En 1913, les établissements Meillassoux Frères et Mulaton apprêts se sont agrandis et viennent de s’équiper d’un matériel moderne pour traiter les articles : robes et draperies en pure laine, coton et soie pour une production journalière de 24.000 mètres.
Mais dès Octobre 1914, lors de l’occupation allemande, la production s’arrête et des équipes de prisonniers russes vont briser au marteau les métiers afin de récupérer le fer et la fonte. L’occupant trouve alors en effet dans les usines les tuyauteries en cuivre et les métaux recherchés pour ses fabrications d’armement.


Une fois, l’usine complètement vidée, les salles disponibles sont réquisitionnées pour servir d’hôpital vétérinaire pour plus de 1.200 chevaux.

Après la guerre dès 1919 l’Office de la Reconstitution Industrielle aide à l’étude des travaux de reconstruction. Louis Loucheur, ministre de la reconstruction industrielle, vient sur place se rendre compte par lui-même de la situation afin de décider des priorités dans « l’oeuvre immense à accomplir ».
Sous l’impulsion des gérants, Louis Meillassoux et Antoine Mulaton, secondés par un personnel dévoué, les bâtiments sont remis en état et le matériel commandé. Pourtant les constructeurs locaux ayant eux-même été sinistrés ne peuvent livrer que suivant de longs délais et malgré les plus grands efforts la remise en route ne peut être effectuée qu’en mai 1921 et la pleine activité n’est retrouvée qu’en 1923.



A cette époque la famille Mulaton a déménagé presque en face de son ancienne propriété, du côté impair de la rue de Lille. La demeure est beaucoup plus fastueuse que la précédente. Elle sera amenée pendant la seconde guerre mondiale à loger une douzaine de soldats britanniques avant la débâcle et leur évacuation.

Le 1er juillet 1932, la Société Anonyme des Etablissements Meillassoux et Mulaton est constituée par acte passé devant Maître Emile Mory. En 1936, l’entreprise affronte les mouvements sociaux et les salariés se mettent en grève et occupent l’usine pour obtenir les avancées sociales qui leur seront acquises avec le front populaire.




Dans les années 1980, la teinturerie, traversée par la Marque, a son entrée située au bout d’une allée bordée d’arbres, la cour Michel, donnant sur la rue du Général Leclerc, presque en face de l’avenue De Vlaminck (actuellement cette allée mène aux ateliers municipaux). Sur la photo panoramique on voit que l’usine Gabert, sa voisine, n’existe déjà plus.


En janvier 1982, un violent incendie se déclare dans la teinturerie, suite à la mauvaise manipulation d’un chalumeau par un ouvrier désireux de dégeler les tuyaux. Le feu se propage rapidement et une nef entière est détruite ainsi que l’ensemble des bureaux de l’entreprise. Les pompiers doivent mettre six lances en batterie pour circonscrire le sinistre.

La situation économique de l’entreprise se dégrade dans les années 1990 et 5 gérants se succèdent en 3 ans à la tête de l’entreprise. Le nombre de salariés passe de 74 en 1994 à 30 en 1998. La direction décide de vendre le fonds de commerce à la société ariégeoise Fitex, ce qui suppose que le personnel accepte une mutation à plus de 1000 kms ou soit licencié.
En août 1998, les salariés, en grève depuis plus d’ un mois, bloquent la rue du Général Leclerc, en face de la mairie, et y font brûler des pneus enflammés au milieu de la chaussée, pour protester contre l’absence de solution qui leur est opposée.
Malgré la rencontre de Mrs Vanneste et Maris, dirigeants de TMM (Teinturerie Mulaton Meillassoux) et Fitex avec les salariés, leurs délégués et les représentants syndicaux, lors du Comité d’Entreprise, aucune solution n’est trouvée pour débloquer la situation et la grève continue.

En octobre, les salariés de TMM, qui n’ont pas l’intention de partir en Ariège, ni de quitter l’usine, décident d’occuper les locaux et le piquet de grève s’installe. L’entrée des bâtiments est refusée à la direction mais une table ronde est organisée à laquelle est conviée la municipalité. Pourtant le nœud du problème n’est pas dénoué et chacun campe sur ses positions. Les clients ne peuvent récupérer aucune pièce ; les grévistes y veillent.

En décembre les salariés obtiennent du Tribunal la suspension de la cession de l’entreprise à la société Fitex. Les salaires de novembre et décembre leur sont versés. Mais en début de l’année suivante les salariés n’ont toujours pas obtenu le maintien de leurs emplois sur place et, sans salaire en janvier, ne savent plus quoi faire.

En février 1999, ils continuent leur bras de fer avec la direction de l’entreprise et une délégation se rend à Paris au Ministère du Travail pour essayer de faire avancer les choses. Le représentant du Ministère qui les reçoit leur assure alors que des démarches vont être entreprises auprès de Dominique Meillassoux pour connaître ses intentions sur l’avenir du site et les solutions qu’il envisage pour l’avenir des salariés.

Pourtant le nouveau comité d’entreprise n’apporte rien de concret même si le rapport de l’expert comptable conclut à la responsabilité totale et entière de Dominique Meillassoux dans la situation actuelle de l’entreprise. La grève continue donc et use les nerfs des grèvistes proches de retenir le gérant contre son gré à l’issue de la réunion.

A la fin des années 1990 l’entreprise ferme ses portes. Elle est radiée du registre du commerce et des sociétés en février 1997 soit après presque un siècle et demi d’existence. La photo aérienne prise en 2022 montre le terrain presque nu sur lequel se dressait l’entreprise de la rue Leclerc à la Marque. A l’emplacement de la propriété Mulaton se trouve le magasin Carrefour et son parking. A ce jour il ne reste plus que le château Meillassoux annexé à la mairie et représenté avant et après la réalisation du nouvel Hôtel de Ville (en 2015 et 2020).


Remerciements à la ville de Hem, l’association Historihem ainsi qu’à André Camion et Jacquy Delaporte pour leurs ouvrages Hem d’hier et d’aujourd’hui et Jacquy Delaporte, Christian Teel et Chantal Guillaume pour leur bande dessinée Au Temps d’Hem