Parler de Jean Sunny, c’est pour moi évoquer un souvenir d’enfance à Roubaix au début des années soixante. J’ignorais alors que Jean Sunny alias Jean Moussalli de son vrai nom était roubaisien d’origine. Fils d’un chirurgien dentiste de la rue du Collège, il est né à Roubaix le 15 août 1928 et il est décédé le 27 août 2007 à Gonesse (Val-d’Oise) Il fut élève du collège Notre Dame des Victoires, pratiqua le football à l’Excelsior sous la direction du fameux Henri Hiltl. Son père le destinait à la médecine mais la guerre en décida autrement. En 1939 il quitte Roubaix pour s’installer dans les Deux Sèvres où il s’occupe un temps de bonneterie. Mais le garçon est chaud bouillant et il se passionne pour les courses de stock car. Le stock-car, qui est autant un spectacle qu’un sport, n’a pas réussi au début à trouver un large public en France. Il faut attendre 1953 et 1957 pour que des courses-exhibition de stock-car soient organisées en France. Jean Sunny va y gagner notoriété et expérience automobile.
Il s’oriente ensuite vers la cascade et l’acrobatie automobile. Il précise : ne confondons pas, il s’agit ici d’expériences mécaniques soigneusement calculées et mathématiquement préparées. Il m’a fallu trois années de recherches pour arriver à un tel résultat. Il organise ce qu’il appelle ses « rodéos » avec des voitures de série, c’est à dire l’automobile de Monsieur Tout le Monde. Il opère généralement sur des Simca Ariane ou Chambord mais ne dédaigne pas exécuter les mêmes exercices sur n’importe quel véhicule qu’on lui confierait. Et cela arrivait quelquefois ! Les exhibitions de Jean Sunny sont basées sur le calcul de l’équilibre et celui de l’adhérence au sol.
Il devient donc le roi des casse-cou automobile qui roule sur une voiture penchée à 80 degrés. Il fut le premier qui descendit les Champs Élysées avec deux roues en l’air. Il fut d’ailleurs champion du monde de la spécialité avec un parcours de 1,420 km sur une voiture sur deux roues. Le succès entraîne d’autres activités, il devient le cascadeur du cinéma français, on peut admirer ses prestations dans des films comme le Fantômas d’André Hunebelle en 1964.
Il se produit toujours dans ses « rodéos » où il pratique les dérapages, risque à tout instant le tonneau. À bord de sa voiture déséquilibrée, il ramasse un tas d’objets posés sur la route, du plus grand au plus petit : un casque, un coquetier, un mouchoir, un dé à coudre ! L’homme est heureux, détendu, désinvolte et affable, selon le journaliste Marcel Leclercq. Je me souviens l’avoir vu à Roubaix en 1961, c’était l’un des héros de mon enfance.
d’après Marcel Leclercq