Appartements de la rue Greuze

 Construits de 1958 à 1960, les bâtiments des Hauts Champs ont donné leur nom aux rues qui les desservent, quand elles ont été viabilisées, plus de vingt ans après la réalisation des logements. L’immeuble n°7, dit pavillon Jean Baptiste Greuze est donc à l’origine de la rue du même nom. Thierry se souvient que les portraits des différents peintres étaient reproduits sur les pignons des bâtiments. Jean Baptiste Greuze, Edgar Degas, Jean Baptiste Chardin, Claude Monet, Maurice De Vlaminck furent ainsi présents dans le quartier, ainsi que le poète Charles Pranard. Le bâtiment Greuze qui nous occupe aujourd’hui, se situe entre la rue Michelet et la rue Chardin. Il est perpendiculaire à l’usine Motte Bossut, et aux deux bâtiments Chardin et Monet qui l’entourent.

 Deux anecdotes sur son environnement : la transformation de l’usine Motte Bossut en 1985 en magasin d’usines a posé très vite la question des parkings pour la clientèle. Il fut un temps question d’utiliser les espaces de part et d’autre du bâtiment Greuze, côté avenue Motte et côté bâtiment Monet, mais les résidents s’opposèrent à ce projet. L’espace entre la rue Michelet et la rue Claude Monet fut néanmoins approprié en places de stationnement. C’est sur cet emplacement que passera bientôt la ligne de bus à haut niveau de service, qui repose à terme la question du stationnement.

Plan des Hauts Champs 1962 Nord Éclair
Vue du bâtiment Greuze Extrait Google Maps

 Concernant le bâtiment Greuze, il a fait l’objet d’une réhabilitation : les entrées étaient autrefois des portes de bois avec un battant, elles sont aujourd’hui en PVC avec des serrures. De même, les boites aux lettres qui étaient à l’intérieur du hall d’entrée, sont aujourd’hui plus accessibles pour la distribution du courrier, car situées à côté des nouvelles portes. Le bâtiment a également reçu un revêtement de laine de verre sous les plaques de sa façade actuelle.

Studio Bâtiment Greuze Croquis Thierry Dony

 La description suivante des deux types de logement correspond à celle des autres bâtiments de la cité des Hauts Champs. Le logement type 2 (studio) se présente de la manière suivante : l’entrée (1) donne dans un petit couloir. Sur la gauche, la porte de la chambre (7), dans laquelle il y a un placard et des fenêtres individuelles. Dans l’entrée, la porte de droite donne accès à la salle de séjour (2), à partir de laquelle on peut aller dans la cuisine (3) équipée d’un évier et d’une gazinière,  dans la salle de bains (4) et dans les toilettes (5). Une petite pièce (6) séparée par une cloison amovible ou un rideau permet au choix, de faire un salon ou une pièce de rangement.  Cet appartement est bien pourvu en placards de rangement, ce qui évitait l’achat de meubles importants de type armoire ou penderie. Dans certains de ces placards toutefois, à chaque étage, se trouvaient les manettes de réglage de la tuyauterie du chauffage.

Logement de type 3 bâtiment Greuze Croquis Thierry Dony

 Le logement de type 3 (deux chambres) se présente comme suit : on entre par un couloir, dont les deux premières portes à gauche et à droite desservent la cuisine (5) et la première chambre (2), puis les toilettes (3) et la salle à manger (7). Une seconde chambre (6) est accessible par la salle à manger. On peut entrer dans la salle de bains (4) par les deux chambres. Une anecdote lors de la réhabilitation : la salle de bains était autrefois équipée d’une baignoire sabot. Après les travaux, la nouvelle baignoire dépassait sur la porte d’entrée de l’une des chambres. Il y a une porte entre la cuisine et la salle à manger, et des placards de rangement, il y avait de quoi ranger. Une baie vitrée (8) longe la cuisine et la salle à manger, avec une porte qui permet d’accéder au balcon. En 1970, nous dit notre témoin, on a posé des fenêtres pour isoler le balcon, ça nous faisait une pièce en plus.

Merci à Thierry Dony pour les croquis et les précisions

Le PMU de la Justice

Les documents les plus anciens que nous ayons pu consulter font mention tout au bout de la rue de Lannoy, à la limite de Lys, d’un estaminet associé à un bureau d’octroi. Cet estaminet est tenu dès 1884 par Fr. Vanangeval, alors qu’on prévoit l’installation d’une bascule charretière devant le bureau de l’octroi.

