Le refuge du quai de Gand

Lors de la fondation de l’antenne roubaisienne de la Ligue Protectrice des Animaux par M. Lenglant, la ville met à leur disposition un espace dans l’abattoir en 1957, puis, en 1959, les loge dans les bureaux de l’ancien dépôt des tramways situé rue de Mascara. On y installe des boxes et un enclos extérieur pour permettre aux animaux de prendre l’air. Ceux-ci sont sous la garde vigilante de M. Fontaine, nous précise la Voix du Nord.

Le refuge rue Mascara en 1959 – photo la voix du Nord
Le refuge rue Mascara en 1959 – photo la voix du Nord

Mais cette implantation n’est que provisoire, et, en 1965, le refuge s’installe près du canal, au coin de la rue Turgot et du quai de Gand sur un espace planté de jardins.

Le nouveau lieu d'implantation – photo IGN 1947
Le nouveau lieu d’implantation – photo IGN 1947

On construit à cet effet un bâtiment à un seul niveau dont la façade s’aligne le long du quai. Un espace reste libre derrière la nouvelle construction pour permettre les ébats des « réfugiés » tout en laissant la place à une future extension.

Photo IGN 1965
Photo IGN 1965

L’ouverture est prévue pour le 27 décembre. Nord Matin qualifie le bâtiment de « coquet » avec sa peinture blanche et bleu-ciel. Le journal souligne le progrès réalisé par rapport aux locaux précédents « perdus au fond d’une impasse tristement mélancolique ». Les installations comprennent un bureau, une infirmerie, et, au fond, 26 boxes avec accès à une grande cour carrelée s’ouvrent sur un long couloir. Mme Dewitte en est la gérante. Le personnel bénévole comprend en outre quatre personnes, et l’association emploie deux vétérinaires.

Les nouveaux locaux – photo Nord Matin
Les nouveaux locaux – photo Nord Matin

Le temps ayant passé, ces installations sont devenues de plus en plus vétustes et sont constamment bondées. En 2012, le refuge comprend 70 box, mais ils sont insuffisants en nombre pour accueillir les animaux abandonnés. Les responsables de l’association drainant les animaux de 80 communes réclament périodiquement des locaux plus grands, mais la question du relogement reste pour l’instant sans solution. Un prochain déménagement, cinquante ans après le précédent, se fait encore attendre…

Document LPA - 2013
Document LPA – 2013

Hormis le dernier, les documents proviennent des archives municipales.

 

La rue Bernard

L’abbé Leuridan nous renseigne sur l’origine du nom de la rue Bernard : elle s’appela d’abord rue du moulin Bernard du nom du propriétaire d’un moulin à broyer le bois de campêche. Après un incendie vers 1850, on l’appela un temps la rue du moulin brûlé, et finalement la rue Bernard.

Souvenirs de la rue Bernard...dans la rue de Lannoy Coll particulière
Souvenirs de la rue Bernard…dans la rue de Lannoy Coll particulière

Après la seconde guerre, longue de 365 mètres et large de 10 mètres, cette rue relie la rue de Lannoy et la rue Pierre de Roubaix, parallèlement au boulevard Gambetta. Cette situation lui vaut d’accueillir un certain nombre d’établissements industriels : aux n°15/17/19 le fabricant de machines textiles Honoré, et au n°37, la société Charles Huet et Cie, lainages et robes. Du côté pair, on trouve au n°2 l’atelier de fabrication du chapelier Jean Déarx, les ateliers Decanis, Literie et Matelasserie du Nord. Tout au bout de la rue, à proximité de la caserne des pompiers du boulevard Gambetta, se trouve encore l’usine à gaz au n°134, plus connue sous le nom de gazomètre, qui n’est plus qu’un dépôt.

