Sion frères

Au début du XX ème siècle, le siège social de l’entreprise Sion frères se situe au 113 avenue Jean Lebas à Roubaix. Une cinquantaine de personnes exclusivement féminines y sont employées .

Le 113 avenue Jean Lebas dans les années 1920 ( document D. Labbé bnr )
lettre 1925 ( document collection privée )

L’usine de production se trouve à Halluin au 16 rue Pasteur. L’entreprise a été crée par M. Sion, à Tourcoing, en 1867 et elle est dirigée par Paul et Jules Sion. Ce tissage fabrique de la doublure, des lainages et de la draperie simple. La vente se fait exclusivement aux grossistes.

Bobineuses à l’usine d’Halluin ( document ARPH )
Pub Sion frères ( document collection privée )

En 1935, la production à Halluin atteint son plus haut niveau avec l’emploi de 1.125 personnes. Les fabrications sont variées : draperies de laine, tissus de robe, de manteau, des doublures. Dans un grand atelier appelé « Le Maroc »,  on tisse uniquement les doublures en rayonne.

En 1947, les établissements Sion frères demandent un permis de construire à Roubaix pour un bâtiment sur trois niveaux au 113 avenue Jean Lebas, sur un terrain de 556 m2 au sol, appartenant aux hospices civils. La totalité des bureaux sur les 3 étages représentent alors plus de 1500 m2 avec une porte d’accès dans la rue arrière, la rue du chemin de fer. Le dossier est confié à l’architecte Marcel Forest à Tourcoing.

documents archives municipales
La façade en 1972 ( document archives municipales )

Peu à peu des changements dans les fabrications et la modernisation réduisent le personnel. Beaucoup de salariés quittent l’entreprise. Ceux qui partent en retraite ne sont plus remplacés. En 1960, on compte plus de 50 médaillés qui ont 30, 40 ans et plus, d’années de présence.

En 1967, l’usine Sion fête son centenaire, mais la crise du textile dans les années 1960 1970 détériore davantage la situation et l’activité s’arrête en 1979.

En Mars 1981 les services administratifs de l’hôpital de Roubaix trop à l’étroit à la Fraternité, s’installent dans les locaux du 113 avenue Jean Lebas qui leur appartiennent du moins, en partie. La direction générale, les services financiers et économiques, les services du personnel sont alors répartis dans ces locaux, ce qui représente 80 à 100 personnes.

document Nord Eclair

A la fin des années 1990, un promoteur immobilier, François Lefebvre, réalise le centre d’affaires Jean Lebas qui regroupe une vingtaine de sociétés et environ une centaine de salariés.

document Nord Eclair

document Nord Eclair

De fait, le centre d’affaires Jean Lebas apparaît comme une véritable locomotive dans le quartier de la gare de Roubaix. Ici et ailleurs, des initiatives privées ont d’ailleurs pris la même voie depuis.

Remerciements aux archives municipales et à l’ARP d’Halluin

Une partie de l’avenue Jean Lebas disparaît

Suite à l’incendie du 81 avenue Jean Lebas à Roubaix en 1978, une petite partie de l’avenue a déjà été rasée en fin d’année 1984 ( voir sur notre site, un article précédemment édité et intitulé le 81 avenue Jean Lebas ). Dans le prolongement de l’avenue, de l’autre côté de la rue Pasteur, on attaque désormais les façades suivantes de l’avenue Jean Lebas, du 93 au N° 99.

Plan cadastral
Du 93 au 101 avenue Jean Lebas ( document archives municipales )

Au N° 93 est installée l’entreprise Droulers, depuis les années 1930. Louis Droulers et Cie » ( L.D.C ) est une entreprise de bonneterie qui fabrique en particulier des tricots à la marque « Eldécé » Le bâtiment est important puisqu’il s’étale sur une partie de la rue Pasteur.

Papier à en-tête Droulers 1955 ( document collection privée )

Dans les années 1980, le garage Laudadio s’installe à la place de l’ancienne bonneterie fermée depuis la fin des années 1970. Le garagiste, agent de la marque Toyota part ensuite s’installer dans un autre endroit. L’immeuble est alors en ruines et même dangereux car il menace la sécurité des passants.

