Des cubes pour le dernier carré

Un dernier espace pour bâtir Photo Nord Éclair

En Janvier 1964, le CIL, la société roubaisienne d’habitations ouvrières et la caisse fraternelle de capitalisation confient à l’architecte Robert Puchaux la conception d’un nouveau groupe d’habitations, qui se situeront dans le dernier espace libre de la plaine des hauts champs, entre la rue Joseph Dubar et la rue Degas. Oubliées les grandes barres collectives, les quatorze bâtiments abriteront chacun quatorze logements, soit en tout 224 appartements de types différents : 112 type 2, 56 type 3, 56 type 4. Le nouveau groupe sera doté d’un centre commercial qu’on bâtira en son milieu. La cité du chemin vert se dressera entièrement sur le territoire roubaisien.

Le chantier en janvier 1965 Photo Nord Eclair

Un an et demi plus tard, le samedi 22 mai 1965, on procède à l’inauguration du groupe du chemin vert, réalisé par la société anonyme roubaisienne d’habitations ouvrières pour le compte du CIL,  entre les rues Degas, Dubar, Michelet, et Pranard. Les immeubles sont présentés comme des points de ponctuation, d’où leur appellation de ponctuels, sur une surface de 40.500 m². Ils sont équipés du chauffage central. Il est possible de visiter le logement témoin tous les jours du 22 au 30 mai.

Au moment de l’inauguration Photo Nord Éclair

Le nouveau groupe reçoit les éloges de la presse : architecture sobre et moderne, tourelles qui ne manquent ni d’élégance, ni d’originalité. Le logement témoin a été aménagé par Mme Robert Delannoy, épouse du Président du CIL. Le maire de Roubaix, Victor Provo inaugure le nouveau groupe en présence de M. Bourgin secrétaire général de la préfecture, et Robert Delannoy le Président du CIL de Roubaix Tourcoing. Celui-ci présente le groupe du chemin vert comme une transition entre la cité des Hauts Champs et  les logements futurs du groupe Longchamp. Il annonce un vaste programme d’équipements : le petit centre urbain de l’avenir comprendra des sections commerciales, administrative, une gare d’autobus, une place du marché. Il y avait donc confusion : le centre commercial sera pour Longchamp, non pour le chemin vert. Sont également prévus deux groupes scolaires, des cabinets médicaux, un centre socio culturel, un foyer de jeunes travailleurs, une maison des jeunes, un grand terrain de sports volley, basket, athlétisme, une piscine, une patinoire…

Le logement témoin Photo Nord Éclair

En contre point, Victor Provo souligne les besoins énormes de la ville de Roubaix, et il éprouve quelque amertume devant les chiffres : seulement 16.000 logements pour 400.000 personnes !  Il signale les lenteurs pour les opérations en cours : on a démoli 2500 logements sur le quartier Anseele et on a construit seulement 900 appartements, quatre ans après ! Il faut continuer la rénovation des quartiers, c’est pour lui une priorité. Il rend toutefois hommage à la belle réalisation de ce groupe du chemin vert, dont la mise en location interviendra au cours du second semestre de l’année 1965.

D’après Nord Éclair et Nord Matin

 

 

 

Des fours, encore

Le temps des dépôts d’ébouage étant dépassé, la décision de construire un incinérateur est prise au milieu des années trente. Le Cul de Four fut choisi, en raison de sa proximité du canal pour le transport, et de son environnement relativement campagnard. En effet, la Mousserie toute proche était encore une plaine agricole.

L’usine d’incinération se construit sur les bassins de l’ancienne école de natation. On peut apercevoir à droite la brasserie Meyerbeer. Photo Archives Municipales de Roubaix.

Le vieil établissement de l’école de natation, créé en 1880 laisse bientôt la place à un nouvel équipement.  Nous sommes en 1936 et l’usine d’incinération des ordures ménagères de Roubaix s’installe rue Meyerbeer. Après une courte période d’essai, elle fonctionne à plein rendement en novembre 1937.

Les fours de l’usine d’incinération Photo Journal de Roubaix

35.000 tonnes d’ordures ménagères sont traitées annuellement, et bientôt on atteindra les 50.000 tonnes. L’usine produit de la vapeur et des kilowatts, et du mâchefer pour les travaux de voirie. Mais elle produit aussi beaucoup de cendres et de là viendra son cauchemar. Les ordures sont brûlées dans une batterie de cinq fours, alimentés par les seuls déchets. Tout y brûle sauf ce qui est métallique. Les habitants du Cul de Four se souviennent de la perpétuelle fumée de la grande cheminée haute de 75 mètres, car le service ne s’arrête jamais.

