Tempêtes sur l’église

En mars 1906 se déroulent les inventaires à Wattrelos, l’église Saint Vincent de Paul n’y échappe pas. Après l’église Saint Maclou, on se dirige vers le Crétinier. Une étrange colonne se met en marche et la foule est difficilement maintenue à distance par la troupe et la gendarmerie. La cavalerie a pris les devants. Beaucoup de manifestants vont jusqu’au Crétinier et la foule est accourue nombreuse. Aucune notification n’avait été faite à l’abbé Coquériaux, curé de la paroisse. Quand les chasseurs arrivent, on est fixés, commente le Journal de Roubaix, une irrégularité allait être commise. Dès quatre heures, le commissaire Grimaldi de Roubaix, dirige le service d’ordre. Il fait dégager la place de l’église par la cavalerie qui repousse les curieux dans les rues voisines. L’infanterie établit ensuite des barrages de tous côtés pour isoler l’église.

L’église Saint Vincent de Paul Coll Particulière

Sur le perron, devant l’église close, se tiennent l’abbé Coquériaux et M. Delcroix doyen de Quesnoy sur Deule, originaire de Wattrelos. Il est cinq heures quand M. Prévot arrive en voiture avec ses deux témoins. Il présente sa commission. Le curé en prend connaissance et se plaint de l’illégalité dont il est victime. M. Prévot répond que M. le doyen de Saint Maclou avait été prévenu pour les deux églises. L’abbé Coquériaux donne alors lecture d’une protestation.

J’ai le devoir comme prêtre, comme pasteur, comme citoyen et comme français d’élever la voix en ce moment contre l’opération que vous avez mandat d’accomplir.

Un membre de la société civile de l’église s’associe à la protestation du curé. Ce dernier refusant d’ouvrir la porte, le commissaire Buchart procède aux trois sommations en frappant de la main sur un des panneaux de la porte. Aucune réponse. Les crocheteurs s’approchent, la porte est solide et maintenue de l’intérieur. On attaque la porte à coups de masse et une brèche est ouverte. Un battant s’entrebâille et derrière on aperçoit un enchevêtrement de chaises.

La foule est massée sur les côtés et manifeste son indignation par des cris hostiles. Liberté à bas les voleurs ! Quelques socialistes répondent par le chant de l’internationale et la flamidienne.

Les crocheteurs s’impatientent, l’un d’eux tente de passer par l’une des fenêtres, grimpe sur une échelle et va briser les vitres avec un marteau. Un capitaine du 43e lui ordonne de descendre au plus vite. Pendant ce temps les chaises s’accumulent sur la place en un tas qui augmente sans cesse. Les fidèles massés à l’intérieur reforment la barricade au fur et à mesure. Plusieurs crocheteurs qui ont failli être atteints demandent à être protégés.

L’église en 1947 entre la Lainière, Dhalluin Lepers et la campagne Photo IGN

Après trois quarts d’heure, la barricade est assez basse pour que des gendarmes puissent l’escalader. L’église est prise d’assaut. La brèche est élargie et livre passage à M. Prévot et ses témoins. Il y a trois cents personnes dans l’église qui chantent je suis chrétien. Il y a notamment MM Louis Dhalluin et Louis Delcroix, membres de la société civile de l’église. Le curé s’adresse à ses paroissiens et leur demande de rester calmes pendant l’inventaire. On récite le chapelet. Les témoins déclinent leurs noms à l’abbé Coquériaux. Après un rapide examen du mobilier de l’église, les sommations sont faites devant la porte de la sacristie qui est ouverte d’une simple pesée. L’inventaire ne donne lieu à aucun incident. On fracture une autre porte, celle du presbytère. Le percepteur déclare regretter qu’elle ait été ouverte de force. Quand il sort de l’église, il est six heures. La colonne se reforme pour regagner Roubaix ; à la barrière du Crétinier, quelques socialistes crient vive la loi, à bas la calotte à quoi répondent les cris de vive la liberté, à bas les voleurs. La colonne atteint la rue d’Alger et le calme se fait.

L’église Saint Vincent de Paul affrontera de nouveau une tempête d‘origine météorologique celle-là, le 16 avril 1924. Les rafales de vent et l’infiltration des eaux ont provoqué la chute de trois grosses pierres, mesurant 83 centimètres et pesant environ 70 kilos. Elles sont tombées du clocher de l’église. On ne signale heureusement aucun accident. Il est prévu que le service es travaux publics procède à la réfection du clocher.

Wattrelos : les églises du Crétinier

Le projet de construction de la première église du Crétinier remonte au mois de Mars 1891 dans ce hameau de Wattrelos mieux relié à Roubaix par deux rues (rue d’Oran et rue des Champs, actuelle rue Charles Casterman) et une halte de chemin de fer sur la ligne Somain Tourcoing qu’au centre de Wattrelos.

