Motte Bossut magasin d’usines

La commission départementale d’urbanisme commercial se réunit le 4 juillet 1983 pour statuer sur un projet de M. Ghislain Dalle. Il s’agit de réunir sous un même toit une trentaine de fabricants qui vendraient des articles de marque, déclassés, dégriffés ou des fins de série. Cette surface de magasins d’usines s’implanterait dans les bâtiments de l’usine Motte-Bossut, avenue Alfred Motte. Le projet est autorisé par décision de la commission : 13 voix pour et 5 contre, dont celles de MM Catrice adjoint et Carton conseiller général.  Toujours en juillet 1983, le commerce roubaisien se déclare opposé à ce projet. En Décembre 1983, intervient un événement important, l’union du commerce de Roubaix est née. Il ne s’agit pas d’une fédération des unions commerciales, qui continuent de subsister. C’est plutôt une structure de dialogue et de concertation, qui aborde les sujets suivants : sécurité, circulation, urbanisme commercial, animation commerciale. Les membres de cette union joueront le rôle de députés du commerce roubaisien. Premier chantier envisagé, une grande animation commerciale pour la ville. Parrain et marraine, le maire de Roubaix et la chambre de commerce. Le Président est Jules Rouvillain, commerçant Grand rue (magasins de jouets Récréation), ex juge au tribunal de commerce. Souhaitée par l’ancien maire Pierre Prouvost, cette naissance est due à André Diligent et Marcel Delcourt, aidés par Jacques Catrice et Jean Papillon, élu roubaisien à la chambre de commerce. Lille et Tourcoing possédaient déjà une telle structure. On trouve dans le bureau, la plupart des présidents des unions commerciales de Roubaix.

 Motte Bossut, l’usine en travaux, Collection direction de l’Usine

En Février 1984, les commerçants du centre réaffirment leur opposition au projet Dalle. Leur présidente, Mme Harmand, écrit au maire et au président de la chambre de commerce. Elle dit que les commerçants ont été mis devant le fait accompli au début de l’été après l’avis favorable de la commission départementale. Jean Papillon dit qu’il a toujours été opposé au projet, et qu’il n’est pas trop tard pour le faire capoter. Le président de la chambre de commerce a intenté un recours auprès du tribunal administratif, et en attendant le projet est suspendu. Mais il souhaite le soutien unanime des commerçants. Les commerçants s’étonnent : pourquoi la mairie est-elle d’accord avec le projet ?

André Diligent répond : je serais un idiot de faire quoi que ce soit contre le commerce roubaisien. Il aurait voulu que ce projet se fasse dans le centre ville, et il en dit toute l’originalité aux États-Unis. Il voit aussi la perspective de faire venir des acheteurs à Roubaix par cars entiers. Et il ajoute : si cela doit être un succès, essayons d’en tirer profit. Et si ça ne marche pas, tant pis. Il signale qu’il n’a pas le pouvoir d’empêcher le permis de construire. Il termine en élevant le débat : ne faisons pas comme si l’avenir du commerce de Roubaix était lié à ce projet des cousins Dalle ; il est d’abord fonction du pouvoir d’achat des roubaisiens. Dans cette affaire je n’ai qu’une idée, je voudrais que pour la région le slogan soit évident, Roubaix, la ville où l’on fait des affaires.

Les unions commerciales de Roubaix votent alors à bulletins secrets par le biais de la fédération, et le résultat est mitigé : la moitié est pour, l’autre contre. Le projet des cousins Dalle semble difficilement pouvoir être remis en cause. La mairie a obtenu des promoteurs que les articles de premier choix soient exclus à la vente et que 70% des produits français y soient vendus, et que dans le comité de gestion, il y ait un représentant de la mairie et un commerçant roubaisien.

Le 24 février, M. Dalle annonce que l’Usine ouvrira en mai. Cet ancien cadre des établissements Décathlon s’est lancé dans ce projet d’entreprise avec l’aide de son cousin Hugues Dalle conseil en entreprise. Il a choisi d’implanter à Roubaix ce concept de magasins d’usine si florissant aux États Unis, parce qu’il y a des friches industrielles, avec des conditions de loyer et de charges raisonnables. Il présente Roubaix comme une terre de réussite pour les entreprises de distribution.

 Les aménagements intérieurs de l’Usine Collection Direction de l’Usine

Il a racheté l’ancienne usine de velours Motte Bossut, le baptise à l’Usine, et 7.500 m² de surfaces commerciales y sont aménagés. Les bâtiments existants seront conservés, et cloisonnés en cellules indépendantes à une trentaine d’industriels dont bon nombre de la région, et qui cherchent à écouler leurs fins de série.

Selon Guislain Dalle, les commerçants roubaisiens ne doivent pas avoir peur, car un industriel ne mettra pas sur le marché des articles qui le couperaient de son réseau de détail. Il mettra ici d’anciennes collections. On ne trouvera pas les mêmes articles qu’en centre ville. Il pense que l’Usine attirera du monde à Roubaix. Il dit ne pas avoir de groupe derrière lui, gérer son affaire avec son cousin et des actionnaires qui croient à la réussite du projet.