L’usine en 1939 Photo Archives Municipales de Roubaix

En 1972, la compagnie générale de chauffe exploite cette usine avec un effectif de 28 personnes, et le directeur est alors M. Louis Coquant. Les cendres deviennent vite un problème. Mille kilos d’ordures donnent 300 à 400 kilos de cendres. On les vendait autrefois, pour les entrepreneurs de travaux publics. Les derniers temps, elles étaient données gratuitement.  Puis il faut payer l’entrepreneur pour s’en débarrasser. On commence également à parler de pollution, avec les nouveaux emballages, comme les bouteilles de plastique, qui produisent un gaz toxique et détériorent les conduits de cheminée. La généralisation de l’emballage perdu a fait accroître le tonnage d’ordures.

Vie et mort de la cheminée de l’usine d’incinération Photo Archives Municipales de Roubaix et Nord Éclair

En janvier 1981, la haute cheminée était inactive depuis quelque temps, et elle est abattue à l’aide de bâtons de dynamite soigneusement disposés. Elle va s’effondrer en moins de cinq secondes après une semaine de préparation. Le projet de l’époque prévoyait la destruction de l’usine incinération pour laisser la place au centre technique municipal. On se prépare également à démolir l’ancienne brasserie Meyerbeer.

Aujourd’hui,  la chaufferie biomasse du quai de Gand fournit l’essentiel de la chaleur du chauffage urbain. Mise en service en 2011, cette énergie irrigue aussi bien les bâtiments municipaux que les hôpitaux, le vélodrome et des logements collectifs. Cela met en valeur que le quartier du Cul de four a toujours contribué à l’apport énergétique de la ville, que ce soit pour l’éclairage avec l’usine à gaz de la rue de Tourcoing et la production d’électricité avec l’usine d’incinération de la rue Meyerbeer.

D’après le Journal de Roubaix, Nord Éclair, et le fonds des archives municipales de Roubaix

 

 

Une rue disparue

C’est à l’occasion de la construction du marché couvert de Roubaix, en 1881 que l’on encadre ce terrain en forme de rectangle par trois nouvelles rues qui viennent compléter la rue Pierre Motte : la rue des Halles, la rue de la sagesse et la rue Jeanne d’arc. Si les trois premières ont survécu à la disparition des halles, en 1956, ce n’est pas le cas de la quatrième.

A gauche, le début de la rue Jeanne d'arc CP Médiathèque de Roubaix
A gauche, le début de la rue Jeanne d’arc CP Médiathèque de Roubaix

La rue Jeanne d’arc, c’était quoi ? Le côté des numéros impairs était entièrement occupé par  le marché des halles, l’autre côté étant constitué en partie des accès aux propriétés et maisons de la rue du Château, qui lui est parallèle et de loin antérieure. Les numéros pairs de la rue Jeanne d’Arc commençaient rue Pierre Motte avec un magasin de confection, auquel succédaient un magasin de soldes, un boucher hippophagique, un cordonnier, un marchand de fruits, un commerce de dentelles, un estaminet, un tonnelier, les halles Flipo, l’estaminet Monnet, un boucher, quatre estaminets.

Les Halles Flipo et la vitrine du café de l’URSA Photos Nord Eclair

La rue Jeanne d’arc était connue comme un haut lieu du sport, avec la présence d’une salle de gymnastique qui abritait depuis 1893 la société  la Roubaisienne au n°20, et qui sera transformée en magasin, les Halles Flipo. Il y avait aussi un haut lieu de l’haltérophilie au n°22, qui abritait l’Union Roubaisienne des Sports Athlétiques, et qui vit évoluer de nombreux champions, parmi lesquels Marcel Dumoulin, huit fois champion de France  d’Haltérophilie, qui participa aux jeux olympiques de 1928 et 1932.

Vue générale de la rue Jeanne d’arc Photo Nord Eclair

La rue Jeanne d’arc  disparaît donc en 1968 pour permettre l’implantation du Lido, centre commercial de transition entre la rue de Lannoy et Roubaix 2000[1].  La dernière démolition concerna  l’auberge des Halles, qui fut autrefois un vieux relais de poste, selon Nord Éclair.

Le projet Poste Bibliothèque Publié dans Nord Éclair

En 1972, c’est la rue du Château qui sera amputée de ses dix sept premiers numéros, parmi lesquels l’ancienne caisse d’épargne, et  quelques maisons d’industriels, ce qui permit de mettre en œuvre le projet d’une bibliothèque de vastes dimensions. En 1968 on prévoyait de construire un nouvel hôtel des postes et un hôtel financier (sic) regroupant l’ensemble des recettes et perceptions de la ville. Si la construction du nouvel hôtel des Postes fut bel et bien menée, c’est une médiathèque qui remplaça le projet d’hôtel des impôts, pour le plus grand bonheur des roubaisiens.

