Georges Lehoucq naît à Tourcoing le 24 Avril 1870. Après ses études au Lycée de Douai puis au Lycée de Tourcoing que son oncle Fidel Lehoucq vient de fonder, il part à Arras pour effectuer son service militaire. A son retour, Georges est ambitieux. Il a hérité d’un coquet capital et souhaite donc absolument créer son entreprise. Son choix se porte sur la ville de Roubaix car c’est une ville industrielle textile performante qu’on surnomme à l’époque : « la Manchester du Nord », ville qui a besoin de matériaux pour la construction de logements ouvriers.
Le 2 Août 1890, Georges Lehoucq décide de reprendre, à 20 ans, le commerce de négoce de bois, créé en 1886 par Honoré d’Halluin, au 37 boulevard de Beaurepaire. L’entreprise est située sur une vaste parcelle de 17.699 m2 entre le boulevard Beaurepaire et le quai du Sartel sur le canal de Roubaix.
C’est un commerce de bois de différentes espèces ( sapin, orme, chêne, peuplier, hêtre, noyer, charme, tilleul, frêne, acajou, noyer d’Amérique, etc ) qui répandent des odeurs délicieuses dans l’entreprise. Ce sont des bois du pays, ou des bois d’importation, et en particulier du nord de l’Europe. Ils sont parfois livrés par billes entières, la forme du tronc est préservée, débitée en tranches fines dans le sens de la longueur. Georges fabrique également des moulures et baguettes pour l’encadrement, dans les ateliers du fond, « le bâtiment de la baguette » où les odeurs de solvant et de produits chimiques deviennent pénibles pour les doreurs.
Il négocie les achats à un très gros importateur dunkerquois Jean-Baptiste Trystram, chez lequel au cours d’un long stage il a acquis les connaissances du métier. Le canal situé derrière l’entreprise permet l’approvisionnement par péniches, dans un premier temps. Les livraisons se feront ensuite par le rail et par la route. Une centaine de personnes travaillent dans l’entreprise, à la fin de cette décennie.
Célibataire, Georges loge quelques mois, à l’hôtel Ferraille au 22 rue de la Gare. Il se marie, le 11 Aout 1898, avec Jeanne Trystram, née à Petite Synthe le 11 Aout 1879, fille de Jean-Baptiste Trystram, son fournisseur et qui est également président de la chambre de commerce de Dunkerque. Ils font l’acquisition de leur maison située au 58 rue des Fabricants. Georges se rend sur son lieu de travail « à l’usine » en voiture à cheval attelée par son fidèle cocher. Georges et Jeanne ont un premier enfant, Jeanne surnommée Jeannette.
Les connaissances professionnelles de Georges et son dévouement à l’égard de tout ce qui touche à la formation de la jeunesse, le font connaître rapidement auprès du public. Georges s’intéresse à la politique et se présente sur la liste républicaine d’Eugène Motte aux élections municipales de 1902. Il est alors élu deuxième adjoint et prend en charge les dossiers de l’Instruction Publique et de la Culture.
Georges Lehoucq va alors entreprendre de nombreuses réformes importantes de l’enseignement général et technique ; le transfert de l’Institut Turgot, l’installation du conservatoire, la création du groupe scolaire de l’avenue Linné, celle du collège de jeunes filles et bien d’autres œuvres marquantes. Il soigne tout particulièrement l’enseignement professionnel pour les fils et filles d’ouvriers roubaisiens grâce à la promotion de formations techniques à l’Institut Turgot. Il est aussi l’un des grands organisateurs de la Cavalcade de 1903 à Roubaix.
Les affaires de l’entreprise sont florissantes. Georges se spécialise encore davantage dans la fabrication de moulures bois pour le bâtiment, l’ébénisterie et l’encadrement. C’est un homme dynamique et il participe à de nombreux salons professionnels pour étendre sa notoriété : Exposition internationale de Paris en 1903, Arras en 1904, Tourcoing 1906 et bien sûr l’exposition internationale de Roubaix en 1911, où il préside la visite de l’école pratique de l’Institut Turgot, rue du Collège, dont il est toujours responsable pédagogique.
En 1908, Georges, lassé peut-être de la politique, démissionne de son poste d’adjoint au maire, et ne se représente pas aux élections municipales de cette même année. Il garde néanmoins le contact et continue à veiller avec soin sur tout ce qui touche à la jeunesse. Il devient président d’honneur des amicales laïques, juge au tribunal de commerce et inspecteur départemental de l’enseignement technique. Il organise à Roubaix le premier congrès national de l’apprentissage. Georges Lehoucq, en 1912, reçoit du gouvernement, la Croix de la Légion d’Honneur, distinction bien méritée.
Georges et Jeanne ont à présent trois enfants : Jeanne 1899, Georges 1901, et Claire 1910. Georges est un amateur d’art et de nombreuses œuvres sont présentes dans leur nouvelle habitation de 899 m2 habitable sur un terrain de 1.224 m2 au 168 rue de Lille.
En 1914, l’usine est réquisitionnée et occupée par les allemands. Devenu oisif, Georges installe dans son grenier, un atelier d’artiste et peint des natures mortes. Il s’active au comité d’alimentation pour aider les roubaisiens à se nourrir. Comme de nombreuses personnalités du monde commercial et politique, Georges devient otage roubaisien en Janvier 1918 et est déporté en Lituanie. il rencontre sur place d’autres notables, qui sont aussi artistes, dessinateurs, écrivains, poètes . . . Sur la photo ci-dessous, Georges est assis à gauche entouré de ses amis, et tient sur ses genoux, sa boîte à peinture.
A la fin de la guerre, les allemands ont vidé complétement l’entreprise, bois, produits finis, matériel et machines. Il ne reste rien. Georges, avec ses modestes ressources, redémarre l’activité et progressivement revient à son niveau performant d’avant guerre grâce à une demande très forte des matériaux de construction, et en particulier du bois.
Au début des années 1920, Georges recrute des commerciaux sur toute la France pour développer les ventes des moulures d’encadrement. Il leur fournit une marmotte ( valise de présentation de toutes les moulures produites ) et des catalogues très complet reprenant plus de 200 références de profils. Les vendeurs sont alors formés pour proposer les moulures, les baguettes chimiques, les cadres pour miroiterie, les moulures d’électricité etc
À suivre . . .
Remerciements à Arlette Camion, Marc Lehoucq ainsi qu’aux archives municipales