Le chapelier Jean Déarx Coll Particulière
Le chapelier Jean Déarx Coll Particulière

Les commerçants y sont relativement nombreux : remarquons une oisellerie au n°1, un boucher M. Mathon au n°32, plusieurs épiciers, et une bonne dizaine de cafetiers. La rue Bernard a aussi son lot de courées : au n°11 la cour Vincent, au n°25 la cour Bernard, au n°22 la cour Florentin, au n°34 la cour Duthy, au n°40 la cour Castel, au n°46 la cour Vlieghe, au 72bis la cour Duquesnoy Crochon, au n°88 la cour Jean Ryckewaert, au n°98 la cour Veuve Raux, au n°110bis la cour Bernard-Spriet. Bien que dépendant de la paroisse Ste Elisabeth, la rue Bernard abrite un dispensaire, la Maison Saint Jean Bosco, des Petites Sœurs de l’ouvrier, qui à l’occasion baptise ou marie les habitants du quartier.

Le bâtiment des pompiers, rue Bernard Photo NE
Le bâtiment des pompiers, rue Bernard Photo NE

La rue Bernard connaîtra bientôt les affres de la démolition, dans le cadre de l’opération Edouard Anseele. Dans les derniers temps, en 1963, signe de l’avancement des travaux, il ne subsiste plus que les numéros impairs, et les huit premiers numéros pairs, les deux ateliers de chapellier et de matelasserie. Tout cela disparaît en 1964 avec le début de la rue de Lannoy. C’est dans la rue Bernard que sera réalisé le premier immeuble de l’opération Anseele, dénommé bâtiment des pompiers, car proche de la caserne des pompiers et fournissant le logement aux combattants du feu. La rue Bernard appartient désormais au passé, nous la connaissons aujourd’hui sous le nom de rue Jules Watteeuw, dit le broutteux, célèbre poète patoisant.

Quand le Pile rénovait son église

Autrefois, le Pile était rattaché à la paroisse Sainte Elisabeth après la construction de cette église en 1863. Cet état de fait dura plus de vingt ans, pendant lesquels la ville et le quartier virent leur population grandement augmenter. Mgr Berteaux, curé doyen de Saint Martin, décide de construire un lieu de culte au Pile et il n’hésite pas à financer le projet. L’architecte Paul Destombes est choisi pour la construction, et la bénédiction de l’église du Très Saint Rédempteur a lieu le 18 février 1884. Elle sera meublée grâce à la générosité des paroissiens. Avec l’installation des orgues en 1897 l’église est complètement achevée.

St Rédempteur ancien et contemporain CP & Photo Méd Rx
St Rédempteur ancien et contemporain CP & Photo Méd Rx

Pendant la seconde guerre mondiale, le 31 août 1941, le quartier est touché par un bombardement anglais et le clocher de l’église est atteint, le portail vole en éclat, les vitraux sont pulvérisés. Une quarantaine de bombes font 38 victimes et 56 blessés. Ce n’est qu’en 1947 que des réparations importantes sont réalisées sur le clocher et la toiture de l’église. Depuis l’origine, le Très Saint Rédempteur, n’a jamais fait le plein des fidèles du secteur, et la situation s’est dégradée peu à peu. De plus, des fissures sont apparues qui menacent l’équilibre de l’édifice. En 1988, l’évêché décide de se séparer de l’église du Pile, car elle est en mauvais état et inadaptée aux besoins du quartier dont la population a beaucoup changé. L’association diocésaine de Lille, propriétaire du bâtiment depuis 1926, la fait détruire en 1990.

Bombardement du Pile août 1941 Photo JdeRx
Bombardement du Pile août 1941 Photo JdeRx

Sur le terrain laissé vacant après la démolition, on décide de reconstruire un lieu de culte ainsi que neuf maisons avec jardin et garage. L’église réalisée en 1993-1994 est due à Philippe Escudié et Jean-François Fermaut. Sa construction est financée par la commune de Roubaix mais la maîtrise d’ouvrage est assurée par l’association diocésaine de Lille. C’est une église de forme circulaire à laquelle sont adjointes des salles de réunions. Un campanile porte la cloche de l’église et s’élève au dessus des bâtiments, et devant le lieu de culte s’étend un parvis. L’église en brique s’inscrit dans la continuité d’un ensemble immobilier d’appartements HLM. Un passage couvert permet d’assurer l’entrée côté immeuble et côté place. L’édifice comporte un lieu de culte d’une capacité d’accueil de 130 à 140 personnes, deux salles de réunion séparées par une cloison amovible et une salle d’activités.

