Les ressorts Delescluse

Albert Delescluse naît à Roubaix en 1890. Il entre en tant que coursier au Journal de Roubaix en 1905, puis devient maréchal-ferrant vers 1910. Après la première guerre mondiale, en 1919, il reprend l’affaire de son ancien patron Jules Hauguet, au 45 rue Newton.

Le 45 rue Newton. A la droite de l’habitation se trouve l’atelier de forge et de charronnage ( photo BT 2020 )

Albert Delescluse se marie avec Marie Vandenbroucke, dont le père est également maréchal-ferrant. De cette union naît leur fille Odette en 1920. L’atelier dont dispose Albert est bien équipé pour produire les fers à cheval, bien sûr, mais également pour cercler les roues en bois, fabriquer des ressorts à lames, et des épures (cadres en bois montés sur les châssis des premiers véhicules automobiles).

Albert Delescluse sur son estampeur, à l’atelier rue Newton ( document A.Antoin )
Albert Delescluse à gauche devant la forge, et deux ouvriers ( document A.Antoin )

Albert décroche de très gros marchés pour son activité de maréchalerie, comme La Lainière, puis il se spécialise rapidement dans la fabrication de ressorts pour toutes marques automobiles ainsi que pour les camions. Son entrepôt lui permet de stocker de nombreuses pièces pour satisfaire la demande de plus en plus importante. Albert est le seul fabricant de ressorts à Roubaix.

Publicité 1928 ( Document collection privée )

Face à son développement, à la fin des années 1920, son atelier de la rue Newton devient trop petit. Il fait l’acquisition du 17 bis boulevard de Beaurepaire, qui a l’avantage d’avoir un accès direct à son atelier de la rue Newton.

La voiture et sa remorque publicitaire d’Albert Delescluse devant le 17 bis en 1935 (document A.Antoin )

Les années suivantes, le développement devient très conséquent, et l’atelier du 17 bis est à son tour trop petit. Albert fait alors l’acquisition d’un terrain, en 1947, au 19 boulevard de Beaurepaire, et demande l’autorisation de construire un atelier. Il confie l’exécution des travaux ( la construction d’une nef ) à M Browaeys, de la rue Boucicaut, pour un montant de 350.000 Frs. Ce nouvel entrepôt lui permet de stationner les véhicules en attente de réparation, et de stocker ses pièces détachées. Le 19 du boulevard de Beaurepaire est séparé du 17 bis, par l’atelier de menuiserie de Désiré Lepers au 17 ter.

Publicité 1947 ( Document collection privée )

En 1945, Odette Delescluse, la fille d’Albert, se marie avec Albert-Hector Antoin. Ce dernier entre dans l’entreprise Delescluse en tant que forgeron. De leur union naît, en 1948, leur fils Albert-Ange Antoin. Pour trouver un logement à Odette et Albert-Hector Antoin, Albert Delescluse fait construire un appartement, en 1954, au dessus de l’atelier du 19. Il confie le dossier à l’architecte G. Verdonck avenue Jean Lebas.

L’appartement au 19 au dessus de l’entrée de l’atelier ( documents archives municipales )

A la fin des années 1950, les constructeurs automobiles réalisent d’énormes progrès techniques sur les nouveaux véhicules. Les ressorts à lames deviennent des amortisseurs télescopiques. L’entreprise Delescluse s’adapte et change de stratégie. Elle abandonne peu à peu la fabrication de ressorts et devient Centre Officiel des amortisseurs De Carbon. Albert-Hector Antoin diversifie alors son activité en distribuant des accessoires automobiles, comme des attelages de remorque, embrayages, échappements, transmissions, et, par la suite, des garnitures de freins.

( Document collection privée )

Albert Delescluse décède en 1963, et son épouse l’année suivante. Albert-Hector Antoin et Odette continuent l’activité de l’entreprise. Le développement de la société à cette époque est important ; ils rachètent le 19 bis, en 1958, à Mme Vve A Pruy-Plateau et le 17 ter, en 1963, au menuisier D. Lepers.

Reprise du 19 bis en 1958 à Mme Vve A Pruy Plateau ( document archives municipales )
Reprise du 17 ter en 1963 au menuisier D. Lepers ( Document collection privée )

La reprise de la menuiserie permet de refaire la façade du 17 bis et 17 ter. Au début des années 1970, leur fils Albert Ange Antoin a 22 ans. Il entre dans l’entreprise pour aider ses parents à l’atelier.

Le jeune fils, Albert-Ange au montage et équilibrage des pneus en 1974 ( document A.Antoin )
Refonte de la façade 17b 17t 19 19b ( Document collection privée )

En 1979, Albert-Hector Antoin rachète l’épicerie-alimentation de Charly Lagaise, au 19 ter, rase le commerce, et construit une porte de 5,50m de hauteur, et large de près de 8m, pour faciliter l’entrée et la sortie des camions. La façade totale mesure désormais près de 40m de large. La superficie totale est d’environ 1400 m2.

Publicité 1975 ( Document collection privée )

Albert Antoin ( père et fils ) continuent de développer le commerce de pièces automobiles. En 1974, ils ajoutent une activité : la pose de tachymètres sur les Poids Lourds pour le contrôle de vitesse, et en 1976, l’installation de compteurs pour les chauffeurs de taxi. Les ressorts à lame que produisait Albert Delescluse ne se vendent plus : 75 tonnes de ressorts ont été mises à la ferraille. L’entreprise Delescluse gérée alors par Albert-Ange Antoin, en Septembre 1998, est la première entreprise du Nord à passer aux 35 heures pour le personnel, ce qui débouche sur une accélération, quant à sa croissance interne et externe. Au début des années 2000, Albert-Ange aligne les différentes parties de l’entreprise sur une longueur de 50m. La superficie totale de l’entreprise est alors de 1800 m2.

