Constructions CIL 1949-1950

Dès 1948, les quartiers du Nouveau Roubaix et des Trois Ponts sont cités comme terrains disponibles pour bâtir…

CIL et Toit familial

En Janvier 1949 le CIL construit 110 maisons et un immeuble de 30 appartements. Dans le quartier du Nouveau Roubaix, dans le triangle avenue Motte, Gustave Delory et Horace Vernet, En octobre 1949 le CIL  a pratiquement terminé les alentours de la rue Mignard. L’opération se poursuit en janvier 1950 : on construit dans le même périmètre avec le Toit Familial. Le lotissement portera le nom évocateur de vertes allées.

vertesallees&fourmiesVertes allées et Boulevard de Fourmies Photos PhW

La maison plébiscitée

La cité expérimentale CIL de Mouvaux lancée et construite dans l’immédiat après guerre présentait un grand nombre de nouveaux modèles de maisons, parmi lesquels on en plébiscita  un en particulier. Ce type de maisons se retrouve dans les lotissements de cette époque, d’un côté et de l’autre de l’avenue Motte, à l’angle de l’avenue Delory, ou dans la cité de la gare de débord.

La cité de la gare de débord

Face à la rue Mignard et juste en dessous de la cité des Trois Baudets à Hem, qui est historiquement le premier chantier CIL de l’après seconde guerre mondiale, se poursuit le chantier démarré en janvier 1949. Le lotissement prendra le nom de l’ancienne affectation ferroviaire des lieux.

maisonmodeleLa maison plébiscitée  Photo PhW

L’avenue Motte

On l’a d’abord appelé avenue des Villas, puis boulevard industriel. Sa double voie est d’origine,  mais son terre-plein vient d’être débarrassé des derniers rails qui menaient autrefois les convois ferroviaires de la gare du Pile à l’emplacement de la gare de débord sur lequel sont apparues des maisons. L’avenue Motte est devenue une splendide artère à la suite du boulevard Clemenceau qui descend de Hem, et qui trouve dans son prolongement l’avenue Salengro à hauteur de la rue de Lannoy. Le macadam a remplacé les pavés.

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L’avenue Motte CP Médiathèque de Roubaix

Les immeubles HBM 1927-1930

Deuxième tranche de travaux

La ville de Roubaix développe un important programme de logements après une délibération d’août 1923, achète les parcelles entre le boulevard de Fourmies, l’avenue Alfred Motte et des Villas et la rue Linné pour l’Office Public Municipal d’Habitations à Bon Marché. Ces parcelles forment une vaste propriété de plus de 7 hectares dont la société Lemaire Frères et Lefebvre est propriétaire. L’achat est réalisé en 1923. La construction des immeubles HBM commence en 1927, dans une deuxième tranche de travaux.

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Des noms d’arbres pour les immeubles

La deuxième tranche de construction des HBM a permis de réaliser sept immeubles collectifs à quatre niveaux. Comme pour la première tranche, le même cahier des charges a été donné à sept architectes différents qui en ont donné leur interprétation personnelle, ce qui donne un certain cachet à l’ensemble. Des noms d’arbres ont été donnés à chacun des îlots : les Acacias, les palmiers, les Chênes, les Saules, les Châtaigniers, les Merisiers.

Des noms de peintres pour les rues

Les rues qui desservent ces HBM seront créées pendant leur construction. La municipalité choisit de leur donner des noms de peintres célèbres : Léonard de Vinci, Rubens, Fragonard, Van Dyck. Un peintre roubaisien figure parmi ce panthéon : Jean Joseph Weerts.

Présence du commerce

Les angles des îlots HBM accueillent bien souvent un commerce. Sur les 28 angles formés par les immeubles, on peut dénombrer: trois boucheries, trois épiceries, deux magasins de fruits et légumes, un fleuriste, un marchand de volailles, une boulangerie, une mercerie, une droguerie, un cordonnier, un salon de coiffure, une laverie automatique, et un restaurant. Quelques commerces ont aujourd’hui disparu et ont été reconvertis en logements, ou servent d’agence pour les bailleurs locaux.