 L’Usine et alentours en 2001 Collection Direction de l’Usine

En Mars, M. Loviton président des commerçants de l’Epeule, résume ainsi la position des contre : les commerçants n’ont pas été informés, et ils sont opposés au projet. Il estime qu’il s’agit de concurrence déloyale pour beaucoup de commerces, et demande de la liste des fournisseurs afin de boycotter leurs marques. Il trouve regrettable que des hangars aient la faveur du public, alors que tant d’efforts sont faits pour enjoliver la ville avec des façades et magasins attrayants. Il ajoute que les cours de vendeurs de Cepreco n’ont plus lieu d’être, puisque pour vendre des rebuts, il ne faut pas être diplômé. Il trouve enfin regrettable que l’image de marque de Roubaix soit celle de capitale des invendus et des seconds choix. En conclusion, il regrette que les élus roubaisiens aient été favorables au projet, et annonce que ces expériences se font au détriment du commerce indépendant, et que cela ne fait que commencer !

Le centre commercial de magasins d’usines ouvre le mardi 15 mai 1984, et il réunit 50 fabricants essentiellement textiles. Le rachat de l’usine a coûté 5 millions de francs, et l’investissement total se monte à 14 millions de francs. Une première phase de travaux a concerné le bâtiment à l’angle de l’avenue Motte et de la rue Michelet, pour 6000 m² de vente sur trois niveaux, autant qu’un magasin Printemps. L’aménagement est rudimentaire : peinture sur les murs, moquette au sol, cloisons amovibles…Les 50 fabricants se répartissent en 28 magasins, certains s’associant pour réduire les frais généraux. Les articles sont 40% moins chers, ce sont des fins de série, des articles de collection ou déclassés. La location des cellules équivaut à un loyer correspondant à 3% du chiffre d’affaires, une association réunit tout le monde et un règlement intérieur a été établi.

Les premiers fournisseurs de l’Usine Publié par Nord Éclair

Une deuxième tranche de travaux sera terminée pour le dernier trimestre 1984. On prévoit un nouveau bâtiment de 3.000 m², pour l’équipement de la maison, et l’aménagement d’un parking couvert. En attendant, l’usine est ouverte tous les jours de 10 h à 19 h sauf le dimanche.

 L’ouverture de l’Usine Photo Nord Eclair

L’ouverture est un succès. C’est dix fois plus que ce que j’espérais dit Ghislain Dalle, qui se félicite de la neutralité bienveillante des anciennes et actuelles équipes municipales, et réaffirme son souhait que Roubaix devienne la capitale des bonnes affaires. A bon entendeur…

D’après les articles de Nord Éclair
Remerciements à la Direction de l’Usine pour les documents iconographiques

La rectification du carrefour

Pour faire face à l’afflux de trafic au carrefour, on se préoccupe dès 1886 de favoriser la circulation des tramways. Devant le conseil municipal, M. Roche défend le projet de dégager l’alignement de la rue Neuve (de nos jours, rue du Maréchal Foch), en démolissant les immeubles entre la rue de Lille et le boulevard de Paris,  pour faciliter le passage des tramways de Lille. En effet, la rue de Lille obliquait alors vers la gauche pour rejoindre la rue Neuve en suivant l’alignement de la rue des Loups. Pour aller à droite en direction du boulevard de Paris, il fallait contourner un groupe de maisons placées dans le prolongement de la rue du Moulin, dont l’axe ne correspondait pas à celui de la rue Neuve.

Cet îlot appartient alors aux hospices de Roubaix, et les immeubles sont loués à un certain nombre de commerçants. On trouve au coin de la rue de Lille (n°1) et de la rue du Moulin (n° 2 et 4) un vieil estaminet à l’enseigne de l’ancienne barque d’or, au nom de M.Desbarbieux. Au n°6 de la rue du moulin, un sellier, M. Dupureur-Barot, au n°8 un négociant en vins, M.Coulon-Cuvelier, et au n°10, un autre estaminet au nom de M.Depauw. Rue de Lille, avant la rue des Loups, il y a une pâtisserie au n°3, au nom de R.Vanhaelst. On voit sur le plan qui suit les cinq commerces concernés et en rouge, le tracé du nouvel alignement.

Le projet en 1911 – document archives municipales

Le projet est pourtant reporté pour des raisons financières, le bail de ces commerçants ne se terminant qu’en 1924, ce qui représente des indemnités conséquentes à verser. En 1910, on reprend l’idée, et les immeubles situés entre la rue de Lille et le boulevard de Paris et appartenant aux hospices de Roubaix sont frappés d’alignement pour dégager les entrées de la rue du Moulin et de la rue de Lille, qui serait ainsi redressée. Les immeubles concernés sont un cabaret au coin du boulevard de Paris loué à M Desurmont, brasseur, et tenu par M. Dubus, un tapissier au n°6, Mme Veuve Rohart, un bourrelier au n°4, M. Dupureur, et l’estaminet de la barque d’or au n°2, au nom cette fois d’Henri Duvillers.. Au n°3 de la rue de Lille se trouve toujours la pâtisserie Vanhelst, et un terrain est loué à la compagnie des tramways de Lille à l’angle du boulevard de Paris.