Bénir la première pierre

Usine Dhalluin Lepers de Wattrelos https://lessegardderoubaix.wordpress.com

Mais le lieu est déjà industrialisé, car l’entreprise textile roubaisienne Dhalluin-Lepers s’y est installée, la pose de la première pierre de la future église coïncidant avec le 50ème anniversaire de cette maison, le 24 juin 1895. A cette date, Monseigneur Monnier, évêque de Lydda, vint en cortège bénir la pierre, l’église et la foule, puis se rendit pour le banquet chez Monsieur Dhalluin-Lepers, lequel était à l’origine de l’idée de l’église et en sera l’un des généreux donateurs. Le terrain avait été offert par Monsieur Watteau, un important fermier du Crétinier, les plans et la direction des travaux revinrent à l’architecte roubaisien Destombes, et les travaux qui démarrèrent en Mars 1895 à l’entrepreneur Pennel.

Monseigneur Monnier évêque de Lydda Coll. Particulière

C’est en présence de Monseigneur Monnier évêque de Lydda qu’a lieu la bénédiction de la première pierre de l’église du Crétinier en avril 1895. Une procession est prévue pour accueillir le Prélat, Grand Place, rue Pierre Catteau, Vieille Place, rue des Champs, et rue de Tourcoing. Le jour dit, le lundi 24 juin, Mgr Monnier a béni la première pierre. Arrivé de Lille à dix heures, après avoir pris en passant le chanoine Evrard de l’église Notre Dame à Roubaix, il est reçu au presbytère par M. Lejeune, doyen de Wattrelos et après avoir revêtu ses habits sacerdotaux, il a été conduit à l’église, précédé par la Chorale St Maclou que dirige M. Deflandre. Puis il s’est dirigé pour prendre place dans le cortège. Un peloton de cavaliers ouvre la marche du cortège, un autre ferme la marche. Le cortège se met en marche vers onze heures. Un accident de voiture arrête sa progression. Le chemin est vite dégagé, il n’y a pas de blessés. Les maisons sont décorées de bannières et les rues jonchées d’herbes entremêlées de fleurs. Des arcs de triomphe ont été dressés rendant hommage au Prélat. Une banderole porte ces mots : in excelsis Deo.

Édifiée dans le quartier du Crétinier, l’église Saint Vincent de Paul répond à un vrai besoin, compte tenu de l’éloignement de St Maclou. Les travaux ont été commencés le 25 mars dernier et les assises de l’église mesurent cinquante mètres de long sur vingt de large. On espère l’achever pour le milieu de l’année prochaine.

Bénir l’église

Le fait marquant de ce mois de mai est incontestablement la double cérémonie religieuse qui eut lieu dans le quartier du Crétinier le 16 mai 1897: la bénédiction de la nouvelle église Saint Vincent de Paul au Crétinier et l’installation de son desservant, l’abbé Coqueriaux. C’est le 14 avril 1897 qu’est reçue en Mairie l’ampliation du décret présidentiel autorisant l’ouverture d’une chapelle de secours dite de St Vincent de Paul.

l’église du Crétinier Coll Particulière

C’est donc par un temps particulièrement favorable, que les habitants du Crétinier s’apprêtent à fêter la bénédiction de l’église Saint Vincent de Paul, et l’installation du curé, l’abbé Coquériaux. Ce dernier est accueilli le 16 mai 1897 par Monsieur Charles Agache sur une estrade dressée près de l’estaminet « à ma campagne », qui lui souhaite la bienvenue au nom du comité organisateur de la fête, et lui offre au nom des paroissiens les divers objets du culte. Le bon curé le remercie et lui donne l’accolade, ainsi qu’à Henri Lagache, secrétaire de la société d’archers.

Un grand cortège constitué de cavaliers, de vélocipédistes, de croix, d’enfants de chœurs et d’un grand nombre de bannières se met en route vers la nouvelle église.Tout au long du parcours, les sociétés défilent en ordre au milieu des oriflammes, guirlandes et drapeaux, les chorales se font entendre avec succès.

L’église Saint Vincent de Paul CP Coll Particulière

A la porte de la nouvelle église, un groupe d’enfants attend le prêtre et à son arrivée, l’un d’eux lui adresse un compliment. Monsieur le curé les bénit et procède à la bénédiction de l’édifice religieux en commençant par l’extérieur. Puis la porte est ouverte et l’église est très vite remplie. Monté en chaire, le vicaire général Carlier fait l’éloge de la manifestation, celui de l’administration diocésaine, et celui de ses collègues, puis Monsieur le doyen de Wattrelos procède à l’installation de l’abbé Coquériaux, en remerciant également le curé de Ste Elisabeth, l’abbé Tilman, pour le magnifique don du maître autel.