Le 93 avenue Jean Lebas ( document archives municipales )

La société Jean Mas et Cie se situe au N° 95. C’est une entreprise de transports qui propose de la messagerie, des déménagements, des services réguliers par route ou par chemin de fer. Jean Mas est adhérent du groupement Walbaum. L’entreprise ferme à la fin des années 1970.

Papier à en-tête Jean Mas 1975 ( document collection privée )

Le 97-99 de l’avenue a longtemps été occupé par le commerce de lingerie de Mme Lescrauwaet, puis par les vêtements de travail de Mme Rmaan à l’enseigne du « Pigeon Voyageur ».

le 97 et 99 ( document archives municipales )
Publicité ( document Nord Eclair )

Des permis de démolir sont accordés en 1996 et 1997 pour tous les immeubles en piteux état du 93 au 99 de l’avenue. La CUDL se rend acquéreur des lieux et fait place nette. Et comme le précise le journaliste de Nord Eclair : « Ce n’était pas un luxe ! »

document Nord Eclair

Les façades monumentales du 101 au 107 sont, quant à elles, en bon état. Elles sont préservées et rénovées. L’ensemble est donc transformé en 4 magasins et 10 logements pour étudiants. Une résidence de 31 logements, sera ensuite construite, le long de la rue des Champs.

documents archives municipales

La place libérée par la destruction des façades lépreuses de l’avenue Jean Lebas permet de créer un parking provisoire pour les automobiles, en attendant la construction de deux immeubles qui encadrent à présent l’esplanade du musée de la Piscine André Diligent.

document archives municipales
document Google Maps
photo BT

Remerciements aux archives municipales.

Chez Charly ( suite )

A partir des années 1990, Le restaurant n’ouvre que le midi en semaine. La salle de restaurant est petite, il n’y a que 10 tables, à cette époque la réservation est donc fortement conseillée.

Charly et Arlette choisissent de n’ouvrir que le midi afin de préserver leur vie de famille et garder du temps pour leur 2 enfants. Après avoir habité 10 ans au dessus du restaurant en 1982, ils décident d’habiter en dehors du restaurant et achète un appartement sur Roubaix.

La façade en 2008 ( document Google Maps )

Le métro arrive à Roubaix, à la fin des années 1990 et l’avenue Jean Lebas est fermée à la circulation durant plusieurs années. C’est une véritable catastrophe pour tous les commerçants roubaisiens qui enregistrent des baisses importantes de chiffre d’affaires allant jusqu’à 50 %. Le restaurant Chez Charly n’est pas épargné. Comme beaucoup de commerçants roubaisiens, ils font le dos rond pendant quelques années mais ils peuvent compter sur une clientèle fidèle.

L’Ordre des disciples d’Auguste Escoffier 1995 ( document C. Bacquaert )

En 1995, Charly Bacquaert est intronisé dans l’Ordre International des disciples d’Auguste Escoffier des Hauts de France. Auguste Escoffier a été surnommé le roi des cuisiniers et le cuisinier des rois. Charly devient secrétaire de l’association et ce, pendant plusieurs années.

les boiseries rénovées ( documents C. Bacquaert )

En 1998, Charly et Arlette décident de rénover les magnifiques boiseries de l’intérieur du restaurant. Ils apportent également des touches originales sur la décoration. Dans les années 2000, Charly Bacquaert devient professeur de techniques culinaires en BTS diététique à l’école Kienz de Marcq en Baroeul.

Charly part en Caroline du Nord en Octobre 2010, pour transmettre les techniques culinaires et savoirs aux élèves cuisiniers américains du Carteret Community College de Morehead City, en collaboration avec l’association des disciples d’Auguste Escoffier des Hauts de France. Les Chefs Nordistes participent à des challenges culinaires avec des élèves de l’Université américaine, qui viendront ensuite en France en tant que stagiaires.

En Mars 2011, Charly annonce dans la presse locale sa prochaine retraite, après 39 ans de bons et loyaux services. En additionnant les années d’apprentissage, Charly a 45 ans de métier en activité. Sa devise aujourd’hui : « On a vécu du restaurant, mais on n’a jamais vécu pour lui ». Cette philosophie a conduit Charly et Arlette à faire des choix : pas d’ouverture le soir, ni le week-end pour consacrer du temps à la famille.