Document daté de 1888 – archives municipales

 Le Ravet-Anceau nous renseigne sur les différents cafetiers qui se succèdent au carrefour de la justice. A partir de 1894, c’est J. Gadenne qui tient l’estaminet. On y trouve H. Lefebvre en 1899, puis L. Dupont de 1903 à 1908. A partir de 1913, la numérotation atteint cette extrémité de Roubaix. A. Nolf préside désormais la destinée de ce commerce situé au numéro 630. Après la guerre, c’est son gendre, Théophile Van Wanbecke-Nolf qui tient commerce à cette adresse.

En Juillet 1925, ce cafetier demande l’autorisation d’effectuer des travaux dans l’immeuble qu’il possède. On apprend dans son courrier qu’il est également propriétaire du bureau d’octroi. Les travaux consistent à échanger les emplacements de l’octroi, initialement placé côté rue verte et de l’estaminet, placé côté rue de Lannoy. On va également supprimer deux fenêtres sur la rue verte pour les remplacer par une baie vitrée plus large.

Document archives municipales

 C’est ainsi que le Ravet-Anceau place en 1930 l’octroi au 628, et l’estaminet, dénommé désormais « café de l’Octroi » au 630. On change la numérotation en 1935, et le café et l’octroi passent au numéro 694. Le propriétaire est toujours monsieur Van Wanbecke. En 1939 l’octroi est au 694. Le café, au 696, est tenu par G.Marquant et figure sur une carte postale prise depuis Lys dans la deuxième partie des années 20. On y voit au premier plan les rails de tramway, et, au fond à droite le terrain ce qui deviendra bientôt le parc des sports. On y remarque également un gabelou de faction à la porte du bureau de l’octroi.

Document collection particulière

 Après la guerre, on retrouve Mme Van Wanbecke qui tient maintenant commerce d’alimentation générale au 692, et, de 1953 à 1964 H. Merckx, comme tenancier du café. Celui-ci passera dans les mains de monsieur A Bouscarle, cafetier PMU de 1968 à 1973.

Document Nord Matin

En 1975 une publicité paraît dans la presse, informant le public de la réouverture du café, cette fois-ci sous l’égide de M . Vandenberghe-Madou et de son épouse. A partir de 1978 le Ravet-Anceau ne fait plus mention du nom du tenancier. On le désigne simplement sous le nom où on le connaît aujourd’hui : le « Pmu de la Justice ».

Document collection particulière

 

 

 

 

Le premier comité de quartier

Le quartier du Fresnoy-Mackellerie peut se targuer d’être le premier comité de quartier qui ait été créé à Roubaix. Comment cela s’est-il passé ? Il faut rappeler que lors de la campagne pour les municipales de 1977, le socialiste Pierre Prouvost avait préconisé la mise en place de comités de quartier librement constitués, de commissions extra-municipales et de commissions ad hoc sur des problèmes spécifiques. (Nord Eclair 19 février 1977).

Après les élections, on procède donc à la mise en place de ces comités. Début Juillet 1977, une visite du quartier du Fresnoy-Mackellerie est effectuée par le maire Pierre Prouvost accompagné de ses adjoints, MM. Duhamel, Vandewynckèle, Pétrieux et de nombreux conseillers municipaux.  Une liste de 22 problèmes à résoudre est établie à l’issue de cette visite. A la suite de quoi, se déroule une réunion des forces vives pour la constitution d’un comité de quartier, dans la salle de la rue de Rome. M. Vandewynckèle, adjoint au maire et MM Mosnier et Wyndels, conseillers y participent, avec les responsables de diverses associations du quartier : il y a là le comité des fêtes, le Label, la CSCV, le CA et la direction du centre social de la rue du Luxembourg, le foyer logement de la rue de Mouvaux, l’Union des commerçants et le GAR (groupe pour l’avenir de Roubaix, opposition municipale). Six commissions sont créées : cadre de vie, urbanisme et environnement, éducation et formation, culture, famille sports et loisirs, relations dans le quartier et emploi.

La visite du quartier par la municipalité Photo Nord Éclair

 A la veille de la constitution du comité de quartier, en octobre 1977, une liste de neuf chantiers a été établie par les habitants du quartier : nouveaux locaux pour le centre social, établissement d’un square à l’angle des rues d’Italie et du Fresnoy, aire de repos derrière le foyer logement de la rue de Mouvaux, utilisation du court de tennis de l’office HLM, aménagement du pont du chemin de fer, utilisation des terrains disponibles dans le quartier, pose de feux tricolores au carrefour de la rue du Fresnoy et du boulevard d’Armentières, implantation de deux cabines téléphoniques, réparation des voies et trottoirs.