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Les premières maisons HBM 1924-1928

Les projets de Jean Lebas

Au lendemain de la première guerre mondiale, un projet d’aménagement général d’un ensemble d’habitations destinées à la population ouvrière de Roubaix est impulsé par Jean Baptiste Lebas, Maire de Roubaix. Ce dernier a créé par décret le 3 juin 1921, l’Office Public d’Habitations à Bon Marché, ancêtre des H.L.M. Le Conseil Municipal du 31 janvier 1924 va émettre la demande d’utilité publique et les terrains sont achetés à la société Lemaire frères et Lefebvre, dans le but d’être cédés aux H.B.M. La rue Jean Macé fait partie de ce plan d’ensemble, avec cinq autres rues (Léon Marlot, Raphaël, Léonard de Vinci, Van Dyck et Fragonard) qui formeront le quartier du Nouveau Roubaix. La ville de Roubaix lance un premier chantier d’ensemble de maisons dans la rue Jean Macé.

Cinq architectes roubaisiens

Les travaux de construction des immeubles démarrent en janvier 1925, en partant de l’avenue Linné. L’Office des H.B.M. a attribué par lots les plans des constructions aux principaux architectes roubaisiens. C’est ainsi que Paul Destombes construira la première partie des immeubles constituée par une tranche de huit maisons, en façade latérale du Groupe scolaire de l’avenue Linné. Les huit maisons suivantes sont attribuées à l’architecte Poubel, puis huit autres encore à l’architecte Dupire, le lot suivant à l’architecte Barbotin, auquel succédera l’architecte Derveaux . C’est Paul Destombes qui clôturera les constructions par un projet déposé le 11 juin 1928. Le cahier des charges des constructions était le même, mais chaque architecte en donnera son interprétation personnelle, ce qui donne une variété de formes à des maisons qui ont cependant gardé un air de famille.

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Nouvelles rues

Le 27 juin 1924 , le Conseil Municipal donne le nom de Léon Marlot, jeune héros de la guerre 14-18, à une rue non viabilisée. Il faudra attendre cinq ans pour avoir une chaussée convenablement construite. La rue Léon Marlot se termine alors dans le chemin vicinal n°9 qui rejoint à l’avenue Alfred Motte. Son parcours sera rectifié en 1929 afin qu’elle se poursuive en ligne droite jusqu’à l’avenue Motte. La rue Jean Macé devient une voie publique en 1931 et elle rejoint l’avenue Motte après un parcours rectiligne, quelques mètres après une école communale de filles et de garçons (Groupe scolaire Jules Guesde) dont la construction a été rendue nécessaire par le développement de la population du quartier, et dont les plans ont été établis en décembre 1930, la réalisation étant achevée en 1934.

L’église Sainte Bernadette

La pose de la première pierre par le Cardinal Liénart doc JdeRx

La première pierre de l’église Sainte Bernadette est posée en juillet 1935 par le cardinal Liénart, alors que le quartier des Hauts Champs et du Nouveau Roubaix est encore campagnard, avec des fermes, des jardins ouvriers, des briqueteries. L’église Sainte Bernadette remplace une humble chapelle de bois construite quelques années plus tôt. René et Maurice Dupire en furent les architectes. A vos souvenirs !

Un premier baraquement datant de 1934 sert de chapelle provisoire, ce qui montre l’importance de la demande du quartier. En effet, l’église Saint Jean Baptiste, improprement appelée église du Nouveau Roubaix est trop éloignée du quartier. La première pierre de la nouvelle église est posée le 28 juillet 1935 par le cardinal Liénart. C’est la 14ème église de Roubaix. L’Evêché a acheté les terrains qui appartenaient à la compagnie de chemin de fer du nord,. On a donc  construit une église, un presbytère, une école et un patronage. Elle devait s’appeler l’église Ste Famille, mais l’abbé Carissimo, promoteur du projet s’y est opposé. Ce sera donc Ste Bernadette. Cette église  n’a jamais été finie, des salles avaient été prévues,  sur les côtés, c’était écrit c’est ici la maison de Dieu, c’est ici la porte du Ciel. En 1936, à la fin de la construction, des ouvriers ont mis un drapeau rouge en haut de l’échafaudage. Un vicaire en soutane est monté à l’échelle pour le décrocher.