Par ailleurs, il est également prévu d’exproprier trois immeubles situés au bord du boulevard de Paris, où exercent le boulanger Moreau, le photographe Shettle, et le marchand de vins Grimonprez. Il s’agit en fait de démolir tous les immeubles situés entre la rue de Lille et le boulevard de Paris jusqu’au débouché de la rue des Loups, pour créer une vaste place publique… La commission concernée juge que pour des raisons financières, il vaut mieux s’en tenir à la première partie du projet.

L’estaminet Dubus au numéro 10, le tapissier aau numéro 8 et vue des  démolitions 
documents Journal de Roubaix et coll. particulière

La ville reprend les baux et fait évacuer les occupants pour pouvoir démolir, mais Dupureur regimbe : il n’envisage pas d’abandonner aussi précipitamment une maison de commerce aussi bien placée dans l’intersection des plus belles et des plus vitales artères de la ville… La guerre survient, qui repousse les travaux de démolition. Ceux-ci sont finalement réalisés, et l’Écho du Nord nous montre en 1930 une palissade couverte d’affiches et de panneaux publicitaires cachant un terrain vague, et qualifié de véritable lèpre dans le quartier. On voit que les immeubles à l’entrée du boulevard de Paris sont toujours debout.

Le site en 1930 – photo Echo du Nord

En 1932 voit le jour un projet de construction d’un immeuble moderne, et le journal l’Égalité précise que le syndicat d’initiative les amis de Roubaix intervient pour que l’immeuble soit conçu dans le style flamand, bien dans la note locale. On décide aussi de démolir les n° 2 à 10 du boulevard Paris, appartenant à la « foncière des Flandres », avant de construire l’immeuble de rapport. Ces bâtiments, dont on voit le premier sur la photo précédente et qu’on retrouve sur la suivante, abritent au n°2, à l’angle, le pâtissier Vanhelst,  exproprié en 1912 du n°3 rue de Lille, et qui a repris la boulangerie de M. Moreau, le photographe Shettle au n°4, un expert comptable au n°6, suivi des entrepôts du Nord, négociant en vins.

Les immeubles à démolir – document collection particulière

Les travaux vont bon train et l’immeuble prend forme l’année suivante. L’Égalité déclare : par son architecture il se rapproche de l’Hôtel des Postes, tout voisin, et, comme cette construction, il ne manque pas d’élégance.

L’immeuble en construction – photo l’Egalité 1933
Le même, terminé – document médiathèque de Roubaix
 

Mais l’histoire de ce carrefour ne s’arrête pas là, et nous ne manquerons pas de la détailler davantage…

 

 

 

Le percement de la Grande Barre

Le grand bâtiment long de 300 mètres plus connu sous l’appellation de grande Barre fut construit à partir de 1958 et constitua avec six autres immeubles la cité des Hauts Champs. Aujourd’hui disparu, il s’étendait sur les territoires d’Hem et de Roubaix. Il était parallèle à la rue Joseph Dubar (sur Roubaix) et l’avenue du docteur Calmette (sur Hem). Deux autres immeubles étaient disposés dans le même sens, le bâtiment B7 appelé Greuze, et le bâtiment B9, appelé Degas. On se souvient encore de l’évolution récente de ce dernier bâtiment, qui fut coupé en deux par le prolongement de la rue Léon Marlot, puis à nouveau par le percement de la rue Chardin. Ce dispositif de désenclavement aurait-il pu être appliqué à la Grande Barre ? Sans atteindre les proportions de l’opération Degas, le percement de la Grande Barre a été projeté et réalisé en 1973, soit quinze ans après sa construction.

Plan de 1962 Nord Éclair

De la même manière qu’il fallait contourner le bâtiment Degas pour rattraper l’avenue Motte, l’accès de Roubaix en venant d’Hem se faisait indirectement. La circulation augmentera rapidement après la réalisation du quartier de Longchamp, à cheval sur Hem et Lys Lez Lannoy. La question d’un passage sous la grande barre fut abordée lors d’un débat public, le vendredi 9 février 1973,  en même temps que celles de la construction d’une salle de réunion, d’une halte garderie, et de la transformation de l’ancienne caisse d’épargne en bureau de poste. Le C.I.L s’engage alors à réaliser le passage à partir de septembre. Il s’agira d’un passage souterrain pour piétons, qui se situera dans l’alignement de la rue Pierre Brossolette (Roubaix), et de la rue de la Justice (Hem). Il est envisagé de le prolonger côté Hem par un chemin vers la rue Villemin.

Le passage de la grande barre Photo Nord Éclair

Les travaux se sont achevés en novembre 1973. Le percement a été réalisé en supprimant des emplacements de caves, afin de permettre le passage. Nous n’avons pas trouvé d’éléments sur ces travaux qui ont été menés assez rapidement. Les témoignages recueillis dans l’atelier portent plus sur l’utilisation du passage, que l’on traversait rapidement, de peur de faire une mauvaise rencontre. A la différence du percement Degas, ce passage sous la grande barre était piétonnier et fut plutôt considéré comme une desserte pour riverains. Son côté pratique n’a nullement solutionné les problèmes de circulation. Il est vrai que la grande barre et ses alentours mettaient en évidence que la solution était à trouver dans la concertation entre les trois villes, les bailleurs et les habitants. A noter que ce passage fut la seule réalisation prévue sur les trois annoncées dans la réunion de février 1973. C’est le début de longues discussions.

