Teinturerie Lenfant

(suite de l’article précédemment édité et intitulé :Henri Delecroix)

Entre temps, Henri Delecroix a cédé son entreprise au fils de Louis LENFANT, le dernier tisserand à l’ « otil » de la rue du Calvaire, Rémy Lenfant. Celui-ci avait initialement créé une teinturerie à Willems au lieu dit « Le Robigeux », 32 rue d’Hem, en 1911. Il s’y occupait des écritures, son beau-frère Jules FONTAINE, était chargé de la clientèle, et Albéric PARENT y était technicien teinturier. Il abandonne donc l’activité brasserie de son prédécesseur pour rouvrir une teinturerie à Hem.

CPA de la 1ère teinturerie Rémy Lenfant à Hem ( Document collection privée)
Courrier de la teinturerie en 1929 (Document Historihem)

Dans les années 1920, Rémy Lenfant achète également 1.100 mètres carrés de terre agricole dans l’avenue de la Gare (actuelle avenue Delecroix, après s’être également appelée rue de la Place) et y construit sa résidence, presque en face de sa nouvelle usine, située dans la rue du Rivage, laquelle bien que prenant sa source dans l’avenue lui est presque parallèle.

Photo aérienne de la propriété en 1933 et en 2022 (Document IGN et Google Maps)
Photos de la maison de maître (Documents Historihem et Google Maps)

On retrouve la teinturerie « Remy Lenfant et Cie » dans l’annuaire dès 1923. L’ usine ayant brûlé en 1940, à l’exception des bâtiments situés en bordure de rue, est reconstruite après 1946 grâce aux indemnités perçues pour les dommages de guerre. A la fin des années 40, Rémy Lenfant possède également une usine au 45 rue Jules Guesde à Roubaix.

Vue aérienne de l’usine de Roubaix en 1951, et en 2022 le magasin Lidl à son ancien emplacement (Documents IGN et Google Maps)

L’usine de Hem pratique le blanchiment, l’apprêt et la teinture sur bobines et sur écheveaux des fils de laine, de lin, de coton et de fibres synthétiques ainsi sur les articles non confectionnés. L’activité de teinturerie des tissus reprend en 1951 et celle des fils vers 1970.

En-tête de facture de 1955 (Document Historihem) et en tête d’enveloppe (Document collection privée)
Publicités de l’entreprise dans les années 60 (Documents Historihem et collection privée)
Vue aérienne de la teinturerie dans les années 60 (Document Historihem)

L’entreprise puise sa force dans son évolution constante au fil des décennies : dans les années 1950 la teinturerie se spécialise ainsi dans les revêtements de sièges et tissus d’ameublement. Puis 10 ans plus tard elle réalise des investissements lourds avec achat d’autoclaves pour teindre le fil.

Dans les années 1970-80, les investissements continuent et la teinture des rubans, ceintures et fermetures éclair débute. Puis dans les années 1990, l’usine s’ouvre à de nouveaux marchés avec la teinture de vêtements finis ou semi-finis, sans pour autant abandonner les tissus d’ameublement, fils et rubans.

Vues de l’usine en 1992 (Document Historihem) et publicité (Document collection privée)

A cette époque, l’entreprise est gérée par Jean-Pierre Lenfant et Géry Fontaine, les arrières petits fils des fondateurs. Ils emploient 14 personnes alors qu’avant 1940, les salariés étaient une cinquantaine. L’eau, pompée à 18 mètres dans le forage de la brasserie en 1910, est pompée, dès lors, à 160 mètres de profondeur.

Vues de l’usine de l’extérieur (Documents Google Maps et Historihem)
Vues des ateliers (Documents Historihem)

Dans les années 2000, la teinturerie Lenfant est titulaire du label Nord Terre Textile et a réalisé un important programme d’investissement dans une rame en grande largeur (3m20) qui lui permet de diversifier ses services aux clients et de renforcer encore la qualité. Le dirigeant de l’entreprise est désormais Jérôme Lenfant et François Fontaine est administrateur.

Logo et publicité de l’entreprise des années 2000 (Document site internet)

Remerciements à l’association Historihem, André Camion et Jacquy Delaporte pour leurs ouvrages Hem d’hier et d’aujourd’hui et Hem 1000 ans d’histoire ainsi qu’à Jacquy Delaporte, Christian Teel et Chantal Guillaume  pour leur bande dessinée Au Temps d’Hem

Les tribulations d’une fontaine

Roubaix se développe d’une manière considérable au dix neuvième siècle. Pour faire face aux besoins en eau grandissants de l’industrie, on décide de puiser dans la Lys. Les travaux sont mis en route et aboutissent en 1863. Pour fêter l’événement, on construit une fontaine sur la Grand-Place. Œuvre de M. Iguel, elle a pour sujet les trois grâces et comporte plusieurs vasques superposées. On choisit le 15 Août, fête de l’empereur, pour l’inaugurer, et on en profite pour faire une grande fête. Une grande banderole à la gloire de Napoléon III pavoise la mairie, et on assiste à des réjouissances populaires qui durent plusieurs jours. La fontaine est placée en face de la mairie au débouché de la rue Neuve.

La fontaine sur la Grand-Place avant percement de la rue de la Gare

Son emplacement devient gênant pour la circulation du fait du percement de l’avenue de la gare et il est décidé de la déplacer. Selon Nord Eclair, un premier déménagement, la placerait en 1874 sur le square Notre Dame, à l’emplacement actuel de l’école des beaux arts. Elle y resterait jusqu’à la suppression du square en 1882. On pose alors au carrefour du boulevard Gambetta et de la rue du Moulin le 20 mars 1883, dans le but d’orner l’entrée de Roubaix.

La fontaine à l’entrée du boulevard Gambetta, aujourd’hui Leclerc

Elle semble avoir trouvé là une place définitive et, au fil des années, elle finit par disparaître sous une végétation envahissante. On note qu’à l’époque une bonne partie du carrefour était simplement empierré, la zone pavée passant au large de la fontaine.

Mais, cette malheureuse fontaine doit de nouveau émigrer en 1924. Il lui faut faire place au monument aux morts. On la démonte pour la réinstaller, quelques centaines de mètres plus loin sur le boulevard, en face de l’hôtel des Postes.

Notons les moyens rudimentaires de manutention de l’époque…

La fontaine devant l’hôtel des postes.

Notre fontaine reste là jusqu’en 1955, mais, placée au débouché direct de la rue du Coq Français, elle est une nouvelle fois victime des aménagements pour faciliter la circulation : On la démonte une fois de plus. Au cours de ce démontage, le bassin se fissure et la fontaine est déclassée et disparaît de la voie publique roubaisienne.

Le monument d’Alexandre Descatoire

Mais le carrefour de la rue Jean Moulin n’est pas resté sans ornement : Un monument aux français morts pour la grande guerre, œuvre d’Alexandre Descatoire, prend sa place en octobre 1925. On peut penser que les choses en resteront là, mais, malheureusement, il s’avère qu’il gêne lui aussi la circulation. C’est son tour d’être déplacé. Il sera reculé d’une centaine de mètres sur le boulevard du Général Leclerc…Mais ceci est une autre histoire…

Documents médiathèque de Roubaix et archives municipales