent pas et on ouvre le collège Samain en 1972. Le Lycée Rostand le suit de près, qui ouvre en 1977.

Sur l’emplacement de la maison d’Étienne Motte s’étend une pelouse située devant le bâtiment des logements des personnels administratifs du Lycée.

Pratiquement en face, la société Motte et Cie possède dès 1884 une propriété côté pair de la grand rue, comprenant une maison prolongée par des bâtiments annexes sur le jardin, qui s’étend jusqu’à la rue d’Avelghem. Cette maison prendra plus tard le numéro 308.

 

Plan cadastral 1884

En 1886 s’y installe André Meillassoux, le beau-père d’Étienne Motte. Cette installation est provisoire, car, dès 1903 il s’installe au 349, de l’autre côté de la rue, laissant la maison à Edouard Meillassoux, son fils, né en 1873, et peigneur sur laines. Il y vit avec sa femme Germaine Desmazieres et ses jeunes enfants Jacques et Pierre. La famille séjourne au 308 jusqu’à la deuxième guerre.

Photo IGN 1965

En 1953 c’est la famille d’Henri Meillassoux et de Marie-Louise Wattel, qu’on retrouve dans la maison jusque dans les années 60. Henri est fils d’Emile Meillassoux et Marguerite Wibaux, petit fils d’Edouard Meillassoux-Desmazieres.

La propriété existe encore aujourd’hui et semble bien entretenue. La grande fenêtre de droite au rez de chaussée a remplacé en 1924 les deux fenêtres originalement séparées par un trumeau.

Photo Google

Revenons à André Meillassoux, l’associé des Motte qui traverse la grand rue en 1903 pour venir habiter au 349, au coin même de la rue d’Alger où il a fait construire une demeure dont la demande de permis de construire date d’octobre 1898. Le recensement de 1906 l’y trouve, avec sa femme Léontine Duval et ses enfants Cécile et Emile ; on y mentionne la profession de peigneur sur laines.

La maison, carrée et de belle apparence, possède sur l’arrière une partie plus basse et une extension vitrée semi-circulaire sur le parc, surmontée d’un balcon.

Nord Eclair nous en livre en 1964 une vue prise depuis le jardin.

André Meillassoux décède en 1917, sa veuve reste dans la maison. En 1939, la propriété est vide selon le Ravet-Anceau. Après guerre, s’y installe le foyer de jeunes filles du peignage Alfred Motte, ainsi que le terrain d’activités physiques inter-entreprises de Roubaix-Tourcoing. Plus tard, la mairie achète la propriété de 10 000 mètres carrés en 1964, pour en faire don aux HLM dans le but d’y construire un foyer des jeunes travailleurs. Celui-ci est construit en 1968 et inauguré en 1969. Il est aujourd’hui transféré place Chaptal et l’ancienne propriété est à l’abandon.

La dernière de nos quatre maisons se situe à quelques mètres de là, au numéro 296. Elle est construite à la fin des années 1880 et abrite à partir de 1891 la famille Browaeys. Le brasseur Jean baptiste Browaeys est né en 1866, en Belgique. Il a épousé cette même année Jeanne Tiers née en 1872.

Le 296 dans les années Le 296 dans les années 80

Vue de la rue, la maison, régulière en apparence, cache un plan de toiture très curieux qu’on découvre grâce aux photos aériennes. Le parc, assez vaste, s’étend jusqu’à la rue d’Avelghem.

Photo IGN 1965

Jean Baptiste décède en 1901 et sa veuve continue d’habiter la maison avec ses filles Jeanne, Antoinette, et Madeleine, ainsi que son fils Jean. Elle héberge également sa belle-mère Colette Verbrugghe et son beau-frère Pierre, employé par Jean-Baptiste. La famille vient du quartier du Fresnoy, puisqu’en 1896, Colette, veuve, habitait 87 rue de Rome avec son fils Pierre, employé brasseur, alors que son autre fils, Jean Baptiste, et sa femme Jeanne habitent le 81 de la même rue. Quittant le 296, la famille va ensuite s’installer non loin de là au 77 rue de la Conférence en 1913. Elle y est toujours en 1920.

La maison est habité ensuite par diverses personnes, dont, dans les années 50 par l’ industriel L. Blanchot-Baumann.

Dans les années 80, le parc est réduit par la construction rue d’Avelghem d’un immeuble qui a abrité un temps les élèves policiers dans l’attente de l’ouverture de l’école d’Hem. Le reste de la propriété disparaît plus tard, ainsi que la maison, dont on conserve pourtant la façade. Celle-ci sert plusieurs années, persiennes fermées, conjointement au mur d’enceinte, à interdire l’accès au terrain. Sur l’ancien jardin on construit enfin l’ensemble de logements collectifs l’Echo dont l’architecte a daigné préserver la partie basse de la façade de l’ancienne maison.