Une cinquantaine d’enseignes

Roubaix 2000 poursuit ses efforts pour s’intégrer dans la vie et la ville roubaisienne. Ainsi crée-t-il sa braderie annuelle le lundi 27 avril 1981. En 1982, le centre commercial Roubaix 2000, c’est 50 petits commerçants qui sont pour 50% dans la copropriété, Auchan pour 30% et la ville pour 20% pour les cellules non occupées. La répartition entre les types de  commerces s’établit comme suit : il y a une majorité de commerces vestimentaires, quinze enseignes (vêtements adultes, enfants, lingerie, bonneterie), auxquels on peut ajouter quatre marchands de chaussures, trois solderies, et deux négoces de tissus. Avec le service de nettoyage des vêtements et la maroquinerie, c’est plus de la moitié des commerçants de Roubaix 2000 !

Roubaix 2000 en 1983 Publicité Nord Éclair

Les commerces de l’alimentation viennent ensuite, avec la restauration, café brasserie le Belfort, pizzeria Russo, restaurant La Fourchette et le Restoself 2000, une boulangerie et une confiserie, sans oublier l’importante présence d’Auchan. Viennent ensuite les services bancaires (Crédit Lyonnais, Crédit du Nord) les assurances de la Macif et une permanence des Assedic. Enfin, on trouve deux commerces de cadeaux, une bijouterie, un disquaire (discocave), un magasin d’électronique (Tandy), un magasin de jouets, un fleuriste, une parfumerie et une maison de la Presse. Et bien entendu, les deux salles de cinéma, Colisée 2 et 3.

Roubaix 2000 en 1983 Publicité Nord Éclair

Les travaux de remise à neuf  s’élèvent à un montant de 20 millions de francs, dans lesquels la moitié serait supportée par les commerçants et le reste par Auchan et la ville, en attendant que la bataille pour les malfaçons aboutisse…. On récapitule les aménagements à effectuer d’urgence : favoriser l’accès par la place de la Liberté et le boulevard de Belfort, améliorer l’accès et la sécurité du parking souterrain, couvrir le centre et le fermer, modifier la circulation à l’intérieur du centre…

Publicité Nord Éclair

L’animation continue : à la fin de l’année 1982,  Roubaix 2000 organise une animation autour du dernier film sorti par Walt Disney, l’avant-gardiste Tron.

La presse donne quelques statistiques : le chiffre d’affaires annuel moyen de Roubaix 2000 s’élève à 7700 francs le m², et c’est le plus bas de tous les centres commerciaux de France. On pourrait atteindre 12.000 francs le m², selon les spécialistes. Après une étude pour les travaux, il apparaît que les commerçants ne pourraient prendre en charge qu’une part de 4,8 millions, encore s’endetteraient-ils pour 20 ans ! La ville participera à hauteur des surfaces non occupées, et Auchan qui pense à son développement régional, se fait tirer l’oreille… On apprend alors que la copropriété a gagné son procès contre les malfaçons. On attend une rentrée de 1,5 millions de francs. Arnold Seynaeve, nouveau président du GIE, croit au développement, mais il faut une décision avant la fin de l’année. Il déclare :

si les trois parties n’arrivent pas à s’entendre sur un projet de rénovation du centre commercial, il n’y a plus qu’à raser Roubaix 2000, car il est impossible de continuer plus longtemps comme cela !

Sombre présage…

Naissance du centre familial Carpeaux

L’immédiat après guerre voit le développement des œuvres de solidarité et d’aide aux familles. Dès 1947, la Croix Rouge crée à proximité de ses dispensaires des centres sociaux[1],  où se pratiquent l’enseignement ménager, le prêt de livres ou la consultation sur place de la bibliothèque, le chant, la danse et la garde des enfants pendant ces activités. Vient ensuite la création du centre social La Maison rue de Lille, agréé en 1953 par la Caisse d’Allocations familiales. Toutes ces expériences vont inspirer celle du quartier du Nouveau Roubaix, à l’initiative des associations populaires et familiales, qui se mettent à la recherche d’un endroit pour la création d’un nouveau centre familial.

L’ancien garage aménagé en centre familial au n°68 rue Carpeaux Photo PhW

Le garage Coetsier situé à l’angle des rues Ingres et Carpeaux est mis en vente en 1956, et Mme Pollet  Béghin[1], l’une des fondatrices du centre, fera usage de sa fortune personnelle pour acquérir ces locaux. Le garage possédait à l’époque une entrée rue Carpeaux et une sortie pour les voitures réparées rue Ingres. Bien qu’il ne se situe pas au milieu du quartier du Nouveau Roubaix, ce local permettait de faire la jonction entre ce quartier et celui de Moulins Potennerie.

Mesdames Pollet Béghin, Heyndrickx et M. Jacques Michaux constituent un conseil d’administration pour l’essentiel composé d’associations dévolues aux familles : l’association populaire de Roubaix, le Foyer de l’Enfance, l’Association populaire des aides familiales, l’Association des familles, La Maison de la Famille, l’Aide aux mères de famille, le PACT[2]. C’est là un genre d’exploit, ces associations étant souvent concurrentes dans d’autres quartiers de la ville.