La création du premier comité de quartier le 4 novembre 1977 Photo La Voix du Nord

 Le 4 novembre 1977, intervient la création du comité de quartier du Fresnoy-Mackellerie ! Il commencera réellement à fonctionner le 22 novembre. A cette date, il sera logé, on évoque la transformation de la salle de la rue de Remiremont en maison de quartier, et il sera officiellement institué en association type loi 1901. Les commissions de travail sont déjà réparties : MM. Renaud, Voeten et Thenis font partie de la commission cadre de vie et environnement, Mmes Croes (CSCV) et Ballois constituent la commission vie familiale et étudient la possibilité d’une information sur la contraception. La commission éducation et formation est prise en charge par Mme Trenchs, et MM. Hatt, Vermeersch. La culture et les loisirs feront l’objet des attentions de Mme Parent, et de MM. Isbaert et Laplace. La commission sports est composée de MM. Frebourg (Volley Club de Roubaix), Doutreligne et Milliez. Enfin la commission emploi comprend Melle Jonasz (centre social) et Fautrez (LCR rue de Mouvaux). Il reste encore quelques sièges à pourvoir pour le comité où l’on espère voir des enseignants, des membres du club du 3me âge de la rue de Mouvaux, du club des marcheurs, de la JOC et de l’Union des commerçants.  

Histoire du Lido

Quand les Halles centrales roubaisiennes furent démolies en août 1956, personne ne se doutait que l’emplacement servirait à nouveau, à peine dix ans plus tard, comme surface commerciale. Pensé comme un centre de transit, intermédiaire entre la partie de la rue de Lannoy à démolir, et le futur centre commercial Roubaix 2000, le Lido existera quelques années avant de disparaître à son tour. L’endroit, aujourd’hui occupé par la poste et la Médiathèque, connaîtra là ses dernières heures commerciales. Nous allons raconter son histoire.

La place des Halles en aire de stationnement Photo AmRx

Avant qu’on n’envisage l’emplacement des Halles pour la cité de transit, le maire Victor Provo soutiendra l’option de l’appropriation de l’usine Huet comme centre transitoire, s’il y a assez de candidats. Cette usine se trouvait autrefois entre la caserne des pompiers (aujourd’hui la CAF) et l’entrée de la rue de Lannoy, c’est-à-dire juste à côté du périmètre à démolir et à reconstruire. Le chausseur Papillon se déclare favorable au projet  Huet. Le quincaillier Gamin suggère qu’on installe les baraquements dans le tronçon du boulevard Leclerc, à partir de la poste.

Photo usine Huet Boulevard Gambetta Collection Particulière

On avance sur le projet Huet, mais de manière peu convaincante : la  façade serait abattue puis remplacée par une baie vitrée, le cloisonnement en cellules reviendrait trop cher, et que penser du travail en commun pour des commerces habitués à leur individualité ? La question du logement piétine également : on relogerait des commerçants dans la première barre construite avec les sapeurs pompiers rue Bernard. Un questionnaire est prévu sur l’utilisation de l’usine Huet, et sur l’organisation du futur centre ; il est clair qu’il y a un effort d’adaptation pour les commerçants auquel ils ne s’attendent pas, comparable toutes proportions gardées, au choc des habitants de la rue Edouard Anseele relogés dans le quartier des Hauts Champs. Il y a là un problème humain.

Mars 1964 Plan du centre commercial de transit Place des Halles Publié par Nord Éclair

Une proposition du centre de transit sur la place des halles est finalement avancée par M. Jacques Motte président de la chambre de commerce dès janvier 64. Puis les premiers travaux d’appropriation sont lancés, qui créent quelques bouleversements, notamment pour la circulation autour de la place des halles. La rue Jeanne d’arc devient piétonnière, la rue de la halle sera élargie et la circulation se fera dans les deux sens. Le futur centre commercial de transit sera piétonnier. Il se présentera sous la forme d’un assemblage d’éléments préfabriqués en aluminium et en glace. Les parquets intérieurs sont en chêne et chaque commerçant pourra personnaliser son magasin, d’autant que l’aménagement de l’intérieur et les enseignes lumineuses seront à leur charge. Un précédent cependant : l’auvent qui surplombe chaque magasin reçoit l’éclairage public. Le tout doit être mis à la disposition des commerçants dans le courant du mois de juillet. L’ouverture officielle aurait lieu courant septembre ou après la braderie…

à suivre

La Rue de Leers : une naissance difficile

Les Trois Ponts et le Carihem en 1845

 Une loi accordant aux communes une subvention pour faciliter l’achèvement des chemins vicinaux, est promulguée le10 Juillet 1868. Les municipalités songent aussitôt à profiter de ces subsides.

