Nord-Eclair (Suite)

Dès 1979, Nord-Eclair quitte définitivement la Grand’Rue car les services de la rédaction, responsable des pages de Roubaix et environs, et de la publicité locale du journal, ainsi que le personnel chargé de recevoir les petites annonces, s’installent sur la Grand’Place plus exactement à l’angle de l’avenue Jean Lebas et de la rue du Vieil Abreuvoir, dans un immeuble jusqu’ici occupé par la Banque Populaire du Nord.

Il est à noter que l’agence Havas Voyage auparavant installée dans les locaux de la Grand’Rue suit Nord-Eclair dans le déménagement. Ses hôtesses accueilleront dorénavant le public au rez-de-chaussée du nouvel immeuble.

Dernières Photos de Nord-Eclair Grande-Rue à la fin des années 1970 (Document archives municipales)
Les nouveaux locaux de Nord-Eclair avenue Jean Lebas en 1979 (Document archives municipales)
Photo couleur des années 1980 (Document archives municipales)

Les anciens locaux mythiques du 63 au 75 Grand’Rue seront ensuite occupés par l’office public de Roubaix des HLM à compter de 1985 puis Roubaix Habitat. Jacques Demey, ancien patron du Journal de Roubaix, toujours propriétaire des murs jusqu’alors, leur a en effet vendu sa propriété qui donne à la fois Grand’Rue et rue du Collège. A partir de 2013, les locaux seront ensuite investis par Paris Store, épicerie et super marché asiatique, société toujours présente de nos jours.

L’office public des HLM de Roubaix achète les anciens locaux de Nord-Eclair (Document Nord-Eclair)
Roubaix Habitat en 2008 puis Paris Store en 2013 dans les anciens locaux de Nord-Eclair Grand’Rue (Document Google Maps)
Les locaux installés par Paris Store à la place de Nord-Eclair Grande-Rue (Documents archives municipales)

En 1989, un permis de démolir est déposé pour mettre à bas la cheminée, inutilisée depuis de nombreuses années, de l’ancienne usine Lestienne, dans la rue du Caire. Par manque d’entretien, la maçonnerie en briques présente en effet de nombreuses fissures et quelques éléments sont abimés par l’érosion, ce qui constitue un danger pour les bâtiments qui l’entourent.

Permis de démolir sollicité pour la cheminée en 1989 (Document archives municipales)

En 1995, une équipe de journalistes de Nord-Eclair reçoit le prix de la presse écrite décerné par la Fondation Mumm pour son enquête collective intitulée : « Le scandale du chômage des jeunes ». Son jury est alors composé de très grands noms de l’histoire de la presse française à savoir, entre autres : Françoise Giroud, Jean d’Ormesson, Christine Ockrent, Claude Imbert et Yvan Levaï. C’est ce dernier qui remet le prix à André Farine, directeur de la rédaction, entouré par des journalistes.

La remise du prix (Documents Nord-Eclair)

En 2001, Nord-Eclair annonce le transfert de son siège social au n°42 de la rue du Général Sarrail, dans un grand immeuble situé au coin de la rue de l’Hospice ayant précédemment abrité autrefois les Ets Leclerc-Dupire puis plus récemment entre autres la CIRPS (Caisse Interprofessionnelle de Retraite et de Prévoyance pour les Salariés).

Transfert du siège social (Document Nord-Eclair)
Photos du bâtiment de la rue Sarrail (Documents Google Maps)

Quant à l’impression du journal celle-ci dure pendant plus de 25 ans rue du Caire. Puis un rapprochement a lieu avec la Voix du Nord avec la mise en commun des moyens informatiques avant le départ de l’impression, à partir de 2005, sur les rotatives de la Voix du Nord à Mons-en-Baroeul, dans la zone de la Pilaterie.

La Voix du Nord à la Pilaterie en 2008 (Documents Google Maps)

Nord Print a en effet dû fermer ses portes, n’ayant pu rivaliser avec la concurrence, malgré une baisse des tarifs pour tenter de retenir sa clientèle, face au montage en Belgique par les italiens d’imprimeries pratiquant du « dumping » (vente à des prix inférieurs à ceux du marché). Son chiffre d’affaires de 2002 à 2005 a de ce fait subi une véritable dégringolade, passant de 10,5 à 4,2 millions d’euros.

