La Mairie

(suite de l’article : La Feuilleraie)

La mairie de Hem c’est, à l’origine, une salle de cabaret à l’enseigne « la Maison Commune », dans l’auberge du Coq, située sur la place du village, derrière l’église (sur ce sujet voir un précédent article édité sur notre site intitulé l’Auberge du Coq).

L’ancienne maison commune (Documents Historihem)

Mais très vite cela ne suffit plus et l’idée germe dans la tête des élus dès 1875, de faire construire une véritable mairie. Le projet définitif est adopté en 1881, sous la mandature d’Henri Leuridan et, en 1884, la nouvelle mairie trône sur la place d’Hem.

C’est ce bâtiment qui abrite la mairie jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale avant de devenir la mairie annexe puis d’être démoli pour laisser la place à l’école de musique (sur ce sujet voir un précédent article édité sur notre site et intitulé La Cantoria).

La nouvelle mairie en 1884 et photo d’Henri Leuridan (Documents Historihem)
La mairie dans les années 1930 puis la mairie annexe dans les années 1970 (Documents Historihem)

La mairie, étant devenue trop exigüe, le 24 mars 1946, sous la mandature de Louis Jourdain, le conseil municipal décide l’acquisition de la propriété Catrice, au 42 rue de Lille (actuelle rue du Général Leclerc) comprenant une villa et une maison du concierge. La nouvelle mairie n’ouvre au public qu’en février 1949 sous la nouvelle mandature de Jean Leplat.

Louis Jourdain et Jean Leplat (Documents Historihem)
Ouverture de la nouvelle mairie en février 1949 (Document Nord-Eclair)

Il convenait toujours de demeurer prudent eu égard à l’histoire de la propriété et notamment à la période de l’occupation allemande quand le parc, comme celui voisin de la Marquise, a servi à entreposer des munitions diverses et variées. On n’est donc pas à l’abri de surprises et ou d’accident. Ainsi le journal Nord-Eclair relate un épisode surprenant lors d’un travail de défrichement dans le parc ayant amené à la découverte d’une dizaine de bombes et obus.

Découverte de bombes et d’obus dans le parc (Document Nord-Eclair)

Il a en outre fallu procéder, au fur et à mesure des possibilités financières de la ville, aux réparations de l’intérieur du château, fortement ébranlé par les explosions ayant eu lieu à la libération. De réfection en transformation, le bâtiment a fini par prendre l’aspect administratif auquel on le destine et les employés peuvent s’installer au rez-de-chaussée, les 1er et 2ème étage étant réservés pour loger le secrétaire général de mairie, Jean Lepers, et sa famille, exception faite de la salle du conseil et de celle des mariages (ancienne chapelle du château Catrice).

Installation des employés au rez-de-chaussée ( Document Hem Images d’hier)

La conciergerie est quant à elle occupée par Henri Waymel, adjudant des sapeurs pompiers (voir sur notre site un article intitulé les pompiers de Hem) et responsable des ateliers municipaux. Mais, même en occupant le logement de fonction du secrétaire général après le départ en retraite de Jean Lepers en 1969, la mairie devient trop petite.

La mairie dans les années 1970 (Documents Historihem)

En 1971, la mairie acquiert donc le château Meillassoux, voisin au n°38, pour y installer certains services (sur le sujet du château Meillassoux voir sur notre site un article intitulé Meillassous et Mulaton). Il abritera ensuite le CCAS (centre communal d’action sociale), la direction administrative des services techniques et le service des actions éducatives. Et en 1981, la conciergerie est également aménagée en bureaux pour abriter le service informatique et la police municipale.

Vue panoramique de la mairie et de l’ancien château Meillassoux dans les années 1980 et CPA du château puis photo (Document Historihem)

Pendant ce temps 3 maires se succèdent à la tête de la ville. Jean Leplat ne s’est pas représenté à l’issue de 30 ans de mandat et Jean-Claude Provo lui succède durant 6 ans de 1977 à 1983, avant de céder la place à Marie-Marguerite Massart, de 1983 à 1995.