D’après Nord Éclair, Nord Matin et l’Histoire des rues de Roubaix par les Flâneurs

 


[1] Voir nos articles précédents

 

 

 

Rue Jouffroy prolongée

Joseph Leconte est né à Namur (Belgique) vers 1800. Il est l’époux d’Isabelle Baillon. Receveur des contributions directes de Roubaix, receveur des hospices et du bureau de bienfaisance, décoré de la légion d’honneur, il est propriétaire de nombreux terrains à Roubaix. Sa fille Isabelle épouse Constantin Descat (qui sera maire de Roubaix en 1867). Joseph Leconte meurt peu après cette date.

En 1885, les héritiers Leconte-Baillon demandent l’autorisation d’ouvrir des rues sur leur propriété situées dans le quartier de Maufait, et, en particulier une rue reliant la rue du chemin neuf à la rue du Chemin vert, à la limite de Lys, en traversant l’avenue des Villas (Alfred Motte) dans le prolongement de la rue Jouffroy. A cet endroit, la propriété borde le domaine des Prés, appartenant à la famille Cordonnier, où se construiront les Stades Dubrulle et Maertens. L’autorisation d’ouvrir la voie est accordée, et la rue tracée prend le nom de Leconte-Baillon. Elle sera raccourcie d’une bonne moitié de sa longueur en 1933, la partie après l’avenue Motte prenant alors le nom de rue Jean Jacques Rousseau.

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Les héritiers Leconte-Baillon commencent à vendre des terrains situés le long de la nouvelle voie, et les acquéreurs construisent les premières maisons. Dès1894 Bernard Spriet, épicier rue de Lannoy, fait construire une petite maison pour entre la propriété Boittiaux et un terrain vague. En 1903, les héritiers Leconte-Baillon possèdent encore 420 mètres de front à rue. A ce moment, les riverains demandent le classement de la rue comme voie publique et la construction d’un aqueduc, s’engageant en contrepartie à faire don à la ville du sol de la rue sur 15 mètres de largeur. La chaussée doit être bordée de fils d’eau et revêtue de scories en attendant d’être pavée. La ville voit dans cette opération la possibilité d’améliorer l’écoulement des eaux du boulevard industriel, insuffisant jusque là, la mise en service imminente de l’usine de velours Motte-Bossut fils et Mangers risquant encore d’aggraver la situation. La rue compte alors 6 ou 7 maisons, toutes du côté impair, dont deux seules subsistent aujourd’hui, sises aux numéros 15 et 69, ainsi que l’estaminet propriété de M.Preys, à l’angle de la rue de chemin neuf.

Les premières constructions
Les premières constructions

La rue est classée, et on établit en 1904 le plan de mise en viabilité sur lequel figurent les noms des riverains. Les propriétés des héritiers Leconte-Baillon sont passées entre-temps dans les mains des héritiers Descat. L’adjudication pour les travaux est lancée, et l’adjudicataire est Léon Planquart, entrepreneur. La réception définitive des travaux est faite en 1906. Première construction du côté pair, sur la bande de terrain séparant la rue du stade, une maison à usage de commerce que Louis Scoufflaire a fait bâtir en 1911, à l’angle de l’avenue des villas. Il y vendra des vélocipèdes. Il changera de métier au début des années 20 pour ouvrir, à la même adresse, un estaminet qui prendra pour enseigne « le vélo », qu’il tiendra jusque la fin des années 30, et qu’on retrouve aujourd’hui sous le nom du « sport man ».

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En 1913 la chaussée en scorie souffre beaucoup des lourds charrois qui évitent la rue de Lannoy. Les riverains se plaignent des fondrières qui se forment. On prévoit de la paver. Ce ne sera fait qu’en 1930, les travaux étant réalisés par Jules Waquier. En attendant, les années 20 voient une deuxième vague de constructions ; c’est au cours de cette décennie que la plupart des maisons de la rue seront construites :

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La rue va rester sans changement plusieurs années, une photo nous la montre dans son état des années 50 :

Document l'Usine
Document l’Usine

Les constructions sont encore clairsemées et la végétation est encore très présente. On y voit de belles constructions, situées dans de grandes propriétés, qui disparaîtront par la suite, victimes de la fièvre immobilière des années 70 et 80…

Dessin la Voix du Nord
Dessin la Voix du Nord
Photos Jpm

 

 

Les numéros impairs

Entre le boulevard Gambetta et la rue des Longues Haies, un estaminet fait le coin de la rue du Moulin depuis 1886. Siège de nombreuses sociétés, il va néanmoins connaître une fin brutale puisqu’il va s’effondrer lors de travaux effectués en 1964.

