Dans les années 20, l’abbé Chavatte, vicaire à l’église Notre Dame et directeur du cercle St Michel, est désigné par Monseigneur Delamaire, archevêque de Cambrai (l’archevêché de Lille n’est créé qu’en 1933), pour fonder une nouvelle paroisse dans le quartier du Pont rouge-Fraternité-Chemin neuf. Il déploie tous ses efforts de persuasion pour mener à bien l’édification d’une église dans cette zone populeuse. Il lance une souscription pour le financement du projet et réussit, à force d’obstination, à obtenir la concession d’un vaste terrain au coin de l’avenue Linné et de la rue Jouffroy, terrain qui se poursuit jusqu’à l’avenue Cordonnier. Cette église sera consacrée à Saint Michel.
Malheureusement, l’état de santé de l’abbé l’oblige à demander à l’archevêché d’être déchargé de ce projet en bonne voie de réalisation. C’est l’abbé Bethléem, également vicaire à Notre Dame, qui est amené à reprendre le projet et le mener à son terme.
En avril 1911 est mise en chantier une église provisoire dont l’abbé Bethléem doit être le futur curé.
L’abbé Chavatte, lui, décède début août, après 25 ans de sacerdoce à Roubaix, au moment même où son projet aboutit. En effet, l’église est inaugurée fin juillet de cette même année.
Un cortège, partant du boulevard de Mulhouse parcourt les rues pavoisées du quartier pour aboutir à la nouvelle église. La cérémonie, à laquelle participera la fanfare catholique « La Liberté » sera présidée par le curé de Sainte Elisabeth, l’abbé Coqueriaux. Le bâtiment est de forme simple et construit parallèlement à l’avenue Linné.
Mais, après la guerre, le besoin se fait sentir d’une église définitive plus vaste et plus belle, et, à l’initiative de l’abbé Boulanger, le curé de la paroisse, une souscription est ouverte pour cette réalisation. C’est ainsi qu’en 1924 Monseigneur Quillet, évêque de Lille bénit la pose de la première pierre. Les travaux d’édification commencent aussitôt.
L’église, œuvre de l’architecte Alfred Nazousky, est construite selon un procédé nouveau utilisant des pierres reconstituées en béton, qu’on maçonne comme des pierres ordinaires. La photo suivante nous montre la construction du chevet de l’église, la vue étant prise en direction de l’avenue Cordonnier dont on reconnaît la maison à double pignon du numéro 21.
L’église est consacrée fin 1927 ; elle reçoit la bénédiction solennelle de Monseigneur Jansoone, évêque auxiliaire de Lille. Un cortège de membres des œuvres paroissiales va chercher Monseigneur Jansoone au presbytère rue Jouffroy pour le conduire à l’église. Le chanoine Goguillon, doyen de St Elisabeth prononce ensuite l’allocution traditionnelle devant les paroissiens et un grand nombre de représentants du clergé. La chorale Saint Michel entonne un salut solennel.
Le journal de Roubaix ne manque pas de saluer la beauté du sanctuaire, « l’un des plus beaux de notre ville ».
Peu après, à partir de 1932, les vitraux de J.J. Vosch, maître verrier de Montreuil, sont posés. Ils font depuis la renommée de l’église.
Mais l’idée était à l’origine de lier la création de la paroisse à l’ouverture d’un lieu consacré à l’enseignement. Dès 1913, s’ouvre au 7 de l’avenue Linné l’école paroissiale Fénelon. En 1928, l’abbé Boulanger, curé de la paroisse, confie l’école à la congrégation des filles de Marie Auxiliatrice qui rebaptisent l’école du nom de leur congrégation. L’école intègre dans ses locaux l’ancienne église provisoire dont elle récupère le premier étage en 1949. Elle possède 7 classes en 1947 et ne cesse de s’étendre, intégrant un cours complémentaire.
En 1933, le curé demande aux frères maristes, congrégation vouée à l’enseignement, de créer pour les garçons l’école Saint Michel, qui ouvre avec trois classes, sur un terrain situé toujours de long de l’avenue Linné sur l’ancien domaine Cordonnier, de l’autre côté de la rue Jouffroy jusqu’à la rue Louis Braille. L’école s’étend en 1950 avec la création d’un cours complémentaire.
Dans les années 70, au moment de l’introduction de la mixité à l’école, tous les enfants du cours complémentaire sont réunis à Saint Michel qui devient un collège, alors que les enfants de primaire et de maternelle se regroupent à Marie Auxiliatrice.
Pourtant, au fil du temps, la fréquentation de l’église diminue et les participants aux cérémonies se font de plus en plus rares. L’église ayant été construite après 1905, les pouvoirs publics ne participent pas à son financement et le diocèse peine à trouver des ressources nécessaire à la chauffer et à l’entretenir. Si bien qu’on ne sait quoi faire de l’édifice. Finalement, la décision de fermeture est prise en 2014. Quelques particuliers fondent une association baptisée « les amis de l’église saint Michel » dont le but est la préservation de l’église et de ses vitraux.
En mai 2021 le diocèse prend la décision de louer l’édifice pour abriter le culte orthodoxe. C’est ainsi que naît l’église orthodoxe St Jean Baptiste, dépendant du patriarcat de Roumanie.
Les illustrations non légendées proviennent des archives municipales et de la médiathèque de Roubaix.