Le nouveau St Rédempteur Photo Conseil Régional
Le nouveau St Rédempteur Photo Conseil Régional

Sources :

Histoire des rues de Roubaix par les flâneurs

Pile à Cœur, écrit par Serge Leroy et Raymond Platteau, avec la participation des bénévoles et des salariés du comité de quartier du Pile

Le lycée Jean Moulin

Dans son numéro du 24 Août 1969, Nord Éclair annonce la construction d’un Lycée Technique Mixte boulevard de Paris, au milieu de « magnifiques parcs privés qui entouraient les châteaux bordant le boulevard ». Le journal se félicite, selon l’opinion couramment partagée à l’époque, de cet événement qui va contribuer à donner un visage moderne à la ville. Il s’agit de remplacer le Lycée de la place Notre-Dame, trop petit. Le nouvel établissement doit comporter des sections industrielles et commerciales et intégrer un collège d’enseignement technique jumelé. Une grande cuisine et sept salles à manger, nécessaires pour nourrir les 1500 élèves prévus, doivent compléter l’ensemble.

Document Nord Éclair
Document Nord Éclair

Le futur Lycée doit trouver sa place entre la rue du Général Chanzy et la rue Dammartin. Cette zone, construite à l’époque depuis près de cent ans, est constituée de beaux immeubles construits en front à rue et de magnifiques propriétés constituées d’hôtels particuliers qui s’élèvent au milieu de parcs ornés de pièces d’eau. On trouve, en 1885, entre les numéros 39 et 47 les familles Cavrois-Mahieu, Druon-Voreux, Wattinne-Hovelacque, Destombes, ainsi que les assurances Verspieren, et, en 1939, les familles Loridan-Dassonville, Cavrois, Dhalluin, Thibeau-Motte, Wattinne-Dubrulle, et Motte-Rasson. Les propriétés les plus importantes sont les numéros 39, le château Cavrois et 43, l’hôtel Thibeau-Motte, séparés du boulevard par un mur surmonté d’une grille imposante.

Il va falloir démolir tout ça.

 

Documents IGN 1953 – en encart l'hôtel Thibeau-Motte.
Documents IGN 1953 – en encart l’hôtel Cavrois.

Dès 1966 le conseil municipal a décidé du périmètre à consacrer au lycée dans le cadre de l’aménagement du boulevard de Paris. Les architectes désignés sont MM. Neveu, Spender et Aureau. On décide cette même année d’acquérir soit à l’amiable, soit par expropriation les propriétés et le préfet lance une déclaration d’utilité publique. Les travaux seront financés grâce à un emprunt d’un montant de 1 750 000 F contracté auprès de la caisse des dépôts. En 1968, on procède à l’expropriation pour cause d’utilité publique de la propriété appartenant aux consorts Thibeau (n° 43). C’est la communauté urbaine qui sera chargée de la construction. Les travaux de démolition commencent

Photo Nord Éclair. Au premier plan le bassin, au fond les restes de l'hôtel particulier
Photo Nord Éclair. Au premier plan le bassin, au fond les restes de l’hôtel particulier

La construction démarre au début de l’année 1971. Le temps est compté : le lycée doit ouvrir ses portes à la rentrée de septembre de l’année 72.