« Je suis plus fier de mes 40 ans de mariage et de mes deux enfants que mes 39 ans de cuisine ! Pendant toutes ces années, nous avons partagé avec nos clients, ce sens de l’hospitalité que l’on trouve chez les gens du Nord ».

document Nord Eclair

Les deux enfants de Charly et Arlette ne souhaitent pas reprendre le flambeau pour continuer l’activité et prennent une orientation professionnelle différente. Le fond de commerce est alors cédé, un peu plus tard, en 2013. C’est de nos jours, un restaurant de type traditionnel : Il Bacaro.

Le restaurant Il Bacaro de nos jours ( Photo BT )

Charly a pris sa retraite, certes, mais il garde toujours un pied dans le métier. Il est occasionnellement juge lors de concours gastronomiques et continue à s’investir auprès d’associations regroupant des cuisiniers comme les Disciples d’Auguste Escoffier, l’Académie Nationale de Cuisine, les Chefs du Nord, en participant à de nombreuses démonstrations culinaires.

photos 2019 ( documents C. Bacquaert )

Remerciements à Charly et Arlette Bacquaert ainsi qu’aux archives municipales.

Le 81 avenue Jean Lebas

Au 81 de la rue de la Gare à Roubaix, se trouve une immense bâtisse, en face de la place des Martyrs de la Résistance, à deux pas de la rue Pasteur. L’immeuble est occupé par la famille Weill-Blin et Neveux dans les années 1910, puis par les successeurs Weill-Blin dans les années 1930. C’est un commerce de draperies et tissus. L’entreprise possède également une deuxième maison à Elbeuf et un bureau à Paris.

document collection privée

L’immeuble est très vaste. La façade de l’avenue Jean Lebas est impressionnante. La superficie est importante, puisque l’entreprise donne également sur l’arrière au N° 20 de la rue de l’Espérance.

vue aérienne 1953 ( document IGN )

Dans les années 1960, le bâtiment est occupé par les établissements Duburcq installés auparavant au 16 rue Nationale dans les années 1950. Ils reprennent l’activité de négoce de tissus et draperies.

Publicité Ets Duburcq

En Novembre 1978, un incendie se déclare dans l’entreprise Duburcq. Les concierges M et Mme Verdefroy qui habitent de l’autre côté, rue de l’Espérance, alertent les secours. En quelques heures, l’immeuble flambe sur toute la hauteur ( sur 4 étages ). Et pourtant les pompiers arrivés rapidement sur place n’ont rien négligé pour venir à bout du sinistre. Mais le déploiement important des moyens ( quatre grandes lances, la grande échelle, et cinq petites lances ) n’ont pu empêcher le désastre de prendre de graves proportions. Au petit matin, il ne reste quasiment plus rien de l’entreprise.

L’incendie en 1978 ( document Nord Eclair )

En Mars 1984, l’immeuble est resté dans le même état que 6 ans auparavant ! Au grand désespoir des voisins, comme cette dame de 76 ans qui habite à côté au N° 79. « C’est inadmissible, l’immeuble est resté dans l’état, les marchandises et matériaux sont restés sur place. Mon mur mitoyen est rongé par l’humidité, ma cage d’escalier est pourrie, et il se dégage des odeurs insupportables. Mon appartement est devenu invivable ».

document Nord Eclair 1984

Il semble que cette personne ait été entendue, puisqu’en Novembre de cette même année, une demande de permis de démolir est déposée, pour plusieurs bâtiments : le N° 81 de l’avenue Jean Lebas, le N° 20 rue de l’Espérance mais également les N° 3 5 7 et 9 rue Pasteur, maisons murées depuis bien longtemps.

Plan cadastral – La partie encadrée en rouge sera rasée ( document archives municipales )
Le 81 avenue Jean Lebas en 1984 ( document archives municipales )
Le 20 rue de l’Espérance en 1984 ( document archives municipales )

Le N° 3 de la rue Pasteur était occupé par Mr Keirsgieter cafetier, le N° 5 était inoccupé, le N° 7 par Chéri-Roussel, pédicure et l’ANPE Agence Nationale pour l’Emploi, était au N° 9

Les 3 5 7 et 9 rue Pasteur en 1984 ( document archives municipales )
le 9 rue Pasteur en 1984 ( document archives municipales )

Le terrain alors vierge, est destiné à créer la fameuse esplanade en vue de l’ouverture du prochain musée de la Piscine. La création de cette place entre l’ancien musée et le nouveau permettra alors de valoriser les lieux et d’en faire un élément marquant de l’avenue Jean Lebas pour le début des années 2000.