L’église Ste Bernadette doc NE

Que devient le terrain rouge ?

Quelques années après la libération, le Nouveau Roubaix poursuit sa construction. Il est ainsi prévu l’édification de dix sept blocs pour deux cents logements et un centre sportif scolaire. En novembre 1950, deux cents habitations sont sorties de terre entre les rues Jean Macé, Horace Vernet, Rubens, et Raphaël, édifiées par l’office municipal HLM. Dans ce nouveau cadre aéré, il reste un grand espace à aménager, situé entre les rues Ingres, Raphaël, Fragonard et Van Dyck.

L’espace dit le terrain rouge CP Méd Rx

En juillet 1954 est livré aux enfants un nouveau terrain de jeux : des tourniquets verts et blancs, une cage à écureuil (sic) argentée, des barres fixes miniatures, un toboggan rutilant, des bacs à sable, des balançoires[1]. Ce jardin d’enfants est l’œuvre de M. Bernard, ingénieur paysagiste, chef du service des jardins, lequel guide le maire Victor Provo et son équipe venus pour une inauguration sans grande pompe ni discours. L’appellation jardin d’enfants laissera bientôt place à celle de terrain rouge,  de la couleur du schiste qui recouvrait le sol. Un premier bac à sable se trouve du coté de la rue Van Dyck, un deuxième longe la rue Ingres, près duquel se dresse la cage à poules[2] (sic). On a installé des barres fixes dans l’angle formé par les rues Ingres et Raphael, et un grand portique de balançoires se trouve aligné avec la dernière rue citée.

Les jeux pour les enfants Photo NE

C’est en juillet 1954 qu’est livré aux enfants le nouveau terrain de jeux dit le terrain rouge: des tourniquets verts et blancs, une cage à écureuil (sic) argentée, des barres fixes miniatures, un toboggan rutilant, un bac à sable, des balançoires. Ce jardin d’enfants est l’œuvre de M. Bernard, chef du service des jardins et ingénieur paysagiste, qui guide le maire Victor Provo et son équipe venus pour une inauguration sans grande pompe ni discours. Les arbres et les haies ont grandi, mais les équipements de jeux ont disparu pour des raisons d’entretien et de sécurité. Le terrain rouge sera un temps occupé par des terrains de baskets, et la question de l’occupation de sa surface reste à l’ordre du jour: certains y voient le marché, et même un marché couvert, d’autres préféreraient lui garder sa fonction de square et d’espace vert. Le débat est ouvert depuis quelques temps.

[1] D’après le Nord Eclair de 1954

[2] Des propres paroles d’un témoin

Un train sur l’avenue Motte

En 1910, les roubaisiens souhaitent un boulevard industriel comme à Douai ou à Lille, avec une voie ferrée. Ils veulent relier la Gare de Roubaix Wattrelos (dite du Pile) qui est au Carihem et une gare de débord qui se trouverait près du Contour des Petites Haies, en bas du boulevard Clémenceau qui vient d’Hem. Le train viendra alimenter les usines en charbon et en matières premières, et transportera leur fabrication. Quelles sont les usines concernées ? Il y a principalement l’usine Motte Bossut construite en 1903 (aujourd’hui plus connue sous le nom de l’Usine, importante surface de vente de textiles), mais d’autres industriels vont venir s’installer, comme Auguste Cavrois qui fera construire la Filature de Maufait, en 1928 et Léon Frasez un tissage juste en face de Motte Bossut en 1925.