En janvier 1869 la commune de Leers se préoccupe de l’établissement d’un chemin vicinal reliant Leers à Roubaix qu’elle juge « d’une utilité incontestable, tant sous le rapport industriel qu’agricole ». Ce chemin, d’une largeur de 10 mètres, doit aboutir au pont Caudron, à la limite de Roubaix, et se raccorder au chemin n°15 qui conduit au hameau des Trois Ponts. On décide de l’exécution de ce chemin, à condition que les terrains concernés soient abandonnés gratuitement par leurs propriétaires, dont les biens devraient en contrepartie bénéficier d’une plus-value.

De son côté, la ville de Roubaix s’intéresse également à l’amélioration des communications entre les deux communes, « tant au point de vue des intérêts commerciaux, que de ceux de l’alimentation de nos marchés ». Une commission est chargée de cette importante question. Elle insiste sur le fait que le chemin reliant les deux communes est resté dans l’état où il se trouvait il y a deux siècles, à une époque où « Roubaix suffisait lui-même à tous ses besoins ». Elle ajoute : « ce chemin tortueux n’est plus à la hauteur de notre époque ». On projette donc de déclasser ce chemin étroit, passant par les fermes Lebrun et Fremaux, qui a ensuite donné naissance aux rues des Trois Ponts, de Tournai, de Cohem et de Carihem. On pense le remplacer par un chemin direct. Cette proposition est envoyée au conseil général, qui l’accepte. Le vieux chemin est déclassé, et le conseil général vote des crédits pour le nouveau. Mais on s’aperçoit qu’une confusion s’est produite, et que le nouveau chemin classé est celui proposé par la commune de Leers sur son propre territoire, et non celui envisagé par la municipalité roubaisienne sur le sien ! Le conseil municipal réitère donc sa demande de classement pour le nouveau chemin comme branche principale, renonce au déclassement du chemin actuel, et décide, lors des travaux d’établissement de la nouvelle branche, de paver également l’ancienne voie sur trois mètres de largeur et de la classer en deuxième catégorie. Le nouveau chemin partira de l’extrémité du nouveau boulevard Beaurepaire, et traversera en ligne droite les terres de la ferme de Bury-Courcelles et rejoindra Leers au niveau du bas voisinage.

Le tracé prévu pour le nouveau chemin

 Mais d’autres difficultés surgissent : la municipalité de Leers veut modifier le tracé initial sur son territoire, sur lequel se trouvent plusieurs constructions. La ville de Roubaix s’en tient au tracé prévu, pour lequel les riverains ont accepté de céder gratuitement la plus grosse partie du terrain nécessaire. La mésentente s’installe et les travaux ne sont toujours pas réalisés en 1876. A ce moment, Alfred Motte, propriétaire-riverain du boulevard Beaurepaire, offre son concours pour débloquer la situation, venant ainsi en aide à la caisse des chemins vicinaux. Il propose de participer au financement du pavage de la dernière partie du boulevard Beaurepaire, attendu depuis 1869, et de participer par moitié aux frais d’expropriation nécessaires pour le percement de la voie nouvelle. Par ailleurs, M. Simoens propose de démolir à ses frais un bâtiment situé à Leers sur le tracé de la future route. Le projet avance : on prévoit de construire en 1877 un aqueduc sur le ruisseau du pont Caudron en partageant les frais d’établissement entre les deux municipalités. On lance en 1879 une enquête d’utilité publique en vue du classement, qui aboutit l’année suivante.

Pourtant les expropriations traînent en longueur, si bien que M. Degraeve, adjudicataire des travaux de pavage le 24 mars 1880, dont le chantier est arrêté, demande une indemnité pour compenser les retards pris. Finalement, les travaux s’exécutent malgré toutes ces difficultés, et le nouveau chemin voit le jour.