Enseigne DLC façade avant et arrière ( Documents A.Antoin )

 

( Document Google Maps )

 

Une partie du comptoir de vente et intérieur de l’atelier ( Documents A.Antoin )

Au milieu des années 2000, l’entreprise Delescluse est rebaptisée DLC ( De.Les.Cluse ) pièces auto. Entre 2000 et 2003 Albert-Ange rachète 2 entreprises dans la région, puis 3 en région parisienne ; il les transforme sous la bannière DLC, ce qui permet de multiplier le chiffre d’affaire de façon très conséquente. En 2008, les parts sociales sont confiées au gérant Brice Pouill. Albert-Hector Antoin décède en 2016. L’entreprise est cédée en Décembre 2018 et l’enseigne devient « Auto Plus Roubaix ».

Auto Plus Roubaix ( document A.Antoin )

De la création, en 1919, jusque la cession, en 2018, les 3 générations ont connu ( pendant un siècle ) une énorme évolution : le fer à cheval, les ressorts à lames, les amortisseurs, et les accessoires auto. Il y a une cinquantaine d’années, existaient encore 44 grosses entreprises de distribution d’accessoires ; il n’en reste plus que 2 aujourd’hui. Les ventes se sont reportées sur des détaillants.

Albert-Hector Antoin ( document A.Antoin )

Remerciements à Albert-Ange Antoin, et aux Archives Municipales

La pâtisserie Coquet

Jean Coquet naît en 1881 à Roubaix. Il apprend le métier de pâtissier. Il se marie avec Léa Stepman en 1909. Ils ont deux enfants : Julienne et Charles. Au début des années 1900, il crée son commerce de pâtisserie-confiserie, au 299 rue du Tilleul ( aujourd’hui rue Jules Guesde ).

Papiers à en-tête des années 1910 ( documents collection privée )

Son épouse, Léa, gère le magasin. Jean s’occupe, bien sûr, de la fabrication des gâteaux dans son atelier, qui se trouve au fond de l’habitation.

L’atelier pâtisserie ( document B. De Ruyver )

La spécialité de Jean est le flan qui a un goût inimitable, si bien que les gens viennent de tout le quartier, de toute la ville et même parfois de très loin ( des Flandres ), pour pouvoir acheter et déguster ce fabuleux flan-maison. Il fait également du négoce puisqu’il garnit des boîtes de dragées pour baptêmes et communions.

Publicité années 1930 ( document collection privée )

Leur commerce est une toute petite boutique avec une porte centrale et deux vitrines latérales. A droite, une étroite porte cochère donne sur un long couloir, afin que les baladeuses puissent entrer et livrer les matières premières à l’atelier.

Façade du magasin ( documents archives municipales et J. Coquet )

Dans les années 1930, les enfants du quartier apprécient le commerce de Jean et Léa Coquet, car les vitrines sont appétissantes : des gâteaux, des bonbons proposés dans des bocaux en verre et vendus au détail, des sucettes « Pierrot Gourmand », ainsi que des dragées bleues ou roses ( fournies par la maison Donat ), dans des boites blanches qui proviennent de Mme Top.

Jean et Léa, et leurs deux enfants, Charles et Julienne ( document J. Coquet )
Léa Coquet, Charles et Julienne ( document B. De Ruyver )

Charles, leur fils, est également pâtissier. Il vient aider son père à l’atelier de production de la maison familiale au début des années 30. En 1936, Charles se marie avec Anne Marie Desreumaux. Jean propose à Charles et son épouse, de venir habiter à l’étage du commerce de la rue Jules Guesde. Lui-même déménage alors, au 70 rue Alfred de Musset. Le père et le fils vont développer le commerce de façon importante, grâce à la qualité des produits et de leur sens commercial. Jean fait remplacer son four de pâtissier, en 1937, pour du matériel neuf et plus performant.

Le nouveau four de pâtissier ( document B. De Ruyver )

Pendant la seconde guerre mondiale, Charles est fait prisonnier en Allemagne. Le commerce de la rue Jules Guesde reste ouvert. Il est géré par Jean, Léa et leur belle fille Anne-Marie au magasin. Un ami, Maurice Desrousseaux vient aider à la fabrication des gâteaux à l’atelier. A la libération Charles revient à Roubaix. Il fourmille de projets pour développer l’affaire familiale. En 1948, il fait transformer l’intérieur de l’habitation : modification de la salle principale et création d’une salle de bains. En 1951, il fait transformer et élargir la façade du magasin, en supprimant la porte cochère. Les plans sont dessinés par M Pinchon, rue Saint Jean ; les travaux sont réalisés par le voisin : M Carlier au 295 rue J Guesde.

la nouvelle façade en 1950 ( document J. Coquet )

Charles et Anne Marie continuent de développer l’activité de leur commerce dans les années 1950 et 1960. Charles distribue des biscuits secs qu’il vend en vrac, à petit prix : 3,50 F le kg. Il élabore des crèmes glacées et les vend dans des cornets qu’il confectionne lui-même.

Charles est pâtissier mais pas boulanger. Pour satisfaire la demande de ses clients, il crée un dépôt de pain frais livré quotidiennement. Charles n’hésite pas à investir d’ailleurs, en achetant une des premières machines électrique à couper le pain en tranches.

Charles continue de produire le célèbre flan maison, bien sûr, avec la recette, jalousement gardée, que son père Jean lui a transmise. Il développe également toute une gamme de gâteaux et l’on trouve dans la vitrine du magasin, une farandole de desserts appétissants tels que : la religieuse au chocolat, le baba au rhum, le tom-pouce, le carré aux fruits, le merveilleux, la tartelette aux fraises, le palet de dame, et autres gâteaux à la frangipane.