Presse Nord, la société qui édite le titre Nord-Matin est radiée du registre du commerce et des sociétés 2 ans plus tard en 2007. Quant à Nord-Eclair le journal devient alors une simple édition supplémentaire de la Voix du Nord : code rouge pour Nord-Eclair et code bleu pour la Voix du Nord.

Les locaux de la rue du Caire sont alors laissés à l’abandon pendant 10 ans jusqu’aux travaux de démolition de 2015. Le site, qui s’étend sur 2,6 hectares, a en effet été racheté en fin 2011 par l’EPF (Etablissement Public Foncier) et l’ancienne construction doit être rasée pour y aménager un nouveau quartier d’activités mixtes et d’habitat.

Les locaux à l’abandon (Documents GraphiLine, Nord-Eclair et collection privée)

Mais en 2011, c’est l’annonce malheureusement pressentie depuis quelques années à savoir la fusion des rédactions de la Voix du Nord et de Nord-Eclair d’ici un an. En additionnant les compétences et en fédérant les contenus, les 360 journalistes vont dorénavant publier deux quotidiens : la Voix du Nord et Nord-Eclair. Ces titres papiers auront leur version numérique à terme pour les tablettes.

Le réaménagement des locaux lillois de la Voix du Nord est prévu afin de pouvoir accueillir les équipes fusionnées et une salle de rédaction capable de produire du contenu web, papier, radio et TV : la fin d’une époque…Le vieillissement du lectorat, donc la chute des ventes et des abonnés, parallèlement à une structure de coûts trop lourde ont eu raison du 2ème quotidien régional. Nord-Eclair ne vend plus alors que 25.000 exemplaires, soit un quart du tirage de la grande époque, et ne compte plus que 55 journalistes.

Aujourd’hui, et depuis 2018, après cinq années passées dans le quartier de l’Union à Tourcoing, la rédaction de Roubaix-Tourcoing a réinvesti le cœur des deux villes. Le bureau principal de la rédaction se situe désormais à l’Eurotéléport, au 84, boulevard du Général-Leclerc à Roubaix, et le bureau secondaire à côté de la gare de Tourcoing. Seize rédacteurs composent cette rédaction qui propose les éditions roubaisienne et tourquennoise de La Voix du Nord et de Nord éclair.

Le bâtiment de la rédaction des 2 journaux bd Leclerc (Document Google Maps)

Article dédié à André Delmée, salarié de Nord-Eclair pendant la quasi totalité de sa carrière.

Remerciements aux Archives Municipales de Roubaix

Les appartements du Hutin

Les trois bâtiments qui se trouvent rue du Hutin et rue de l’Espierre ont été construits par le CIL en 1959 et 1960. Après une visite des officiels en mai 1960, les appartements sont mis en location en octobre. Ils correspondent aux n°65 et 73 de la rue du Hutin pour le premier bâtiment, soit vingt appartements identiques. Et deux autres bâtiments juste derrière, dans la rue de l’Espierre, dont le tracé perpendiculaire à la rue du Hutin qui traverse le lotissement : cinq entrées pour le premier et deux entrées pour le second plus petit. Soit un ensemble de 90 appartements.

Visite des officiels au Hutin mai 1960 NE
Visite des officiels au Hutin mai 1960 NE

La description d’un appartement nous est proposée par une des locataires, membre de l’atelier : dès le rez-de-chaussée, on accède directement à deux appartements. Tous les appartements du bâtiment  sont strictement identiques, même surface, même disposition. On y accède par une petite entrée, où se trouvent un petit placard, et les WC. On entre ensuite dans le séjour sur la droite, avec une très grande fenêtre, les appartements sont très bien exposés. Le soleil se lève du côté du séjour et se couche dans la cuisine, qui est rectangulaire avec deux grandes fenêtres. Il y a aussi une petite salle de bain avec une fenêtre, on ne peut y accéder que par la cuisine, sans doute à cause de la disposition des canalisations. Au bout du séjour, on a un petit couloir sans porte et deux chambres de part et d’autre de ce couloir. Il y avait des placards dans les appartements, ils sont d’origine, et dans l’espace entre les deux chambres, on a monté un genre de dressing, avec des portes coulissantes en bois, qu’on a ensuite enlevées pour mettre des tentures, c’est assez profond et assez haut.  Ces placards, c’était bien pour les jeunes ménages, ça évitait d’acheter des meubles.

