1949, année de la Sainte Famille

En février 1949, l’abbé Potdevin, autrefois vicaire à l’église St Joseph, se prépare à devenir un curé bâtisseur dans le quartier du Hutin pour la quinzième paroisse de Roubaix. Le terrain de la future église est déjà choisi en bordure de la rue Mazagran, sur un espace occupé par des jardins ouvriers. En attendant, depuis le début du mois de février, une chapelle provisoire accueille les paroissiens, dans une salle des établissements Dubar Delespaul au n°292 rue d’Alger.

La chapelle provisoire Photo VDN
La chapelle provisoire Photo VDN

Le 3 avril 1949, intervient la pose de la première pierre. Sur le terrain devant accueillir le nouvel édifice, une tranchée a déjà été creusée pour délimiter ses contours. Le chanoine Delcour, doyen de Saint Martin préside la cérémonie, et il glisse à l’intérieur de la pierre un parchemin attestant la date de ladite cérémonie. Puis il est reconduit avec l’abbé Potdevin processionnellement au presbytère.

Pose de la première pierre Photo VDN
Pose de la première pierre Photo VDN

En mai, le chantier est bien avancé, grâce aux membres de cette nouvelle paroisse, car tout le monde s’est investi tant financièrement que physiquement.

Avancement du chantier Photo VDN
Avancement du chantier Photo VDN

Le 3 juillet 1949, le cardinal Liénart, accompagné de son vicaire général Mgr Bouchendomme, est reçu rue Delespaul, chez M. Marissal, membre du Comité paroissial d’organisation de la cérémonie d’inauguration. Un cortège se forme comme suit : des scouts, des vélos fleuris, la Fanfare Wattrelosienne, des petits enfants en blanc, le groupe représenté de la Sainte Famille, les mouvements paroissiaux, le cardinal entouré du clergé. L’itinéraire emprunte les rues pavoisées de Constantine, d’Alger et de Mazagran. A l’entrée de la nouvelle église, sur les marches, M. Vantorre membre du comité paroissial accueille le chef du diocèse. Le Prélat prend alors la parole : la communauté paroissiale saura se donner l’église qui lui convient. Nous allons, en bénissant les pierres du nouvel édifice, recommander à Dieu chaque foyer, chaque famille. Et il bénit toute la foule agenouillée. Les clefs du sanctuaire lui sont présentées par la petite Marie Odile Hennion, le cardinal Liénart ouvre les portes et entre suivi par les paroissiens. Il va présider la première messe du nouveau sanctuaire. L’abbé Potdevin officie en dialogue avec l’assistance. Le Psaume 150 de César Franck termine la cérémonie. Le chef du diocèse est ensuite reçu chez Melle Verdonck, qui a offert sa maison comme première chapelle de la paroisse de la Sainte Famille.

Cérémonie d'inauguration Photo VDN
Cérémonie d’inauguration Photo VDN

Trois mois plus tard, le frontispice de la Sainte Famille s’orne d’un magnifique bas relief, réalisé par deux enfants de la paroisse, Melle Marie Geneviève Dodin et son frère Jacques, tous deux anciens élèves de l’Ensait et à ce moment élèves de l’Ecole des beaux Arts de Paris. L’oeuvre représente le retour d’Egypte de la Sainte Famille, taillé à même la pierre. Elle mesure 2,50 mètres sur 0,80 mètre, et s’encastre dans l’alvéole située au dessus du portail. Le 2 Octobre 1949, elle est inaugurée par l’abbé Potdevin, après une intervention de l’abbé Boussemart sur le rôle du foyer chrétien devant les commandements de la Sainte Église.

Le bas relief de la Sainte Famille Photo VDN
Le bas relief de la Sainte Famille Photo VDN

Tous ces événements prouvent s’il en est besoin que 1949 fut vraiment l’année de la Sainte Famille !

Inauguration du bas relief Photo VDN
Inauguration du bas relief Photo VDN

La naissance de la sainte Famille

C’est le 11 janvier 1949, que le Cardinal Achille Liénart, Evêque de Lille, confie à l’abbé Alfred Potdevin la charge de fonder une paroisse dans le quartier du Hutin à Roubaix. Sous le vocable de la Sainte Famille, va naître cette nouvelle communauté chrétienne, entre le canal, le cimetière de Roubaix et Wattrelos. Investi de cette « incroyable mission », à vélo et avec entrain, l’Abbé Potdevin parcourt le quartier, qui est riche de plus de 3.000 habitants, afin de faire connaissance avec ses ouailles, et d’annoncer la bonne nouvelle : la construction d’une église dont la réalisation dépendra de leur bonne volonté. Sa parole est entendue, puisque de nombreux futurs paroissiens répondent favorablement à son appel.