Publicité année 1950 ( document J. Coquet )

Et puis il y a les productions saisonnières qui occasionnent énormément de travail supplémentaire en journée non stop, comme à Noël avec les bûches et les coquilles livrées dans les écoles, à Saint Nicolas avec les sujets en chocolat, à la Pentecôte avec les pièces montées pour les communions, à Pâques avec les œufs et les poules en chocolat, et toute l’année avec les gâteaux pour les mariages et les repas d’anniversaire. A l’époque, il n’y a pas encore de congélateur ; tous les produits sont vendus dans un état de fraîcheur remarquable.

Publicité année 1950 ( document collection privée )

Le jour de fermeture du magasin est le mardi, et c’est un jour de repos bien mérité car la pâtisserie est ouverte tout le reste de la semaine, y compris le dimanche après midi. En effet le « Cinéma Studio 47 » qui se trouve en face, au 262 rue Jules Guesde ( à l’angle de la rue Copernic ), fait salle comble chaque dimanche et les clients sortent à l’entracte pour acheter des confiseries, des gâteaux ou des glaces. En semaine, la pâtisserie est ouverte à l’heure du repas, ce qui permet aux salariées de l’usine Boléro rue de Saint Amand, de venir faire quelques achats pendant la pause du midi.

De gauche à droite, Marie-Madeleine, Jean, Bernadette et Etienne dans ses bras. Devant, Thérèse et Bernard ( document B. De Ruyver )

Charles et Anne Marie ont 6 enfants : Marie-Madeleine, Bernadette, Jean, Thérèse, Bernard et Étienne. Les deux filles plus âgées restent à la maison, s’occupent des plus jeunes, et aident les parents dans différentes tâches :

– la vente des gâteaux ou des dragées en magasin,

– la vente des crèmes glacées sur le trottoir, quand le beau temps le permet,

– l’approvisionnement de l’atelier en lait frais, en bidons de 10 litres, qu’ils vont chercher à vélo à la ferme Lebrun aux Trois Ponts,

– la livraison des pâtisseries aux clients, le dimanche après midi, dans un porte-en-ville ( caissette en métal fixée sur le porte-bagages de la bicyclette ), de façon à ce que les gâteaux soient livrés à domicile.

Jean et Charles Coquet ( document J. Coquet )

En 1974, Charles et son épouse prennent leur retraite, et partent se reposer dans une maison à Toufflers. Aucun des 6 enfants ne souhaite reprendre le commerce des parents qui est alors cédé à A. Leroy. Il continue l’activité jusqu’au milieu des années 1980. Se succèdent alors de multiples petits commerces de boulangerie pâtisserie qui cessent rapidement leur activité.

le magasin en 1997 ( Photo G. Vanspeybroeck )

Aujourd’hui le magasin est inoccupé . Il risque d’ailleurs d’être rasé prochainement, tout comme les maisons voisines : la maison Derryx au 301, et le café du Cercle Artistique Roubaisien au 303, suite à l’important programme de rénovation du quartier du Pile.

le magasin en 2019 ( Photo BT )

.

Remerciements aux Archives Municipales, à Bernadette De Ruyver et à l’abbé Jean Coquet

Auguste et Louis Derryx

Au début des années 1900, Auguste Derryx crée son commerce, au 301 rue du Tilleul ( aujourd’hui rue Jules Guesde ), à l’enseigne : « La grande maison blanche ».

Publicité 1932 ( document collection privée )

C’est le supermarché avant l’heure ; on y trouve presque tout : articles de chauffage, cuisinières, meubles, vêtements, chaussures, draps, lingerie, machines à coudre, vélos, etc. Chacun se pose toujours la même question : comment vendre autant de produits différents dans si peu de place, car l’échoppe est petite. Auguste a le sens du commerce ; il est très disponible, le magasin est ouvert de 8h à 20h sans interruption et même le dimanche matin jusque midi.

Publicité 1937 ( document collection privée )

Il accorde des facilités de paiement à tous les clients ( 10% à la commande et le reste en 10 mensualités avec un taux d’intérêt très faible ), ce qui permet à son commerce de connaître un succès grandissant ; la clientèle de ce quartier populaire et ouvrier, n’a pas toujours les moyens d’acheter au comptant. En 1938, Louis Derryx, le fils d’Auguste, reprend l’affaire. Il abandonne progressivement les meubles, vêtements et autres produits, pour distribuer principalement les 2 roues, car il est passionné de vélo et moto.

( documents collection privée )

Après guerre, en 1945, Louis Derryx fait modifier sa façade, et ne vend plus que des bicyclettes, cyclomoteurs et motocyclettes. Il distribue les marques Aiglon et Vespa, et, dans les années 60, les cycles Peugeot. Il assure l’entretien, les réparations, et vend des pièces détachées.

Publicité 1960 ( document collection privée )
La façade du 301 rue J Guesde ( document Pile à cœur )

Tous les ans, Louis organise « le petit tour du Pile à vélo » avec ses fameuses courses à étapes et ses animations radiophoniques. Louis a été bien formé par son père et sa devise reste la même : le service avant tout.. Il installe une cabine téléphonique, pour que les clients puissent appeler ; il sert de scribe, rédige des courriers et monte des dossiers administratifs ; il emmène des malades à l’hôpital de la Fraternité. Il est très près de ses clients : un grand cœur ouvert aux autres.