Croquis d'un appartement par notre témoin
Croquis d’un appartement par notre témoin

Il reste encore quelques locataires qui sont là depuis le début, ils m’ont raconté qu’au début, ils étaient chauffés avec des feux à charbon. Autrefois les caves communiquaient et elles avaient une petite cellule réservée au stock de charbon. Puis elles ont servi pour des dealers, elles ont été finalement condamnées en 2009, autant l’accès par le bloc que par l’extérieur. Les charges n’ont pas été réduites pour autant. Sur la droite au rez-de-chaussée droit du n°65, il y a eu des ilotiers qui avaient une permanence. Ils ont fermé rapidement. Après il y a eu un gardien, c’était son logement de fonction.

Les appartements et la verdure Photo CQ ECHO
Les appartements et la verdure Photo CQ ECHO

Depuis 20 ans que je suis là, les bailleurs se sont succédé : l’Opac de Roubaix, puis Roubaix habitat maintenant c’est LMH. Il y a eu du changement concernant les espaces verts. Quand je suis arrivée, il y avait de la verdure, c’était magnifique, des arbres, de la végétation, on entendait les oiseaux dès le matin. Après la réhabilitation, ils ont tout coupé, les arbres soi-disant malades, pour faire un parking. Ça ne nous laisse plus de place pour les espaces verts, et ils en ont encore enlevé pour placer les conteneurs de récupération, alors on plante des fleurs en bas de nos fenêtres, sur le devant des fenêtres ou les petits parterres non exploités, dans la descente d’escalier. Entre voisins on se passe des plantes et des graines. Ils ont fait le parking sans concertation, ils ont dessouché les arbres avec des bulldozers. Les gens ont commencé à se garer, du jour au lendemain, le parking s’est ajouté à nos charges, du coup boycott du parking qui s’est retrouvé vide, on se garait dans la rue. Après, quelques locataires paient leur place, et comme des gens venaient se garer sans payer, on a mis des poteaux fixes et noirs pour empêcher le passage, du coup les véhicules de secours ne peuvent plus passer.

Les appartements aujourd'hui vue Google Maps
Les appartements aujourd’hui vue Google Maps

Pour l’époque, fin des années cinquante, l’accès à l’électricité et à l’eau courante, c’était moderne. Il y avait des locataires portugais, algériens, français, qui arrivaient dans des appartements avec confort, salle de bains, on disait pièce d’eau à cette époque. C’était des ouvriers du textile ou des travailleurs du bâtiment. Le chauffage central individuel au gaz était installé quand je suis arrivée. En 2009, il y a eu une réhabilitation extérieure, remise aux normes des vieilles chaudières, les sanitaires, mais le double vitrage date des années quatre-vingt. Les changements sont difficiles à obtenir : par exemple, les lampadaires, on en a sur la façade arrière du bâtiment, et on a du mal à faire changer les ampoules. La grande transformation,  c’est l’évacuation des eaux usées, on a une colonne d’évacuation qui est à l’intérieur du mur de cuisine, entre chambre et cuisine, alors quand c’est bouché, je ne vous parle pas de l’odeur. Comme maintenant tout le monde a un lave-vaisselle, une machine à laver, le débit a augmenté. On voit aussi qu’il y a un changement des mentalités, à cause du mode de vie. Aujourd’hui, c’est chacun chez soi et chacun pour soi. Quand je suis arrivée là j’ai été bien accueillie, il y avait de tout, les enfants jouaient dehors, les mamans se rassemblaient devant le bloc, on papotait. Aujourd’hui, c’est bien différent.