Le début des travaux - Photo Nord Éclair
Le début des travaux – Photo Nord Éclair

Tout se passe conformément aux plans, puisque la réception des travaux a lieu début Août 72. Le journal se réjouit du bel aspect de l’édifice. L’architecte a réussi à insérer les bâtiments en conservant certains des arbres centenaires. Face au boulevard de Paris, un bâtiment bas permet l’entrée des élèves et abrite les bureaux de l’administration. Sur la gauche, placé à angle droit, une vaste construction de trois étages rassemble les salles de cours. A droite, toujours perpendiculairement au boulevard, les logements sur trois niveaux, et, au fond, l’ensemble cuisine-réfectoire. On prévoit tout au fond, le long de la rue Coligny, une salle de sports. C’est Mlle Leroy, sa directrice, qui présidera aux destinées de l’établissement

La réception des travaux – photo Nord Éclair
La réception des travaux – photo Nord Éclair

L’inauguration conjointe du collège Samain, rue d’Alger et du lycée Jean Moulin, a lieu en février 1973, en présence d’Arthur Notebart, président de la Communauté Urbaine, et de M. Provo, le maire de Roubaix, parmi de nombreuses personnalités.

Le parking professeurs en 1993
Le parking professeurs en 1993

Les documents proviennent des archives municipales.

 

Quand le basket occupait la place

Parmi les grandes figures du sport roubaisien évoquées lors des récentes journées du patrimoine, il y avait Jean Pierre Rousselle, qui nous a quittés en novembre 2015. Le basket, c’était sa vie. Il découvre le basket à l’école et il en fera son métier, en tant que joueur, moniteur et entraîneur. Il joue à l’AS Denain Voltaire, avec le célèbre Jean Degros. Ce club français de basket-ball fondé en 1947 va grimper dans la hiérarchie du basket français jusqu’à atteindre l’élite en 1960 et remporter la Coupe de France alors qu’il évolue en Excellence. Cinq ans plus tard, il réalise l’exploit de remporter le titre de champion de France avec plusieurs écoliers de Voltaire dans l’effectif. Puis Jean Pierre entraîne le Clermont Université Club, champion de France 1979 1980, qui fera un beau parcours en coupe d’Europe…

Jean Pierre Rousselle à l’AS Denain Voltaire Photo NE

Il arrête le basket de haut niveau en 1981, devient moniteur à Roubaix en 1984 et entraîneur au Stade Roubaisien. En Janvier 1992, Jean Pierre Rousselle devient le Monsieur Basket de Roubaix, avec une mission pour trois ans : en tant que moniteur municipal dans les écoles primaires. Il prend la direction de l’école municipale des sports de Roubaix, option basket, et il encadre les 7 à 14 ans, tous les mercredis matin dans la salle des sports de la rue du Pays. Enfin il est le responsable technique du stade roubaisien pour toutes les équipes du club, et entraîneur manager de l’équipe première féminine. Roubaix est une ville de basket : l’Évolution Roubaix basket est première de son championnat, de même que le Stade roubaisien. Il y a donc deux équipes de basket qui jouent au même niveau à Roubaix, et Jean Pierre milite pour un seul grand club.

Jean Pierre, coach du Stade Roubaisien Photo NE

En mars 1994, démarre l’opération Basket en liberté, dans un esprit d’animation des quartiers avec la dynamique suivante : former des animateurs basket, organiser des matchs, des tournois, créer des terrains en libre accès. Treize entreprises roubaisiennes sont impliquées parmi lesquelles Camaieu, Chaussport…En avril 1995, c’est l’organisation d’un tournoi inter quartiers, avec des matchs d’une demi heure, de 10 heures à 18 heures. Huit équipes sont engagées : celles des centres sociaux de l’ Hommelet, des 3 Ponts, de l’Alma et la Maison des 2 quartiers, l’ASCO, animation 92 et une équipe de la police qui en finale bat le CS Hommelet, la coupe du fair-play revenant à animation 92. Le calendrier de l’année est éloquent : 15, 16, 17 avril tournoi de street basket, 23 juillet tournoi logicil 3 Ponts, le 27 août tournoi Quick, le 4 septembre tournoi GTI Sodifac et chaussport. Le 23 et 24 septembre, l’opération nationale France basket tour passe par Roubaix, au parc des sports : 800 jeunes jouent ensemble, l’accueil du france basket tour est financé par les entreprises Flipo Manutention, Hutchinson, GTI Sodifac, Sodexo, Logicil, la SRIEM…L’année se termine avec le tournoi Westaflex qui a lieu le 22 octobre. En avril 1996, le France basket tour repart de Roubaix. On joue sur la grand place.