L’abbé Alfred Potdevin Photo Collection Particulière

Quatre ans après la fin de la seconde guerre mondiale, le quartier bénéficiait du renouveau et du plein essor de nombreuses entreprises : la Lainière, rue d’Oran, le peignage Amédée Prouvost, rue de Cartigny, Dubar-Delespaul, Pennel et Flipo, Gallant  rue d’Alger, Olivier rue de Constantine, Lestienne, rue du Caire, Clarel rue Delespaul, pour ne citer que les plus importantes. On parlait de la future construction d’immeubles : en 1954, les appartements de la rue d’Oran, puis la cité des dominos, les appartements de la rue du Caire. Un peu plus tard, les premières tours, dont la tour du Hutin.

A cette époque la marche était pour la plupart le seul moyen de locomotion ! Pour assister à la messe dominicale, il fallait se rendre à l’église du Sacré Cœur boulevard de Strasbourg (aujourd’hui disparue) ou à Saint Vincent de Paul (aujourd’hui reconstruite). Comme il fallait agir dans l’urgence, la première messe fut célébrée le 1er février 1949, dans une maison de la rue Mazagran. Mais tout ceci ne pouvait être que provisoire, et nécessitait qu’on voie rapidement plus grand. L’Eglise se mit donc en marche, et c’est le 3 avril 1949, soit moins de trois mois après la naissance du projet que sera posée la première pierre. Sur le terrain allant accueillir le nouvel édifice, une foule de fidèles assiste à la messe concélébrée, parmi les officiants par le Cardinal Achille Liénart, Evêque de Lille, de Monseigneur Henri Dupont, Evêque auxiliaire, de Monsieur l’Abbé Alfred Potdevin, et de Monsieur l’Abbé Jacques Testelin.

L’événement dans la presse en mai 1949 Nord Éclair

Rendez-vous fut pris, trois mois plus tard, pour l’inauguration ! C’est un « sacré défi » que vont relever les membres de cette nouvelle communauté. Tout le monde s’investit tant financièrement que physiquement. C’est à celui qui achète le plus de briques, le plus de ciment, qui fournit le plus d’outils, qui se découvre de talents de manœuvre, de métreur, de maçon, de menuisier, de vitrier, de plombier et de couvreur. Les épouses et les mères assurent l’intendance. C’est une histoire de famille ! Une trentaine de gamins cassent, sans se lasser, des pierres nécessaires pour réaliser le sol de l’église et sur lesquelles sera coulé le béton. Les scouts charrient des brouettes de cailloux, de sable et de ciment sous la houlette des « chefs de chantier ». Tout se fait dans la joie et la bonne humeur, avec la même motivation pour tous. Mi-juin, le gros œuvre est déjà terminé, mais c’est le 23 juin 1949 que fut baptisée la Cloche Madeleine-Françoise, conçue et fondue, également dans le quartier. Le cérémonial se déroule selon les rites et tous les paroissiens bénéficient de la traditionnelle distribution de dragées.

La Cloche Madeleine-Françoise Photo PhW

Ce pari fou qui paraissait irréalisable pour certains, a été tenu, car le 3 juillet 1949, soit trois mois, jour pour jour, après la pose de la première pierre, l’église a été inaugurée, pleine de ces hommes et femmes qui ont cru et ont pris part à sa création. Seul le fronton, et quelques fenêtres, restaient à poser.

Le Cardinal Liénart se rendant à l’inauguration de la sainte Famille Photo Collection Particulière

Ce fut la fête dans le quartier. Les enfants, tout de blanc vêtus, les scouts, la fanfare, le clergé, les laïcs, ont parcouru les rues du quartier avant de se rendre à la Sainte Famille pour participer à la première messe. A l’issue de la cérémonie, le Cardinal Achille Liénart a remercié les bâtisseurs d’amour et de paix, en rappelant que c’est au milieu des actes de votre vie que s’accomplit l’œuvre de votre salut. Cette citation sera reprise par Monseigneur Adrien Gand, lors de la messe célébrée en plein air, pour le vingtième anniversaire de la paroisse en 1969, qui fut suivie d’un repas où tous les fidèles furent conviés.

La Chapelle de la Saint Famille CP Collection Particulière

 

Merci à Micheline Masure-Cagnet pour ce magnifique témoignage, et ce n’est qu’un début !