La situation en 1886
 Les documents proviennent des archives municipales

 

On aligne rue de Cohem

A l’origine, il s’agit d’un chemin vicinal conduisant du hameau des trois ponts à Leers en passant par le hameau du petit vinage, d’une largeur de trois mètres en 1838, et qui fait de nombreux coudes pour éviter les propriétés. Il est bordé de deux fossés. Sur cet ancien chemin seront tracées plus tard les rues de Tournai, d’Ypres, de Cohem et de Carihem.

 Le chemin des trois ponts à Leers en 1845

 A la fin du 19eme siècle, la création de la gare de Roubaix-Wattrelos, dite gare du Pile restructure le quartier. On trace la rue Brame qui longe les installations ferroviaires et vient se raccorder à la rue de Cohem. Celle-ci perd son nom pour devenir la rue d’Ypres entre l’extrémité de la rue de Tournai et cette nouvelle intersection. La rue, dont l’axe est pavé, est bordée de fossés, passe au milieu des pâtures longe la ferme Watteau et quelques maisons éparses.

La rue de Cohem à la fin du 19 eme siècle.

 Au débouché de la rue Brame, rectiligne et relativement large, notre rue reste étroite et tortueuse. Très vite, la municipalité cherche à la redresser et à l’élargir pour favoriser la circulation, alors que les riverains souhaitent améliorer le drainage de ces terrains situés à l’endroit le plus bas de Roubaix et facilement inondés.

C’est ainsi que, dès 1891 un riverain, M. Briet demande l’autorisation de construire un aqueduc en front à rue sur l’emplacement du fossé, face à la ferme Watteau, pour déverser les eaux pluviales dans le riez des trois ponts, et qu’en 1905 les riverains demandent la construction d’un aqueduc. En 1910 on prévoit la construction du boulevard industriel dont l’égout ne pourra pas traverser la ligne de chemin de fer. La rue de Cohem devra donc disposer d’un aqueduc pour récupérer ces eaux et les déverser dans celui de la rue Brame. On lance une adjudication remportée par l’entrepreneur Henri Duhem qui effectue les travaux dont la réception a lieu en 1911.

En 1908, le directeur de la voirie insiste sur le fait que « les alignements de la rue Brame se raccordent à ceux de la rue de Cohem d’une manière défectueuse… ». On fait donc des rectifications à de nombreuses reprises dans le but d’aligner la rue sur l’avenue Brame. Tous les riverains sont successivement amenés à céder du terrain pour l’incorporer à la voirie : M. Briet en 1909, La brasserie « la communauté » en 1912, alors qu’on réclame l’éclairage pour la rue de Cohem, qualifiée de « véritable casse-cou » en conseil municipal. M. Berly participe à l’alignement en 1925, M. Watteau et la société Bossu-Cuvelier en 1941, et divers riverains dans les années 50. A force de rogner à droite et à gauche, la rue se redresse et s’élargit progressivement.

Les divers plans d’alignement

 Parallèlement, le caractère campagnard de l’endroit disparaît progressivement durant ces années. Attirées par la proximité de la gare et du canal, les entreprises s’installent le long de la rue qui prend ainsi un caractère plus industriel. On remarque très tôt une brasserie, puis, au début des années 20, s’installe la société Bossu-Cuvelier et Camille Dubrulle qui implante là un entrepôt de métaux, la menuiserie industrielle Baet frères en 1929, la teinturerie Delescluse en 1928.

 Mai 1940 voit la destruction d’un baraquement des établissements Bossu-Cuvelier à la suite d’un bombardement, tandis que la teinturerie Delescluse s’agrandit à plusieurs reprises avant et après guerre. La rue prend l’aspect proche de celui qu’on lui connaît maintenant avec la suppression des ses pavés et leur remplacement par un revêtement de tarmacadam en 1961.

La rue en 1953

 La construction du pont du Carihem, puis la suppression des voies de service de la gare vont enfin influer sur l’environnement de notre rue. On trace la rue Léo Lagrange qui forme un nouveau carrefour avec elle, qui perd son nom au profit de l’avenue Brame jusqu’à ce point. Son débouché se fait maintenant sur un rond-point, on installe des terre-pleins centraux, la société Camaïeu s’installe partiellement sur l’emprise de Bossu-cuvelier et sur les anciens terrains SNCF…

Ainsi pourra-t-on dire de la rue de Cohem que, si, au cours de sa carrière, elle a plus que quintuplé sa largeur, elle aura , en contrepartie, perdu dans le même temps les deux tiers de sa longueur !

 Les documents proviennent des archives municipales.