Le café de la ligue des sports, vu depuis et vers le boulevard Gambetta

Les photos montrent que l’estaminet, dont la façade principale donne sur le boulevard Gambetta, ouvre également sur le coin des rues du Moulin et des longues Haies. On y remarque que les rails du tramway, dédoublées au carrefour, se réunissent en une voie unique qui remonte la rue.

Document Nord Eclair

Une photo de l’estaminet effondré permet de voir le débouché de la rue Edouard Anseele et le bas de la rue Jean Moulin. L’angle est formé par un commerce. En 1886, c’est un estaminet, tenu par F.Wacrenier. La charcuterie Vrambout s’y installe à partir de 1914, qui devient boucherie sous le même nom en 1955, et, reprise par M.Libert, un commerce de volailles en 1974.

Document La Voix du Nord

On trouve après le coin et jusqu’à la rue St Jean une suite quasi ininterrompue de commerces, dont quatre estaminets, en 1886. Au coin de la rue St Jean, en particulier, se situe un débit de boissons, d’abord au nom de Mazurel, puis deviendra l’estaminet Bus, puis Deffrennes, puis Carette jusqu’à la deuxième guerre.

Société réunie devant l’estaminet du 61

Le 7, après avoir abrité un estaminet, devient une bonneterie à partir de 1908. A l’enseigne du « bas roubaisien », elle s’étend au 11 à partir de 1929. En 1965, un opticien y établit son commerce. Au 9 est installé un libraire en 1908. La boutique devient une imprimerie en 1925, puis une papeterie en 1929, pour redevenir une librairie en 1932, et jusque dans les années 60.

Les commerces du 7 et du 9

En 1903 s’installe au 53 la brasserie coopérative Quint-Delvallée, qui prendra vite pour enseigne « La Confiance ». On y retrouve un magasin d’usine dans les années 70 :

Document la Voix du Nord

Mais les entreprises industrielles sont également très présentes dans la rue. A partir de 1895, s’installent au 21 le tissage Florimond Watel, et, du 23 au 45, la teinturerie Motte et Bourgeois. Celle-ci prend successivement les noms des établissements Motte et Marquette à partir de 1908, puis Société anonyme des établissements Hannart frères & Motte et Marquette réunis au début des années 20. L’entreprise installe ensuite ses bureaux au 53 de la rue. Les maisons aux numéros 47 à 53 se vident progressivement jusqu’en 1914, rachetés pour abriter au 45-47-49 la teinturerie Burel. Au début des années 30, le tissage est repris par Alfred Motte frères et Jules Porisse qui installent leurs bureaux aux numéros 17 à 21. L’entreprise prend en 1955 le nom de filature des Longues Haies et en 65 celui des laines du chat botté.

Au 33 en 1955, Renault installe son département véhicules d’occasion, prélude à une extension beaucoup plus importante, qui aura raison de tout le bas de la rue, côté impair…

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Les autres documents proviennent de la bibliothèque numérique de Roubaix

 

La cité disparue

En 1972 la Sarhnord entame la démolition d’une ancienne usine textile, située aux n°309 à 313 de la Grand-rue. On y trouvait autrefois les industriels Bonte & Lesur et leur fabrique de tissus, puis le tissage Bonte et Cie. Un temps inoccupés, les lieux furent ensuite repris par une société de fabrication de meubles, la  société Dupont-Mobildar, à laquelle succédera vers 1970 la société de meubles Leville-Mobildar réunies, dernière entreprise sur les lieux. Un projet de lotissement, présenté comme une formule originale de logement social est alors mis en œuvre, qui sera appelé la cité de promotion. Cela fait suite à une première expérience roubaisienne qui s’est déroulée  dans la rue St Antoine, dont l’objet était d’accueillir des personnes socialement handicapées et perturbées. Il s’agit donc ici de créer une cité sur les 11.127 m² qu’occupaient les anciens établissements textiles et mobiliers. Les travaux sont menés par La Sahrnord et l’entreprise Théry d’Arras.

