Le Parking

Au début du 19ème siècle, l’actuelle avenue Henri Delecroix n’est qu’un chemin pavé qui d’une part relie tout droit le château Six à l’église Saint Corneille et d’autre part continue quasiment à angle droit pour devenir le chemin de Hem à Forest. A la fin du siècle la partie coudée est une partie de la route départementale de Saint Amand à Roubaix, tandis que l’autre partie devient l’avenue du Château, rebaptisée ensuite avenue de la Gare début 20ème.

Vue aérienne de l’avenue de la Gare de la place d’Hem à Forest en 1933 (Document IGN)

En effet, le chemin de fer de Tourcoing à Somain la traverse à hauteur du Rivage dans les années 1880, avec un passage à niveau et une halte implantée au point dit « Ronde du Château ». On trouve son appellation actuelle sur un plan de 1953 et elle sera quelques peu modifiée par la création de l’antenne Sud. En effet en 1984, un carrefour sera aménagé en vue de l’implantation de feux tricolores avant la construction d’un giratoire 4 ans plus tard.

CPA de la « gare » prise vers Forest (avec les colonnes du château Six au fond) et de la halte prise vers le centre d’Hem au début du 20ème siècle (avec au fond l’église Saint-Corneille) (Documents collection privée)

Comme le montre la carte postale ci-dessus 2 estaminets sont installés de part et d’autre de la route menant vers Hem afin que les voyageurs puissent se désaltérer : A l’Arrêt de Hem, tenu par J. Lefebvre, sur la gauche et l’Estaminet de la Gare sur la droite. Il reste en effet du chemin à faire à travers champs avant d’atteindre le centre du village.

Ainsi qu’on le voit également sur les deux cartes postales suivantes, hormis les 2 estaminets il y a très peu de bâtiments proches de la halte, aucune gare n’ayant été attribuée à la commune mais un simple arrêt de chemin de fer. Le seul bâtiment qui apparaît nettement avant la barrière est celui qui abrite les forgerons de la famille Roger (père et fils).

CPA de la halte vers Hem, avec barrière fermée ou ouverte (Documents collection privée)

L’Estaminet de la Gare est ouvert en 1887 par Louis Leclercq et repris par Séraphin Debraussere l’année suivante. L’établissement appartient à la brasserie Leclercq et on y achète également des billets de train. L’installation du tissage d’Henri Duprez en 1928, du 48 au 52 de la rue, juste en face de l’estaminet amène sans doute de nouveaux clients. Quant à la ligne de chemin de fer, elle est fermée en juillet 1939 à la veille de l’avènement de la seconde guerre mondiale.

Au cours de celle-ci, le garde barrière Louis Marga, né en 1900, s’illustre dans la résistance, après avoir été soldat lors de la première guerre mondiale alors qu’il était ouvrier des chemins de fer. Il organise ainsi le passage de deux soldats français évadés vers la zone libre puis fin 1942 rejoint le réseau de résistance du War Office avant de se rapprocher du mouvement de résistance Voix du Nord.

Fin 1943, il appartient au Groupe d’Ascq, qui procède à des actions de sabotage. Il place ainsi des explosifs sur la voie ferrée, et participe au déraillement d’un train militaire allemand à Ascq, acte qui entraîne une répression sévère. Il est arrêté par la Gestapo de Lille où il réside alors, interné à la prison de Loos, condamné à mort par le tribunal militaire allemand et exécuté au fort de Seclin au lendemain du débarquement.

Louis Marga et sa femme avant la guerre à la halte de Hem ( Document collection privée)

En 1950, la municipalité décide de rendre hommage à Henri Delcroix, député-maire de la ville pendant un quart de siècle, et à l’origine de nombreuses réalisations : œuvres sociales et projets d’urbanisme, ayant contribué au bien-être de la population hémoise, décédé en avril 1939. C’est l’avenue de la Gare qui est choisie pour porter son nom. L’inauguration a lieu le 1er mai 1950, en présence de nombreuses personnalités et sous la présidence de Jean Leplat, maire de Hem.

Changement de nom de l’avenue de a Gare en 1950 (Document Nord-Eclair)

Dans les années 1940 à 1960, on ne trouve plus trace de l’ancien estaminet de la gare puis en 1961, un cafetier apparaît au 51, avenue Henri Delecroix à savoir O. Canfin suivi de Mme Cl. Cappèle en 1965 jusqu’en 1970, et, en 1971, c’est le café Au Parking qui y est répertorié.

L’ancien Estaminet de la Gare et le 51 avenue Henri Delecroix en 2008 (Document collection privée et Google Maps)
Vue aérienne de l’avenue en 1962 (Document IGN)

A suivre…

Remerciements à l’association Historihem.

Les banques de l’avenue Jean Lebas (Suite 1)

Plus loin vers la gare, au n°22-24 de l’avenue, se trouve le Crédit du Nord, qui traite toutes opérations de banque et de fonds publics. Cette banque a son siège social à Lille, une succursale à Roubaix et des comptoirs à Croix et Lannoy.

Publicités du Crédit du Nord au n°22 de l’avenue Jean Lebas en 1914 (Document Ravet-Anceau et collection privée)

L’immeuble, qui abritait auparavant l’entreprise de broderies artistiques de Mme Fievet Mille, est alors bien intégré dans l’architecture générale de la rue comme on peut le voir sur une photo de la presse locale. Il est en effet dans un style conforme à tous les magnifiques bâtiments qui la bordent.

Publicités de Mme Fievet Mille et façade du Crédit du Nord dans l’immeuble d’origine au n°24 (Document Nord-Eclair)
Croquis et plans du rez-de-chaussée avant et après 1959 (Documents archives municipales)

Pourtant, en 1959, le Crédit du Nord cède aux sirènes de la modernisation et construit, en lieu et place de l’ancien immeuble, et après avoir racheté et démoli les maisons voisines, un horrible bâtiment à la façade bétonnée qui défigure l’ensemble de la rue.