Réhabilitation

La réhabilitation a commencé par le Carihem en septembre 1980. D’abord il faut remédier aux problèmes de chauffage par des travaux d’isolation thermique. Il faut ensuite améliorer le confort de ces logements : refaire les entrées, installer des baignoires, revoir les revêtements de sol, améliorer l’isolation acoustique des appartements, et remettre aux normes de sécurité les installations électriques. Des travaux de ce genre attendent les vieilles HBM, à plus forte raison qu’elles datent des années 1930, qu’elles sont dans un réel état de vétusté. Par comparaison avec le Carihem, les travaux sont d’une autre importance, car ils coûteront deux fois plus cher.

 Les HBM des années trente Collection Particulière

En avril 1981, une réunion des habitants du Nouveau Roubaix se déroule au centre social de la rue Carpeaux, et on fait le point sur l’étude menée par le CREPAH organisme chargé de l’étude de la réhabilitation. Le directeur des HLM, M. Xavier Grousset est présent, ainsi qu’une cinquantaine d’habitants et le conseiller municipal M. Tytgat. Cette réunion est l’occasion de l’expression des associations : CSCV, centre social, comité de quartier, groupement de défense des locataires. Un journal vidéo est présenté lors de cette réunion, qui a été réalisé par les animateurs du centre social et un opérateur de l’IREP. Des propositions concrètes sont faites : appartements témoins après travaux, création d’une commission avec habitants du quartier pour servir d’interlocuteur avec l’office HLM, création d’une permanence de l’office.

 HBM et HLM concernées par la réhabilitation Collection Médiathèque de Roubaix

En Mars 1983 on apprend qu’il y aura deux tranches de travaux. La première concernera 584 logements collectifs et 191 individuels, les HBM, la seconde les immeubles construits entre 1950 et 1955, les HLM.  Les premiers travaux devraient débuter fin 1983. L’opération doit s’étaler sur cinq ans. La presse signale qu’un grand nombre de logements sont vides en raison de leur dégradation.

La réhabilitation est plus importante qu’au Carihem. Au Nouveau Roubaix, il faut refaire l’isolation thermique, les installations sanitaires, la réfection des cours, la confection de loggias, l’évacuation des ordures, le chauffage, l’installation électrique, les toitures, les terrasses, les menuiseries, l’équipement intérieur, et prévoir l’aménagement de locaux collectifs résidentiels.  L’office HLM travaille à rassurer les habitants qui s’inquiètent de l’augmentation prévisible des loyers, en collaborant avec le comité de quartier. La permanence demandée plus tôt est créée : une chargée de mission,  Mme Pavy est basée au 54 rue Léonard de Vinci, et elle reçoit les familles et leurs doléances. L’information des habitants du quartier se poursuit avec des tracts, affiches, cassettes vidéo et réunions publiques. Le centre social Carpeaux a mis un animateur à disposition du comité de quartier, Didier Lebecque. Son rôle est de favoriser l’expression et la réflexion des habitants sur le projet de réhabilitation.

 Croquis paru dans Nord Éclair

En Octobre 1983, l’opération est détaillée par voie de presse : on procédera immeuble par immeuble, on gardera la taille des appartements. Les locataires habiteront ailleurs dans le quartier le temps des travaux. On commencera par l’immeuble n°7, à l’angle angle boulevard de Fourmies et Horace Vernet. Les travaux ne seront pas terminés en 1987.

Concessions automobiles

Sur les photos aériennes, apparaît en 1971 à la limite de l’usine Motte-Bossut velours un bâtiment construit sur une zone jusque là consacrée à des jardins ouvriers. Ce bâtiment, construit perpendiculairement à l’avenue Motte, abrite une concession Renault. Le terrain situé à l’angle de l’avenue et de la rue Jean-Jacques Rousseau doit servir d’aire de stockage pour les véhicules, mais n’est pas encore aménagé.

Photo IGN 1971

 Le garage s’installe et, dès l’année suivante Renault Roubaix insère dans Nord Matin une publicité détaillant ses implantations sur la ville. Y figure la concession située 230 avenue Motte sous la dénomination du garage du Nouveau Roubaix.