La Ville de Roubaix commence la réalisation du boulevard industriel (avenue Salengro et avenue Motte). Elle fait construire le terre-plein pour le train et les deux voies de chaque côté pour les voitures. La Compagnie des Chemins de fer du Nord donne son accord en 1911 et un projet de gare de débord est élaboré le 26 mai de la même année, elle doit se trouver en face du boulevard de Fourmies. Mais deux évènements importants vont retarder le projet. En 1912, l’industriel Eugène Motte est battu aux élections municipales et remplacé par le socialiste Jean Lebas. La vente des terrains n’avance pas et les décrets d’expropriation sont longs à obtenir. L’opération va pouvoir démarrer en 1914 quand éclate la première guerre mondiale. Il faudra attendre 1920 pour reprendre les travaux. On doit changer d’entrepreneur, le dernier étant mort pour la France. A l’emplacement de la future gare de débord, il y a des baraquements montés par la Préfecture avant l’invasion allemande, qui sont dans un état d’insalubrité. Des mesures sont prises, les rails sont posés, mais le train ne circulera qu’à partir des années trente. Les personnes interviewées disent qu’il n’y a pas eu de gare de débord, et qu’il n’y avait qu’une seule voie…

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Les rails sur l’avenue Motte CP Méd Rx

Par contre le train circule. Une fois par jour, toujours à la même heure, un peu avant midi, il remonte le boulevard industriel et traverse les importantes rues Pierre de Roubaix, de Lannoy et Lecomte Baillon. Ces endroits sont dangereux, car il y a des passages à niveau sans barrières.

Ce train était-il rentable ? Servait-il vraiment à quelque chose ? Le développement de l’automobile et du transport routier l’a sûrement concurrencé, comme il le fait aujourd’hui. La seconde guerre mondiale va l’achever. Une personne nous a dit que les allemands ont démonté les rails pour les emmener en Russie. Après la libération, des arbres ont été plantés sur le terre-plein et cet endroit est devenu un grand boulevard.

Notre article et les recherches de Dalila ont suscité des commentaires :

En 2001, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec monsieur Fayolle (service Patrimoine de la SNCF), au sujet de la voie ferrée désaffectée reliant Somain à Halluin et passant par Herseaux-Wattrelos-Roubaix-Lys Lez Lannoy-Hem-Forest-Ascq : il y a bien eu un « itinéraire de rocade » avec sa gare de marchandises dite « Annexe du Nouveau-Roubaix », en parallèle à la ligne ferroviaire principale Ascq-Forest-Hem-Roubaix-Wattrelos à double voie.
D’après les documents d’archives de la SNCF, cette petite rocade devait venir « aérer » la ligne principale et elle fût réalisée par la Compagnie du Nord-Est. A la différence de la ligne principale, cette rocade était bien à voie unique. Aucun de mes documents ne fait mention du transport de voyageurs comme ce fût le cas pour la ligne principale qui transportait voyageurs ou travailleurs à bord de trains appelés « trains-omnibus » ou « navettes ».
Il n’y avait pas de barrière pour séparer la chaussée de la voie ferrée et les gens passaient de l’une à l’autre… Des affiches signalétiques, aux dessins très expressifs, rappelaient aux passants « Ne marchez pas sur la voie ferrée ! »
Je ne sais pas quel type de marchandises y était acheminé, sachant que sur la voie principale, matières premières et textiles y transitaient, mais aussi des courriers (trains de messagerie), des produits chimiques notamment avec l’usine Péchiney-Ugine-Kuhlmann qui réceptionnait des trains entiers de soude en provenance de Jarrie-Vizille… Son site (fermé et ultra pollué ) est devenu un point noir à Roubaix !

Dalila poursuit

J’ai repris contact avec les archives de la SNCF, mais également avec un groupe d’anciens cheminots du Nord qui sont organisés en diverses associations et qui collectionnent photos, articles, revues spécialisées… : l’un d’eux m’a répondu et il est OK pour étendre la recherche auprès de son réseau.
Autre info : l’époque de la construction de la voie ferrée du bd Industriel correspond à la période des chantiers d’aménagement des voies industrielles secondaires (canaux et rails) sous le Plan Freycinet. Ainsi, les voies ferrées passant par Roubaix étaient inscrites au programme 2 et programme 3 de ce Plan national.