Le terrain vierge de l’avenue Jean Lebas à l’angle de la rue Pasteur ( document archives municipales )

Remerciements aux archives municipales

Chez Charly

Charly Bacquaert est né en 1949 à Wattrelos. Il est fils et petit-fils de boulanger et il rêve de devenir cuisinier pour toucher à tous les métiers de bouche. Après son apprentissage chez Alcide à Lille, il débute sa carrière comme commis à l’hôtel de la Poste à Avallon qui possèdait à l’époque trois macarons au guide Michelin, puis devient chef de partie au restaurant « Le Chouan » à Bruxelles puis au Buffet de la Gare de Valenciennes, 2 restaurants étoilés.

A 23 ans, Charly, fort de ses formations reçues auprès des différents chefs étoilés, se sent alors prêt pour créer son restaurant, avec son épouse Arlette, née Scipion.

le 127 rue de la Gare, au début du siècle ( document collection privée )

Leur choix se porte sur Roubaix. En 1972, ils reprennent le café «Jules» au 127 avenue Jean Lebas, à deux pas de la gare et des grandes maisons de vente par correspondance. Ce commerce a toujours été un estaminet et ce, depuis la création de l’avenue Jean Lebas. C’est un petit établissement, d’une surface au sol de 116 m2.

Plan cadastral

Au début des années 1950, le responsable de l’établissement crée une ambiance « Club » regroupant la clientèle aisée du patronat du textile roubaisien. Il devient alors un lieu de rendez-vous apprécié du tout Roubaix.La cave voûtée au sous-sol était composée de caveaux au nom de grands crus de champagne, la décoration intérieure dans le style « Art Nouveau » comme chez Maxim’s à Paris est exceptionnelle, faite de boiseries en acajou et de cuivre. Cette salle cosy à tout de suite attirée Charly et Arlette qui décide de transformer cet établissement en restaurant et démarre leur affaire en Décembre 1972.

la façade du 127 avenue Jean Lebas en 1972 ( document archives municipales )

L’enseigne choisie est « Chez Charly ». Leur idée de départ est de créer un endroit ou les clients aiment aller : un restaurant convivial et chaleureux, un lieu où l’on se sent comme chez soi, où l’on peut discuter affaires, mais également en dégustant une cuisine de qualité.

Charly Bacquaert au service au plat en salle en 1973 ( document C. Bacquaert )

La première année, Charly et Arlette proposent une cuisine régionale, des Waterzoï, des Potjevlesh. Le cadre du restaurant attirant une clientèle plutôt haut de gamme, ils changent alors de stratégie et décident de proposer une cuisine plus gastronomique mais faisant la part belle aux produits régionaux. Charly réinvente alors des recettes régionales. C’est le début d’une très grande aventure !

La devise de Charly et Arlette est « Manger bien, tout en restant léger ». Ils proposent donc une cuisine de contraste au niveau du goût et surtout au niveau des couleurs. Il est en effet impératif que l’oeil participe au plaisir du bien manger.

Intérieur du restaurant ( documents C. Bacquaert )

Le nom des plats originaux est très poétique : le ragoût d’artichaut et d’écrevisses, la charlotte d’anguilles de la Somme à la mousse de crevettes grises, le petit pâté chaud de saumon à la crème d’estragon, ou bien encore, le filet de bśuf à la moelle et au vin de Fleurie. La carte des vins est également exceptionnelle, car Charly a reçu une formation de son père, ancien représentant multi-cartes en vins fins.

Le succès est au rendez vous, leur restaurant « Chez Charly » devient un lieu incontournable de la restauration sur la ville, et même sur la région. Cinq ans après l’ouverture, il est cité au célèbre Guide Michelin.

guide Michelin

En 1982, Charly obtient le prix d’excellence de l’A.N.C Académie Nationale de Cuisine, ce qui lui permet de passer dans la presse locale et à la télévision régionale.