Photos de Jean-Claude Provo et de Marie-Marguerite Massart (Documents Historihem)

En 1977, suite à son élection, Jean-Claude Provo procède à un réagencement des bureaux de la mairie. Ainsi le rez-de-chaussée est transformé en un tournemain. Le sol est recouvert de moquette pour atténuer les bruits et des plantes vertes sont réparties un peu partout pour égayer l’atmosphère.

Finis les guichets et place à des bureaux aux lignes modernes sur lesquels les usagers trouvent des écriteaux leur indiquant qu’ils se trouvent : à l’état civil, aux élections, aux affaires militaires ou aux vaccinations. Par ailleurs des sièges confortables sont installés pour faciliter leur attente.

Les murs sont recouverts d’un papier élégant et la clarté est présente partout. Contre l’un des murs de grands panneaux d’information sont mis à disposition du public. Ainsi l’accueil des usagers est plus direct et plus personnalisé. Dans le même esprit un bureau a été aménagé au rez-de-chaussée pour permettre aux adjoints de recevoir des visiteurs. Des permanences sont tenues telles que les consultations juridiques et au premier étage une salle est aménagée pour accueillir les diverses commissions.

Réaménagement des locaux en 1977 (Document Nord-Eclair)

Une sympathique réception réunit les élus et le personnel municipal à l’issue de la visite des locaux ainsi réaménagés, au cours de laquelle le nouveau maire explique que les élus ont ainsi voulu améliorer les conditions de travail des employés tout en mettant en place un meilleur accueil du public.

A suivre…

Remerciements à la ville de Hem et à aux associations Historihem et Société d’Emulation de Roubaix

Cimetière de Hem (suite)

En 1955, éclate à Hem ce qu’on appellera l’Affaire de Beaumont : alors que la construction du groupe scolaire de Beaumont est en projet depuis un an, il est reporté par un arrêté préfectoral qui déclare d’intérêt public l’acquisition d’un terrain de 60 hectares et, dans la foulée, le député maire de Roubaix, Victor Provo, saisit la ville de Hem du projet de création d’un cimetière dans le style de « Los Angeles » dans la plaine de Beaumont.

Le plan qui accompagne ce projet ne tient compte, ni des quelques 1000 logements ni de l’église Saint Paul, ouverte au culte en juin 1954, ni du château et de la cense de Beaumont qui y sont déjà construits, ni des projets d’accession à la propriété déjà planifiés.

Plan de la plaine de Beaumont avec ses constructions et plan du projet de cimetière (Documents Historihem)
L’affaire de Beaumont (dossier du syndicat d’initiative Les Amis de Hem créé en 1953) (Document Historihem)

En justification de ce projet, il est fait état de l’insuffisance du cimetière roubaisien actuel, et de l’impossibilité de trouver, dans les limites de la ville de Roubaix, un terrain assez vaste pour créer ledit cimetière. Le cimetière actuel roubaisien d’une superficie totale de 15 hectares, situé entre le canal et des bâtiments industriels, serait alors abandonné…

Il s’agirait donc de la création, sur le territoire de la ville de Hem, d’une vaste nécropole destinée à la ville de Roubaix, et donc d’une annexion pure et simple d’une partie de la ville de Hem, laquelle fait écho au projet d’annexion de 200 ha du territoire hémois, dont la plaine de Beaumont, déjà projetée en 1944 par l’administration municipale de Roubaix, pour y reloger des roubaisiens suite à la destruction programmée de 13.000 logements insalubres.

Titre du journal Nord-Eclair en mai 1955 (Document Nord-Eclair)

En mai 1955, en effet, le conseil municipal de Roubaix constate que de plus en plus les familles achètent des concessions et qu’à ce rythme, d’ici 3 ans, la réserve temporaire des terrains encore disponibles sera épuisé. Deux solutions sont donc envisagées : le maintien de l’ancien cimetière et la création d’une nouvelle nécropole ou la désaffectation du cimetière actuel et sa translation dans un endroit plus vaste.