Une première assistante sociale vient au centre familial pendant six mois, elle est remplacée à son départ par Melle Raymonde Denis. Au début de l’année 1957, celle-ci reprend le porte à porte dans le quartier, et recueille besoins et attentes de la population. Elle deviendra la directrice du centre familial Carpeaux, mi temps assistante, mi temps directrice du centre, et s’occupera de l’écriture des statuts et du dossier de demande de centre familial auprès de l’association des centres familiaux.  Le conseil de direction est alors composé comme suit : Président, M. Jacques Michaux, Vice-présidents, Mmes Meunier, Pollet-Béghin et M. Seynave, secrétaire, M. Audooren et trésorier,  M. François Motte.

A partir d’octobre 1958, des réunions sont organisées pour recueillir les besoins et les attentes de la population. En Janvier 1959, il est procédé à l’ouverture du centre familial Carpeaux sous l’égide de l’association des centres familiaux. On y trouve des cours de coupe couture, une section de bricolage, un club de dessin, une bibliothèque, des cours de pâtisserie et d’enseignement ménager, un cours de danse et de cuisine. Ce sont les mères de famille qui accueillent. On vient au centre familial pour apprendre et communiquer aux autres, et on peut amener les jeunes enfants qui ne vont pas à l’école. L’assistante sociale reçoit les familles le jeudi et vendredi de 10 à 12 sur rendez vous. Le centre familial de la rue Carpeaux vient de faire ses premiers pas, et déjà échafaude de nouveaux projets.

(à suivre)

Remerciements à Madame Gisèle Delanoy pour son témoignage et pour le document

[1] Il y en a deux  à Roubaix : l’un est situé au 46bis rue de la chaussée dans le quartier de la Guinguette et l’autre est à au n°51 du boulevard de Belfort. Voir le blog Edouard Anseele pour en savoir plus.
[2] Madame Etienne Pollet Béghin, est la fille de Joseph Béghin, industriel à Thumeries (sucre, pâte à papier, presse) et elle épouse Étienne Pollet, industriel lainier, dirigeant des établissements Les fils de César Pollet. Jeune fille, elle se forme au dispensaire école de la Croix Rouge des Longues Haies. Adulte, elle poursuit l’action caritative par son engagement dans l’action sociale. D’après Jacques Eloy Maître de conférences à l’Université de Lille 3.
[3] id

 

Un carrefour de tramways

Ancien chemin d’accès vers le moulin seigneurial, la rue du Haut Moulin est classée, ainsi que la rue de Lille, dans le réseau des voies urbaines en 1836. Elle prolonge la rue Neuve passée la rue de Lille. Au milieu du 19e siècle, elle troque son nom contre celui de rue du Moulin. Elle deviendra rue Jean Moulin en 1963.

Le bas de notre rue du Moulin sert de limite au du canal ouvert en 1843, qui s’arrête là en cul de sac. Il était prévu d’établir la jonction avec le tracé de Croix à travers les Hauts de Barbieux (actuel parc de Barbieux), mais des difficultés imprévues conduisent à l’abandon du chantier et à la réalisation d’un nouveau tracé au Nord. L’ancien canal est alors comblé entre la rue du Moulin et le pont Nyckès de 1873 à 1883. Sur son emplacement, on crée un boulevard central qui prend alors le nom de boulevard Gambetta. Le chantier du canal au delà de la rue du Moulin, abandonné, constituera l’avenue de l’Impératrice et le parc qui la prolonge. Cette avenue prendra en 1871 le nom de boulevard de Paris. On ne tarde pas à orner l’extrémité du boulevard Gambetta d’une fontaine.

Plan de 1867 – Document archives municipales

L’évolution des techniques fait que ce carrefour très passant ne tarde pas à être traversé de nombreuses voies ferrées. En 1878 la compagnie des Tramways de Roubaix et Tourcoing (TRT) met en service les premières lignes de tramways à chevaux, dont la ligne 1, menant de Croix à Tourcoing, qui emprunte la rue de Lille pour tourner à angle droit dans la rue Neuve. Cette ligne est construite à écartement normal (1m44), alors qu’en 1881, la ligne F des tramways à vapeur de la compagnie des tramways de Lille et de sa banlieue (TELB), également à voie normale, et menant de Lille à Roubaix par Croix, emprunte également cette même voie.

En 1894, les tramways à chevaux cèdent la place à des motrices électriques à la TRT. Celles-ci étant désormais à écartement métrique (1m), les rues neuve et de Lille doivent recevoir quatre files de rails imbriquées (écartement normal pour TELB et métrique pour les TRT). Mais le nombre de voies traversant notre carrefour va encore se multiplier. En effet, une ligne nouvelle ligne 2 bis, puis A bis) conduit à partir de 1905 de la grand-Place vers l’hospice Barbieux par la rue Neuve et le boulevard de Paris. Une autre ligne nouvelle emprunte la rue Neuve et la rue du Moulin et traverse la zone qui nous occupe aux alentours de 1900 vers le Raverdi et le boulevard de Fourmies (ligne 10, puis I).

