Le Toit Familial s’est rendu acquéreur des cinq hectares occupés par le château et le parc, par l’entremise du CIL. La démolition du château Huet intervient en avril 1951, elle est effectuée avec le souci de préserver les grands arbres de la propriété. Le permis de construire est délivré le 21 novembre 1951. Huit grands immeubles parés de briques rouges sont édifiés, qui porteront des noms d’oiseaux : la mésange, la chanterelle, la grive, le bouvreuil, le bruant, la bergeronnette, le pinson et le rossignol.
A la fin de l’année 1953, le vieux mur triste qui enserrait la propriété a été en partie abattu, laissant ainsi apparaître les nouveaux immeubles, entourés d’arbres et de verdure. Une partie du parc a été réappropriée en jardin d’enfants, c’est le futur square de la Potennerie. En juillet 1953, il est procédé à l’inauguration du jardin du square Destombes, puis de celui de la Potennerie. Les officiels visitent les deux lieux sous la conduite de M. Bernard, chef des jardins et plantations de la ville.
Le 24 janvier 1954, le groupe de la Potennerie propose 152 nouveaux logements à la location, alors qu’une partie du parc a été réappropriée en square avec jeux d’enfants.
Pendant une réunion de l’atelier mémoire, les participants se sont exprimés sur les deux images de l’église Saint Jean Baptiste, l’une datant de la belle époque, et l’autre du mois d’août 2010. Le compte rendu suivant relate les observations, les remarques et les pistes de recherches énoncées par tous les membres de l’atelier. On trouvera en italique quelques éléments de réponse extraits du bulletin de la Société d’Emulation consacré aux églises de Roubaix. Mais le travail est loin d’être terminé !
Sur la photo ancienne, l’église est encore en construction, la rue semble être un sol de scories.
L’église Saint Jean Baptiste, dite du Raverdi, a été conçue par l’architecte Auguste Dupire dont les plans datent du 2 août 1887. Sa première pierre est posée en 1888, et l’église sera construite du 16 avril 1889 au 15 novembre 1890. La rue Jean Goujon fut classée dans le réseau urbain de la ville par une décision du Conseil Municipal du 21 octobre 1904.
Les flèches ont changé. A mi hauteur des deux clochers, des éléments ont disparu, des ornements (clochetons ou pignons).Ont-ils mal vieilli et posé des problèmes de sécurité ? Sont-ils tombés ? On cite deux rénovations, l’une après la première guerre, et l’autre, il y a une dizaine d’années.
Une délibération municipale du 6 février 1959 nous apprend qu’il est question de faire procéder à d’importants travaux : consolidation de la charpente, réfection de la maçonnerie, réfection des grillages de protection des vitraux et reconstruction du parvis. Tous ces travaux seront menés à bien dans le cours de l’année.
Les abat-sons sont plus nombreux, par contre, on a procédé à la suppression des « balcons », le garde corps a disparu, pouvait-on autrefois y marcher ? La statue aurait été descendue et rénovée il y a quelques années… L’Horloge est toujours la même, il est rare de trouver une horloge sur les frontons des églises.
En janvier 1892, les habitants du quartier ont pétitionné pour obtenir une horloge à leur église.
Autrefois, il y avait plus de vitraux, ils ont été rénovés. Sur la photo de gauche, il semble y avoir un vitrage provisoire, ou des planches…Les deux colonnades latérales du fronton autour du vitrail central ont disparu. Les portes n’ont pas changé, elles ont été repeintes lors de la dernière rénovation, ce qui fait l’objet d’une anecdote. La couleur employée, le violet, ne plaisait pas aux paroissiens, les portes furent donc repeintes couleur sang, en référence à la Pâque juive.
L’atelier s’interroge sur la présence de deux tours. Une autre église, aujourd’hui disparue, Saint Antoine, rue de Remiremont avait la même configuration. Pourquoi donc deux tours ?