Documents Nord Matin 1972

 Daniel Meyfroodt préside alors aux destinées de la concession. Les activités du garage s’étendent, puisqu’en 1975 la mairie est saisie d’une demande de permis de construire pour un bâtiment supplémentaire au nom de la S.A.R.L « Garage et carrosserie du Nouveau Roubaix ». Le permis est accordé, mais une photo aérienne de 1976 montre que le bâtiment est n’est pas encore érigé au mois d’avril :

Le garage Renault en activité. Photo IGN 1976

Cette situation perdure quelques années, puis M. Meyfroodt devient concessionnaire Volkswagen en 1978. Il cède finalement son affaire en 83 à M. Leclercq ; celui-ci continue à commercialiser la gamme Volkswagen-Audi.

Document La Voix du Nord 1983

 D’après un employé du garage, celui-ci, tout en conservant son enseigne, change une nouvelle fois de mains, et c’est maintenant M. Mandron qui le reprend sous la raison sociale MBBM.

Le garage Volkswagen avenue Motte. Document La Voix du Nord

 M. Mandron quitte ensuite Roubaix, pour reprendre la concession Volkswagen-Audi de Villeneuve d’ascq. Il est remplacé avenue Motte par M. Rogier revend le garage à l’Usine qui cherche à s’étendre et qui s’installe avenue Roger Salengro sous la dénomination du garage Valauto Volkswagen-Audi.

Valauto avenue Roger Salengro – Document collection personnelle

 Il est curieux de constater que le terrain, qui faisait partie à l’origine de l’usine Motte-Bossut, revient finalement en possession de l’usine après un intermède automobile qui aura duré une trentaine d’années !

 

La création du parc des sports

Le 2 juillet 1909 un rapport au conseil municipal lu par M. Roussel signale le fait qu’un terrain de 27 hectares situé au pont rouge doit être mis en vente à approximativement 1 franc le mètre carré. L’occasion d’acquérir ce terrain ne devrait pas être négligée par la municipalité, qui pourrait y construire un nouveau cimetière et y déplacer l’abattoir. La municipalité ne pouvant pas se permettre d’effectuer un emprunt, il préconise l’achat du terrain par les hospices qui pourraient le revendre à la commune le jour où celle-ci en aurait besoin. Les hospices se portent donc acquéreurs de ces terres dépendant des fermes de l’Espierre et de Maufait.

La même année, lors d’un autre conseil municipal, le rapporteur insiste sur la nécessité de la création d’un parc des sports, qui pourrait se situer le long de la rue de Lannoy sur des terrains dépendant de la ferme de l’Espierre et appartenant aux Hospices. On évalue la dépense à 200 000 francs dont 80 pour l’achat du terrain. Les finances publiques ne permettant pas cette dépense, le rapporteur envisage la location du terrain aux hospices. On prévoit de créer des terrains de football, une piste de course à pied des installations d’athlétisme, des bureaux, salle de réunion, conciergerie, des vestiaires et salle de douche, des tribunes de 100 mètres de long, ainsi qu’une « porte monumentale d’un aspect décoratif aussi satisfaisant que possible… » Le projet est retardé par la guerre.

Document médiathèque de Roubaix

Un plan de 1923 recense les propriétaires des terrains. La plus grosse part appartient aux hospices qui possède également les bâtiments de la ferme de l’Espierre. Ces terrains s’étendent également de l’autre côté de la voie ferrée. Quelques autres propriétaires se partagent des terrains de taille plus modeste le long de l’avenue Salengro.

 En 1924, on procède à l’achat de ces parcelles à M. Deroubaix-Despelchin, Mme Veuve Derache-Bonte, la société des terres de Maufait, et M. Henri Catteau.

Les travaux démarrent en mars 1929. Le journal de Roubaix, dans une édition du mois d’août 1930 évoque une ouverture prochaine des installations. Le parc municipal des sports couvre huit hectares. L’architecte en est Jacques Greber, à qui on doit également les plans de l’école de plein-air.

Photo Journal de Roubaix

 A droite de l’entrée, une salle de gymnastique avec, en galerie, une piste permettant l’entraînement à la course à pied par mauvais temps. A gauche, un café-restaurant, l’habitation du concierge et les bureaux de l’administration. Au fond, deux terrains de tennis grillagés et un terrain d’honneur de deux hectares. Les tribunes abritent des vestiaires et des douches. On draine pour assécher les terrains argileux. Les eaux sont réunies dans un unique collecteur.

Document médiathèque de Roubaix

 Ces installations ne tarderont pas à être mises à la disposition des sportifs roubaisiens.