Photo Google

Ce reste de façade et la maison du 308 restent les seuls témoins des demeures de maître qui existaient à cet endroit, ornements d’un quartier par ailleurs populaire.

Les documents proviennent des archives municipales et de la médiathèque de Roubaix.

Péripéties autour d’un parking

La Ville de Roubaix souhaite depuis quelques années aménager un parking non loin du centre ville afin d’améliorer l’accès aux commerces et désengorger la Grand Place. L’Administration municipale a envisagé l’aménagement au Centre de la Ville dans sa partie comprise entre la Place de la Liberté, la Grande-rue, la Grand’Place, la rue du Général Sarrail, la rue du Bois, la rue des Fabricants, la rue Pierre Motte et le Bd. Leclerc. Plusieurs événements vont contribuer à faire avancer ou reculer ce projet.

L’incendie du Radio Ciné

En décembre 1961, à peine quelques heures après la troisième séance permanente de la journée de Noël, le cinéma Radio Ciné est la proie des flammes. Cette salle de cinéma qui s’appelait la salle Sainte Cécile jusqu’à la deuxième guerre, disparaît ainsi victime d’un violent incendie, malgré l’intervention des sapeurs pompiers arrivés sur place dans la nuit à 1 h 45. Au matin, le froid a saisi ce qui reste du cinéma avec sa façade en bois façon « western ». Tout est calciné, réduit en cendres, les 420 fauteuils, la cabine de projection s’est écroulée au milieu du faux plafond qui cachait la verrière, car le toit du cinéma était une véranda . Les dégâts sont évalués à une trentaine de millions de francs.

L’incendie du Radio Ciné le 25 décembre 1961 Ph NE

On a craint pour les maisons voisines et particulièrement le 17bis dont les locataires ont été relogés provisoirement dans les locaux du commissariat situé à deux pas. Le mur qui sépare la propriété du n°25 a également souffert, il faudra l’abattre. En effet, ce mur, d’une hauteur de 6 mètres n’est plus contreventé et présente un hors d’aplomb très important vers la cour et le jardin de la propriété portant le n° 25. L’écroulement de la totalité de la toiture et du plancher du cinéma a provoqué le descellement de poutres et, consécutivement, une ouverture béante et de larges fissures dans la partie supérieure du mur. De gros blocs de maçonnerie sont en équilibre instable et peuvent s’abattre à tout moment dans le jardin voisin.

Trois pompiers ont été blessés lors de l’intervention. La ville donne quinze jours au propriétaire pour la démolition du mur du côté du n°25. En 1963, elle se porte acquéreuse du terrain du cinéma pour y réaliser un parking. Il semble que ce parking soit devenu celui du Crédit Commercial de France en 1974 (signalé Ravet Anceau).

Le rachat du 45

Entre-temps, d’autres acquisitions ont été faites. L’expropriation du 45 rue du Général Sarrail, immeuble appartenant à l’association de gestion des services médicaux et sociaux de l’industrie et du commerce de Roubaix Tourcoing est envisagée dès 1959, une indemnité est proposée au locataire Pennel et Flipo, et une somme de rachat au propriétaire. En 1962, il est procédé à la démolition de l’immeuble qui est confiée aux établissements Mailler (95 rue du Hutin à Roubaix) qui emporte l’adjudication en proposant le délai de démolition le plus court à savoir 6 mois. Mais l’hiver particulièrement rigoureux entraînera un report jusqu’en septembre de l’année 1963. En vue de clore la propriété communale sise rue du Général Sarrail n° 45, une palissade publicitaire fait l’objet d’un appel d’offres remporté par la S.A. Affichage Giraudy en novembre 1964.

Les 47-49

Une autre acquisition est en cours, celle des n°47-49, dont le propriétaire est la SARL Fernand Carissimo et fils en liquidation. L’acte de vente date du 9 octobre 1959 et son contenu nous permet d’avoir une description des lieux. C’est une propriété bâtie sur et avec 2.346 m2 environ comprenant 2 corps de bâtiments reliés entre eux par 2 bâtiments latéraux et les fonds et terrain en dépendant, ainsi que ledit bien existe s’étend et se comporte, sans aucune exception ni réserve dans l’état où il se trouve actuellement c’est-à-dire bâtiments en cours de démolition terrain arasé en tout ou partie. Tous les matériaux de démolition y compris les pavés appartiennent à l’entrepreneur Dhaze et les travaux étant effectués sous la surveillance de M. Lecroart, architecte.