Philippe Armand complète notre information :

J’ai été informé de cet article par Dalila et c’est avec plaisir que je partagerais mes modestes connaissances relatives aux deux sujets de cete discussion à savoir la ligne Halluin-Somain et la desserte ferroviaire de l’Avenue Alfred Motte. Il s’avère que je suis natif de Roubaix où j’ai vécu jusqu’en 1990. Mes premiers commentaires vont être un peu négatifs. Je suis un peu surpris qu’il soit fait allusion à la Compagnie du Nord-Est pour l’embranchement de l’Avenue Motte dans la mesure où il s’agit d’un dossier du 20° Siècle alors que cette compagnie a disparu suite à la Guerre de 1870 et les concessions qu’elle avait obtenues de l’Etat furent ré attribuées à la Compagnie du Nord.
D’après les éléments dont j’ai entendu parler, cet embranchement industriel n’avait pour but que de desservir des industriels riverains un peu comme en Gare de Croix-Wasquehal. Il n’a jamais été question d’une ligne complémentaire à une section de la ligne Halluin-Somain.
Je pense que des reportages sont déjà parus dans Nord Eclair à ce sujet lors d’une période estivale.
J’ai déjà eu l’occasion de voir des photos de cet embranchement avec des wagons stationnés. Il s’agissait de tombereaux à essieux avec une version à trappes supérieures pour l’un d’eux. Ces wagons étaient sur une voie annexe à la voie principale.
J’aurais l’occasion d’effectuer d’autres interventions destinées à faire avancer vos recherches.

Le premier supermarché Auchan de France

Les derniers morceaux de campagne du quartier du Nouveau Roubaix ont disparu quand on a construit la nouvelle cité des Hauts Champs, située entre l’église Sainte Bernadette, la première du nom, et l’usine Motte Bossut. Ce quartier déjà bien peuplé vient donc d’être complété par une cité de 900 logements, ce qui a sans doute contribué à la création d’un super-marché, installé dans les murs d’une ancienne entreprise textile. Le tissage Léon Frasez construit en 1925 presque en face de l’usine Motte-Bossut, fermera avant la seconde guerre, et sera repris vers 1948 par la société de retordage de laines/la filature de laine Arlaine.

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La façade du premier Auchan doc NE

L’environnement des collectifs d’habitation de la rue Braille ou de la plaine des Hauts Champs ont donc favorisé l’ouverture d’un magasin libre-service. Jusqu’ici, on a beaucoup construit sans penser au ravitaillement des habitants, qui s’approvisionnent chez les commerçants du boulevard de Fourmies, de la rue de Lannoy, voire sur Lys ou sur Hem. Ces magasins sont relativement éloignés pour la nouvelle cité des Hauts Champs. Le retordage de laines sera déplacé et un commerce dont l’enseigne rappelle le lieudit commence sa carrière.

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L’intérieur du premier Auchan doc NE

Il est inauguré le samedi 23 décembre 1961 en présence de M. Robert Hirsch, Préfet du Nord, et de nombreuses personnalités régionales et locales, parmi lesquelles se trouvent les  représentants des villes de Croix, Hem, Roubaix, Wattrelos, ceux des chambres de commerce de Lille et Roubaix, ceux du patronat textile, dont le PDG des Trois suisses, et celui de la Redoute, entre autres.

Les premiers clients sont d’abord frappés par le grand parking, d’une capacité de 200 voitures. Puis c’est la grande variété des rayons dans lesquels on peut faire son marché avec un panier roulant, qui permet d’amener les marchandises jusqu’à la voiture. Ce libre-service possède en effet des rayons très variés : épicerie, fruits et légumes, crémerie, boucherie, vins, bières, eaux minérales, confiserie, pâtisserie, boulangerie, produits d’entretien, petite quincaillerie, vaisselle, papeterie, librairie, jouets, disques (avec appareil d’écoute automatique) rayons textiles et habillement, bonneterie, sous vêtements, linge de maison.