Ainsi dotée d’un curé, des divers objets et mobiliers nécessaires, et de paroissiens enfin comblés, l’église Saint Vincent de Paul est ouverte au culte en cette fin d’après midi de mai 1897, au milieu des cités ouvrières du Crétinier, passé du statut de hameau à celui de quartier urbain.

(à suivre)

L’église non rebâtie

Les églises Saint Sépulcre, du très saint Rédempteur et Sainte Bernadette aujourd’hui disparues. Coll Particulière

Roubaix a la particularité d’avoir reconstruit plusieurs églises sur son territoire. Ce fut le cas de l’Église du Saint-Sépulcre, place d’Amiens ; une première et grande église de briques en style romano-byzantin est construite entre 1870-1873, devient une église paroissiale en 1877. Mais, devenue vétuste, elle est démolie en 1961. Un accord entre la commune, propriétaire de l’édifice, et l’évêché assure le suivi d’un nouveau lieu de culte qui est bâti entre 1961 et 1962 par les architectes roubaisiens Luc Dupire et Marcel Spender. De même l’église du Très-Saint-Rédempteur construite rue Bourdaloue en 1881-1884 par Paul Destombes est bénie le 18 février 1884. Après les années 1970, l’église, faute d’entretien et par manque de moyens du diocèse, se dégrade. L’église ferme en 1988 et l’association diocésaine la fait démolir en 1990 avec l’accord de la commune. Une nouvelle petite église moderne de briques, plus fonctionnelle, est financée en partie par la commune en remplacement de la première, tandis que l’association diocésaine assure la maîtrise de l’ouvrage. Le projet est confié aux architectes Philippe Escudié et Jean-François Fermaut. Elle est bâtie en 1993-1994. C’est enfin le cas de l’Église Sainte-Bernadette, avenue Alfred Motte La première église Sainte-Bernadette élevée par Vilain et Serex s’avère à la fin du 20e siècle trop vaste pour les besoins paroissiaux et inadaptée aux modes de célébration contemporains. En 1990, l’évêché de Lille annonce la décision de vendre l’église et ses locaux annexes. Un concours d’architecture est aussitôt organisé et la première pierre de la nouvelle église posée en 1991, sur un terrain appartenant à la commune situé sur la même avenue. Elle est construite sur les plans des architectes Philippe Escudié et Olivier Bonte entre 1991 et 1993. Elle est financée par l’association diocésaine et par la commune de Roubaix.

L’église du Sacré Cœur vue de la rue Pellart Coll Particulière

L’Église du Sacré-Cœur du XIXe siècle, s’élève sur la place d’Audernarde et son parvis fait face à la rue Pellart. Elle résulte du vœu des Roubaisiens d’ériger un lieu de culte en l’honneur du Sacré Cœur si la ville est préservée de la guerre contre la Prusse. Sa construction débute donc en 1871 mais n’est pas achevée quand débute la Première Guerre mondiale. C’est en effet la première église roubaisienne dont la municipalité républicaine de l’époque refusa de prendre en charge les dépassements budgétaires. Les catholiques roubaisiens promettent alors de la terminer si la ville est épargnée. Promesse tenue en 1930. Le clocher abrite alors quatre cloches : la plus lourde pèse 3,6 tonnes, la plus légère 700 kilos.

Le projet d’Omer Lecroart doc NE

En 1971, le lieu de culte ferme pour des raisons de sécurité et il est rasé l’année suivante. La municipalité décide alors de construire un espace de jeux pour enfants équipés de bac à sable et de portiques. Pourquoi n’a-t-elle pas été rebâtie, alors qu’un projet avait été adopté à l’instar de l’église du Saint Sépulcre ? L’architecte Omer Lecroart avait en effet présenté un projet dont le coût s’élevait à plus d’un million de francs. La commission des églises avait pris une part du financement et la commune en prenait pour 75 % du montant. Un emprunt est alors envisagé.L’église est plus petite que la précédente 35 mètres sur 13 de large et sera rebâtie du côté de la rue Pellart. Il restera donc un emplacement libre entre l’église et le presbytère qui lui ne sera pas démoli.

Démolition 1972 doc NE

La démolition s’effectue jusqu’en mai 1972. Mais les choses en restent là. Deux projets ont été estimés très coûteux, le projet de 1973 combattu par une partie du clergé prévoyait l’adjonction d’un lieu de culte pour les musulmans, une mini mosquée de six mètres sur dix. Et puis une partie de la population catholique estime qu’il y a plus urgent à faire que de construire un lieu de culte quand il s’en trouve un à moins de cinquante mètres.