Charly en cuisine en 1984 ( document C. Bacquaert et publicité Nord Eclair )

Pendant la décennie 1980, Charly participe à de nombreux concours gastronomiques, et obtient ainsi de nombreuses récompenses. En 1983, il participe au championnat de France du dessert, le trophée Gaston Brule en 1984, finaliste national du prix culinaire Le Taittinger en 1988, finaliste du Meilleur Ouvrier de France 1990, en 1991 il obtient le trophée de l’académie des Glaces en créant la glace au caramel, et obtient une Toque au célèbre guide « Gault et Millau ».

Une Toque au Gault Millau

à suivre . . .

Remerciements à Charly et Arlette Bacquaert ainsi qu’aux archives municipales.

L’inauguration du monument Jean Lebas

Jean Lebas est né en 1878 à Roubaix. Socialiste membre du SFIO, il est élu maire de Roubaix en 1912. Il devient conseiller général, député du Nord, président du conseil général du Nord, ministre du travail, ministre des PTT. Héros et martyr de la résistance, il décède en déportation en 1944.

Jean Lebas ( document collection privée )

En début d’année 1949, la municipalité décide d’ériger un monument financé par souscription publique, à la mémoire de Jean Lebas. Le monument est situé sur le terre-plein central du boulevard Gambetta, avec d’un côté, la place de la Liberté et de l’autre, la rue de Lannoy. Ce mémorial frappe le regard de tous ceux qui entrent dans notre ville. Ceux-ci ne manquent pas de remarquer l’importance de cette colonne et se rendent compte immédiatement de l’hommage rendu à Jean Lebas par la ville et la France.

le monument boulevard Gambetta ( document collection privée )

L’auteur du monument est bien connu. Il s’agit de Mr Dejaegere, qui a obtenu le grand prix de Rome. C’est un mémorial imposant. Son symbolisme est éloquent : un pilier haut et lourd qui représente l’oeuvre écrasante du maire défunt. Le monument est à la fois important et léger d’aspect. Deux statues latérales flanquent la colonne et le buste de Jean Lebas.

document collection privée

A l’arrière, une troisième statue représente un ouvrier qui, muni de ses outils, symbolise véritablement le travail et la reconnaissance de la population à celui qui fut Ministre du Travail, ardent défenseur des travailleurs.

document collection privée

L’inauguration du monument Jean Lebas a lieu un dimanche, le 23 Octobre 1949, en présence d’une foule immense, de Mme Jean Lebas et sa fille Marcelle et de très nombreuses personnalités politiques. Victor Provo successeur et disciple du grand disparu décide de se recueillir le matin même, au monument des martyrs de la résistance et au monument aux morts avant d’assister à la cérémonie en début d’après midi.

L’inauguration ( document Nord Eclair et archives municipales )

La foule est immense, le boulevard Gambetta et la place de la Liberté se noircissent de monde. Environ 8000 personnes sont présentes. Les emblèmes d’une cinquantaine de sociétés locales entourent le monument.

Après l’impressionnante « sonnerie aux morts » de la clique dans un silence très respectueux, le voile symbolique tombe et on découvre le monument. Victor Provo s’avance alors, pour fleurir la stèle.

Victor Provo à la tribune devant Mrs Mayer, Pluquet, Sory, Laurent et Bondt ( document archives municipales )
Victor Provo ( document archives municipales )

A la fin de la cérémonie, trois personnes prennent la parole : Victor Provo maire, fortement ému, puis Augustin Laurent, président du Conseil Général du Nord, suivi de Mr Daniel Mayer, ministre du travail. Tous sont unanimes, ils saluent l’oeuvre et l’esprit du défunt, sa personnalité forte, robuste, courageuse et tenace. Une carrière qui atteignit les plus hauts sommets de l’héroïsme, de la gloire, du martyr.

( document collection privée )

En 1990, le métro arrive à Roubaix. L’interconnexion bus-mongy-métro doit être installée à l’emplacement précis du monument. Il va donc devoir être déplacé. (voir sur notre site, un précédent article édité et intitulé : le déplacement du monument )

Remerciements aux archives municipales

Le déplacement du monument

C’est en juin 1990, qu’on apprend le déplacement imminent du monument de Jean Lebas, pour cause d’aménagement de l’interconnexion bus Mongy métro, qui sera installée à proximité de Motte-Bossut. La future station de métro Roubaix 2000 sera la première à être achevée sur le territoire roubaisien. La CUDL demande donc à la mairie de déplacer le monument. Il n’est pas question de détruire, juste déplacer, mais où ?