Henri se souvient :

Je venais de prendre mes fonctions aux Ets Losfeld, grossiste en fromages, mais surtout 1er affineur de mimolette de France (et même d’Europe !). Monsieur Joseph Losfeld m’a demandé de faire la 1ère livraison de fromages au nouveau super marché de Roubaix des Hauts Champs. C’était le premier du groupe actuellement appelé Auchan. L’inauguration devait avoir lieu le lendemain, c’était le branle-bas de combat ; j’ai été reçu par le personnel très sympa, mais particulièrement énervé, ils n’étaient pas des spécialistes en fromage ! Monsieur Gérard Mulliez était présent, et il contrôlait tout. Très absorbé, il a oublié le petit pourboire du livreur, mais je lui pardonne…

Dans chaque rayon, un choix considérable de marques. La devise de la maison avait de quoi plaire : plus de marchandises pour moins d’argent ! Un dernier avantage convaincant : le super-marché est ouvert de 8 h 30 à 12 h 30 et de 14 h à 20 h toute la semaine et de 9 h à 13 h le dimanche. Ce sont là les premières innovations d’une surface commerciale qui va s’affirmer au long des années en inventant encore, jusqu’à la création d’autres surfaces de cette marque. Roubaix fut ainsi une nouvelle fois terre d’innovation…

Photos Nord Éclair

Sonia et Dalila se souviennent

C’était la grande surface de proximité jusque dans les années 80… car celui de Leers était plus grand. On se souvient du rayon « café » d’où se dégageait une forte odeur… l’emballage sous-vide n’existait pas encore ! On pense qu’il y avait un étage dont l’accès se faisait par une rampe (pente d’accès) : le rez de chaussée était réservé à l’alimentaire et l’étage pour le reste. Mais ça on en est plus vraiment sûres.

Jeannine :

Je viens de prendre connaissance de votre blog suite à l’article paru dans Nord Éclair. Je viens de faire un retour en arrière !!En 1963 je faisais la « reprise des vides » sur le terre plain devant l’entrée du magasin. J’ai tenu ce poste quelques années. A l’époque, pas de « machine » tout se faisait de tête. C’est bien de se souvenir. Merci à vous. Jeannine.

Un complément :

Le 24 décembre 1961, c’était l’ouverture d’un super marché dans le quartier des Hauts Champs et du Nouveau Roubaix, qui allait être à l’origine de bien des changements dans la vie commerciale et dans les habitudes des habitants du quartier, puis de la ville. A la date de son ouverture, il s’appelle juste Super – Marché et son adresse est avenue Motte à Roubaix.

Les Longues Haies en 1931

Le roman de Maxence Van Der Meersch intitulé Quand les sirènes se taisent est paru en 1933. Il évoque le quartier des longues haies pendant les grèves de 1931.

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Van Der Meersch et son ouvrage
Collection particulière

Pierre Pierrard écrit dans la préface : c’est le Roubaix de l’avant guerre, de l’avant-36, le Roubaix de notre enfance, à la fois terriblement austère et terriblement attachant, qui tournait interminablement autour des trois pôles fixés par le XIXème siècle industriel : l’usine, le taudis, le cabaret. Ce roman est une des contributions de Maxence Van Der Meersch à la mémoire roubaisienne. Ce témoignage nous donne un grand nombre de descriptions des lieux et de la vie roubaisienne de l’époque, qu’il faut confronter à d’autres mémoires, celle des familles, des journaux, des différents syndicats, du monde politique. A lire ou à relire

La rue Edouard Anseele, héritière des Longues Haies

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La rue des Longues Haies doc Brunin

Il y a soixante dix ans la rue des longues haies prenait le nom de rue Édouard Anseele, par une décision du conseil municipal, qui souhaitait rendre hommage au grand dirigeant socialiste belge. Mais si le nom de la rue a changé, ses caractéristiques principales subsistent.