plan du lotissement

L’expérience débute en juillet 1974. Le CIL, le bureau d’aide sociale, la communauté urbaine de Lille, la direction de l’action sanitaire et sociale, le ministère de l’équipement se sont associés pour l’opération, et le CAL de Roubaix va gérer ce lotissement original. Cette cité se trouve donc dans le quartier de l’entrepont, et ses maisons en ciment seront construites sur un chantier détrempé par les mauvaises conditions climatiques. Une partie du lotissement est consacrée aux espaces verts, ce qui lui vaut d’être présenté comme un poumon de verdure pour l’Entrepont. Cependant la cité de promotion est un monde à part, avec son centre social avec salle de soins médicaux, et salles pour activités diverses. Elle comprend 27 logements de type F6 ou F7 pour familles nombreuses, plus 8 maisons rénovées de la rue de la Conférence, soit 32 logements proposés. Un monde à part, mais ouvert sur le quartier, car les enfants vont dans les écoles du quartier, et les habitants feront leurs courses dans les magasins du quartier.

entrée de la cité familiale

Ces  maisons hautes d’un étage, ont une surface de 110 m² au sol,  attenante à un lopin d’espaces verts. L’Orsucomn, le Pact, le Bureau d’aide sociale seront à l’origine des placements, et  l’administration du centre social sera confiée à la CAF et au PACT. Il s’agissait d’un public en très grande difficulté, et les familles étaient suivies par des travailleurs sociaux. Les témoins racontent que ces familles étaient renfermées sur elles-mêmes, coupées du monde, elles n’allaient pas vers les autres, elles étaient sauvages. Qui étaient-elles ? D’où venaient-elles ? On évoque des familles immigrées, des familles ayant connu des accidents de la vie, des familles d’origine rurale, Dès le début, en tous cas, des familles en détresse, peu acceptées par la population.

La cité familiale en 1986 Photo Coll Particulière

On se demande très vite dans le quartier pourquoi on a fait un ghetto.  Au départ, ça s’appelait la cité promotion, puis on a parlé de cité de transit, enfin de cité familiale, Les personnes ne devaient pas rester dans cette cité, elles ne faisaient que passer. De ce fait, les maisons étaient très mal tenues. Il y avait aussi la découverte de l’habitat urbain, pour une famille de la campagne, comment s’adapter à l’usage du nouvel habitat. On évoque la présence de poulets, de lapins, dans les maisons. Bientôt, il n’y a plus de permanence sociale sur place, le suivi est fait par des extérieurs.

Vue de la cité Photo Coll Particulière

On tire alors un constat d’échec : cette concentration de personnes en difficulté  est jugée inopérante. Les familles partent, ne sont pas remplacées, et on mure les maisons. La cité se vide, on commence à démolir. Quinze ans à peine après sa construction, les pavillons sont à l’état de ruine, la cité s’est transformée en terrain d’aventure pour les enfants du quartier, ou en chantier de récupération de matériaux divers, ou encore en dépôts d’ordures.  Deux ou trois locataires occupent encore les logements, assez vindicatifs. La ville met en demeure la Sahrnord de démolir, car il y a danger pour les enfants qui jouent au milieu des ruines et des gravats, La destruction de la cité est décidée en décembre 1988.

Derniers instants de la cité en 1988 Photo Nord Éclair

Quelques années plus tard, l’endroit est devenu un petit coin de nature : le Jardin de Chlorophylle,  un havre de paix, à deux pas de l’agitation de la ville. Entretenu par une structure d’insertion sociale, il est animé depuis par l’association Angle 349, qui s’applique à faire découvrir au public le milieu naturel sous ses diverses formes et à initier aux notions d’écologie, en particulier à destination des enfants.

Vue actuelle Extrait Google Maps
Remerciements aux membres de l’atelier mémoire pour leurs témoignages et leurs documents

 

La place du Travail en projet

Pour structurer les quartiers appelés à se développer au sud-ouest de Roubaix, on songe, parallèlement à l’ouverture de boulevards de ceinture (boulevard de Lyon), à créer des places publiques. M.Tiers, en conseil municipal, insiste en 1889 sur le fait que Roubaix ne dispose que de trois places publiques et qu’il en faudrait d’autres. Il insiste sur leurs avantages du point de vue hygiénique (appel d’air), comme lieu réunion pour les enfants, et souligne le prix abordable des terrains dans les quartiers périphériques. Il ne faut pas différer les constructions, sinon les endroits favorables seront construits. Il cite en particulier un terrain rectangulaire Bossut-Delaoutre dans le quartier du cheval blanc le long de la rue de Lannoy (future place de la Fraternité). Mais un autre emplacement retient également l’attention de la

Le site en 1845

Juillet 1890 : Le directeur de la voirie municipale procède au métré de terrains « pour servir à la création d’une place publique au lieu-dit la Potennerie ». Cela représente environ 5100 mètres carrés de terrains appartenant à la Société Lemaire et Lefebvre et comprend un corps de ferme situé le long de la rue de Larochefoucault, le tout au prix de 6 francs le mètre.