1909 voit la mise en service du grand boulevard parcouru par le Mongy, sous les couleurs de l’ELRT, l’Électrique Lille-Roubaix -Tourcoing, à écartement métrique lui aussi. Il emprunte le boulevard de Paris par des voies longeant chacun des trottoirs et traverse la rue Jean Moulin pour poursuivre sa route par le boulevard Gambetta jusqu’à son terminus situé place de la Justice. Par la suite, la TRT abandonne la ligne vers Croix aux TELB, et la rue Neuve perd à cette occasion ses quatre files de rails pour ne conserver que sa voie métrique. En effet, le parcours de cette ligne est modifié en 1908 ; venant de la rue de Lille, elle rejoint désormais la grand-place par le boulevard Gambetta et la rue Pierre Motte. Quelle densité de voies ferrées à cet endroit !

Les voies traversant le carrefour en 1914. Document archives municipales

Ce plan de voies va se simplifier au fil du temps jusqu’à la suppression finale des tramways « urbains ». Seules les voies du Mongy demeureront. Elles vont modifier leur itinéraire et emprunteront la rue du Maréchal Foch dans les années 50 à la suite du prolongement de la ligne de la place de la liberté à la grand-Place et la constitution d’une raquette de retournement.

Intéressons nous maintenant aux bâtiments formant le coin rue de Lille-rue Neuve-boulevard Gambetta : Ils ont également beaucoup évolué au cours des années. A l’angle de la rue Neuve et du boulevard Gambetta on trouve à la fin du siècle un estaminet sous les noms de Farvacque en 1885, Lecreux en 1900, à l’enseigne du café des Arcades.

Le café des arcades – document médiathèque de Roubaix

Traversons la rue Neuve. Sur le trottoir d’en face, à l’angle de la rue de Lille, côté rue Neuve, une épicerie et une boucherie appartenant toutes deux à la famille Scarceriau. L’épicerie deviendra très vite un bureau de tabacs et la boucherie se transformera en estaminet sous la direction de M. Desmarez avant 1904. Le pan coupé de ce commerce arbore sur la photo une splendide peinture murale ! Sur le même coin, mais côté rue de Lille, on trouve une charcuterie au 2, et l’hôtel du Nord au 4.

L’extrémité de la rue neuve après 1908 – A gauche l’estaminet Desmarez et la rue de Lille . Au fond une motrice électrique des TRT – document médiathèque de Roubaix

Mais le sujet est à peine effleuré, et nous le compléterons lors d’un prochain article…

 

Charbons et automobiles

En 1932, les travaux de construction du pont supérieur entraînent l’expropriation de M. Raux, négociant en matériaux, au 289 boulevard de Beaurepaire, après le passage à niveau. Il va alors s’installer sur le boulevard Industriel près du passage à niveau du Carihem, et dépose une demande pour la construction d’un mur de clôture et pour la construction d’un magasin, au n° 171. Deux ans plus tard, Edouard Raux fait bâtir une maison d’habitation sur la partie du terrain situé en bordure du boulevard industriel. L’architecte choisi par le propriétaire est René Dupire. On peut toujours voir cette maison de nos jours, de même que le mur de clôture.

Document Archives municipales

M. Raux apparaît en 1935 dans le Ravet Anceau, sous la rubrique « matériaux de construction ». Au début des années 50, il devient négociant en charbons. En 1959 apparaît, en plus de la mention des charbons Raux, la raison sociale SAVCA, combustibles liquides et gazeux. Les photos aériennes de 1953 nous montrent l’existence d’un embranchement particulier sur la voie ferrée centrale de l’avenue Salengro, permettant aux wagons de décharger directement dans la cour de l’entreprise. L’aiguillage d’accès était placé au niveau de l’actuelle avenue de Verdun ; c’est le seul embranchement sur cette voie. On distingue nettement les différents tas de charbons, et en haut de la photo, plusieurs tombereaux SNCF qui viennent d’être déchargés,  et un tronçon de la voie qui suivait l’axe de l’avenue Roger Salengro.

Photo archives municipales et photo Jpm
 

En 1970, l’entreprise se diversifie : parallèlement à la SAVCA, apparaît à la même adresse la société nouvelle de carrosserie automobile. En revanche, il n’est plus fait mention de commerce de charbons. L’entreprise a disparu en 1974,  M. Raux a sans doute pris une retraite bien méritée…

Photo Archives municipales

Le Ravet Anceau de 1979 mentionne les Établissements Ponthieux automobiles, concessionnaires Ford au 209, et J. Leys au 227. La photo aérienne nous montre qu’une partie du terrain a été distrait de l’ensemble pour y construire des maisons, et que les voitures ont désormais remplacé les tas de charbon !

Documents archives municipales
 

Le Ravet Anceau de 1987  indique toujours le garage Ponthieux, concessionnaire Ford, mais bientôt l’affaire est vendue à M. Rogier qui installe avenue Roger Salengro le garage Valauto sous la marque Volkswagen-Audi. Ce garage était précédemment installé au coin de l’avenue Motte et de la rue Jean-Jacques Rousseau, près de l’Usine sous l’enseigne MBBM, et son propriétaire était alors M. Mandron. Le départ du garage permettant à l’Usine de s’étendre – juste retour des choses – sur un terrain qui faisait partie, à l’origine, de l’usine de velours Motte-Bossut.