C’est la 2ème solution qui est adoptée et le choix se porte sur la plaine de Beaumont située sur les territoires des communes de Hem et de Croix. Ce terrain d’une superficie de 60 hectares serait scindée en trois parties, ce qui permettrait d’en faire un cimetière intercommunal : 45 ha pour Roubaix, 10 ha pour Croix et 5ha pour Hem. La presse locale annonce le projet pour acquis.

Photo aérienne du cimetière de Lannoy dans les années 1950-1960 et plan IGN correspondant actuel (Documents IGN)

L’administration municipale de Hem, considérant la vocation résidentielle de la plaine de Beaumont, s’oppose fermement à ce projet et suggère qu’éventuellement, si un cimetière annexe s’avère réellement indispensable, elle pourrait en envisager l’implantation dans la zone rurale de son territoire, à côté du cimetière de Lannoy, situé lui aussi en territoire hémois. Cette suggestion est aussitôt rejetée par l’administration municipale roubaisienne.

Aucun accord n’étant trouvé, le projet est alors classé pendant trois ans et exhumé en 1958, quand le préfet du Nord prend un arrêté décidant la mise à l’enquête du dossier de la ville de Roubaix, concernant un cimetière intercommunal Roubaix-Hem-Croix. Entretemps le projet de lotissement du groupe de Beaumont II a été approuvé en 1956 et l’autorisation d’acquérir le terrain nécessaire à la construction du groupe scolaire a été accordée et celle-ci a été entreprise en fin d’année 1957.

A vous de juger (des amis de Hem) (document Historihem)

Le conseil municipal de Hem est donc plus que jamais opposé au projet de cimetière, pour des raisons évidentes de salubrité publique. La ville d’Hem, en la personne de Jean Leplat, son maire, rejette donc catégoriquement la conception d’un cimetière intercommunal Roubaix-Hem, car dans l’arrêté préfectoral de 1956 concernant le lotissement il est stipulé que le drainage dudit lotissement devra être exécuté de façon à faciliter l’évacuation des eaux du Cimetière intercommunal de Roubaix -Hem.

Or ces eaux seraient contaminées par des matières organiques en putréfaction et acheminées dans les réseaux d’égout des lotissements de Beaumont II, Beaumont I puis dans le collecteur de Carpeaux. Les Amis de Hem éditent quant à eux un tract destiné à aviser les habitants du quartier du danger qui les menace avec le nouveau projet de cimetière de 36 hectares comprenant ce qui reste de la plaine de Beaumont et une partie du plateau de la Tribonnerie.

Tract des Amis de Hem (Document Historihem)

Le préfet du Nord réagit à ce tract en précisant qu’il y a peu de chances que l’eau de la nappe soit en contact avec les corps mais qu’il est toujours possible de procéder à l’épuration des eaux de drainage du cimetière avant de les rejeter à l’égout. Il ajoute que par ailleurs la situation du cimetière projeté et des zones habitées n’est pas différente de celles de toutes les nécropoles de l’agglomération.

Le conseil municipal réaffirme son opposition au projet, considérant notamment que l’épuration des eaux de drainage du cimetière nécessiterait l’édification d’une usine d’épuration en pleine zone résidentielle et à proximité des lotissements de Beaumont et de la Citadelle. Le préfet confirme en réponse qu’une fois le projet au point, il le soumettra bien entendu au Conseil Départemental d’Hygiène.

Photos de Jean Leplat, maire de Hem, et Victor Provo, maire de Roubaix (Document Historihem et Wikipedia)

Jena Leplat, maire de Hem mais aussi médecin, s’étant battu contre le projet en tant que président d’honneur fondateur du syndicat d’initiative « les Amis d’Hem », cite en conclusion un extrait du rapport établi en 1945 par Guy Lapchin, alors urbaniste d’Hem et 10 ans plus tard architecte en chef du CIL de Roubaix-Tourcoing, comme argumentaire sur le plan humain.