Le basket sur la Grand Place Photo NE

Puis en février 1997, treize jeunes s’étant distingués comme acteurs et pratiquant le basket dans leur quartier, sont sélectionnés par les centres sociaux et les comités de quartier pour aller à New York. Jean Pierre Rousselle a pu convaincre les entreprises déjà impliquées dans Basket en liberté et d’autres de financer ce voyage. Ambassadeurs et reporters, ces jeunes roubaisiens vont aussi jouer au basket en découvrant New York, l’espace d’une petite semaine. Ultime hommage, la salle de basket où joue le Stade roubaisien porte désormais le nom de Jean-Pierre Rousselle.

Jean Pierre Rousselle

La presse de l’époque parle de 28 terrains de basket fonctionnant pour l’opération basket en liberté à Roubaix. Saura-t-on encore les situer aujourd’hui ?

 

Brecht à la bourse du travail

Le titre de Nord Eclair en juin 1956
Le titre de Nord Éclair en juin 1956

Ce titre d’un article paru dans Nord Éclair en juin 1956 demande quelques explications. Bertolt Brecht (1898-1956) est le dramaturge autrichien, et metteur en scène bien connu. Monter une de ses œuvres en 1956 n’est pas anodin, car le théâtre de Brecht veut rompre avec la grande tradition dramatique et pousser le spectateur à la réflexion, alors qu’on est en pleine guerre froide. Deux pièces sont jouées à Roubaix : les fusils de la mère Carrar et des extraits de Grand peur et misère du IIIe Reich. La première a été écrite pour répondre à la politique de non-intervention défendue par les démocraties occidentales au moment de la guerre civile espagnole. La seconde dresse un portrait de la société allemande depuis l’avènement d’Hitler jusqu’aux prémices de la guerre, écrite à partir de récits de témoins oculaires et d’extraits de journaux qui montrent l’enracinement profond du régime nazi dans toutes les sphères du peuple allemand. Vingt quatre scènes évoquent tout à tour la bourgeoisie, le corps médical, la justice, les enfants, les prisonniers, et leur évolution face au régime.

La bourse de travail boulevard de Belfort CP Méd Rx
La bourse de travail boulevard de Belfort CP Méd Rx

Ces deux pièces sont jouées à Roubaix à la bourse du travail, qui est aussi le théâtre Pierre de Roubaix. Titrer « Brecht à la bourse du travail », c’est mettre en évidence l’aspect militant des œuvres d’un auteur anti-faciste, dans un lieu qui est aussi le siège des syndicats ouvriers depuis 1934.

Cyrille Robichez
Cyrille Robichez Photo Irhis

Il reste à évoquer la troupe qui vient jouer ces œuvres. Il s’agit du Théâtre Populaire des Flandres, créé trois ans plus tôt par Cyrille Robichez dans la ville d’Hénin Liétard. Cette troupe devient itinérante et passe donc par Roubaix en 1956. C’est le début de l’aventure du TPF, qui sera plus tard intégré au Centre dramatique national, avec lequel Cyril Robichez (1920-2001) mènera jusqu’en 1981 les expériences les plus diverses : le premier festival de Lille, les Nuits de Flandre, le Petit-Théâtre quotidien du Pont-Neuf et le Théâtre Roger-Salengro à Lille. Avant sa retraite, il a dirigé le département théâtre de la direction régionale des affaires culturelles du Nord-Pas-de-Calais. Cyrille Robichez avait fait appel à Parvine Tabaï, une comédienne parisienne, interprète d’autres œuvres brechtiennes (Mère Courage) également de pièces d’Eugène Ionesco. Il assura également la mise en scène de ces deux pièces.

