Novembre 1902

Cyclisme. Les amnisties de l’Union Vélocipédique Française. À l’occasion de son congrès annuel, l’UVF a amnistié de toutes pénalités un certain nombre de vélodromes. Ainsi le vélodrome lillois disqualifié depuis 1900 pour des raisons d’ordre financier, le vélodrome d’Arras puni d’une amende pour avoir laissé courir des amateurs non licenciés, et le Vélodrome de Roubaix qui se voit dégagé d’une amende de 100 francs relative à son fonctionnement.

En tête du bulletin de l’UVF doc Gallica

Football. Les résultats des sociétés de l’U.S.F.S.A. Le RCR bat l’Olympique lillois par 3 bus à 2 après une belle partie. Le RCR bat le Sporting Club Tourquennois, 6 buts à 3.

Football. Les résultats des sociétés libres. Le match opposant l’Olympique Roubaisien et le Football Club Tourquennois a pris fin après 35 minutes de jeu, le FCT refusant de continuer à jouer après un regrettable incident. L’O.R. menait 2 à zéro. L’Iris Club Roubaisien rencontrait l’Étoile Roubaisienne et a remporté le match par 3 buts à 1. Le Club Sportif Roubaisien a battu le Sporting Club Roubaisien par un but à zéro, après une partie animée et une belle défense du CSR.

Cross Country. Premier entraînement de la saison de cross country au Racing Club Roubaisien, sur 5 kilomètres. Vainqueur Honorez en très grande forme, il court en 19’30, laissant son second Becquerel à plus de deux minutes.

Hockey sur gazon. Une partie opposait le RCR au Sporting Club Tourquennois, qui s’est terminée par un match nul 4 à 4, après un match très intéressant sur le terrain de Beaumont.

Antwerp FC le plus ancien club de Belgique

Football. Le challenge international du Nord. Il est organisé comme chaque année par le Sporting Club Tourquennois et ouvert à tous les clubs français et étrangers reconnus par l’Union des Sociétés Françaises de Sports Athlétiques (U.S.F.S.A). Les demi-finales et la finale se joueront sur le magnifique terrain de la rue de Dunkerque. Pour cette septième édition, voici les équipes présentes : l’Antwerp FC détenteur du Challenge, le Racing Club Roubaisien, champion de France, le Standard Athlétic-Club, le Racing-Club de Bruxelles, le Football-Club Liégeois, l’Union Saint Gilloise, l’Union Sportive Parisienne, la Nationale de Saint Mandé, le Football Club Courtraisien, le Cercle Sportif Brugeois, le Daring Brussels Club, l’Olympique lillois, l’Union Sportive de Calais et le Sporting Club Tourquennois.

Football. Résultats Championnats du Nord : le RCR bat l’Iris Club Lillois par 9 buts à 3. L’Olympique lillois bat le Stade Roubaisien par 3 buts à 2. Du côté des sociétés indépendantes, l’Iris Club de Roubaix bat le Sporting club roubaisien par 2 buts à 0. L’Olympique Roubaisien a battu le Football Club Courtraisien par 2 buts à 0.

Lutte. La fête de l’union des sports de Roubaix a accueilli un public nombreux. Le travail athlétique de MM. Bulteau, Desbouvries et Kochler et les exercices classiques de MM. Briche et Vanhuysse ont été très applaudis, de même que le travail aux anneaux de M. Liévens. Pour les numéros de lutte, le professeur Boghaert a tombé Vanhuysse par une ceinture avant après 18 minutes de lutte intéressante.

Croquis du Journal de Roubaix 1902

Cyclisme. La concurrence parisienne a été fatale aux pistes de province. Ainsi le vélodrome de Roubaix avait bien commencé par la course Paris Roubaix, avait bien continué par une belle rencontre entre Jacquelin et Ellegaard, le premier ayant remporté le Grand Prix de Pâques. Puis le vélodrome roubaisien se contenta de continuer la saison par des réunions évidemment intéressantes mais point sensationnelles. Pourquoi ? Les coureurs tout simplement attendent à Paris dans leurs cabines celui des deux vélodromes parisiens qui resterait le plus offrant et le dernier enchérisseur.

Un défi roubaisien au jiu-jitsu

Le 26 octobre 1905, un combat organisé par le journal l’Auto opposait le boxeur Dubois sur la terrasse des usines Védrine à Courbevoie au professeur de jiu-jistu Ré-Nié, lequel a eu raison de son adversaire en 29 secondes. Les critiques ne manquent pas : le célèbre professeur Charlemont niait les qualités de M. Dubois et disait à qui voulait l’entendre qu’il n’était pas qualifié pour représenter l’école française. Théodore Vienne, le directeur de l’Éducation Physique, reproche à Charlemont de ne pas avoir relevé le défi du jiu-jistu, lui qui est un champion, et de ne pas monter sur le ring pour affronter Ré-Nié.

