En cette semaine de rentrée scolaire, voici l’évocation d’une femme qui exerça le métier d’enseignante avec dévouement et ténacité.
Alice Cotteaux est née à Maurois dans le Cambrésis le 4 février 1862. Après des études primaires, elle obtient son brevet de capacité et s’en vient à Lille pour suivre les cours du collège Fénelon d’où elle sort en 1881 nantie du brevet supérieur. Elle débute ensuite comme stagiaire à l’école de la rue Solférino à Lille le 28 mars 1881, et pour la rentrée d’octobre de la même année, la voici institutrice adjointe à l’école de la rue Léonard Danel toujours à Lille. Elle y demeure vingt années et le 1er octobre 1901, elle est nommée au poste de directrice d’école à Leers.
Ça n’est pas une sinécure, car elle arrive dans une commune dont les sympathies de l’administration municipale ne vont pas à l’école officielle et à ses représentants. Cependant Melle Cotteaux ne désarme pas et tient tête avec un rare courage aux tracasseries dont elle est l’objet. Elle parle encore sans passion des incidents dont Leers fut le théâtre à l’époque. En 1902, pour protester contre le départ des religieuses de l’école Saint-Henri voulu par la loi Républicaine, des enfants conduits par des meneurs se promenèrent dans les rues de la commune en criant : voilà les victimes de la liberté. À la suite de cette manifestation, le conseil municipal a adressé une requête au Préfet et refusé formellement l’aménagement des locaux de l’école communale de filles.
C’est alors que Melle Cotteaux, une institutrice aux ressources plus que modestes, à laquelle la population ne manifestait que méfiance et souvent méchanceté, se substitue à un conseil municipal défaillant et à une administration municipale aveuglée par le sectarisme. Elle achète de ses deniers des fournitures scolaires, du charbon, du pétrole pour permettre à ses élèves de continuer à suivre les cours. En 1912, elle fera faire à ses frais des aménagements dans l’habitation de la directrice, alors que cela incombait à la municipalité leersoise.
Ce n’est qu’après la première guerre que les choses s’améliorent avec l’arrivée de Joseph Leroy fervent républicain à la mairie en 1919. L’école publique ne pouvait que prospérer et Alice Cotteaux peut continuer ses fonctions pédagogiques jusqu’à l’âge de la retraite, en 1928, après 47 années de services rendus à l’enseignement laïc. Elle choisit de demeurer à Leers, avec sa fidèle gouvernante Melle Flore Delespaul. Elle est titulaire de la médaille de bronze de l’enseignement depuis le 10 juillet 1909, de la médaille d’argent depuis le 18 juillet 1927. Elle est officier d’académie depuis le 25 juillet 1925. Elle a joué un grand rôle dans la vie des amicales laïques et elle a créé en 1921 la section de gymnastique Les Féminines.
Ses funérailles ont eu lieu le jeudi 8 janvier 1953 en l’église de Leers. Elle était directrice honoraire d’école, elle avait 91 ans. La levée du corps a été faite au domicile mortuaire, 51 rue de Néchin. Sur le char funèbre, de nombreuses fleurs des gerbes des couronnes offertes par le personnel enseignant, les élèves, l’Amicale laïque, par les anciennes élèves et amis de la défunte. En avant du convoi funèbre deux plaques étaient portées offertes par le personnel enseignant les élèves de l’école publique et par l’Amicale laïque. Les coins du poële étaient tenus par Melle Marie Leroy, déléguée cantonale, Madame Brienne, directrice honoraire d’école, Mmes Rachel Lefebvre et Loew Deldycke anciennes élèves. Parmi l’assistance on remarquait d’importantes délégations des écoles publiques locales, un groupe important d’anciennes élèves et le personnel enseignant, M. Duchatelet secrétaire général de la Fédération des Amicales Laïques du canton de Lannoy, Edgard Deffrennes vice-président de l’Amicale Laïque de Leers, MM. Vendevelde, De Ruyck , adjoints et plusieurs conseillers municipaux, représentant la municipalité. L. Castel institutrice honoraire à Roubaix, Jules Gillis directeur d’école en retraite, Alfred Bara maire de Lys, Roger Dhondt inspecteur de sécurité Sociale, Céran Lamblain secrétaire de Mairie, et d’autres personnalités locales et régionales. Après la cérémonie religieuse, le convoi s’est dirigé vers le cimetière où a eu lieu l’inhumation. L’éloge funèbre fut prononcé par M. Bailleul directeur d’école et par Edgard Deffrennes au nom de l’Amicale Laïque et des œuvres scolaires et post scolaires.
Plus récemment, son nom a été donné à l’école maternelle de la rue Mozart à Leers, un bel hommage rendu à sa carrière d’enseignante.
Sources Le Journal de Roubaix, Nord éclair, Nord Matin, Gaston Gilman (Nord Matin)