En septembre de la même année, M. Jean-Baert, clerc de notaire à Lys lez Lannoy, adresse une lettre au conseil municipal, « ayant appris que l’administration et le conseil municipal… recherchaient des terrains … pour y créer des places publiques… » Il présente un projet de place situé lui aussi dans le quartier du petit Beaumont, sur sur 12000 mètres carrés, lui aussi le long du chemin n° 8 du Petit Beaumont, mais légèrement plus bas que le terrain Lemaire et Lefebvre (il ne touche pas le Boulevard de Lyon). M. Jean-Baert détaille les avantages de son projet : c’est un quartier appelé à un grand développement, proche de la nouvelle église de St Jean Baptiste, et du tout récent boulevard de Lyon, située dans une zone où de nouvelles fabriques s’installent, qui vont provoquer des mouvements de population et des constructions en tous genres. Autre avantage, les terrains sont encore nus et non bâtis et ne nécessitent pas d’expropriations.

Il propose de vendre à la ville une superficie de 9750 mètres carrés à 5 francs le mètre, et de donner gratuitement une bande de terrain représentant 2200 mètres carrés. Par ailleurs, pour éviter à la ville une dépense immédiate, il propose un bail sur dix ans avec faculté d’acquisition des terrains au prix convenu pendant la durée du bail. Il offre enfin de faire effectuer lui-même les travaux de terrassement, que la ville pourrait rembourser par la suite.

L’année suivante, en décembre 1891 est faite la demande de déclaration d’utilité publique avec le plan des parcelles à acquérir. C’est le résultat d’un mélange des deux options précédentes : pour englober le tracé du boulevard de Lyon et son intersection avec la rue de Beaumont, on choisit, pour la plus grosse partie de la place, des parcelles appartenant à la société Lemaire et Lefebvre (qui viennent en majorité de la famille Destombes). On complète ce terrain par deux bandes appartenant l’une à la société Henri Briet et compagnie, dont les administrateurs sont Henri Briet et Jean Baert, l’autre à Jean Baert lui-même.

Les différents propriétaires des parcelles

On complète le projet avec l’ouverture de rues qui vont converger vers la nouvelle place. En particulier, une rue déboucherait au milieu de la place, et une autre la borderait :

Les rues à ouvrir

Finalement, une nouvelle mouture du projet nous montre une configuration semblable à celle que nous connaissons aujourd’hui, avec les futurs boulevards de Fourmies et du Cateau, ainsi que la future rue Henri Regnault. Les travaux vont pouvoir commencer.

 

Documents archives municipales

 

 

 

Le pont St Vincent (origines)

A l’origine, la partie nord-ouest de Roubaix est parcourue par deux chemins, celui de Mouvaux et celui du Fresnoy menant au centre de Roubaix respectivement par la rue du grand chemin et la rue Nain. Un chemin transversal, le chemin de Blanchemaille, croise les précédents.

Plan cadastral de 1805
Plan cadastral de 1805

En 1842 l’arrivée du chemin de fer coupe cette partie de la commune en deux. Le tracé étant décidé, on choisit d’implanter la station de chemin de fer le plus près possible du centre, à l’endroit où la voie se trouve à niveau, c’est à dire à l’endroit où passe la rue du Fresnoy. Le chemin de Mouvaux, en contrebas de la voie, passera sous celle-ci. Par contre, le nouveau bâtiment des voyageurs barre maintenant le chemin du Fresnoy : Il faut le dévier par une rue latérale vers la droite, qui, après un premier coude à gauche, coupe la voie par un passage à niveau avant de rejoindre l’ancien tracé du chemin.

Plan cadastral de 1845
Plan cadastral de 1845

Mais la compagnie des chemins de fer du Nord, à l’étroit dans ses installations, étend les emprises de la gare à partir de 1857. La surface en est presque doublée. On construit une vaste halle pour les marchandises sujettes aux droits de douane à côté du bâtiment de voyageurs. Quelques années plus tard, la Compagnie construit de nouvelles halles à marchandises. Cependant, la municipalité se préoccupe des difficultés de circulation entre la gare et le centre de la ville. En effet, pour se rendre à la gare, il faut emprunter des rues étroites et mal commodes. Par ailleurs, la municipalité juge le bâtiment de la gare « d’une insuffisance notoire et de la plus triste construction ». Elle forme le projet de relier la grand-place à la gare par une large avenue rectiligne débouchant sur un bâtiment digne de la ville.