Tout d’abord la présence importante de l’industrie, de grandes usines, des filatures de laine principalement : au n°28 la filature des longues haies, Motte Porisse, qui produisait la marque des laines du Chat Botté, dont le souvenir subsiste avec le rond point auquel on a donné ce nom, au carrefour du boulevard de Belfort, de la rue du Coq français et de la rue St Jean. Cette usine sera détruite par un monstrueux incendie qui dura plusieurs jours en 1983. Il y avait aussi au n°38 la Manufacture des deux gendarmes, qui était une marque de linge de maison et de tissu éponge.  La rue passe ensuite entre l’usine Motte Bossut et la fabrique de couvertures Lemaire et Dillies ; la première abrite désormais les archives nationales du monde du travail et l’autre accueille l’IUP Infocom. Puis, à l’autre bout de la longue ligne droite, après la rue Pierre de Roubaix, il y a d’autres entreprises, principalement des bonneteries, dans la partie encore existante de la rue Edouard Anseele.

Entre la rue du Coq français et la rue Pierre de Roubaix se trouve un habitat de maisons serrées, avec de petites façades en front à rue, mais aussi avec de nombreuses courées, composées en moyenne d’une dizaine de maisons. Il y en a encore plus d’une trentaine en 1960. A la même époque, on y trouvait aussi huit épiceries, trois boucheries, deux drogueries, deux marchands de vins et spiritueux, quatre coiffeurs, deux libraires, et douze cafés.

La vitrine de ces commerces est souvent suivie par l’entrée d’une courée, avec ou sans porte, devant un court boyau sombre qui donne dans la cour entourée de deux alignements de maisons. Un point d’eau, une pompe, au fond les toilettes communes et les casiers à charbon…Souvent les cours communiquent entre elles, ce qui forme un labyrinthe inextricable à qui n’est pas du coin. Cet habitat est très ancien, certaines courées étant déjà citées en 1895, comme la cour Boucau au n°167, ou la cité Jénart-Beny au n°353. Malgré l’entretien et le nettoyage régulier, les maisons sont vieilles, et il arrive parfois que l’une ou l’autre s’effondre, comme ce fut le cas de la cour Leman, où six maisons s’effondrèrent, en décembre 1958.

Dès le début du vingtième siècle, dans un souci d’hygiène, de salubrité et de santé publique, ont été créés le dispensaire anti tuberculeux de la croix rouge qui abritera également l’école d’infirmières, et l’établissement des bains douches fondé par la caisse d’épargne en 1911. Ces deux établissements étaient encore en fonction avant l’opération de rénovation.

La caisse de crédit municipal, ex Mont de Piété, est installée entre la rue Dupleix et la rue du Coq Français ; on disait qu’on allait « Chez Ma Tante » pour y gager un bien quelconque en échange d’un peu d’argent. Près de là, se trouve la sortie de l’hippodrome, grand lieu roubaisien de spectacles : le cirque franco-belge y donne de nombreuses représentations, et c’est aussi une scène de music hall, d’opérette et d’opéra, rebaptisée Capitole pour les besoins du cinéma. Il sera démoli en 1964.

La rue est aussi le décor d’une braderie en avril, qui associe les marchands d’occasion avec les bradeux d’un jour, sans oublier les animations des commerçants et des cafés, où l’on joue, l’on chante et l’on danse.

A la fin des années cinquante, les fusillades entre partisans algériens du MNA et du FLN troublent la paix du quartier, qui devient alors le « douar Anseele ». Que le quartier ait été considéré comme un village (un douar), rien d’étonnant, car on trouvait dans la rue Édouard Anseele et les rues alentour, tous les ingrédients de la vie sociale, de travail et de loisirs.