La chapelle du couvent en 1904 doc BNRx

On se reporte alors sur l’appropriation de la chapelle de la visitation qui servira d’église paroissiale après quelques aménagements. C’est en 1975 à l’issue d’une réunion à laquelle participent Monseigneur Gand évêque de Lille et Léonce Clérembeaux député et adjoint au maire, que la décision est entérinée. Les sœurs de la Visitation ont accepté d’envisager leur départ, à condition d’être relogées dans la périphérie. Des solutions sont recherchées sur Sailly-Lez-Lannoy.

Le projet « visitation » doc NE

Le couvent de la Visitation fera donc l’objet d’un projet en quatre parties : tout d’abord la chapelle qui sera appropriée pour diverses activités paroissiales. Puis le corps principal du couvent serait transformé en foyer logement pour personnes âgées, ensuite la plus grande partie du terrain serait mise à disposition du public sous forme de parc avec aire de jeux, sur le modèle du square Destombes. Enfin le bout de terrain situé entre les maisons de la rue de la Vigne et celles qui se trouvent au quai de Nantes et boulevard de Strasbourg vont recevoir un semble d’une cinquantaine de logements et de places de parking. Quant à la place d’Audenarde, désormais libre de toute occupation, elle fera l’objet d’une consultation de la population, avant de devenir un espace de jeux pour enfants.

Carré Saint Jean

Suite de l’article intitulé : Les Petites Soeurs des Pauvres,

Le couvent des « petites sœurs des pauvres » de Roubaix ferme définitivement ses portes en 1999. Le bâtiment reste inoccupé quelques temps. La ville se retrouve avec une friche immobilière de plus de 10.000 m2 qui semble bien difficile à réutiliser.

En 2007, l’imagination intarissable des architectes et promoteurs immobiliers voient là l’occasion de construire un programme mixte de logements à proximité du centre ville. Ce projet ambitieux est orchestré par le groupe « Pascal Boulanger Réalisations » à Lille. Le cabinet d’architecture Escudié-Fermaut à Tourcoing est choisi pour l’étude et la conception.

documents archives municipales

Le site est composé de plusieurs anciens bâtiments qui sont réhabilités. Un immeuble neuf vient compléter l’ensemble en reformant le front bâti de la rue Saint Jean.

80 logements réhabilités dans le bâtiment principal : Bat A ( Photo BT )

Les travaux s’étalent sur plusieurs années, par différentes étapes successives. Le chantier commence par le ravalement de toutes les façades : les briques sont nettoyées et rejointoyées avec un joint rouge. Les anciens châssis sont remplacés par des fenêtres bois de couleur noire. L’ensemble de la toiture est remplacé par des tuiles en terre cuite de couleur gris anthracite. 3 ascenseurs sont construits sur les façades arrières, et sont habillés d’un bardage en bois.

documents archives municipales et photo BT

Les anciennes écuries ( Bat D ) sont transformées en 9 petites maisonnettes fonctionnelles et coquettes.

documents archives municipales et photo BT

La chapelle invisible de la rue est conservée. Elle comporte deux lofts et un logement-atelier d’artiste ( Bat F ).

document Nord Eclair et photo BT

Un immeuble neuf complémentaire de 20 logements ( Bat E ) est construit en front à rue. Il s’agit d’appartements en location gérés par Logis Métropole (SA d’ HLM).

documents archives municipales

La large porte située rue du coq français est rénovée et la statue de Saint Joseph restaurée.

Photo BT

Les espaces verts ne sont pas oubliés. 3 parkings sont créés dont 1 sous- terrain. Ils sont bien séparés entre eux, de façon à limiter la surface dédiée aux voitures, pour libérer de véritables zones d’espaces verts piétonnes.

document Google Maps

L’objectif est atteint : conserver au mieux les anciens bâtiments en les adaptant aux nécessités des logements neufs. Cette superbe réalisation regroupe au total, plus d’une centaine de logements répartis en appartements, maisonnettes et lofts dans un environnement insolite, calme et paisible.

document Nord Eclair

Remerciements aux archives municipales

Les petites sœurs des pauvres

Un asile de vieillard (comme on l’appelle à l’époque) est fondé provisoirement à Roubaix, en 1860, rue de l’Embranchement (aujourd’hui, la rue de Lille). L’abbé Masse, doyen de Saint Martin et plusieurs industriels y font venir « les petites soeurs des pauvres ». Il s’agit d’une congrégation religieuse qui a pour mission la fraternité dédiée aux soins des personnes âgées, pauvres et malades.

En 1862, les bienfaiteurs de l’œuvre achètent un terrain de 10.234 m2 au 52 rue Saint Jean pour y installer le bâtiment définitif et participent au financement de sa construction grâce à des dons et des souscriptions particulières.