La rue de la Gare est ouverte en 1883 mais ne débouche que sur le bâtiment de la douane. Parallèlement, la compagnie du Nord propose dès 1860 de supprimer le passage à niveau du Fresnoy, gênant pour tout le monde et de le remplacer par un passage supérieur reporté 300 mètres plus loin. La municipalité réagit à partir de 1863 en réalisant une rue reliant la rue Blanchemaille à ce nouveau pont. Large de 12 mètres, elle prendra le nom de St Vincent de Paul et passera entre les écoles et l’hôpital de la rue Blanchemaille (hôpital Napoléon). On prolonge également les rues de l’Alma et de l’Ouest pour les raccorder au pont nouveau.

A situation en 1886, avant la construction de la gare définitive
A situation en 1886, avant la construction de la gare définitive

Le nouveau maire, Monsieur Julien Lagache, négocie avec la Compagnie du Nord. Pour la construction d’une nouvelle gare à l’emplacement de la halle de la douane. Le nouveau bâtiment est terminé en 1888. En 1891, on élargit le tablier du pont, qui constituait un étranglement pour la circulation.

A gauche le pont original, à droite le même élargi
A gauche le pont original, à droite le même élargi

Enfin, vingt ans plus tard, en 1908 on construit la passerelle qui permettra de nouveau la communication directe pour les piétons avec le quartier du Fresnoy. En 1914, les allemands, avant leur départ, feront sauter la halle qui surplombe les voies, la passerelle et le pont Saint-Vincent. Le pont sera reconstruit après la guerre.

Le pont en 1918 – document collection particulière
Le pont en 1918 – document collection particulière
Les autres documents proviennent des archives municipales.

 

 

 

 

En bas de la rue

La rue du Moulin, une des plus anciennes voies de Roubaix, a très vite été densément bâtie. Si on considère la partie basse de la rue, entre le boulevard de Paris et la rue du Havre pour les numéros pairs, on est surpris du nombre de commerces, d’entreprises et de courées de part et d’autre de l’école municipale.

Le bas de la rue, côté pair – vues depuis et vers la rue Neuve
Le bas de la rue, côté pair – vues depuis et vers la rue Neuve

Ce côté pair présente avant la première guerre une profusion d’estaminets : on en compte pas moins de 12 avant la rue du Havre ! Les commerces de bouche y sont également bien représentés : une charcuterie, quatre épiceries et deux crèmeries. D’autres commerces complètent ce panel : la pharmacie au coin du boulevard de Paris, une blanchisserie, un marchand de couleurs, un buraliste, deux magasin vendant des étoffes, une coiffeuse, un marchand de journaux. Sans oublier , tout au bas de la rue, la serrurerie Liagre, déjà présente en 1886 :

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Cette partie de la rue abrite également d’autres métiers artisanaux : trois ferblantiers, un teinturier, un vannier, un ébéniste, deux tailleurs, un cordonnier. Il n’y a pratiquement pas de maison sans boutique ! Les maisons d’habitation sont renvoyées dans des courées, généralement attenantes à un estaminet. On trouve ici au 22 la cour Delmarle, au 42 la cour Dubar, au 64 la cour Loridant, et, au 70 la cour Brabant.

L'entrée de la cour Delmarle de nos jours. Photo Jpm
L’entrée de la cour Delmarle de nos jours. Photo Jpm

Les entreprises industrielles sont bien présentes aussi, avec une fabrique de pompes, qui deviendra un atelier de fonderie au 38, juste à côté de l’école, et, au 50-52, l’entreprise D’Halluin-Grenu, puis D’Halluin-Namur en 1901, puis Bayart père et fils.

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Entre les deux guerres, peu de changements. Un maréchal ferrant s’installe au 36, un marchand de chaussures au 72, un marchand de jouets au 44 et un marchand de cycles au 62, remplaçant d’autres commerces. Exemple de stabilité, la pharmacie au coin du boulevard de Paris, reste tenue par M. Constant depuis 1885 jusque dans les années 50… Une affaire de famille !

La droguerie Molinier a pris, en 1922, la suite de la serrurerie Liagre
La droguerie Molinier a pris, en 1922, la suite de la serrurerie Liagre

Autre exemple de stabilité, les débits de boisson restent très nombreux : la proportion d’estaminets ne varie pas sensiblement.