Photo Jpm

La Florentine

A peine le boulevard de Fourmies est-il ouvert, qu’est déposée en 1896 une demande de permis de construire pour un bâtiment à usage de commerce. Il s’agit d’un estaminet, au numéro 77, dont  le tenancier est M. Plankaert, de 1901 à 1926. Lui succèdent en 1927 MM. Delerue, et Sergheraert en 1929. A la suite de la renumérotation du boulevard, l’estaminet devient le 135 en 1934. M. Dourcin le reprend en 1939.

La demande de permis de construire – la porte est au centre de la vitrine -document archives municipales

Après guerre, le commerce devient une boulangerie,  alors qu’au même moment, s’installe juste en face une boulangerie concurrente, au 132, laquelle est tenue par le pâtissier Fassin, à l’emplacement d’un ancien magasin de lingerie. Une photo nous montre la future boulangerie avant sa conversion, sur laquelle on voit que la vitrine est toujours conforme au plan de 1896,  avec sa porte centrale.

Le magasin. Au fond l’usine Dazin-Motte et la place du Travail – Photo collection Bernard Thiebaut

On note que la boulangerie est tenue en 1953 par M. Routier, puis par M.Henou en1961. En 1977, Joseph Guesquière, le nouveau boulanger, demande un permis de construire pour aménager le magasin. On remarque sur le plan que l’état « avant travaux » est différent de celui de 1896 : la porte du magasin est maintenant placée à gauche de la vitrine. Les travaux projetés nous montrent l’état actuel de la boulangerie, avec la porte d’entrée élargie et replacée au centre.

Les états antérieur et projeté. Document archives municipales.

M. Guesquière tiendra la boulangerie quelques années, jusqu’à l’arrivée de Patrick et Pascale Hermand, venus de l’Avesnois où ils exerçaient depuis 1962, et qui gèreront la Florentine de 1990 jusqu’en 2002. Ils lui donneront une grande expansion grâce à leur pâtisserie fine, renommée en particulier chez les amateurs de chocolat. Après leur départ pour Lille, où ils ouvrent des commerces dans le vieux Lille et dans le quartier de Wazemmes, on assiste en 2002 à l’arrivée  de Marlène et Eric Morin, venant de Villeneuve d’Ascq où ils exploitaient  une première affaire depuis 1995. Ils conservent à la Florentine sa tradition de qualité, appréciée de la clientèle. Leur établissement emploie vingt-cinq personnes, dont six apprentis. Ce commerce aura fait preuve depuis l’origine d’une belle stabilité : estaminet pendant plus de 50 ans puis boulangerie-pâtisserie pendant un temps au moins égal ; on peut assurer que rien ne laisse présager de sa fin !

Document Hermand

Malfaçons !

Janvier 1981. Le centre commercial Roubaix 2000 est dans un état déplorable. C’est une véritable passoire : l’eau pénètre partout et cause des dégâts importants. Cinq pompes fonctionnent constamment pour que le parking souterrain ne soit pas inondé. Des crevasses apparaissent, des joints de dilatation, de la rouille. Tout ceci est du à des malfaçons. Et l’on apprend que la ville a engagé une procédure depuis 1972, année d’inauguration, et que le syndic des commerçants a pris la suite en 1975, notamment  pour faire jouer la garantie décennale.

La pluie à l’étage ! Photo Nord Éclair

On brocarde l’architecte, grand prix de Rome, qui a conçu un véritable blockhaus en centre ville. Même si les commerçants ont payé de leurs deniers la pose de glaces au rez-de-chaussée pour couper les courants d’air, l’étage de Roubaix 2000 reste ouvert à tous vents. On dénonce dans la presse l’irresponsabilité des promoteurs et l’inconscience des entreprises. Le tribunal doit établir les responsabilités des entrepreneurs, et la bataille d’experts est engagée. On parle d’ores et déjà de réhabilitation, à l’image de ce qui se passe pour les constructions d’autres grands prix de Rome, situés dans les quartiers sud de la ville. Il s’agit en effet de procéder à des réparations urgentes, et de fermer le centre pour qu’il soit à l’abri de la pluie et du vent.

La fermeture du rez-de-chaussée Photo Nord Éclair

Entre-temps Roubaix 2000 perd l’un de ses défenseurs les plus actifs. Roger Fruit était le Président du Groupement d’Intérêt Économique du centre commercial depuis 1973. Il faisait partie des quelques commerçants qui avaient connu les péripéties des déménagements successifs. Ayant repris en 1957 la maroquinerie de son père, située 56 rue de Lannoy, Monsieur Fruit s’en va occuper en 1964 un magasin du centre de transit du Lido, avant de rejoindre le nouveau centre en 1972. Il décède en ce mois de janvier 1981. La bataille juridique engagée pour cause de malfaçons sera plaidée en mars 1981. On évalue les réparations à plus d’un million et demi de francs. Les entreprises pourront faire appel, ce qui repoussera d’autant l’exécution des réparations. Des travaux conservatoires sous contrôle d’expert sont envisagés…Malgré toutes ces péripéties, les commerçants croient encore à la réussite du centre commercial, comme le montre leur important budget publicitaire. Auchan joue son rôle de locomotive en drainant plus de 100.000 clients chaque année, les aménagements pour le tramway et l’arrivée prochaine du métro ne peuvent que renforcer leur optimisme.