Louis Derryx ( document Pile à cœur )

Au début des années 1970, Louis Derryx cède son commerce de cycles à A Debenne qui continue l’activité, avant de fermer le magasin au milieu des années 1980.

la façade dans les années 1990 ( document Archives Municipales )

Récemment, le 301 rue Jules Guesde et les maisons voisines ont été rasées, dans le cadre d’un important programme de rénovation du quartier du Pile

.

Remerciements aux Archives Municipales, ainsi qu’à Serge Leroy et Raymond Plateau

.

Des meubles à la Condition Publique

Dans les années 60, la récession économique entraîne la réduction de la production textile roubaisienne. Les entreprises se restructurent, licencient et ferment les unes après les autres. Cette situation porte un coup fatal à l’activité du Conditionnement du Boulevard de Beaurepaire qui n’a plus lieu d’exister et ferme en 1972.

Années 1970 ( doc Archives Municipales )

Le bâtiment est repris par A & G Valcke, entreprise de transports maritimes et aériens, qui utilise ces locaux pour le stockage et la logistique. Mais les 9200 m2 au total sont beaucoup trop importants. La direction de cette entreprise de transports propose donc à Fernand Coucke de lui louer une partie des locaux. Fernand Coucke est PDG de la Sté de diffusion européenne de meubles et possède 3 magasins : 2 à Lille et 1 à Tourcoing, avec l’enseigne « Mobilier de France ». Il lui manque Roubaix pour verrouiller la métropole.

Un bail de location est signé en 1975 pour 2200 m2 ( 1400 m2 de surface de vente et 800 m2 de stockage ) C’est une partie du rez de chaussée, comprise entre le Boulevard de Beaurepaire et la voie centrale intérieure. Le transporteur Valcke garde le côté rue Monge et la partie arrière de l’immense bâtiment.

( doc Nord Eclair 1976 )

Fernand Coucke décide, en 1976, de rénover complètement la façade, noircie par 70 ans de pollution. Les briques rouges et blanches décrassées redonnent à l’immeuble son magnifique éclat d’autrefois.

( doc Archives Municipales )
( doc Archives Municipales )

L’enseigne « Mobilier de France » est finalement choisie et remplace l’enseigne « Mobis » initialement programmée. Le magasin ouvre en 1978, avec une grosse campagne de publicité dans la presse locale.

( doc Nord Eclair 1976 1978 )

On entre dans le magasin par une ouverture sur le Boulevard de Beaurepaire. Fernand Coucke décide de soigner ses clients, avec les mêmes services que dans les autres magasins, à savoir un accueil sympathique, une information complète des vendeurs, un choix important, des prix séduisants, une qualité irréprochable.

( doc Nord Eclair et coll. priv. )

Malgré tout, le démarrage du magasin est difficile et laborieux. Le succès n’est pas vraiment au rendez vous. Le consommateur n’est pas habitué à entrer dans un magasin qui n’a pas de grande façade vitrée. Les meubles sont difficilement visibles de l’extérieur et cela n’attire pas le chaland. L’absence de places de stationnement pour les clients est également un handicap : « Pas de Parking, pas de business ! »  C’est un échec ; le commerce ferme en 1985, après une période très courte d’activité.

Quelques temps plus tard, la municipalité décide de restaurer la Condition Publique et d’en faire le lieu culturel que nous connaissons aujourd’hui.

.

Remerciements aux Archives Municipales.

.

 

Les magasins Drouffe

Benjamin Louis Drouffe a 25 ans lorsqu’il se marie, en 1880, avec Marie Chevalier. La même année, ils créent ensemble leur petite entreprise, une manufacture de meubles et sièges. L’entreprise L. Drouffe-Chevalier s’installe rue Pierre de Roubaix dans un bâtiment immense auquel on accède également par une porte cochère, au 29 rue de Saint Amand.

( Document BNR )

Très rapidement ils décident d’apporter un complément d’activité à leur entreprise. Au début des années 1900, ils produisent des voitures d’enfants, des charrettes, des attelages, des tricycles… dans leurs usines de Roubaix ( au 136-138 rue Pierre de Roubaix ) et de Toufflers (au 122 rue de Roubaix ).

( Document BNR )

La production est bien sûr artisanale : les landaus sont entièrement montés manuellement et demandent une main d’oeuvre abondante et spécialisée.

( Doc coll. priv. )
( Doc BNR )

En Août 1911,un incendie ravage l’entreprise de la rue Pierre de Roubaix, détruisant un lieu de stockage de meubles de grande valeur, un atelier de production de voitures d’enfants, et une partie de l’habitation. Le préjudice s’élève à 75.000 Frs. Les assurances permettent heureusement de rembourser les frais et de reconstruire les locaux.

( Document Journal de Roubaix . Archives Municipales )

Benjamin Louis et Marie sont ambitieux ; ils souhaitent développer davantage les ventes de leur commerce. Après la première guerre mondiale, ils font l’acquisition d’un immeuble au 43 et 43 bis rue de Lannoy ( juste à côté du café de la Planche Trouée ). La rue de Lannoy est l’une des artères les plus commerçantes de la ville, ce qui facilite le démarrage commercial de leur petite entreprise.

En 1920, ils engagent d’importants travaux d’aménagements de ces locaux et les transforment en magasin de vente et d’exposition de voitures d’enfants. En 1923, ils construisent un deuxième bâtiment juste derrière le magasin. Ils créent également un dépôt à Paris, rue de la Huchette.

( Document BNR )

Benjamin Louis et Marie ont 11 enfants. Trois de leurs garçons s’occupent de la production :

– à Toufflers, Albert s’occupe des services techniques et Eugène de l’administratif,

– à Roubaix Gabriel s’occupe de la gestion du magasin de la rue de Lannoy.

L’entreprise Drouffe Chevalier devient Drouffe frères, au début des années 20.