Une photo de 1989 montre ainsi clairement le contraste entre le Crédit du Nord et l’immeuble voisin d’origine. C’est à cette même adresse que la banque demeure jusqu’à la fin des années 2000. Puis le bâtiment reste inoccupé avant d’accueillir un club sportif à l’enseigne Basic Fit.

Publicités du crédit du Nord en 1947, 1968 et 1975 (Documents Ravet-Anceau)
La façade du n°24 en 1989, 2008 et 2023 (Documents archives municipales et Google Maps)

En retraversant l’avenue on arrive au n°33 immeuble de caractère où se situe dès les années 1910 la Banque Scalbert. C’ est un établissement du Nord de la France fondé par Auguste Scalbert qui fusionne en 1976 avec la banque Dupont fondée dans le nord par Louis Dupont. La Scalbert-Dupont compte alors 154 agences.

La banque Scalbert en 1910 (Document BNR)
Publicités de la banque (Documents collection privée et Nord-Eclair)

En 2006, la Scalbert-Dupont est absorbée par le groupe CIC (Nord-Ouest) qui, dès les années 1920, avait pris une participation dans chacune des 2 banques nordistes d’origine. Depuis 1910, la façade de l’immeuble n’a guère changé si ce n’est la disparition des 2 colonnes d’origine encadrant l’entrée et supportant la grille, toutes deux disparues.

Façade de la Scalbert-Dupont dans les années 1970 et de nos jours (Document archives municipales et Google Maps)
Publicité de la Scalbert-Dupont groupe CIC (Document collection privée)

En remontant encore l’avenue vers la gare, sur le trottoir d’en face, on trouve un autre exemple du même ordre avec la Société Générale installée au n°40. Cette agence, qui a également des bureaux à Tourcoing et Croix, fait aussi escompte et opérations de bourses, et possède un service de coffres-forts. Elle a investi un magnifique immeuble de caractère comme le montrent deux cartes postales du début du siècle.

Publicités d’époque de la Société Générale (Documents collection privée)
Cartes postales de la façade initiale (Documents collection privée)

Comme le Crédit du Nord cependant, l’agence a elle aussi recours à une modernisation de sa façade en 1961 après rachat du 38 bis. Si les étages ne sont pas touchés le rez-de-chaussée est quant à lui bétonné. Ses publicités se modernisent également au fil du temps. En 1981, un guichet automatique très novateur est installé dans le passage menant à la rue Nain afin que la clientèle puisse y effectuer ses retraits sans descendre de voiture.

 

Croquis ancienne et nouvelle façade (Document archives municipales)
Le nouvel immeuble dans les années 1980 (Document archives municipales)
Publicités de 1928, 1965 et 1975 (Documents Ravet-Anceau et collection privée)
Installation du guichet automatique en 1981 (Document Nord-Eclair)

Dans les années 2010, l’agence roubaisienne de la société générale quitte l’avenue Jean Lebas pour gagner des locaux plus petits, lumineux et modernes, construits en lieu et place d’une institution roubaisienne à savoir le Palais du Vêtement, sur la Grand Place de Roubaix. Sa nouvelle adresse devient le 1-3 Grande Rue à Roubaix. Quant au n°40 avenue Jean Lebas, il abritera après quelques temps divers cabinets médicaux.

La Société Générale avenue Jean Lebas en 2013 et 1-3 Grande Rue actuellement (Documents Google Maps)

En remontant encore vers la gare, un autre édifice abrite une banque dès le début du siècle. Il s’agit du n° 57-59, immeuble de style, et du Comptoir National d’ Escompte de Paris dont le siège se situe dans la capitale et qui possède également une agence à Tourcoing. Cette banque propose toutes opérations de banque et de bourse.

La façade du Comptoir National d’Escompte de Paris (Document collection privée)
Publicités de 1928 et 1955 (Documents Ravet-Anceau)

En 1962, le Comptoir dépose une demande de permis en mairie pour transformation et aménagement d’un immeuble à usage de banque. Il s’agit alors d’une mise en conformité du bâtiment existant aux normes d’hygiène et de sécurité, notamment avec l’installation d’une sortie de secours sur la rue de l’Espérance. Le plan joint à la demande donne une idée de l’aménagement intérieur du rez-de-chaussée où le public est reçu.

Plan joint à la demande de permis de construire (Document archives municipales)

Dans les années 1970, l’enseigne change car la  Banque nationale pour le commerce et l’industrie (BNCI) et le Comptoir national d’escompte de Paris (CNEP) ont fusionné en 1966 et c’est donc la Banque Nationale de Paris qui est installée dans les lieux, comme le montrent une publicité de 1975 et une photographie du bâtiment à l’époque.

Publicités de 1975 et 1979 et photographie d’époque (Documents Ravet-Anceau, Nord-Eclair et Archives Municipales)

Puis dans les années 1980, après le départ de la banque au n° 24 de la Grand’Place, l’immeuble est occupé par la compagnie d’assurances AGF. De nos jours c’est le groupe Gesco qui est installé dans les lieux et il est à noter que contrairement aux établissements bancaires précédemment cités, la façade de l’immeuble du 57-59 n’a pas connu de modification notable et a donc gardé son cachet d’origine.

Les assurances AGF : installation et photographie des années 1980 (Documents Nord-Eclair et archives municipales)
Photographie de Gesco en 2022 (Document Nord-Eclair et Google Maps)

A suivre…

Remerciements à la BNR et aux archives municipales de Roubaix.