Vue aérienne de la propriété Carissimo Photo IGN en haut la rue du Général Sarrail, en bas la rue des Fabricants

On apprend que le bâtiment est partiellement démoli, suite à une convention passée le 13 novembre 1958 entre les liquidateurs de la S.A.R.L. Carissimo et M. Dhaze, entrepreneur de démolition (97, rue du Brun Pain à Tourcoing). Tous les travaux doivent être entièrement terminés dans un délai de 5 mois à partir du jour du permis de démolition daté du 1er décembre 1958, la démolition devant se faire jusqu’au niveau du trottoir et des cours, toutes excavations comblées et arasées suivant une pente régulière allant du seuil de la grande porte rue du général Sarrail au niveau haut du trottoir de la rue des Fabricants. Mais malgré de nombreux entretiens et plusieurs lettres rappelant à M. Dhaze, ses obligations, la démolition est très imparfaite, le terrain n’est pas nivelé et donc inutilisable dans son état actuel.

La ville, qui tient là une surface de parking digne de ses ambitions à l’intérieur du quadrilatère délimité par les rues du Maréchal Foch, des Fabricants, du Bois et du Général Sarrail, envisage l’acquisition de la propriété sise 36, 38, 40 rue des Fabricants, d’une superficie totale de 1.991 m2, appartenant à la S. A. Dupont-Desfontaines et Fils. Cela permet la création d’un parking s’ouvrant dans la rue du Général Sarrail (n°45,47,49) et débouchant dans la rue des Fabricants. S’y ajoute en 1965 l’entrepôt sis 46, rue des Fabricants dont la S. A. Dupont-Desfontaines et fils est également propriétaire et dont elle n’a plus l’usage. La ville s’en porte acquéreuse.

Si l’affaire avance bien du côté de la rue des Fabricants, il n’en va pas de même du côté Sarrail. Par une ordonnance de référé du 26 mars 1963, le Président du Tribunal de Grande Instance de Lille, accordait à l’entrepreneur Dhaze, un dernier délai jusqu’au 27 avril 1963 pour parfaire les travaux litigieux. Maître Poissonnier est nommé expert avec mission de déposer un rapport, ce qu’il fait le 25 juin 1964. Ce rapport détaille les travaux restant à exécuter. Cela fait l’objet d’un appel d’offres auprès des entrepreneurs de démolition. M. Fried, 72, rue de la Blanche Porte à Tourcoing, est retenu le 6 mai 1964. Le parking est pour bientôt.

Le grand collecteur à l’entrée de la rue Photo NE

Les grands travaux de 1965

L’année 1965 apporte de nouvelles données : le 25 janvier 1965 les consorts Journel proposent à la ville la vente de leur propriété occupée commercialement sise rue du Général Sarrail n° 51. Depuis le début des années 1960, le traiteur Michel Duplouy tient le commerce à l’enseigne renommée de Blot. Il devient donc pour un temps locataire de la ville de Roubaix. Puis le 3 mai 1965, c’est le grand chantier du collecteur qui démarre dans la rue du Général Sarrail. Le Syndicat Intercommunal d’Assainissement du Bassin de l’Espierre a approuvé un vaste projet d’amélioration du réseau intercommunal comportant la construction de plusieurs collecteurs. Certaines voies de Roubaix seront ainsi éventrées pour un temps, comme le boulevard Gambetta, la rue Pierre Motte et la rue du Général Sarrail.

Vue de la rue en 1965 Photo NE

De plus, la conduite d’eau potable de 200 mm de la rue du Général Sarrail qui longe le collecteur est en très mauvais état. Elle a dû être remplacée à la demande du Syndicat, pour éviter toute catastrophe en cas de rupture, par une conduite provisoire de faible diamètre implantée dans chaque trottoir !

Le parking Sarrail en 1965 Photo NE

Le parking, enfin !

Le 22 Novembre 1965, le parking est terminé ! Un arrêté municipal détermine les conditions d’utilisation de ce nouveau parking :

Article 1er. Un parc destiné au stationnement des véhicules ne dépassant pas 1.500 k g de poids total en charge, est mis à la disposition du public, entre les rues du Général Sarrail et des Fabricants.

Article 2. La durée du stationnement des véhicules sera celle indiquée sur les dispositifs de contrôle de la durée du stationnement et définie aux articles 1, 3, 4, 6 et 7 de l’arrêté municipal en date du 26 octobre 1962.