L’emplacement initial CP Méd Rx

En juin 1945, la notification officielle du décès de Jean Lebas parvient à Roubaix. Le député maire de la ville, ancien ministre, est mort d’épuisement au camp de Sonnenburg en Prusse Orientale, où il était retenu prisonnier. En 1948, un comité a recueilli des fonds pour l’érection d’un monument à sa mémoire. Ce monument se dressera à l’entrée du boulevard Gambetta, à proximité de la Place de la Liberté. Comme la semelle qui supportera le mémorial fait vingt mètres de long sur douze de large, il faudra modifier la configuration du boulevard. A cette époque, le boulevard Gambetta est encore constitué d’une chaussée centrale avec deux terre-pleins latéraux, plus deux bas côtés pavés de 9 mètres de large. Il faudra donc modifier le profil du boulevard, qui aura désormais deux chaussées latérales avec un terre-plein central. Les chaussées pavées seront supprimées. On envisage d’ores et déjà la construction d’un nouveau pont pour relier le boulevard Gambetta avec la place Chaptal. Le réaménagement de la partie du boulevard entre la place de la Liberté et la rue Pierre de Roubaix entraînera une déviation par la rue Bernard (aujourd’hui rue Jules Watteuw) pour les véhicules allant vers le canal.

Configuration initiale du boulevard CP Méd Rx

En janvier 1949, après que le boulevard Gambetta ait été modifié, la construction du monument démarre et on prévoit l’inauguration le 1er mai. L’auteur de l’œuvre est le sculpteur roubaisien Albert Dejaeger, grand prix de Rome, et la Maison Ferret marbrier, 210 Grand-rue, spécialiste de la belle pierre, est chargée du chantier. L’ensemble représente une colonne de douze mètres sur laquelle se trouve le buste de Jean Lebas, vers lequel deux statues allégoriques la France et Roubaix élèvent leurs bras désespérés. Derrière la colonne, une autre figure symbolique représente un ouvrier en tenue de travail. On peut lire sur la colonne qui était Jean Lebas, quel rôle il a joué pendant les deux guerres mondiales. Ce monument est finalement inauguré le 23 octobre 1949, et l’on craint déjà que les inscriptions qui sont en bronze métal, s’oxydent et que le vert de gris se délaie sous l’action de la pluie, en coulées salissantes. Deux ans plus tard, les corps de Jean Lebas et de son fils seront ramenés à Roubaix.

Démontage, numérotation, remontage Photos Nord Éclair

La CUDL avait prévu de démonter le monument, de le stocker pendant trois ou quatre ans, soit la durée des travaux du métro, et de le remonter une fois les travaux terminés. Les roubaisiens ne sont pas d’accord, pour des raisons sentimentales, mais aussi financières. Le coût de l’opération se monte à 50 millions de centimes, et il sera pris en charge par la CUDL, si on le remonte tout de suite. Il faut donc trouver un emplacement de manière urgente.

Après concertation avec le Parti Socialiste, plusieurs propositions sont émises : le mettre à hauteur de la rue Henri Dunant, mais c’est encore trop près de l’installation métro. Le situer à l’angle de la rue Pierre de Roubaix et du boulevard Gambetta près de la Caisse d’Allocations Familiales, sur un terrain lui appartenant. On mettra là un chapiteau de l’ancien hospice Blanchemaille. Autre emplacement proposé : avenue des nations unies sur un terrain situé face au centre d’action sociale  On propose place de la gare, au dessus de la station qui s’appellera aussi Lebas, mais cela masquerait la gare, et la place est trop petite. On parle du Rond Point de l’Europe…Mais on va rester sur le terre plein du boulevard Gambetta, à hauteur de la CAF. Le monument sera retourné vers le pont qui permet d’accéder à Wattrelos.

Le monument Lebas aujourd’hui

En juillet,  l’entreprise Cazeaux de la Chapelle d’Armentières est chargée de démonter, et de numéroter les morceaux du monument. Le monument Lebas est désassemblé comme ces châteaux écossais achetés par des milliardaires américains, dit la presse. Dès octobre, on reconstruit…