L'estaminet Derly, au numéro 40
L’estaminet Derly, au numéro 40

Après la deuxième guerre, même pérennité. La droguerie Molinier perdure sous le nom de Dupont-Delalé jusque au seuil des années 70. Le salon de coiffure, installé au 12 depuis le début des années trente se retrouve au même endroit en 1874 ! Le 80, au coin de la rue du Havre est un commerce d’alimentation depuis les années 20 jusqu’à aujourd’hui, après qu’on y ait vendu des gaufres en 1914, et du beurre en 1922.

Au premier plan le carrefour de la rue du Havre et le n°80
Au premier plan le carrefour de la rue du Havre et le n°80

Si les premières maisons ont été détruites récemment, les autres sont toujours debout, et les façades de la partie remontant jusqu’à la rue du Havre n’ont pratiquement pas changé. Elles mériteraient pourtant quelques travaux de rénovations !

 

 

 

 

 

 

 

Le foyer des jeunes travailleurs

C’est en août 1968, que l’Office municipal d’HLM de Roubaix a terminé les travaux de construction du Foyer de Jeunes Travailleurs. L’initiative de cette réalisation est due à MM Pierre Catrice et Germain Wiart, Président et Vice Président de l’Association pour le logement des jeunes isolés. Construit dans le parc d’une ancienne maison de maître appartenant à la famille Meillassoux, le foyer est l’œuvre de l’architecte roubaisien Michel Delplanque. Les plans ont été réalisés sur les bases d’un travail d’équipe entre l’architecte et le conseil d’administration.

Le foyer en 1969 Photo Nord Éclair

Le foyer est un bâtiment de quatre étages sur pilotis triangulaires, avec  une vaste surface de rez-de-chaussée et une partie habitation qui comprend  148  chambres. Le hall d’entrée s’ouvre sur la Grand-Rue. Quand on y pénètre, à droite en entrant, on découvre une salle de restaurant self service d’une contenance de 250 places. L’autre côté du rez-de-chaussée est consacré aux activités socio-culturelles. Il y a une cafétéria pour l’après repas, un foyer de lecture, une salle de jeux de 165 m², des salles de télévision,  deux salles de réunion, une bibliothèque. En sous sol, sept pièces sont aménageables en ateliers, labo-photo, et une grande salle de 200m² permet de faire du sport.

La cafétéria et le self Photos Nord Éclair

La chambre type fait 10,75 m², comprend un petit vestibule, un cabinet de toilette, avec eau chaude et eau froide, et un grand placard de rangement. Les chambres ont vue sur le parc, et à chaque étage, il y a des douches et des  installations sanitaires. Dans le parc, on trouve un terrain de sport (basket et volley ball). Il y a des douches dans les sous sols. Un parking pour vélomoteurs et bicyclettes se trouve entre les pilotis. Les conditions d’admission sont les suivantes : être célibataire, être âgé de 18 à 25 ans, travailler. L’ouverture aux étudiants est envisagée. Le prix de la pension mensuelle est de 320 francs, comprenant la location de la chambre, le petit déjeuner et quarante repas à 4,50 frs.

Salles de loisirs et de TV Photos Nord Éclair

La structure possède un encadrement permanent : un directeur, un intendant, deux animateurs. Le modus vivendi reste à définir, mais le Foyer ne sera pas un ghetto, car il s’ouvrira aux jeunes du quartier et de l’agglomération. Le restaurant sera ouvert aux non-résidents (capacité 500 repas matin et soir en deux services). Le premier directeur se nomme Henri Lepers. Tourquennois d’origine, 28 ans, il est diplômé de l’école de formation et d’application pour l’animation des collectivités, titulaire du diplôme d’état de conseiller d’éducation populaire de la Jeunesse et des Sports. Il a déjà œuvré au foyer de Bayonne, au foyer des apprentis jockeys de Chantilly, et il a participé à l’animation globale d’un quartier d’Evreux.

Henri Lepers, premier directeur du foyer Photo Nord Eclair

Le foyer des jeunes travailleurs est un véritable hôtel tout confort qui a coûté 35 millions d’anciens francs. Son budget de financement se répartit de la manière suivante : 2,5 millions crédit HLM, 548.000 francs par la sécurité sociale et la Caf, 310.000 francs par le ministère des affaires sociales, 300.000 par la ville, 100.000 par le Conseil Général, le FAS, et le CIL. La ville de Roubaix a acheté le terrain et l’a cédé à l’office municipal HLM qui est propriétaire du terrain et du foyer, lequel est mis en location à l’A.L.J.I,  seule responsable de sa gestion. Il sera inauguré par Robert Schumann, ministre des affaires sociales en mars 1969.

Maurice Schumann inaugure le foyer Photo Nord Éclair