Le théâtre Pierre de Roubaix avec son entrée d'autrefois Photo Méd Rx
Le théâtre Pierre de Roubaix avec son entrée d’autrefois Photo Méd Rx

La ferme et l’hôpital

Bury-Prinpont est une ferme relativement ancienne, puisqu’elle figure déjà sur la carte de Cassini, datant du 18ème siècle. Située au Pont rouge, à la rencontre du chemin neuf et de l’ancien chemin de Lannoy qui deviendra la rue de Maufait, elle est tenue pratiquement tout au long du 19ème siècle par la famille Despret, dont le nom est également orthographié Desprez.

Carte de Cassini, 1740 – document IGN
Carte de Cassini, 1740 – document IGN

C’est ainsi qu’on y recense en 1920 Despret Pierre François, né en 1789, qui a épousé de Marie Julie Duthoit, dont il aura plusieurs fils, Pierre Louis, Henri et Florimond. Son épouse décède en 1827, et il se remarie avec Catherine Deschamps le 7 mai 1832. La famille va occuper la ferme, qui appartient en 1747 à Antoine Théry, un avocat lillois, jusqu’en 1875, alors que le chef de famille approche de 90 ans.

Entre temps, son fils Florimond, marié à Adélaïde Dellebecq, va exploiter, à quelques centaines de mètres de là, la ferme de Courcelles située le long de l’ancien chemin du même nom, qui sera remplacé par la rue Victor Hugo. Il va reprendre après son père l’exploitation de Bury-Prinpont, en laissant à son fils Pierre, époux de Sophie Desquien, le soin de reprendre la ferme de la rue Victor Hugo. Catherine Deschamps va décéder en 1871, et son mari en 1878 ; on retrouve Florimond à la ferme de 1880 à 1896

Plan cadastral 1884
Plan cadastral 1884

Mais cette zone agricole va perdre brusquement son caractère campagnard. En effet, en 1891, le conseil municipal, sous la férule de Julien Agache décide de faire l’acquisition auprès de la famille Théry de 4 hectares de terrain, incluant la ferme, pour y construire un nouvel hôpital. C’est chose faite en 1893. La ville, désormais propriétaire de la cense et des terres qui l’entourent, va laisser courir le bail de Florimond Despret en attendant d’avoir un financement pour commencer les travaux.

Le nouvel hôpital
Le nouvel hôpital

Mais les choses se précipitent : la ferme brûle le 7 juillet 1896 ; cet incendie sonner le glas de l’exploitation pour la famille. L’année suivante, les frères Despret réclament une indemnité de fumure pour compenser la perte d’exploitation qu’ils ont subie.

La ferme est démolie pour 1900 et la construction de l’hôpital suit : les pavillons s’élèvent les uns après les autres et le journal de Roubaix annonce en 1907 l’inauguration prochaine

Photo IGN
Photo IGN

Cette famille de fermiers va abandonner la culture et se reconvertir (Victor, le petit fils de Florimond, va tenir une épicerie au 261 rue de Lannoy). C’est cette famille qui édifiera le fort Desprez, qui deviendra plus tard le square des Prés.

Le Beau Chêne

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Le hasard des recherches dans les archives municipales nous a fait découvrir une photo de cette ferme, prise lors de sa démolition en 1927. D’après la légende, elle était située boulevard de Metz, et la comparaison avec des plans et photos aériennes de l’époque nous permet de préciser que le photographe était placé derrière la ferme et que les bâtiments au fond et à droite sont situés respectivement boulevard de Metz et rue Voltaire. Placée le long du chemin des Couteaux non loin du hameau du Hutin, elle fait partie des fermes anciennes de Roubaix, qu’on remarque déjà sur les plans cadastraux du consulat, juste après la révolution. Si elle n’est pas cernée de douves, comme d’autres à la même époque, c’est qu’il n’y a pas de cours d’eau à proximité immédiate pour les alimenter ; le canal n’arrivera que bien plus tard !