Une signification symbolique est-elle attachée à cette caractéristique ? Sans doute la réponse se trouve-t-elle dans les travaux de l’architecte Dupire, qui a également construit le temple protestant de la rue des Arts. Un autre témoignage historique pour terminer : avant l’église, il y avait des fermes et des vignes, et le vin fournissait l’évêché de Tournai.
Cet échange commun pose de nombreuses pistes de recherches. Un travail similaire sera effectué avec des vues comparatives de l’intérieur de l’église. A vos commentaires et compléments !
En septembre 1954 se termine le chantier d’un lotissement réalisé par le CIL et la Maison Roubaisienne. Il s’est déroulé en deux tranches, une première d’une quarantaine de maisons, une seconde d’une vingtaine, soit une soixantaine de maisons, délimitées par la rue d’Hem et de la rue Jean Gougeon. Une nouvelle rue est alors tracée entre les nouvelles maisons, qui établit la jonction entre la rue d’Hem et la rue Claude Lorrain.
La nouvelle rue est destinée à desservir l’accès à cette nouvelle petite cité, mais présente d’autres avantages. Quand on vient de la rue d’Hem, elle permet d’accéder plus directement à l’église Saint Jean Baptiste, les commerces, la place du Travail…
Il reste à lui donner un nom. Ce sera celui de Marc Sangnier, (1873-1950) journaliste et homme politique français. Il occupe une place importante dans le mouvement de l’éducation populaire à travers les revues et mouvements qu’il a animés. Il est le pionnier du mouvement des Auberges de Jeunesse en France.
Le Suisse, l’église façade et intérieur Photo coll. Particulière, Cartes Postales Coll. Médiathèque de Roubaix
Chaque église de Roubaix avait autrefois un Suisse. Un paroissien rémunéré par la paroisse, accomplissait les fonctions de suisse : il conduisait les cortèges, plaçait les membres de l’assistance à leurs places, dirigeait les aspects pratiques des cérémonies. Il indiquait les places libres, faisait respecter le silence. Il frappait sur le sol avec sa canne lors de ses déplacements, ou pour ramener l’assistance à plus de calme. Il indiquait le chemin à suivre au de la présentation de l’hostie par le prêtre. Cette fonction était encore exercée il y a une trentaine d’années dans certaines paroisses.
Le Suisse de notre photo était celui de la paroisse Saint Jean Baptiste, mais il arrivait qu’il officie également à l’église Saint Michel. Monique Dhalluin, qui habitait le petit château Dhalluin, l’évoque dans ses mémoires : un Suisse en culotte courte et bas blancs, aux mollets impressionnants, nous accueillait coiffé d’un bicorne, une hallebarde à la main…
La description générale corrobore ce souvenir : le Suisse était vêtu d’un uniforme rappelant l’Ancien Régime, avec bicorne, bas et culottes courtes, gilet brodé de fils d’or, épaulettes, chaussures à boucles. Il tenait une hallebarde et une haute canne à gros pommeau de cuivre évasé, en forme de poire.
Une anecdote concernant un mariage de 1903 à l’église Saint Martin nous donne un aperçu de la tenue du début de siècle. Les familles des mariés ont en quelque sorte rhabillé le Suisse de l’époque : comme les vêtements de cérémonie (du Suisse) n’étaient plus de toute fraîcheur, Mme Motte Lepoutre lui fit faire sur mesure une superbe tenue rutilante (sic) d’or et d’argent. Elle lui fit même confectionner de faux mollets qu’elle l’obligea à porter sous ses bas pour qu’il précédât en beauté, avec un galbe parfait, le cortège nuptial.
Cependant le cliché nous montre un Suisse plus contemporain, en pantalons, mais ayant gardé bicorne et canne. Après le Suisse, c’est un laïque qui exerçait ces fonctions, mais il n’était plus en tenue.