Ces derniers épisodes, ainsi que l’insalubrité de l’habitat amenèrent la question : faut-il détruire le bloc Anseele ?  Lorsque Roubaix eut épuisé ses derniers terrains libres pour construire, commença alors l’opération rénovation des ilots insalubres, dont l’îlot Édouard Anseele fut l’un des premiers chantiers, dans lequel les démolitions commencèrent en 1959.Photo collection particulière

La longue histoire du bâtiment Degas 2

Après percement Photo Lucien Delvarre

Après le percement du bâtiment n°9 en 1986, on parlera désormais du grand Degas et du petit Degas. Il est prévu de prolonger la rue Léon Marlot afin qu’elle rejoigne la rue Joseph Dubar en passant entre la chaufferie et l’ancienne supérette. Il s’agit d’assurer le désenclavement du quartier, et l’on pense implanter des commerces dans la rue Léon Marlot prolongée. Seule la boulangerie Dujardin s’y installera. Le prolongement viendra plus tard.

Le bâtiment Degas accueille alors des activités de rencontre et d’animation entre habitants soutenues par le centre social des hauts champs. La Confédération Syndicale du Cadre de Vie y tient également une permanence. Le 13 octobre 1986, intervient l’assemblée générale fondatrice du comité de quartier, qui s’installera dans le bâtiment Degas à l’entrée 13. Son premier Président sera André Delcroix, membre de la CSCV,  auquel succéderont Ernest Gongolo et Thierry Dony actuellement en fonctions. Suite à un certain nombre de péripéties, perturbation de réunion, intrusions, le local ayant été vandalisé, le comité de quartier quittera le bâtiment Degas en 1993 pour s’installer au n°176 de l’avenue Motte, en octobre 1994.

Entretemps, en 1989, on a refait les peintures des bâtiments en associant les habitants pour le choix des couleurs. A la même époque, un atelier bois est installé dans une cave de l’entrée G du bâtiment Degas, à l’initiative du centre social des Hauts Champs. Un formateur technique intervient pour apprendre aux locataires à entretenir leur logement, et à intervenir sur des petites pannes. Les gens peuvent faire des travaux dans l’atelier où il ya des machines. Cet atelier propose également des animations aux enfants du quartier. Cette opération se termine en 1996 pour des problèmes de sécurité et de financement, et l’atelier bois intègre le centre social des Hauts Champs.

En 1995, la chaufferie située à l’angle des rues Degas et Pranard est démolie, on rase les anciens locaux inoccupés de la supérette, et le chauffage est alors assuré par Logicil à Hem. A partir de 1996, la situation se dégrade progressivement, et on évoque la fermeture des balcons des bâtiments 9 et 10, car ils servent de dépotoir pour des ordures, quand celles-ci ne tombent pas sur les passants. Les murs sont graffités, les entrées sont squattées, le quartier n’est plus sûr. Le 27 mars 2000, la rue Léon Marlot est enfin prolongée. Les habitants étant contre la percée jusqu’à la rue Joseph Dubar, on ne crée pas de nouvelle traversée et la desserte se fera par la rue Degas et la rue Pranard. Des ralentisseurs sont installés à l’entrée de la percée Marlot/Degas, et à l’angle Degas/Pranard, qui feront la joie des skate-boards.

Après le relogement de ses habitants, le Petit Degas a été démoli en février 2009, et on va bâtir des maisons individuelles et un bloc de neuf appartements sur l’emplacement libéré. La livraison est prévue pour le troisième trimestre 2010, et un mail piéton sera réalisé tout le long de la rue Degas jusqu’au passage menant vers l’école. L’histoire du bâtiment ne s’arrête pas là. Après la démolition des entrées C et D du Grand Degas (soit 28 appartements) prévue pour le troisième trimestre 2009, la rue Chardin va être prolongée pour la faire aboutir vers la rue Degas. Voie piétonne ou voirie ouverte à la circulation automobile ? La Ville et le bailleur Partenord organisent des réunions d’information et de concertation avec les habitants. La percée Chardin sera terminée en Juillet 2010.Une nouvelle desserte parallèle à la percée Marlot  reliera donc l’Avenue Motte à la rue Degas. Le bâtiment Degas survivra-t-il à toutes ces ouvertures ?