A l’étage, la galerie des courants d’air Photo Nord Éclair

Cependant, il faut bien constater que 13% des cellules commerciales sont encore vides, et ce sont celles qui subissent le plus l’humidité. Il reste l’étage à couvrir, et les soixante dix commerçants sont prêts à assumer la dépense d’un million de francs que couterait une telle opération. Enfin, il y a le problème du parking, sous utilisé, à cause de l’humidité et de la sécurité. Il est bien proposé qu’il soit gratuit, mais est-ce vraiment une solution ?

Fin de l’usine de velours

L’usine de velours de l’avenue Motte a cessé de fonctionner en 1982, avant de devenir quelques années plus tard l’ensemble de magasins plus connu sous le nom de l’Usine. Nous revenons dans ce premier épisode sur la fin de l’entreprise Motte-Bossut.  En 1843 se crée la société Motte Bossut. Louis Motte, son épouse Adèle Bossut, un oncle Cavrois Grimonprez et un beau frère Louis Wattine Bossut sont les principaux associés de cette première société qui sera dissoute en 1867, après l’incendie de la filature monstre, dont on peut encore apercevoir le mur, entre le monument consacré à Eugène Motte et l’ancien dispensaire de la goutte de lait. Une nouvelle filature sera construite en 1863, dont nous connaissons encore les bâtiments, aujourd’hui occupés par les archives du monde du travail. En 1889, les fils de Louis Motte-Bossut, décédé deux ans plus tôt, étendent l’affaire familiale avec une filature de laine située boulevard de Mulhouse à Roubaix. La nouvelle société Motte-Bossut et fils est toujours une affaire familiale, sans intervention des banques. En 1897, c’est au tour de l’usine de Leers, puis en 1901 le tissage de velours d’Amiens, et en 1903, l’usine de velours de l’avenue Motte à Roubaix.

Les usines roubaisiennes de l’entreprise Motte-Bossut

La filature du boulevard Leclerc Coll Médiathèque de Roubaix
L’usine du boulevard de Mulhouse Coll ADN
L’usine de velours de l’avenue Motte Coll ADN

En 1919, Motte-Bossut devient une société anonyme, dont les actionnaires sont exclusivement des membres de la famille. Elle le restera jusqu’à sa dissolution en 1982. La direction effective de la société et des usines est toujours restée dans la famille. La progression se poursuit avec la construction en 1924 des usines de Vadencourt et de Comines, et une fabrique d’étoffes non tissés à Lys lez Lannoy en 1927. Après la Seconde Guerre mondiale, l’entreprise Motte-Bossut est toujours renommée pour la fabrication des ses tissus de velours. En 1959, apparaît la marque « Tissus La Tour » et plus spécialement pour le velours la marque Sporvel. En 1967, il y avait encore une dizaine d’usines dans le groupe, l’entreprise traitait le coton depuis la matière première jusqu’à ses formes élaborées : tissages, teintureries, filatures, velours, non tissé.

Tissus La Tour et Sporvel Coll particulière

Fin mars 1981, la fermeture du site du boulevard Leclerc est annoncée. Dans l’usine de l’avenue Motte sont regroupés les bureaux administratifs, la confection, la teinture et la finition du velours, les tissus d’ameublement et les tissus plats pour l’habillement. Le 22 septembre 1981, c’est le dépôt de bilan de l’entreprise. Les raisons invoquées sont les importations incontrôlées entraînant une diminution de 50% de la production. Motte Bossut représente encore le deuxième producteur de velours en France après la SAIC installée dans l’est. L’entreprise emploie alors encore 660 personnes. Un mois plus tard, dans le cadre d’un plan de restructuration, intervient la suppression de 150 emplois et du tissage de Comines. En juillet 1982, après cinq heures d’audience, le tribunal de commerce de Roubaix se prononce pour la liquidation de biens de la société Motte Bossut… S’ensuit une conférence de presse de l’intersyndicale, la présentation d’un projet de reprise de Dominique Motte, fils d’un des actionnaires, avec le soutien du CIASI (comité interministériel d’aménagement des structures industrielles). Un comité central d’entreprise se réunit. Un pourvoi en appel de la décision du tribunal est demandé, ce qui constitue un sursis pour l’envoi des lettres de licenciement. Les salariés manifestent dans la rue et demandent des garanties : assurance garantie salaires, fonds national pour l’emploi, retraite ou départ volontaire à 55 ans, garanties de licenciement pour cause économique pour ceux qui donneraient volontairement leur démission, contrat de solidarité cogestion.

Les salariés en manifestation juillet 1982 Photo Nord Éclair

Finalement le candidat à la reprise renonce. On va vers la liquidation pure et simple. Le 21 septembre 1982, on apprend qu’il y a un nouveau et mystérieux acquéreur, M. Vieilletoile, mais rien n’aboutit. Le 25 septembre 1982, aucun autre acquéreur ne s’est présenté, ce qui entérine la fin des activités de la société Motte-Bossut. A ce moment, il restait encore 498 personnes à Roubaix et Leers (323 à Roubaix et 175 au tissage de Leers)  :  348 ouvriers, 111 employés techniciens et agent de maîtrise, 41 cadres et VRP.

D’après la presse de l’époque

On lira avec intérêt l’article de Stéphane Mathon  Coup de tonnerre, Motte Bossut dépose son bilan dans le site de la société d’émulation, histoirederoubaix.com