Beaucoup de questions restent posées : comment on devenait Suisse ? Qui était le Suisse de la photo ? Quelle différence entre le Suisse et le Bedeau ? Quand la fonction a-t-elle disparu ? A vos souvenirs…
Source anecdote 1903 Jean Piat : Jean Lebas de la Belle Époque à la Résistance
Nous avons évoqué le château Dhalluin, plus connu sous le nom de Grande Potennerie. Il y avait un autre château Dhalluin, dans la même propriété, plus modeste que le précédent, mais également habité par une famille Dhalluin. Il s’agit de la famille de Maurice Dhalluin et de Louise Virnot, mariés en juin 1919, et qui habitaient auparavant au n° 19 de la rue Charles Quint à Roubaix[1]. En 1920, alors que la famille va s’agrandir, ils décident de louer la demeure de la Potennerie qui est la propriété de Mme Alfred Motte. Voici la description qu’en fait Monique Dhalluin qui vécut là son enfance :
Cette maison de brique aux arêtes et décors de pierre blanche était située en plein quartier ouvrier, au milieu d’un grand parc tout clos de murs surmontés de tessons de bouteilles pour décourager les intrusions éventuelles…
On accédait à la propriété par une entrée située rue Jules Guesde, qui donnait sur une petite voie d’accès. Il sera question un moment d’établir la jonction entre la rue de Bouvines et la rue Montgolfier, en prolongeant cette petite ruelle. Le projet fut abandonné. La petite voie d’accès subsiste néanmoins et dessert désormais le groupe scolaire. L’autre entrée de la propriété se trouvait rue Dupuy de Lome.
En septembre 1955, sont entrepris les travaux de creusement et de fondations pour le nouveau groupe scolaire de la Potennerie. Le grand mur qui entoure la propriété et qui menace de s’écrouler par endroits, sera bientôt abattu pour laisser apparaître un groupe scolaire dans un nid de verdure.
[1] Tous ces détails figurent dans le livre de souvenirs de Monique Dhalluin, fille du couple Maurice et Louise Virnot.
Le Château D’halluin dit la Grande Potennerie en 1964 Photo Nord Éclair
La seconde partie du parc de la Potennerie, correspond au n°4 de la rue du Tilleul, aujourd’hui rue Jules Guesde. La propriété appartient à Madame Alfred Motte, née Berthe Scrépel (1870-1943), belle sœur d’Eugène Motte, industriel, maire de Roubaix de 1902 à 1912. Deux maisons de maître s’y trouvent : la Grande et la Petite Potennerie. Elles étaient habitées par la famille de Jules Dhalluin Balay pour la première, qui gardera le nom de château Dhalluin dans la mémoire collective, et la famille de Maurice Dhalluin Virnot occupait la seconde. Madame Alfred Motte est la belle mère de Jules Dhalluin, qui a épousé en première noces Berthe Motte, laquelle est décédée en 1913.
Les Dhalluin, nous explique Monique[1], étaient une famille d’industriels depuis longtemps vouée au textile (…) La matière première était la laine. La firme D’Halluin Lepers Frères sise rue de la Fosse aux Chênes quant au siège social, avait des usines à Wattrelos, Mouscron, à Ohain, au Cateau et un atelier à Roubaix.
Monique, qui habite la Petite Potennerie, évoque la maison de son oncle Jules : la demeure de notre oncle, plus vaste et plus luxueuse que la nôtre, était très belle avec ses larges portes fenêtres alignées sur la terrasse qui s’étendait sur toute la longueur de la façade. Mais entre les deux domaines, nulle délimitation clairement définie …
Elle décrit les dépendances : un logement de gardiens et une petite ferme basse[2] avec écurie, sellerie, logement des fermiers et divers locaux en prolongation, porcherie, clapier, poulailler, et par devant le tout un enclos de fumier et une petite mare… De l’autre côté du parc un bâtiment servait de maison de gardiens, de garage et de logement pour les domestiques. Il y avait aussi des serres dans un grand potager verger…
Elle évoque également un vieux tennis, des manèges, des buttes, des fossés et une grand pièce d’eau entourée de rochers artificiels, de chemin s tourmentés et rocailleux et d’une grotte…des bancs, des statues décoraient le parc …des lions accroupis, un faune cornu, un buste de déesse.