La ferme en 1884
La ferme en 1884

Dénommée Ferme du Beau Chêne en 1884 sur plan cadastral, elle est située dans le Ravet-Anceau au 9 chemin des couteaux, dans le hameau du même nom, ce qui correspondra plus tard au 105 boulevard de Metz. Les recensements successifs nous apprennent qu’elle était tenue au 19 ème siècle par Louis Prouvost, né à Roubaix en 1800, qui a épousé assez tard Victoire Masquelié (également orthographié Masquelier). Celle-ci, veuve depuis 1881, conservera la ferme qu’elle laissera ensuite à ses enfants. D’après le Ravet-Anceau, celle-ci sera exploitée jusqu’en 1926. Le chemin des Couteaux sera progressivement redressé et élargi pour constituer le boulevard de Metz, mais la cense, placée en retrait du chemin, ne sera pas touchée par ces travaux. En 1867, le percement du canal va bouleverser le quartier et séparer les hameaux jusque là voisins et traverser sur les terres dépendant de la ferme.

Situation de la ferme sur une photo IGN
Situation de la ferme sur une photo IGN

Louis Joseph Prouvost est seul en 1836 pour élever ses trois filles Julie, Eosine, et Virginie. Il se mariera en 1846 à Victoire Masquelié, qui lui donnera deux autres filles, Victoire et Marie. Celles-ci auront respectivement 4 et 2 ans en 1851. Marie n’aura pas de descendance, mais Victoire aura deux filles de son mariage avec Jules Warlop, Marie Victoire et Elise Marie. Louis et Victoire Prouvost-Masquelié achètent en 1866 la ferme qu’ils cultivaient jusque là à Mme Marie Christine Delporte, veuve de M. Pierre Joseph Dassonville.

BC4-96dpiEn 1893 des documents officiels nous apprennent que Mlle Marie Prouvost, fille de Louis et de Victoire est co-propriétaire de la ferme avec les enfants de sa sœur Warlop-Prouvost, mineures. Elle a construit une maison, qu’elle occupe depuis 1874, le long du boulevard, au 44 et demande un permis de construire pour en édifier deux autres tout à côté. Les deux sœurs en font également construire deux, choisissant également comme architecte M. Deregnaucourt. Victoire Warlop-Prouvost, veuve, occupe la ferme de 1882 à 1895. La ferme est ensuite reprise à bail par la famille Dupont, qui l’exploite entre 1899 et 1926, à la veille de sa démolition. Durant cette période, la cense a été vendue : M. Dupuis, habitant Tourcoing, en est propriétaire en 1914, et Jules Wacquier, entrepreneur, l’est en 1920.

Les maisons construites près du 44 par la famille
Les maisons construites près du 44 par la famille

Le vieille ferme est donc démolie en 1927. Les établissements Masurel obtiennent un permis de construire pour un alignement de 27 maisons au coin du boulevard de Metz et de la rue Voltaire. Une photo aérienne de 1932 nous montre le long du boulevard cette rangée de maisons, alors que des jardins (ouvriers?) s’étendent sur son emplacement. En face de l’autre côté du boulevard, d’autres jardins (ouvriers également?).

Les documents proviennent des archives municipales.

 

 

 

 

La pharmacie de Paris

Le conseil municipal du 7 février 1867 décide de créer l’avenue de l’Impératrice, qui prendra par la suite le nom de boulevard de Paris, sur l’emplacement du souterrain qui devait prolonger le premier tracé du canal vers Croix. L’état avait exproprié à cet effet un terrain de 20 mètres de large à partir de la rue du Moulin. Mais la largeur de la future promenade doit être de 40 mètres ; il faut récupérer de part et d’autre une bande supplémentaire de 10 mètres.

Situation en 1867
Situation en 1867

La presque totalité des riverains accepte d’offrir gratuitement à la ville les terrains nécessaires. Il demeure quelques parcelles à exproprier aux angles de la rue du Moulin. On démolit donc quelques maisons, puis on reconstruit selon le nouvel alignement.

Plan de 1884
Plan de 1884

En 1875, monsieur Guilluy est pharmacien au 20 rue du Moulin. Peu de temps après, en 1880, la pharmacie est remplacée par une autre située au numéro 16, au coin du boulevard. Le pharmacien est maintenant A. Constant, qui a repris l’officine et l’a déménagée vers un emplacement plus favorable. Il reste à changer l’adresse. Ce sera sans conséquence pour le bâtiment : l’entrée, située sur le pan coupé, ouvre sur les deux voies. La renumérotation est chose faite en 1885 : la pharmacie est maintenant située au 1 du boulevard de Paris et les numéros de la rue du Moulin débutent en conséquence au 18.