La façade de la rue Saint Jean ( document archives municipales )

La construction se termine en 1864. Le bâtiment peut recevoir 150 personnes. Une grande chapelle dans l’axe central, et qui n’est pas visible de la rue, sépare les deux ailes : les hommes à gauche et les femmes à droite. A cette époque, les chambres sont des dortoirs, les lits sont séparés par un simple rideau.

En 1882, la maison s’est encore agrandie de manière à pouvoir recevoir 235  »vieillards » et 22 petites sœurs, aidées par de nombreux bénévoles.

Plan ( document archives municipales )

A l’intérieur, les écuries se trouvent à gauche du bâtiment et l’entrée des chevaux se fait ainsi par la rue du coq Français. Au fond se trouve la buanderie. Une cour intérieure se trouve au centre du bâtiment principal, pour les jardins mais également pour la basse-cour où les animaux peuvent promener à leur aise en liberté : poules, coqs, canards et même moutons. Sur la droite, se trouve la salle des fêtes et le vestiaire. L’aumônerie quant à elle, se trouve juste à côté au 38 de la rue Saint Jean.

l’aumônerie au 38 qui existe toujours de nos jours ( photo BT )

De nombreux bénévoles reçoivent les dons des particuliers, des vêtements ainsi que des meubles pour remise en état en vue d’une future revente.

documents collection privée
document Nord Éclair

Les écuries deviennent des lieux d’expositions, en Novembre de chaque année. Les travaux manuels des pensionnaires y sont en effet mis en vente : vannerie, rotin, fer forgé, tricot, broderie, dentelle, tableaux, peluches. L’argent ainsi récolté est une aide pour les missions des « petites sœurs des pauvres » à l’étranger pour les pays en voie de développement sur les 5 continents.

document Nord Eclair

Au début des années 1960, la maison de retraite ( appelée autrefois : l’asile de vieillards ) change d’appellation et devient « Ma Maison ». La salle de restauration est refaite, l’accueil est plus sympathique et chaleureux, les jardins extérieurs sont soignés : tout est fait, pour que les personnes âgées se sentent chez eux, comme à la maison.

document collection privée

En 1962, on décide enfin d’élargir généreusement la porte cochère. En effet, l’étroite porte d’entrée ne permet plus aux camions de pouvoir accéder à la cour pour effectuer les livraisons.

document Nord Eclair et archives municipales

Un club du 3° âge est créé en 1973, pour les personnes âgées qui habitent le quartier. Leur local est aménagé dans les anciennes écuries, d’une façon remarquable : murs de briques nettoyées, cheminée rustique, meubles anciens restaurés par les pensionnaires ; l’atmosphère est chaude et sympathique.

Les personnes habitant le quartier peuvent venir au club, tous les jours de 14h à 18h, pour jouer aux cartes et à d’autres jeux de société.

document Nord Éclair

En 1999, le bâtiment a désormais 135 ans d’existence ! Des travaux très importants sont nécessaires : travaux d’aménagement et de modernisation car les locaux sont très vétustes, et travaux de sécurité, car le bâtiment est loin de répondre aux normes de sécurité obligatoires.

Compte tenu des sommes importantes que ces travaux représentent, les sœurs quittent les lieux. Elles vont se diriger vers d’autres centres des petites sœurs, et en particulier à La Madeleine. Le centre des « petites sœurs des pauvres » de Roubaix ferme donc définitivement ses portes, en cette même année 1999.

À suivre . . .

Remerciements aux Archives Municipales, à la SER, ainsi qu’à Manuela Screpel, Soeur Adelaïde et Monique Gheerolfs.

Du château Ternynck à l’école Jeanne d’Arc (suite)

L’école des sœurs dominicaines se situe au 25 rue de Lille (bâtiment acheté à la famille Ternynck en 1919). Les locaux deviennent trop petits car l’école ne cesse de se développer. Il faut donc songer à s’installer ailleurs. Le président de l’école, Fernand Lepoutre, fait l’acquisition du château Ternynck le 1er Juin 1946. Le financement a pu être réalisé grâce à des emprunts, des dons de la congrégation et des familles, mais aussi par des ventes de charité et des séances théâtrales.

document Institution Jeanne d’Arc

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Du château Ternynck à l’école Jeanne d’Arc

Henri Ternynck est un industriel roubaisien, dans le domaine du textile. Il possède une usine de tissage et filature, située sur le Boulevard de Fourmies ( voir un précédent article sur notre site, intitulé : l’usine Ternynck ) ainsi qu’une entreprise rue de la Fosse aux Chênes. Ses immenses bureaux se situent au 50 rue de la gare ( à l’angle de la rue de l’hospice ). Henri Ternynck gère ses affaires avec ses enfants, et crée l’entreprise Henri Ternynck et fils. Tous les membres de la famille Ternynck habitent dans différents endroits à Roubaix.