Le 3 juillet 1961, la ville achète la propriété avec le projet de construire à cet endroit un lycée technique de jeunes filles, qui remplacerait celui de la Place Notre Dame devenu insuffisant. Laissé à l’abandon trois années durant, le parc boisé est devenu un vaste terrain vague, et l’immeuble est régulièrement vandalisé, on a même tenté d’y mettre le feu. L’idée de transformer cette propriété en jardin public et l’immeuble en maison de jeunes a été un moment évoquée. La presse mentionne une pièce d’eau asséchée et une grille d’entrée rue du Puy de Lôme. La Grande Potennerie a survécu quelques années à la Petite Potennerie. Le Collège Jean Lebas, dit de la Potennerie, occupera son emplacement en 1967.
[1] Monique D’halluin, fille de Maurice et Louise Virnot. Elle raconte ses souvenirs dans un ouvrage conservé dans le fonds patrimonial de la Médiathèque de Roubaix
[2] Construite en 1897 d’après les archives municipales
Le maire de Roubaix Victor Provo eut un mois de septembre 1967 chargé : pas moins de quatre nouveaux établissements scolaires à inaugurer ! Le tout nouveau groupe scolaire Albert Camus situé dans le quartier Edouard Anseele sera le premier, dès le 9 septembre, puis ce sera au tour de l’école Jean Macé boulevard de Mulhouse, qui devient pour l’occasion un groupe scolaire le 16 septembre. Le Collège de la Potennerie fera l’objet de la troisième inauguration le 23 septembre, avant que le groupe scolaire Buffon ne termine la série le samedi 30 septembre !
La construction du Collège de la Potennerie est annoncée le 29 octobre 1965, sur l’ancienne propriété D’Halluin, où se trouvaient deux habitations distinctes qui appartenaient respectivement à M. Jules D’Halluin et Mme Berton D’Halluin, la Grande et la Petite Potennerie. La Petite Potennerie a déjà laissé la place au groupe scolaire de la Potennerie, à l’angle des rue Jules Guesde et Dupuy de Lôme. La Grande Potennerie, dont on a pensé un temps utiliser les locaux pour une maison de jeunes, puis pour le nouveau lycée technique de jeunes filles, sera finalement démolie pour permettre la construction du CES de la Potennerie.
En présence de nombreuses personnalités, le maire Victor Provo coupe le ruban tricolore et commence la visite de l’établissement : à droite de l’entrée, le grand bâtiment d’externat sur trois niveaux, huit salles d’enseignement général, six salles d’enseignement avec annexes, trois salles d’enseignement pratique, deux salles de propreté, une salle des professeurs, un cabinet médical et un préau aménagé sous le premier étage. Au fond, juste en face de l‘entrée, se dresse le bâtiment de demi pension composé de deux salles de restaurant pour un effectif de 400 élèves, en deux services, une salle à manger des professeurs, une grande cuisine moderne et des vestiaires. Enfin à gauche de l’entrée, le bâtiment administratif (direction, sous direction, secrétariat, gestionnaire, orientation) parloir, logement du concierge et trois appartements pour la directrice, le sous directeur et l’intendant[1]. L’édifice est dû aux architectes Clément et Caron, et il aura coûté 340 millions de francs, dont la ville prendra en charge plus de la moitié du financement, afin notamment d’augmenter la qualité des revêtements de sol. Il est de plus situé dans le cadre verdoyant de l’ancien parc dont on a préservé tant que possible les grands arbres. Le CES de la Potennerie est le premier collège d’une série de cinq à bâtir à Roubaix.
Vient alors le moment des allocutions. Mme Legrand, la directrice du CES, qui dirigea auparavant l’institut Sévigné, salue le maire et l’inspecteur d’académie, les remercie d’avoir fourni au corps professoral du CES un superbe édifice. Elle souligne le véritable tour de force des entrepreneurs qui ont réalisé la construction en huit mois, ce qui a permis une rentrée normale des élèves, le lundi précédent.