Article 3. L’utilisation de ce parking devra se faire en respectant les sens de circulation imposés par des panneaux et des flèches peintes sur le sol. Les automobilistes devront prendre toutes dispositions pour effectuer leurs manœuvres d’entrées et de sorties sans danger pour les autres usagers de la route.

Article 4 . Les prescriptions du présent arrêté entreront en vigueur à partir du 13 novembre 1965.

Le parking Sarrail en 1984 doc AmRx

 

Un singe à Saint Martin

En Octobre 1964, un couple de touristes visite Roubaix. Après avoir contemplé le majestueux hôtel de ville, ils traversent la Grande Place, pour admirer l’église Saint Martin. Soudain, leur regard est attiré par un animal sur le toit ! Un singe se promène tout en haut du vénérable édifice. Il suffit que quelqu’un lève les yeux vers le ciel, pour qu’aussitôt, nombre de badauds en fassent autant. Le petit groupe de curieux se met à grossir ; une centaine de personnes se trouve maintenant sur la place et le contour de l’église.

A droite, le sacristain, M. Fichelle

Le sacristain, M. Fichelle, mécontent que l’on vienne squatter le toit de son église, décide de faire sonner les cloches du carillon, pour tenter de chasser le petit animal ; en vain car le primate continue sa promenade, nullement intimidé.

Mais que fait donc ce singe sur les toits de l’église ? s’interroge le journaliste de Nord Eclair. Après enquête, il s’agit d’une petite guenon appelée « Nénette », qui s’est sauvée du commerce Truffaut de la Grande rue, et qui a bien l’intention de profiter de sa liberté quelques temps.

Nénette devient, au bout de 3 jours, le chouchou des roubaisiens. On jette, sur le toit peu élevé, des bananes, des pommes, des cacahuètes, et même des frites pour la nourrir. Nénette se plaît ainsi dans sa nouvelle retraite. Les enfants sont ravis de la voir escalader le clocher, en imaginant King Kong en haut de l’Empire State Building !

Comment faire pour récupérer le primate ? On installe une cage piégée : peine perdue car Nénette l’évite avec une aisance déconcertante et invraisemblable. Ne dit-on pas  »malin comme un singe » ! On dépose des fruits farcis de somnifère : en vain, car cela est également inefficace ; son instinct lui fait rejeter les produits contaminés. Un roubaisien, M. Steux, propose d’amener son singe mâle, qui pourrait séduire Nénette, et la faire sortir de sa réserve. Peine perdue, Nénette grogne et s’enfuit rapidement.

M. Steux amène son singe mâle dans son sac, pour essayer de séduire Nénette

Cela fait maintenant une semaine que Nénette apprécie sa liberté, et continue son escapade. Elle devient une véritable vedette, et pourtant il est impossible de l’approcher, et très difficile de la photographier ou de la filmer. Les caméras de télévision se déplacent, devant l’église, dans le dessein de filmer le petit animal, sans résultat probant. Notre guenon doit être hostile aux médias !

Le 11° jour, Nénette n’apparaît pas. La LPA s’inquiète. Elle est peut-être malade. Tous les roubaisiens se mobilisent. Il faut absolument capturer en douceur la guenon, saine et sauve et en parfaite santé.

Le 13° jour, Nénette apparaît de nouveau. On installe une nouvelle cage piégée, et cette fois-ci, Nénette cède à la tentation des oranges fraîches, et clac ! elle se fait prendre dans la cage. Le piège s’est refermé. C’en est fini, de la liberté. La petite guenon est examinée par un vétérinaire qui la trouve en pleine forme ; elle est ensuite rendue à son propriétaire mais celui-ci n’a pas la possibilité d’en assurer la garde, ce qui l’avait amené, d’ailleurs, à vendre l’animal par l’entremise d’un commerçant roubaisien. Quelques jours après, la LPA décide donc de vendre Nénette aux enchères.

A la salle des ventes de la rue du Collège, une foule immense se presse, pour voir notre Nénette qui est adjugée pour la somme incroyable de 1800 F. La guenon partira au zoo de Bagatelle, de M et Mme Parent, à Merlimont. Nénette va revenir à Roubaix, pour quelques jours mi-Décembre, car elle est prêtée au magasin Bossu Cuvelier de la Grande rue, pour les fêtes de Noël. Confortablement installée au rayon jouets, elle accueille tous les enfants sages. Elle repartira ensuite au zoo de Bagatelle, privée de liberté, certes, mais elle pourra profiter d’une fin de vie plus sereine.

Sacrée Nénette !

Remerciements aux Archives Municipales et à Daniel Labbé. Tous les documents proviennent des quotidiens de la presse locale d’Octobre et Novembre 1964.