( Doc coll. priv. )

En plus de leur gamme de voitures d’enfants, ils fabriquent et distribuent également des lits, des chaises, des moïses, des jouets.

A la fin des années 1920, les frères Drouffe se séparent de l’usine de la rue Pierre de Roubaix pour ne garder que l’unité de production de Toufflers. Le bâtiment est repris par M. Larnou qui habite rue des Fossés, et qui le transforme en cinéma et dancing. Par la suite ce sera le cinéma « Renaissance ».

( Document Journal de Roubaix . Archives Municipales )

Début Juin 1931, des ouvriers du textile manifestent dans toute la ville. Ces événements durent plus de deux semaines. La tension monte entre ouvriers grévistes et forces de l’ordre et le 15 Juin des émeutes éclatent, surtout dans le quartier des Longues Haies et de la rue de Lannoy.( Maxence Van der Meersch en relate les événements dans son livre : Quand les sirènes se taisent )

( Document L’Egalité . Archives Municipales )

Des barricades sont érigées, des rues dépavées, des vitrines brisées, des magasins saccagés: les gardes-mobiles chargent pour réprimer ces manifestations non déclarées.

Les heurts sont très violents et il y a de nombreux blessés. Gabriel Drouffe n’hésite pas un seul instant à soigner un garde-mobile, le lieutenant Le-Thomas, qui a reçu un pavé en plein front. Les émeutiers n’apprécient pas ce geste et les représailles sont immédiates ; toutes les vitrines sont brisées, le magasin pillé, les deux véhicules Citroën ( voiture personnelle et fourgonnette de livraison ), stationnés rue des Longues Haies, sont saccagés et incendiés.

( Documents JP Drouffe )
( Documents JP Drouffe )

Devant tant de haine, Gabriel Drouffe fait paraître, dans la presse locale, une lettre dans laquelle il revendique le devoir de porter secours à tout blessé, qu’il s’agisse d’un garde-mobile ou d’un ouvrier gréviste.

À suivre . . .

Remerciements aux Archives Municipales, et à Jean Pierre Drouffe pour son témoignage et sa documentation.

Un grand musicien roubaisien

( Photo BT )

Georges Delerue est né à Roubaix le 25 Mars 1925. Ses parents habitent au 27 rue de Valmy. Sa mère Marie Lhoest est femme au foyer, son père est chef d’atelier de l’entreprise JB Lhoest qui appartient au père de Marie. Il fabrique des limes au 152 rue Decrême

( Document coll. priv. )

La mère de Georges a un joli filet de voix ; elle connaît la musique, sait lire les notes et joue au piano du Bizet et du Gounod. Quand elle arrive à faire des économies c’est pour emmener toute la famille à l’Hippodrome-Théâtre, sur le boulevard Gambetta, assister à des représentations d’opéra comique.

Georges Delerue et sa mère Marie ( Doc V Perrot )

En 1928, les parents déménagent au 23 rue Louis Dupire, près de la place Faidherbe. Marie s’aperçoit un jour, par hasard, que Georges arrive à chanter avec elle, avec une aisance déconcertante, un air qu’elle fredonne. Il a 5 ans. C’est une première révélation !

Georges commence alors à se familiariser avec la musique, les notes et le piano. Il est plutôt bon élève à l’école, de tempérament solitaire et mélancolique. Il passe son certificat d’études en 1938, et ses parents, très fiers, le récompensent en l’inscrivant au conservatoire de la rue de Soubise. Georges est fou de joie mais il continue ses études de métallurgie à l’institut Turgot, rue du Collège.

Georges Delerue à 15 ans ( Document V. Perrot )

C’est à cette époque-là que les parents emménagent au 152 rue Decrême, dans l’usine familiale de fabrication de limes ; Georges y travaille en tant qu’ouvrier pour aider financièrement la famille.

Le poste de travail de Georges ( Document V. Perrot )

En 1941, Georges souffre énormément du dos et doit subir une opération délicate, à Lille, qui l’immobilise plusieurs mois. C’est à cette époque, que Georges se rend compte qu’il est habité par la musique, et devient obsédé par l’idée de composer. Ses professeurs, dont Albert Desenclos, au conservatoire, sont conscients du formidable potentiel d’oreille et d’intelligence musicale de Georges et, en conséquence, le font travailler sur des œuvres de Debussy, Fauré, Schumann, Brahms. . .

Georges travaille jour et nuit et les récompenses arrivent en Juillet 1945 puisqu’il obtient au conservatoire :

Le 1° prix de piano

Le 1° prix d’harmonie

Le 1° prix de musique de chambre

Le 2° prix de clarinette

Encouragé par ses professeurs, Georges tente sa chance en montant à la capitale et s’inscrit au Conservatoire National de Musique de Paris. Il quitte Roubaix en Septembre 1945. Des années 1945 à 1950 il termine ses études musicales à Paris, il compose ses premières œuvres et s’initie à la fonction de chef d’orchestre.

( Document V. Perrot )

Dans les années 1960, il rencontre les réalisateurs de cinéma de la nouvelle vague, et écrit pour les plus grands d’entre eux : Truffaut, Godard, de Broca, Verneuil, Oury…Coppola et d’autres grands réalisateurs américains commencent à s’intéresser à son travail. Il va désormais composer à la fois pour Paris et Los Angeles. Georges connaît alors une ascension fulgurante.

( Document INA )

Georges Delerue n’oublie pas Roubaix. De passage dans les années 1980, il s’arrête quelques instants devant la maison de la rue Louis Dupire, où il a passé une partie de son enfance, et bien sûr, au conservatoire municipal, rue de Soubise.