 

Le quartier du Fresnoy-Mackellerie

 Avant que ces deux noms ne fassent l’objet d’un regroupement administratif contemporain, le Fresnoy et la Mackellerie étaient des lieux dits particuliers. Le terme « Fresnoy » désignait un lieu où poussaient les frênes, arbres très courants dans nos régions et appréciés pour les travaux de charronnage. Roubaix avait donc ses terres du Fresnoy. Selon des sources érudites, la Macquellerie était un fief croisien du XIIème siècle. Le secteur est alors traversé par des voies très anciennes. Le chemin de la Mackellerie, souvenir du fief médiéval, menait de Croix à Mouscron par Tourcoing, et fut  longtemps le chemin d’intérêt commun n°112. A la fin du dix neuvième siècle, c’est encore un chemin étroit et tortueux pavé sur une largeur de trois mètres et bordé de deux fossés. C’est l’actuelle rue de la Mackellerie. Dans son prolongement, on trouvait l’ancien sentier du bas Fresnoy qui deviendra la rue Cuvier, et au-delà le boulevard d’Armentières. Mais une voie importante formait un carrefour avec ces deux chemins. Il s’agissait d’un chemin très ancien qui reliait jadis la route royale de Lille à Menin à la frontière belge de Wattrelos/Herseaux. Ce chemin comprenait dans son tracé roubaisien la rue de Mouveaux (orthographe de l’époque), la rue du Grand Chemin (d’où le nom), la rue St Georges (rue du Général Sarrail) et la Grand Rue. Pour le quartier qui nous occupe, il s’agit de l’actuelle rue de Mouvaux. Enfin, il y avait le sentier du Fresnoy qui à l’origine partait de l’extrémité de la rue Nain et se prolongeait jusqu’à Tourcoing. Dans la première partie du dix neuvième siècle, c’est une contrée champêtre, avec des moulins sur les hauteurs du Fresnoy et des fermes le long du sentier du même nom.

Ce pont peut être considéré comme une porte d’accès au quartier Collection Médiathèque de Roubaix

L’arrivée du chemin de fer en 1842 va contribuer à isoler ce bout de campagne, qui subira assez vite les assauts de l’industrie et de l’urbanisation. La rue du Fresnoy se voit amputée d’une partie de son parcours, et la passerelle qu’obtiendront tardivement (en 1908) les riverains ne compensera jamais le passage supprimé.

On voit ici l’accès à la rue du Fresnoy par l’escalier de droite qui aboutit rue de l’Ouest Collection Médiathèque de Roubaix

De fait le passage à niveau est bientôt remplacé par un pont dès 1856 à cause du remblai du chemin de fer. L’activité du négoce des charbons se développe notamment dans la rue de l’Ouest située derrière la gare. De grandes entreprises se sont implantées dans le périmètre du quartier, pour en citer quelques exemples : la teinturerie textile Dubar et fils au n°86 rue du Fresnoy, l’entreprise Louis Glorieux et fils, important tissage installé au chemin de la Mackellerie qui faisait battre 2765 métiers mécaniques en 1885. Eugène et Louis Cordonnier ont fait édifier leur usine au n°15 rue du Luxembourg.

La rue du Luxembourg Photo PhW

C’est à partir de cette époque que la construction se développe dans le quartier du Fresnoy-Mackellerie. L’ensemble des rues italiennes se construit en deux temps. Leur classement dans le domaine vicinal municipal s’effectue entre 1867 et 1885, et pour la plupart elles seront bâties dans les premières années du vingtième siècle. L’importance de la population amène la création de deux églises : la première, Saint Antoine, est édifiée en 1897, face à la rue de Remiremont. Elle est ouverte le 12 août 1900. La seconde, Saint Vincent de Paul est construite un peu plus tard rue du Danemark à l’emplacement de l’ancien tissage Glorieux.

L’église Saint Antoine Collection Particulière

Signe de l’évolution industrielle et commerciale du quartier, la construction d’une gare annexe en 1908, la gare de débord de l’Allumette, qui a remplacé les champs du bout de la rue du Luxembourg. La diversité des entreprises est également remarquable : fonderies, brasseries, négociants, transporteurs, sans parler de la vivacité du petit commerce dans les petites et grandes rues du quartier.

Tout ceci a contribué à créer un quartier de forte densité urbaine, dont le patrimoine immobilier a vieilli, en même temps que l’activité industrielle disparaissait progressivement. Comment le quartier du Fresnoy-Mackellerie a-t-il vécu l’évolution de son patrimoine humain et immobilier ? Voilà le sujet des futurs travaux de l’atelier mémoire, dont vous trouverez les chroniques régulières dans ce blog…