La pharmacie au début du siècle – document coll. particulière
La pharmacie au début du siècle – document coll. particulière

On retrouvera Monsieur A.Constant à cette adresse jusqu’en 1926. L’officine est alors reprise par F. Constant, (son fils?), qui y officiera jusque dans les années 50. La pharmacie figure en 1960 sous le nom de M. Malbranque-Constant (le beau-fils?), qu’on retrouve là encore en 1988. Trois pharmaciens en plus de 100 ans, une belle longévité !

La pharmacie en 1989
La pharmacie en 1989

La pharmacie est reprise ensuite par M. et Mme Pelaton, qui, perpétuant la tradition, y restent un nombre d’années important. Mais des projets de modernisation guettent la pharmacie : on construit en face au début des années 90 un immeuble moderne en forme de lame de couteau. Son tour va venir ; elle est démolie dix ans plus tard, remplacée par un nouvel immeuble. Mais l’officine ne disparaîtra pas pour autant : elle est réinstallée dans ce bâtiment neuf avant 2004. Elle a pris aujourd’hui le nom de grande pharmacie de Paris. M. Beaurain préside désormais à sa destinée au sein du groupe Giropharm.

Photo Jpm 2016
Photo Jpm 2016

Les autres documents proviennent des archives municipales.

Le centre social du Carihem

L’office municipal HLM a construit au Carihem un ensemble de 220 appartements qui ont été terminés en décembre 1964. Depuis, près de sept cents personnes habitent cette nouvelle partie du quartier, et la création d’un centre médico-social est apparue opportune, car la plus proche structure de ce type se situe rue Franklin. Le nouveau centre devient donc une annexe de celui de la rue Franklin, en attendant un ensemble social plus vaste, dans la ZUP des Trois Ponts, pour laquelle les travaux vont bientôt commencer, et on envisage qu’ils ne soient pas terminés avant 1970. Ce coin de Roubaix fait l’objet de multiples projets, comme le rappelle le maire Victor Provo, des écoles seront construites, les PTT vont y installer un nouveau centre de tri, on prévoit même une antenne d’autoroute vers Wattrelos et Dottignies !

Le lotissement du Carihem Photo NE
Le lotissement du Carihem Photo NE

Pour l’heure, les habitants du quartier du Carihem, de la rue de Leers, de la rue Boucicaut sont également concernés par ce service de proximité, qui doit ouvrir le 2 août 1966. Le centre médico-social du Carihem comprend une grande salle d’attente attenante à la salle de soins, où se tient le bureau de la directrice Mme Doutreluigne.

Vue extérieure du centre Photo NE
Vue extérieure du centre Photo NE

Quels soins y prodigue-t-on ? Pansements, piqûres, rayons ultra-violets et infra-rouges, délivrance de feuilles de soins pour l’aide médicale gratuite, protection maternelle et infantile, service de vaccinations. Le centre est ouvert tous les jours, sauf le dimanche, de 10 heures à 11 heures 30, mais la permanence sera progressivement allongée. Le second rôle du centre sera d’accueillir les anciens, qui deviendra un lieu de rencontre et de repas qui seront d’abord distribués, puis organisés sur place.

Cette création fait suite au souhait de l’administration municipale, que rappelle Victor Provo lors de son allocution : que chaque quartier soit doté d’un centre médico-social. L’inauguration de ce nouveau centre a lieu le jeudi 28 juillet 1966. Y assistent les maires de Roubaix et de Wattrelos, un certain nombre d’adjoints, le directeur de l’office municipal HLM, M. Ditte entre autres personnalités, et quelques habitants du Carihem. Ce centre médico-social était situé au n°11 rue du stand de tir.

Pendant l'inauguration Photo NE
Pendant l’inauguration Photo NE