Georges est récompensé par trois Césars de la meilleure musique de film à Paris : en 1979 pour « Préparez vos mouchoirs », en 1980 pour « l’Amour en fuite », en 1981 pour « Le dernier métro » et 1 Oscar à Hollywood en 1980 pour « I love you, je t’aime ».

( Document coll. priv. )

Georges décède en 1992 à Los Angeles. Il laisse une œuvre considérable, gigantesque, monumentale. Il a composé 348 musiques de film, des musiques pour la télévision, quelques opéras, des musiques pour des documentaires, des concertos, des musiques de chambre. Il faudrait 80 jours d’écoute, pour apprécier toutes les œuvres mises bout à bout.

( Document NE et photo

La ville de Roubaix n’oublie pas Georges Delerue. Le 21 Juin 1994, le jour de la fête de la musique, M le Maire, René Vandierendonck dévoile une plaque gravée en hommage à Georges Delerue, dans la cour du conservatoire, en présence de son épouse Colette et de ses deux filles.

( Photo BT )

En 2018, une fresque est réalisée sur le pignon d’une maison voisine de la nouvelle entrée de l’école de musique, rue de Lille. Georges Delerue : un des plus grands compositeurs du 20° siècle. Un des plus prestigieux enfants de notre ville, issu d’un milieu modeste, et qui termine sa carrière à Hollywood.

Remerciements à Vincent Perrot pour son livre « Georges Delerue, de Roubaix à Hollywood », ainsi qu’à Isabelle Leupe et Laurence Thiery du Conservatoire de Roubaix.

.

Une héroïque ouvrière

Marie Bettremieux, née Marie Buisine, habite avec son mari, Henri, au 96 rue de la Balance. Ils ont 3 enfants : Henri, Marie et Simone. A l’âge de 55 ans, en 1924, elle est ouvrière à l’usine Demarcq, fabricant de toiles, sacs et tapis, au 1 quai du Sartel. Elle travaille dans la pouponnière de l’usine, où sont gardés les enfants des ouvrières, pendant les heures de travail. Elle est responsable de cette garderie depuis 1921.

( Document coll. priv. )

Le 24 Octobre 1924, le feu se déclare au milieu de l’après-midi au sous sol de l’usine, où sont stockées les matières premières et en particulier la toile de jute qui sert à la fabrication des sacs. Le feu se propage à une rapidité foudroyante et atteint très vite l’escalier qui conduit à la garderie.

( Document Le Pèlerin )

Une dizaine de bébés se trouvent dans le dortoir. Marie Bettremieux s’y précipite et sort plusieurs enfants en deux ou trois fois ; ils sont sains et saufs mais il reste deux poupons. Marie, n’écoutant que son courage, retourne dans le fond du dortoir où se trouvent les berceaux des derniers enfants : un garçonnet de 3 ans et une fillette de 18 mois. Mais le brasier est épouvantable et l’héroïque gardienne ne revient pas.

( Document coll. priv. )

C’est seulement à la nuit tombée que les pompiers peuvent sortir les corps carbonisés des deux enfants ainsi que celui de Marie, morte pour avoir essayer de les sauver. Ce drame provoque dans toute la ville une émotion intense et incommensurable. Jean Lebas, maire de Roubaix, décide alors d’organiser des funérailles solennelles pour ces trois victimes.

( Document coll. priv. )

«  Désirant perpétuer le souvenir de cette humble femme du peuple qui n’hésita pas à sacrifier sa vie pour sauver celle des autres, votre administration a décidé, à titre d’hommage public, de donner son nom à une rue de la Ville.  » C’est en ces mots élogieux que, le 5 Décembre 1924, le maire de Roubaix, Jean Lebas, parle de la femme qui a donné son nom à l’ex-rue de la Balance, Marie Buisine.

( Document coll. priv. )

Sur la plaque de la rue portant son nom, figure l’inscription « Victime du Devoir au cours de l’incendie du 24 octobre 1924 ».

Marie Bettremieux, née Marie Buisine, a été décorée de la croix de la Légion d’honneur à titre posthume, sur la proposition de M. Chautemps, ministre de l’Intérieur. Son mari Henri, déjà durement éprouvé par la mort de son fils en 1918, ne se remet pas de la disparition brutale de sa femme et décide de mettre fin à ses jours en 1925. Le sublime dévouement de cette humble ouvrière, morte pour sauver « ses chers enfants », sera souvent cité en exemple dans les leçons d’éducation morale.

La crèche en 1894 ( Document Archives Municipales )

Au début des années 1960, la crèche municipale, située au 57 rue Marie Buisine (construite en 1894), est rasée pour cause de vétusté. En 1964, la nouvelle crèche Marie Buisine est construite sur le même emplacement. Elle est plus vaste, plus spacieuse, capable de recevoir une quarantaine d’enfants, et surtout avec une orientation différente.

( Document Archives Municipales et Photo BT )

Cette crèche est toujours en fonction et sera transférée, en 2020, à deux pas, rue Lannes, dans un immense centre social multi-accueil, comprenant une crèche, un CCAS ( centre communal d’action sociale ), une PMI ( protection maternelle et infantile ). Les travaux devraient démarrer en 2019 ; l’inauguration est prévue en 2020.

.

Remerciements aux Archives Municipales et au personnel de la crèche Marie Buisine.

.