Edmond et Marie Ternynck ( document C. Baccarrere et A. Charpentier )

Un des fils d’Henri, Edmond Ternynck, se marie avec Marie Dormeuil, en 1878. Il décide de faire construire son hôtel particulier vers 1880. Il fait l’acquisition d’un terrain vierge de 13.519 m2, situé au 32 rue de Barbieux, pour y faire construire sa demeure. L’extrémité de cette immense parcelle se situe avenue Le Notre, en bordure du parc de Barbieux. Il confie le projet à l’architecte M. Dupire, qui s’inspire du château de Raray dans l’Oise, pour édifier les plans de la demeure.

L’hôtel particulier d’Edmond Ternynck 1880 ( document Archives Municipales  )
L’hôtel particulier d’Edmond Ternynck  ( document C. Baccarrere )

Le château du Huchon, comme on l’appelle à l’époque, est très imposant, Il est composé de très nombreuses pièces, sur trois niveaux. Au rez de chaussée, une galerie de 24m de long fait face à la rue, c’est une galerie de façade pour y exposer des tableaux et œuvres d’art. La décoration des salles est luxueuse : cheminée dans chaque pièce, moulures bois, portes intérieures monumentales. Au 2° étage, se situent les chambres pour le personnel : les femmes de chambre et les femmes de ménage sont en effet très nombreuses et nécessaires pour le service des châtelains.

Les pièces intérieures ( documents C. Baccarrere )

A l’extérieur, côté sud, est édifiée une terrasse couverte pour les beaux jours.

La terrasse couverte ( document C. Baccarrere )

De chaque côté du château, ( côté rue ) sont édifiés deux bâtiments séparés. Le premier est réservé aux écuries, car les déplacements à l’époque se font essentiellement en véhicules hippomobiles ( fiacres, calèches ). Le deuxième, appelé bâtiment des communs, est consacré aux nombreux jardiniers. On y trouve la resserre et un hangar pour stocker le matériel. Le long du mur de clôture, se trouvent un clapier et un poulailler.

Les extérieurs ( documents Archives Municipales et C. Baccarrere )

Dans les années 1920, de nombreuses nouvelles constructions sont érigées dans la rue de Barbieux. La municipalité décide alors d’une nouvelle numérotation des habitations. C’est ainsi que le 32 rue de Barbieux devient le 68.

Côté rue ( document C. Baccarrere )
Côté jardins ( document C. Baccarrere )

Edmond décède en 1914. Son épouse, Marie Ternynck, continue à gérer seule la demeure. La propriété est immense. Une partie du château ( la moitié du rez de chaussée et la moitié du sous sol, sur le côté sud ) est louée, en 1929, à Léon Tack et son épouse Gabrielle née Catry.

Léon Tack est grossiste et importateur en fruits, primeurs et légumes. Son entreprise est installée au 23-25 rue de la Halle, où la famille occupe le 1° étage. Le couple et leurs enfants apprécie alors ce nouveau logement spacieux, dans un cadre idyllique et verdoyant.

Publicité Léon Tack ( document collection privée )

Marie Ternynck décède en 1934. La famille Tack reste locataire de la demeure rue de Barbieux. En Mai 1940, Léon Tack, son épouse et leurs 7 enfants quittent Roubaix, et partent à Mélicourt dans l’Eure, pour quelques mois, puis descendent dans le sud de la France, et résident à Tarbes pendant quelques mois également. La famille Tack est de retour à Roubaix en 1941 ; les allemands occupent la moitié de la demeure. Léon Tack déménage à la fin de l’année 1942, et part s’installer au 52 rue Dammartin.

À suivre . . .

Remerciements à Carole Baccarrere, Annick Charpentier, Gabrielle et Dany Tack, Béatrice Martin, Florence Tellier, Virginie Samyn ainsi qu’aux Archives Municipales.

Un mariage œcuménique

Le 13 juin 1973 a eu lieu un mariage à l’église réformée de la rue des Arts, et il nous est raconté par la mariée. Mon futur mari était catholique, et venant d’une famille très pratiquante. Chaque semaine ses parents et grands parents allaient à la messe. Ils allaient à l’église Saint Michel avenue Linné à Roubaix. Moi, j’étais protestante et je ne voulais pas me marier à l’église catholique.

Le Temple de la rue des Arts au n°27 CP Méd Rx

Nous sommes allés voir l’abbé Bouquillon qui était le prêtre officiant à l’église Saint Michel. Il a fait une demande à l’évêché pour que mon futur époux devienne protestant. Après l’accord obtenu, l’abbé Bouquillon nous a dit : « il vaut mieux faire un bon protestant qu’un mauvais catholique ! » Quel soulagement pour ses grands parents !