Extrait du rapport de Guy Lapchin (Document Historihem)

Quelles qu’en soient les raisons le projet du cimetière de Beaumont est finalement abandonné et Jean Leplat, maire de Hem de 1947 à 1977, peut se targuer d’avoir su tenir tête à Victor Provo, maire de Roubaix de 1942 à 1977, ainsi que le montre avec humour la bande dessinée « Au temps d’Hem ».

J’ai fait peur à Victor (Document BD Au temps d’Hem)

Le seul cimetière de Hem reste donc celui qui se situe dans la rue du Cimetière, ancien chemin du même nom qui relie la rue du Docteur Coubronne à la rue de la Vallée. Ce cimetière connait alors un premier agrandissement, sur la droite par rapport à l’entrée qui se situait au centre, comme le démontre la photo aérienne de 1962 par rapport à celle de 1947. Le cimetière est alors pour vu d’une deuxième entrée sur la droite. Quant au cimetière de Lannoy, sur le territoire de Hem au bout de la rue des Trois Villes, il est ensuite intégré à la ville de Lys-lez-Lannoy dans la rue des Meuniers.

Photos aériennes du cimetière de Hem en 1947 et 1962 (Documents IGN)

Puis en 1977, le cimetière s’agrandit à nouveau, cette fois sur la gauche, avec la construction d’une chambre funéraire et l’aménagement d’un parking avec une nouvelle entrée telle que nous la connaissons aujourd’hui. Et en 1991, un colombarium, lieu fleuri et verdoyant disposant d’un jardin du souvenir, pour accueillir les cendres des défunts, est inauguré en même temps que le nouveau local technique destiné au personnel du cimetière.

Inauguration du colombarium en 1991 (Documents Nord-Eclair)
Photos aériennes de 1989 avec le bâtiment et le parking aménagé et de 2004 avec le colombarium (Documents IGN)

En 2004, à l’occasion de la commémoration du 06 juin 1944, la rue du Cimetière est transformée en rue du 06 juin 1944. Un cortège prend le départ de l’hôtel de ville jusqu’à l’ancienne rue du Cimetière et l’inauguration de la nouvelle rue a lieu, suivie du dévoilement des plaques par le député maire Francis Vercamer, en présence des élus, des représentants des associations patriotiques et de riverains.

Dans son discours le maire rappelle le sens de cette démarche et le choix de célébrer ce 60ème anniversaire en baptisant ainsi une rue historique dans laquelle se trouvent les marques du souvenir. Cette rue a en effet été marquée par les événements dramatiques de la seconde guerre mondiale, des soldats anglais y ayant à l’époque trouvé refuge chez Anna Reversez, dont cet acte de résistance lui coûta la vie en déportation à Dachau et dont les descendants sont présents pour cette journée d’hommage.

Dévoilement de la plaque de la nouvelle rue sur l’ancien café de la Paix lieu de rendez-vous avec le fossoyeur à la fin du 19ème siècle (Documents Historihem Nord-Eclair)

Dans les années 2020, le cimetière s’est encore étendu sur la droite jusqu’à l’avenue d’Aljustrel. L’ancien cimetière entouré de champs fait maintenant face au Jardin des Perspectives et a donc conservé son cadre paisible, même si les arbres qui ont longtemps bordé la rue ont aujourd’hui disparu. Il dispose toujours de l’ancienne entrée principale, de l’entrée plus à droite et de la nouvelle entrée donnant sur le parking.

Photo aérienne de 2023 et les 3 entrées sur la rue du 06 Juin 1944 de gauche à droite (Documents Google Maps)

Remerciements à la ville de Hem, l’association Historihem ainsi qu’à André Camion et Jacquy Delaporte pour leurs ouvrages Hem d’hier et d’aujourd’hui et Jacquy Delaporte, Christian Teel et Chantal Guillaume  pour leur bande dessinée Au Temps d’Hem