Le professeur Ré-Nié tel qu’il apparaît dans son livre Coll particulière

Mais qui est donc ce Ré-Nié et ce nouveau sport qui nous arrive d’extrême orient ? Le professeur Ré-Nié, de son vrai nom Ernest Régnier, enseignant et pratiquant de Jiu-jitsu, ayant une école à Paris, est célèbre pour avoir défié les pratiques de combat d’Europe dans le but de prouver la supériorité du Jiu-jitsu sur les autres pratiques à mains-nues. Il a écrit un ouvrage intitulé les secrets du jiu-jitsu dans lequel il présente ce nouveau sport venu du Japon et qu’il espère voir figurer bientôt aux côtés de la boxe française et de la boxe anglaise. Jiu-jitsu signifie « Brise-muscles » et il est le sport national japonais depuis plus de deux mille ans. Il peut être défini comme l’art de combattre et de vaincre la force brutale par la vitesse et l’habilité musculaire1 C’est après la guerre en Mandchourie qu’il a été introduit en Angleterre, aux États Unis et en France, nations qui ont permis par leur médiation que les russes vaincus par les japonais obtiennent un armistice, qui précède le traité de paix signé le 5 septembre 1905 à Portsmouth. La découverte du jiu-jitsu par le monde occidental est donc toute récente, et c’est un nouveau sport qui vient de faire son apparition.

Le jiu-jitsu vu par le Journal de Roubaix

Ce premier combat victorieux avec le champion Dubois lui fait une bonne publicité mais rencontre le scepticisme des champions français de l’époque.

Un défi roubaisien

Le champion de Jiu-jitsu Ré-Nié, directeur de l’école japonaise de jiu-jitsu de Paris rue de Ponthieu 55bis à Paris, reçoit un courrier de la part de Paul Boghaert champion athlétique de France depuis le concours d’Issy les Moulineaux en 1903, et vainqueur de divers concours de lutte libre. Cette lettre datée du 27 décembre 1905 l’informe que le mystérieux jiu-jitsu n’a pas convaincu le champion de lutte libre qui affirme s’entraîner avec ardeur, persuadé que la méthode du jiu-jitsu basée surtout sur l’agilité devra baisser pavillon devant la lutte libre. Et il propose un match avec l’enjeu qu’il plaira à son futur adversaire. Une seule condition, que cette rencontre ait lieu à Roubaix, la province pouvant bien pour une fois prendre sa revanche sur la capitale.

Boghaert, le challenger roubaisien doc JdeRx

Un défi crânement lancé, commente le Journal de Roubaix. Le défi est relevé et le professeur Ré-Nié exige un enjeu de 3.000 francs ! La réponse est parue dans l’Auto du 1er janvier. Le champion Boghaert est estomaqué par la somme qui ne se trouve pas journellement sur un tapis de lutte. Il pensait dans un premier temps se récuser mais des amis, partisans convaincus de la lutte libre, ont bien voulu appuyer le projet. La somme est donc réunie et sera déposée au journal l’Auto. Il est bien entendu que le match ne prendra fin que sur la demande de l’un des adversaires, suivant un règlement préalablement établi et devant un jury composé de trois personnes et désigné d’un commun accord.

Les avis et le combat

Le Journal De Roubaix consacre un article à la présentation du jiu-jitsu dans son édition du 28 janvier. On apprend que le match aura lieu à l’Hippodrome roubaisien le 3 février pendant une exhibition comme Roubaix sait en organiser. Le 2 février, on procède à la présentation des combattants : Ré-Nié a 36 ans, pèse 63 kilos et mesure 1 mètre 65, il a appris le jiu-jitsu avec les maîtres japonais Yukio-Tani et Miyaki. Il fut auparavant champion de lutte gréco-romaine (amateurs) champion de catch en Angleterre. Son challenger roubaisien est Paul Boghaert le lutteur roubaisien bien connu, si connu que le Journal de Roubaix en oublie de donner ses mensurations.

L’Hippodrome de Roubaix, lieu du combat doc BNRx

De l’avis de Jean Desruelles qui a vu travailler Ré-Nié, il l’a trouvé vif et agile, et il pense que s’il peut amener Boghaert au tapis, le roubaisien ne se relèvera pas. Le combat sera mené rapidement et ne durera peut-être que quelques secondes. Louis Delescluse, le dévoué chef moniteur de la Jeunesse Sportive du Blanc Seau, sera l’arbitre de la rencontre. Il connaît bien Paul Boghaert pour avoir été son professeur de lutte libre. Pour lui, s’il ne se laisse pas impressionner, il possède suffisamment de force et d’agilité pour triompher de son adversaire.

Ré-Nié croqué par le JdeRx

Finalement le match se déroulera en faveur de Ré-Nié, malgré la résistance et les attaques incessantes de Boghaert qui sera vaincu en 5 minutes et 21 sec sans avoir démérité. Une prise irrésistible sur la carotide lui fit crier grâce. Il sera le vainqueur moral de ce combat, mais le jiu-jitsu avait fait ses preuves !

1D’après les secrets du jiu-jitsu page 22