Le Cercle Artistique Roubaisien

le Cercle Artistique Roubaisien en 1936 ( coll. priv. )

C’est en 1934 que Robert Carette fonde le C.A.R Cercle Artistique Roubaisien, avec quelques mordus du chant passionnés comme Mrs Dubois, Hoste, Declercq, Keyaert, Deldalle, Pollefeyt, et bien d’autres. La mission du Cercle est de préparer les jeunes au chant et de leur apprendre l’amour des beaux airs et des belles pages du patrimoine lyrique. Le quartier du Pile possède déjà une troupe lyrique d’amateurs qui se produit au sein de l’Amicale Pierre de Roubaix. Quand celle-ci cesse son activité, l’idée de fonder un groupe lyrique et théâtral recueille l’adhésion de tous. Le recrutement organisé de suite permet de rassembler de nombreux chanteurs et choristes. En 1935, le C.A.R remporte déjà un premier succès au concours de chant. Pendant de nombreuses années, le C.A.R va remporter des prix, dans divers concours, tant en opérettes et opéras, que dans les diverses catégories de chanteurs individuels.

Diplôme concours de chant ( Archives Municipales – Don  M Tartare 2017.001 )

Dans le quartier du Pile, ces concours de chant, où de nombreux talents sont découverts, sont toujours suivis par des milliers de spectateurs passionnés. Dans le groupe s’installe un esprit de camaraderie et d’entraide assez remarquable. C’est dans le café de M Prosper Hoste, au 303 rue Jules Guesde, que se trouve le siège du C.A.R et c’est un voisin bien connu des habitants du quartier qui est président d’honneur: M Louis Derryx commerçant en cycles. Dans le café de M Hoste, la salle du rez de chaussée ainsi que le premier étage sont assiégés, envahis, submergés les jours de répétition, toujours dans la joie et la bonne humeur, réunions qui se terminent toujours par l’hymne du C.A.R.

Hymne CAR ( Archives Municipales – Don M Tartare 2017.001 )

En 1948, le C.A.R remporte 43 prix individuels dont 18 premiers prix. Ce record exceptionnel fait honneur aussi bien au Comité d’Administration et à la Direction Artistique qu’aux lauréats eux-mêmes. Et si ces chiffres ne sont plus atteints par la suite, c’est qu’au fil des ans les brillants éléments de la Société sont mis « hors concours ».

 

Concours international de chant 1954 ( coll. priv. )

Les 5 et 6 Juin 1954, pour son 20° anniversaire, le C.A.R organise le Concours International de Chant Lyrique Amateur, sous le patronage de la Fédération, avec l’aide de la ville de Roubaix et du Comité de quartier. 176 personnes participent à ce concours. Une semaine avant la date, le journal local précise qu’ il y a finalement près de 200 interprètes à cette manifestation et que les horaires prévus sont avancés de 30 minutes. Le jury est composé de personnalités nationales et internationales : des professeurs de conservatoire et des directeurs d’opéra de Paris, du Luxembourg, de Bruxelles, de Sarrebruck, de Gand, de Bordeaux, de Lyon . . .

Plusieurs catégories parmi les concurrents : Soprani et Barytons à la Bourse du Travail, Boulevard de Belfort, Mezzos-Contraltos, Ténors et Basses au Conservatoire de Musique, rue de Soubise. Une foule immense vient assister à cette fête

Le Dimanche 6 Juin en fin d’après midi, pendant la délibération du jury à la Bourse du Travail, a lieu un concert du cercle Orphéonique de Roubaix. Les prix sont ensuite décernés aux meilleurs chanteurs : dans chaque catégorie, 10 prix sont distribués pour un total de 70.000 Frs.

Concours international de chant ( Nord Eclair Juin 1954 )

Dans les années 60, les temps deviennent plus difficiles ; les jeunes délaissent de plus en plus l’art lyrique et se tournent plus volontiers vers le rock and roll et la musique pop. Mais le C.A.R ne se décourage pas et continue sa tâche : diffuser le chant et la musique, la seule langue connue de tous les peuples.

En 1961, au programme, figure « La Cocarde de Mimi Pinson » et « Les Mousquetaires au Couvent ». En 1966, le Cercle Artistique Roubaisien reçoit 3 000 F de subvention pour mettre en scène « Carmen » de Bizet.

Carmen ( Archives Municipales – Don M Tartare 2017.001 )

Prosper HOSTE, président honoraire du C.A.R et du cercle symphonique Jean Macé-Pasteur, est nommé chevalier du mérite philanthropique. En mai 1969, le Cercle Artistique Roubaisien remporte le prix du festival international d’art lyrique à Vichy. Au début des années 70, le Cercle Artistique Roubaisien organise une soirée cabaret flamand à l’amicale Pierre de Roubaix, et se distingue en présentant « les cloches de Corneville » au théâtre Pierre de Roubaix. En 1973, nouveau succès pour le C.A.R : « Le pays du sourire » en janvier et « la cocarde de Mimi Pinson » en septembre, une animation sous chapiteau place Carnot en avril, avec des airs de la belle époque. L’année suivante, le Cercle Artistique Roubaisien présente « les mousquetaires au couvent ». Cinq opérettes et pour la première fois un opéra font partie des projets pour la prochaine saison.

La fille du tambour major ( Archives Municipales – Don M Tartare 2017.001 )
Les mousquetaires au couvent ( Archives Municipales – Don M Tartare 2017.001 )

Mais malgré les succès des spectacles, les difficultés sont de plus en plus lourdes et s’amoncellent : recrutements difficiles, décors très coûteux, nécessité d’un éventail de costumes impressionnant, problèmes de trésorerie. L’âge d’or est terminé. Le Cercle Artistique Roubaisien aura donné à ce quartier du Pile le titre glorieux de dernier bastion du chant lyrique à Roubaix.

La troupe du CAR en 1978 ( Archives Municipales – Don M Tartare 2017.001 )

.

Remerciements aux Archives Municipales pour la documentation.

.

Une brasserie, un cinéma, une teinturerie.