Ensuite l’inspecteur d’académie évoque l’emploi heureux d’un procédé nouveau de béton, dans une chaîne industrialisée de production et il se dit certain que d’autres projets existent dans les cartons de la ville de Roubaix, le lycée technique de jeunes filles du boulevard de Paris notamment.
Le maire Victor Provo fait l’éloge des instituteurs, des professeurs et de leur mission : éveiller les enfants et les conduire jusqu’à l’aboutissement de leurs études, les aider à devenir des hommes sachant juger, peser et décider. Les possibilités d’aménagement du terrain sont grandes car on pourra construire dans son enceinte une salle de sports et une piscine…
Puis M. Treffel, l’inspecteur d’académie, remet les insignes de chevalier dans l’ordre des palmes académiques à quatre enseignants MM Roger Braem et Robert Cacheux directeurs d’école primaire, Achille Leclercq instituteur, et Jean Van Welden professeur de collège. La cérémonie s’achève par un vin d’honneur et l’harmonie des anciens et jeunes soldats musiciens entame la Marseillaise dans la cour du Collège. Quand la piscine sera réalisée quelques années plus tard, le site de la Potennerie aura pris la configuration qu’on lui connaît encore : les immeubles CIL, le square, le groupe scolaire et le collège partagent le nom du quartier.
Il convient de remarquer que les quatre établissements inaugurés ont connu ou vont connaître des modifications : le groupe scolaire Albert Camus a été reconstruit, le groupe scolaire Jean Macé a récemment connu la rénovation de sa salle des fêtes, le groupe scolaire Buffon est en pleine rénovation. Quant au collège de la Potennerie, à présent nommé Jean Lebas, il vient d’être entièrement reconstruit. La durée de vie des établissements des années soixante serait-elle de quarante ans ?
[1] D’après les présentations des journaux Nord Éclair, Nord Matin et la Voix du Nord
Dès le mois de janvier 1945, alors que la guerre n’est pas terminée, Roubaix, qui a été libérée en août 1944, se mobilise pour accueillir les prisonniers et déportés. Un gala de bienfaisance est ainsi organisé le 9 janvier au grand théâtre de l’Hippodrome à leur profit. En avril 1945, l’Ecole de plein air du Pont Rouge reçoit un contingent de plus de cinq cents prisonniers libérés. Un service médical composé de médecins et d’infirmières de la Croix Rouge sous la direction du docteur Carré dispense les soins aux arrivants en collaboration avec le service de désinfection de l’hôpital. Des permanences d’accueil sont organisées jour et nuit par le service des postes. Puis fin avril, ce sont 365 rapatriés de Buchenwald qui arrivent en gare de Roubaix. Les services d’accueil les transportent aux châteaux Huet et Dhalluin, rue Jules Guesde dans le quartier de la Potennerie, mais également au château Vanoutryve boulevard de la République. Les convois se succèdent pendant le mois de mai, et la presse évoque d’autres lieux d’accueil : des hôpitaux militaires auxiliaires boulevard Gambetta et rue Edouard Anseele. Une quinzaine de voitures et six ambulances transportent prisonniers, rapatriés, blessés et malades, jusqu’aux centres médicaux.
D’après les témoignages, ces personnes étaient dans un état pitoyable. C’étaient des morts vivants, épuisés par leurs années de captivité, et par leur voyage de retour interminable. Il fallait les aider pour marcher, les coucher, les nourrir…
Le château Huet remplira quelque temps cette fonction de bloc sanitaire. Au moment de sa dissolution, il sera question de le transformer en maison de repos pour les rapatriés. Mais nous n’avons pas trouvé suite du projet. Ce château sera démoli en 1951.