Le prêtre et le pasteur officiant de concert Coll Particulière

Mon mari s’est marié quatre jours après son vingt et unième anniversaire, car ses parents n’acceptaient pas qu’il se marie avant sa majorité. De ce fait nous avons attendu trois ans avant de convoler en justes noces. Nous nous sommes donc mariés le 23 juin 1973 et la cérémonie a été faite conjointement par l’abbé Bouquillon et le pasteur Peuron au Temple de l’église réformée de la rue des Arts.

Remerciements à Hélène Fleurbayx pour ce beau témoignage

Un singe à Saint Martin

En Octobre 1964, un couple de touristes visite Roubaix. Après avoir contemplé le majestueux hôtel de ville, ils traversent la Grande Place, pour admirer l’église Saint Martin. Soudain, leur regard est attiré par un animal sur le toit ! Un singe se promène tout en haut du vénérable édifice. Il suffit que quelqu’un lève les yeux vers le ciel, pour qu’aussitôt, nombre de badauds en fassent autant. Le petit groupe de curieux se met à grossir ; une centaine de personnes se trouve maintenant sur la place et le contour de l’église.

A droite, le sacristain, M. Fichelle

Le sacristain, M. Fichelle, mécontent que l’on vienne squatter le toit de son église, décide de faire sonner les cloches du carillon, pour tenter de chasser le petit animal ; en vain car le primate continue sa promenade, nullement intimidé.

Mais que fait donc ce singe sur les toits de l’église ? s’interroge le journaliste de Nord Eclair. Après enquête, il s’agit d’une petite guenon appelée « Nénette », qui s’est sauvée du commerce Truffaut de la Grande rue, et qui a bien l’intention de profiter de sa liberté quelques temps.

Nénette devient, au bout de 3 jours, le chouchou des roubaisiens. On jette, sur le toit peu élevé, des bananes, des pommes, des cacahuètes, et même des frites pour la nourrir. Nénette se plaît ainsi dans sa nouvelle retraite. Les enfants sont ravis de la voir escalader le clocher, en imaginant King Kong en haut de l’Empire State Building !

Comment faire pour récupérer le primate ? On installe une cage piégée : peine perdue car Nénette l’évite avec une aisance déconcertante et invraisemblable. Ne dit-on pas  »malin comme un singe » ! On dépose des fruits farcis de somnifère : en vain, car cela est également inefficace ; son instinct lui fait rejeter les produits contaminés. Un roubaisien, M. Steux, propose d’amener son singe mâle, qui pourrait séduire Nénette, et la faire sortir de sa réserve. Peine perdue, Nénette grogne et s’enfuit rapidement.

M. Steux amène son singe mâle dans son sac, pour essayer de séduire Nénette

Cela fait maintenant une semaine que Nénette apprécie sa liberté, et continue son escapade. Elle devient une véritable vedette, et pourtant il est impossible de l’approcher, et très difficile de la photographier ou de la filmer. Les caméras de télévision se déplacent, devant l’église, dans le dessein de filmer le petit animal, sans résultat probant. Notre guenon doit être hostile aux médias !

Le 11° jour, Nénette n’apparaît pas. La LPA s’inquiète. Elle est peut-être malade. Tous les roubaisiens se mobilisent. Il faut absolument capturer en douceur la guenon, saine et sauve et en parfaite santé.

Le 13° jour, Nénette apparaît de nouveau. On installe une nouvelle cage piégée, et cette fois-ci, Nénette cède à la tentation des oranges fraîches, et clac ! elle se fait prendre dans la cage. Le piège s’est refermé. C’en est fini, de la liberté. La petite guenon est examinée par un vétérinaire qui la trouve en pleine forme ; elle est ensuite rendue à son propriétaire mais celui-ci n’a pas la possibilité d’en assurer la garde, ce qui l’avait amené, d’ailleurs, à vendre l’animal par l’entremise d’un commerçant roubaisien. Quelques jours après, la LPA décide donc de vendre Nénette aux enchères.

A la salle des ventes de la rue du Collège, une foule immense se presse, pour voir notre Nénette qui est adjugée pour la somme incroyable de 1800 F. La guenon partira au zoo de Bagatelle, de M et Mme Parent, à Merlimont. Nénette va revenir à Roubaix, pour quelques jours mi-Décembre, car elle est prêtée au magasin Bossu Cuvelier de la Grande rue, pour les fêtes de Noël. Confortablement installée au rayon jouets, elle accueille tous les enfants sages. Elle repartira ensuite au zoo de Bagatelle, privée de liberté, certes, mais elle pourra profiter d’une fin de vie plus sereine.

Sacrée Nénette !

Remerciements aux Archives Municipales et à Daniel Labbé. Tous les documents proviennent des quotidiens de la presse locale d’Octobre et Novembre 1964.