La rue Copernic commence rue Jules Guesde pour se terminer rue de Leuze. Sa longueur est de 130 mètres sur une largeur de 12 mètres. Elle fut classée dans le réseau urbain le 29 décembre 1905. En 1909 on avait construit à l’angle de la rue du Tilleul (devenue rue Jules Guesde), une maison à usage d’estaminet avec salle de concerts. Plus tard ce fut un cinéma, le Studio 47. A l’occasion d’une visite sur place, Daniel Najberg nous fit remarquer ce que seul son coup d’œil de passionné du cinéma aurait pu voir : la cabine du projectionniste était encore en place et visible de la rue.

La cabine de projection de l'ancien cinéma
La cabine de projection de l’ancien cinéma

En 1903, on avait bâti 17 maisons dont 5 en front à rue et 12 en courée constituant la cité Raux-Penet du nom de son propriétaire. Si la courée a disparu, son entrée subsiste fortement transformée au n°5. Avant même que la rue Copernic soit véritablement créée, on y trouvait déjà la Brasserie Coopérative « Union de Saint Amand » fondée le 29 octobre 1898 qui comptait 1.300 adhérents en 1915. Cette coopérative cessa son activité avant 1940.

Carton et action de la brasserie St Amand Coll Particulière
Carton et action de la brasserie St Amand Coll Particulière

Les bâtiments de la brasserie furent rachetés par la Teinturerie du Pile, laquelle se trouvait déjà rue de Condé depuis 1935. Les deux associés Achille Beghin, et Henri Descamps rachètent donc la brasserie pour étendre leurs activités. Différents travaux y furent exécutés, en particulier en 1946 quand on y éleva une cheminée haute de 30 mètres, pour remplacer la précédente plus modeste qui avait été détruite durant l’occupation.

La cheminée de la teinturerie doc AmRx
La cheminée de la teinturerie doc AmRx

La teinturerie du Pile devient vite une référence de la teinture en écheveaux. L’entreprise a pour clients le tissage Craye (l’actuelle Manufacture), Bergère du Nord, Phildar. René Béghin reprend l’affaire et la production progresse de 3 tonnes de fil par jour à 14 tonnes. En 1988, l’usine dépose le bilan, pour fermer définitivement en 1991. L’usine est cédée au franc symbolique à la Ville. En l’an 2000, on décide de raser le bâtiment et les deux cheminées les plus récentes. La plus ancienne subsistera comme la trace de l’industrie dans le quartier.

La rue Copernic aujourd'hui Vue google maps
La rue Copernic aujourd’hui Vue google maps

Que fera-on de l’espace ainsi dégagé ? La réponse se trouve probablement dans le Programme Métropolitain de Requalification des Quartiers Anciens Dégradés dans lequel on retrouve le quartier du Pile à Roubaix et celui du Crétinier à Wattrelos.

Sources

Histoire des rues de Roubaix par les flâneurs

Article Voix du Nord

Série permis de construire Archives Municipales

http://www.lafabriquedesquartiers.fr

 

Les immeubles du square Destombes

En 1952, Roubaix est couvert de chantiers CIL : le groupe du Pont Rouge, le Fort Desprez, les lotissements divers du Nouveau Roubaix, le parc de la Potennerie et le square Destombes en font partie.

Etat du chantier en 1952 Photo NE
État du chantier en 1952 Photo NE

Les immeubles construits par le CIL dans le square Destombes ont de nombreux points communs avec ceux de la Potennerie. Les deux lotissements ont en effet obligation de préserver les plantations et arbres existants. A la Potennerie, l’achat de la propriété privée Huet va permettre la construction d’immeubles collectifs, après la démolition de la maison de maître du lieu, dite château Huet. Le square Destombes appartient à la ville, qui vend une partie de sa surface pour construire des immeubles identiques.

Plan CIL Square Destombes Photo NE
Plan CIL Square Destombes Photo NE

Les plans des immeubles du CIL du square Destombes sont sensiblement ceux qui ont été utilisés pour réaliser les immeubles de la cité du Galon d’eau, de la cité des Canaux, et de la cité du Pont Rouge. Pour le premier site cité, ils se trouvent à l’angle de la Grand Rue et de la rue Nadaud. Pour le second, ils sont en front à rue du boulevard Gambetta à Tourcoing. Pour le troisième, ils se trouvent dans l’angle de la rue de Lannoy et de la rue Yolande.

Plan des immeubles AmRx
Plan des immeubles AmRx

C’est la société le Toit Familial sise 16 rue St Vincent de Paul à Roubaix qui va construire. Cette société a fait l’acquisition du terrain (5529 m²) auprès de la ville le 26 avril 1952. Le permis de construire a été délivré le 10 janvier 1952, et l’arrêté de certificat de conformité délivré le 28 avril 1954.

En tête le Toit Familial AmRx
En tête le Toit Familial AmRx

Entre-temps, le CIL aura construit trois immeubles de trois étages parallèles à la rue Lalande et un quatrième perpendiculaire, plus long que les trois précédents, et avec un décrochement, du à la configuration des lieux. Tous ces immeubles sont réalisés au fond du square, loin du déferlement automobile de la rue Pierre de Roubaix. L’espace jeux pour enfants a été préservé, ce qui ajoute à la qualité de vie des résidents.

Le square et les immeubles Coll Particulière
Le square et les immeubles Coll Particulière

Le 25 août 1956, le CIL demande à la ville de Roubaix la certification que les immeubles collectifs du square Destombes sont en état d’être habités dans toutes leurs parties (88 logements) et qu’ils sont affectés à l’habitation aux ¾ de la superficie totale du terrain. Auront ainsi été réalisés, quatre bâtiments collectifs comportant 88 appartements.

Le square aujourd'hui Photo Google
Le square aujourd’hui Photo Google