Située au carrefour des rues Jean Goujon, du Tilleul (Jules Guesde), d’Hem, et Jean Baptiste Vercoutère, cette propriété figure sur le cadastre de 1884. Sa construction est donc antérieure à cette date. Le plan montre un grand bâtiment dont une façade s’oriente vers le parc, avec deux escaliers latéraux permettant l’accès à une terrasse ou une véranda. Le côté opposé présente un seul escalier qui doit donner sur l’entrée du château. On devine deux porches un peu plus haut. Le bâtiment principal jouxte des annexes, sans doute les écuries, et les logements du personnel de service. Une entrée est également figurée de ce côté. Cette propriété est occupée par l’industriel Georges Heyndrickx-Bossut jusqu’à la première guerre. Après la première guerre, Charles Huet-Masurel entre en possession de la propriété, qui sera désormais connue comme le château Huet.
Pendant l’occupation, le château Huet sert de camp d’entraînement aux soldats allemands, qui l’avaient alors entouré d’un réseau de défense à base de mines et de grenades. A la libération, le château est reconverti en lieu d’accueil pour les rescapés des camps de concentration, puis de refuge pour les personnes déplacées, réfugiés ou expulsés civils, obligés de quitter leur foyer situé en zone de guerre. Le château Huet sera démoli en 1951. A cette époque, la propriété comprend un parc planté d’arbres, et trois corps de bâtiment. Si le château doit disparaître, on va préserver le parc. En effet, la société « le Toit Familial » affiliée au CIL va construire à cet endroit un quartier tout neuf, composé de 152 logements collectifs, répartis en huit groupes, respectueux des grands arbres. Un hectare du parc sera préservé et converti en square public.
Quand on observe attentivement le plan de 1919 ci-dessus, et qu’on le recoupe avec les propriétés signalées dans le Ravet Anceau ou dans la presse, on obtient la liste suivante.
1-Côté Raverdi, une propriété située au démarrage de la rue du Tilleul (future rue Jules Guesde) à l’endroit du carrefour formé par cette rue avec les rues Jean Goujon, d’Hem, et Jean Baptiste Vercoutère. On aperçoit une grande bâtisse près de laquelle se trouvent des jardins et dont l’accès se fait par la rue Montgolfier. Cette propriété est occupée par l’industriel Georges Heyndrickx et sa famille jusqu’à la première guerre.
2-Immédiatement au dessus, et séparée de la précédente propriété par le prolongement de la rue de Bouvines, un grand bâtiment autour duquel se trouve une grande pièce d’eau au lieu dit la Pontennerie, et quelques autres bâtiments disparates. La percée ou le prolongement de la rue de Bouvines jusqu’à la rue Montgolfier n’a jamais abouti. Il semble bien qu’il ait servi d’accès à cette propriété où l’on pouvait entrer également par la rue du Puy de Lôme. Selon le Ravet Anceau, cette propriété est occupée par M. Toulemonde Destombes, puis appartient à M. Alfred Motte Scrépel et sa famille jusqu’à la première guerre. En 1897, Alfred Motte demande l’autorisation de faire construire une ferme sur cette propriété.
3-Au-delà de la rue Montgolfier, à l’angle de la rue Jean Baptiste Notte et du boulevard de Reims, une autre propriété avec un grand jardin, dont l’accès se trouve boulevard de Reims. En 1892, il s’agit de la propriété de M. Bossut Plichon.
4-De l’autre côté du boulevard de Reims, se trouve la grande propriété dite des Près, appartenant à M. Louis Cordonnier, dont le souvenir subsiste avec le nom de l’avenue qui donnait accès à ce véritable château. L’avenue Linné a été tracée sur une partie de la propriété.
On voit donc que le quartier était encore campagnard, libre de toutes constructions, excepté ces grandes propriétés d’industriels, dont on peut situer la construction entre 1870 et 1900. Plusieurs familles s’y succéderont, avant que la réappropriation de leurs propriétés en terrains publics ou sportifs ne s’opère, après la première guerre mondiale.