Roussel rue Watt

Fronton du 48 rue Watt vue Google Maps

Le fronton de l’entrée de l’usine du 48 rue Watt affiche fièrement 1887. C’est la deuxième implantation d’Émile Roussel, après le 144 de la rue de l’épeule. Mais il s’agit de la société Roussel Desrousseaux, du nom de la deuxième épouse d’Émile, Célina Desrousseaux, qu’il a épousé le 25 février 1884, à Roubaix. Émile Roussel a-t-il voulu anticiper la transmission de ses usines aux enfants de ses deux lits ?

En tête Roussel Desrousseaux doc AmRx

En 1929, l’entreprise figure au Ravet-Anceau comme suit : S.A.R.L Émile Roussel et fils (Rayon E Roussel Desrousseaux et fils) teinturier apprêteur. La famille (ou la société) est également propriétaire de deux courées donnant dans la rue de l’épeule, au bout de son parcours, dont l’une s’appelle la cour Desrousseaux. Le 30 mai 1950, la société Émile Roussel et fils demande la possibilité d’approprier en logements le n°51 de la rue Watt. À partir de 1970, le site de la rue Watt ne cesse de s’agrandir, est-ce une stratégie pour rapatrier les éléments du 144 rue de l’épeule et regrouper les deux sociétés ?

Le premier agrandissement vers la rue de l’épeule doc AmRx

Le 6 juillet 1970, la société Émile Roussel Desrousseaux obtient l’autorisation d’agrandissement de l’atelier de teinturerie, les travaux sont rondement menés, terminés le 20 novembre 1970, et déclarés conformes le 4 février 1971. Au préalable, il a fallu démolir les n°243 et 245 de la rue de l’épeule. C’est un premier agrandissement de l’entreprise vers la rue de l’épeule où elle dispose à présent d’un bâtiment en front de rue, voire d’un accès. Quelques jours plus tard, le 12 février 1971, une nouvelle demande d’agrandissement d’atelier entraîne la disparition des n° 249 et 251 de la rue de l’épeule. Le dossier est bouclé et les travaux sont terminés le 24 janvier 1972.

Deuxième agrandissement doc AmRx

Vingt ans plus tard, une demande d’extension va entraîner en Janvier 1991 la démolition totale des numéros 237 239 241 de la rue de l’épeule. En Février 1991 l’extension est demandée et les travaux commencent. À ce moment, l’entreprise Roussel Desrousseaux occupe 9405 m² entre la rue Watt, le boulevard Montesquieu et la rue de l’épeule.

L’emprise de l’implantation en 1990 doc AmRx

Mais la teinturerie Roussel-Desrousseaux, devenue filiale du groupe Chargeurs, est bientôt mise en vente, en mai 2003. Depuis septembre 2002, l’entreprise enregistrait en effet une baisse des commandes, et son principal fournisseur, Les Tissages de Linselles, a été mis en liquidation judiciaire. Dans une interview du 19 mai 2003 donnée au magasine Investir, Eduardo Malone, le président du groupe Chargeurs déclarait : « il faut payer ce qu’il faut pour enterrer les sociétés qui ne sont pas rentables ». L’entreprise est en cessation d’activité, d’après Bernard Brossard, le secrétaire du comité d’entreprise, le 4 juillet 2003. Même si les commandes des derniers clients seront bel et bien honorées, soixante quinze salariés, soit la totalité du personnel, sont menacés de licenciement. Suite à diverses manifestations (enterrement symbolique de l’entreprise avec brûlage du cercueil) le plan social est ouvert le 2 juillet 2003 avec comme revendication de la part des employés une indemnité pour préjudice moral. Située entre la rue Watt, la rue de l’épeule et le Boulevard Montesquieu, la teinturerie Roussel-Desrousseaux, cette ancienne entreprise textile familiale récemment intégrée au groupe Chargeurs, était spécialisée dans le secteur d’activité de l’ennoblissement textile, elle a fermé ses portes en 2003.

La mosquée Bilal photo site Mosquée Bilal

Depuis 1979, l’association musulmane de la mosquée Bilal offrait un lieu de culte pour les musulmans vivant dans le quartier de l’épeule et les autres quartiers avoisinants et aussi de donner la possibilité d’apprendre la langue arabe. Elle se situait rue de Wasquehal avec une salle de prières de 50 m² !

En 2005, grâce aux dons de ses fidèles, l’association a acquis un local d’une superficie 1500 m² du site Roussel rue de l’épeule. Les travaux de la mosquée Bilal ont débuté en début de l’année 2010. Elle est inaugurée en août 2012 avec son grand dôme et sa salle de prière. En septembre 2014, l’association a fait édifier un minaret qui surplombe la mosquée Bilal de ses dix huit mètres de haut.