Le dernier concert de Jacques Brel a lieu à Roubaix le Mardi 16 Mai 1967 dans la salle du Casino, place de la Liberté. Pour sa dernière tournée, Jacques Brel souhaite terminer par notre ville, car c’est dans le Nord qu’il a commencé sa carrière. Cela fait pourtant bien longtemps qu’il avait annoncé son intention de ne plus donner de galas sur scène. Mais Jacques a longuement envisagé avec calme et confiance, ce départ réfléchi et ce jour est arrivé à Roubaix.
Pour ce dernier concert, 2000 billets sont mis en vente. Monsieur Maes, directeur du Casino n’en revient pas. C’est un véritable raz de marée. Les 2000 tickets sont vendus en 30 minutes ! De nombreuses personnalités du spectacle sont présentes pour assister à cet événement : Bruno Coquatrix a quitté son Olympia et Eddie Barclay est venu spécialement de Cannes.
La place de la Liberté est envahie par les voitures des radios périphériques (RTL, Europe 1…), des photographes de grands hebdomadaires parisiens. Le public est venu de toute la France : Marseille, Bordeaux, Nantes …et bien sûr de Belgique : des fans acharnés qui ne veulent absolument pas rater l’événement : la dernière de Jacques Brel. Tout le public espère que ce ne sera qu’un faux départ, qu’il va changer d’avis et remontera sur les planches prochainement.
Jacques Brel entre en scène devant un public très ému et les 20 chansons interprétées prennent, en cette occasion, un accent particulier. Les titres se succèdent à un rythme rapide, tandis qu’il essuie d’un revers de main, son front ruisselant ; « Les Vieux, Madeleine, Jef, Le plat pays, Ne me quitte pas ». Les titres se bousculent. Le public hurle, trépigne, exige, comme si, cette folle nuit ne devait jamais se terminer. Les photographes mitraillent prennent des milliers de photos, les éclairs de flash éblouissent toute la salle du Casino.
Le spectacle se termine. Une vive émotion s’empare alors du public dans la salle, lorsque le rideau tombe. Tout le public se lève pour une « standing ovation » en criant « Encore Encore ! ». Malgré les rappels et les cris, Jacques ne revient pas sur scène. Personne ne réalise encore vraiment qu’il n’y remontera plus.
L’émotion est encore plus vive derrière le rideau, lorsque tout le monde reprend en choeur : « Ce n’est qu’un au revoir ». Dans les salles de rédaction, personne n’y croit encore. Jacques Brel n’est pourtant pas un de ces farfelus qui nous ont habitué à de fausses sorties publicitaires.
« La dernière » est toujours un spectacle émouvant. Ce n’est plus le chanteur seul qui a le trac, mais ses amis, les musiciens, les ouvreuses, les journalistes, les spectateurs. Tous savent qu’ils emportent avec eux, la dernière image d’un très grand Monsieur, le dernier salut de Monsieur Brel.
Cette fois, c’est bien fini. Bruno Coquatrix lui déclare alors : A 38 ans, on ne s’en va pas sur la pointe des pieds, avec le spectacle de ce soir, vous nous reviendrez encore, Monsieur Brel !
Mais non, Jacques a pris sa décision et c’est bien »la der des der ». La salle se vide, les lumières s’éteignent une à une. C’est fini.
Jacques Brel ne fera plus de concerts exténuants, mais ne prendra pas sa retraite pour autant. Il se tourne alors vers le théâtre où il crée la version francophone de « l’Homme de la Mancha », et surtout vers le cinéma où il enchaine les succès : « les Risques du Métier, mon Oncle Benjamin, l’Emmerdeur, l’Aventure c’est l’Aventure », et bien d’autres, jusqu’au début des années 1970.
Après avoir passé son brevet de pilote, il achète un avion bimoteur et un voilier pour son propre plaisir et part habiter aux îles Marquises. Gros fumeur, il est atteint d’un cancer du poumon. Jacques s’éteint à Paris en Octobre 1978 et repose au cimetière des Iles Marquises.
Remerciements aux archives municipales.